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CHAPITRE 2 REVUE DE LA LITTÉRATURE : FORMATS D’ÉVALUATION DE LA

2.7 Analyse probabiliste

2.7.3 Choix des paramètres

La difficulté d’application des méthodes probabilistes par les praticiens réside dans la complexité des choix des paramètres d’entrée, car les analyses probabilistes sont très sensibles au choix des variables, distributions, coefficients de variation, bornes, et il importe d’effectuer un choix éclairé pour obtenir des résultats qui rendent compte de la réalité (Kreuzer 2003).

• Modélisation des paramètres de résistance du barrage

Ainsi, Altarejos-Garcia, Escuder-Bueno, et Morales-Torres (2015) approfondissent le choix des paramètres d’entrée à partir de différentes connaissances a priori de l’ouvrage, concernant les paramètres de résistance à l’interface barrage-fondation. Plusieurs cas d’incertitudes sont étudiés : (1) incertitude maximale – aucune donnée, paramètres choisis par jugement de l’ingénieur et expériences similaires – (2) incertitudes moyennes – nombre variable d’essais réalisés –, (3) variation spatiale des paramètres exprimée par la réduction de leurs coefficients de variation, (4) simulations de la variation spatiale des paramètres. Cette méthodologie appliquée avec rigueur permet de préciser le choix des paramètres à partir de données brutes obtenues en pratique. Également, Carjaval et al. (2009) et Peyras et al. (2010b) réalisent une modélisation probabiliste des paramètres de résistance d’un barrage en béton compacté au rouleau (BCR). À partir des quelques informations disponibles obtenues par essais expérimentaux (plusieurs essais de densité du BCR par couche, une ou deux mesures de résistance à la compression du BCR par couche, très peu d’essais de résistance à la traction et au cisaillement du BCR pour l’ouvrage), il est déduit que seule la variabilité spatiale de la densité du béton peut être étudiée. La démarche effectuée consiste à, à différentes échelles (locale, d’une couche, du barrage) :

• Analyser statistiquement les données de densité 𝜌 obtenues en nombre suffisant,

• Modéliser la résistance à la compression 𝑓𝑐′ grâce aux résultats statistiques des densités, • Modéliser la résistance à la traction à partir des correspondances proposées entre 𝑓𝑐′ et 𝑓𝑡

dans la littérature,

• Modéliser les paramètres de résistance au cisaillement 𝐶 et 𝑡𝑎𝑛𝜙 par relation physique (courbe intrinsèque du béton).

Cette procédure permet de dépasser les frontières de connaissance imposées par le faible nombre d’essais directs réalisés sur les ouvrages hydrauliques.

Carjaval, Peyras, et Bacconnet (2010) proposent de considérer la résistance au cisaillement dans le corps du barrage sans avoir recours aux paramètres 𝐶, 𝑡𝑎𝑛𝜙 pour éviter la perte de précision due à l’hypothèse de Mohr-Coulomb et autres modélisations simplifiées. Une courbe intrinsèque parabolique est utilisée pour le béton afin de mieux représenter 𝑅 pour de faibles niveaux de contraintes, comme il peut y en avoir à l’amont lors de chargements hydrostatiques extrêmes. La dépendance entre charge hydrostatique et résistance au cisaillement est ainsi prise en compte. Cette

correction d’une surestimation de 𝑅 résulte en une augmentation de la probabilité de défaillance de l’ouvrage : il sera donc intéressant de considérer cette hypothèse dans certains cas critiques afin de ne pas fausser l’analyse de risque qui s’ensuit grâce aux résultats de l’analyse probabiliste.

Pour enrichir l’estimation de la résistance, Krounis et Johansson (2012) étudient la corrélation entre la cohésion et l’angle de friction, et son influence sur l’évaluation probabiliste de l’ouvrage. Également, la cohésion à l’interface barrage-fondation est un élément difficile à évaluer et impossible à mesurer, mais a une importance considérable sur les résultats, ce qui encourage à préciser au maximum les données d’entrée avant toute étude (Krounis et al. 2016). Enfin, Spross, Johansson, et Larsson (2013) proposent une méthodologie pour préciser la connaissance des sous- pressions puisque l’augmentation de celles-ci influence fortement l’instabilité du barrage.

Enfin, à partir des données obtenues par des essais expérimentaux, un ajustement avec une loi de probabilité connue peut être effectué. Pour déterminer les paramètres de cette loi (moyenne, écart- type), l’approche bayésienne peut être utilisée. Il s’agit d’améliorer une estimation a priori d’un paramètre (moyenne) grâce aux statistiques des observations effectuées. En cas de nombre insuffisant d’observations, Westberg Wilde et Johansson (2016) proposent également de mener des études de sensibilité sur l’écart-type.

• Modélisation des paramètres de chargement

Traditionnellement, les études de stabilité sont menées pour un niveau d’eau fixe dans la retenue, correspondant à la crue de conception choisie selon les caractéristiques du barrage, par exemple la CMP (Crue Maximale Probable, PMF – Probable Maximum Flood) au Canada. Carjaval et al. (2009b) et Carjaval et al. (2009a) suggèrent une méthodologie permettant une modélisation probabiliste du niveau d’eau dans la retenue, intégrant des simulations prenant en compte les précipitations, la topologie du bassin versant, etc. à la manière des méthodes courantes ; ainsi que le niveau du réservoir au début de la crue, en fonction de l’historique et de l’utilisation de l’ouvrage. Les applications à des cas-types résultent en une diminution de l’estimation du niveau d’eau correspondant à la CMP. D’autre part, cette méthodologie ouvre les perspectives de modélisation de la charge hydrostatique comme une distribution de probabilités : PDF, indicateurs statistiques, etc.

• Choix des PDF et des bornes

Les incertitudes associées aux estimations des paramètres de résistance et de chargement sont intégrées dans les calculs probabilistes grâce aux distributions choisies pour les variables. Il importe de les déterminer rigoureusement ; en effet les probabilités de défaillance résultantes sont susceptibles de varier beaucoup, surtout lorsque l’on recherche de faibles valeurs de probabilités de défaillance puisque c’est le contenu de probabilité dans la queue de la distribution qui diffère d’une distribution à l’autre.

Lombardi (2006) propose une méthodologie pour sélectionner la distribution de probabilités qui correspond le mieux à une série de données connue, pour la résistance et pour la charge. Il s’agit de sélectionner une distribution parmi une nomenclature de PDF usuels, et de vérifier et améliorer un ajustement de la distribution avec les échantillons de valeurs dont on dispose.

Certains considèrent des distributions non-bornées (Westberg Wilde et Johansson 2013), d’autres bornent les PDF considérés afin de conserver le sens physique des résultats, puisqu’une probabilité trop faible, par exemple 10-123 n’a plus de signification (Lombardi 1993) ; c’est le cas de Altarejos- Garcia et al. (2012).

Cependant, la prudence est de mise lors de l’utilisation de lois bornées, puisqu’alors le contenu de probabilité aux bornes peut être important, et la probabilité de défaillance passer brusquement de 0 à une valeur inacceptable, sans échelonnage progressif, lorsque la charge augmente. C’est pourquoi Lombardi (1988) propose une distribution à double borne logarithmique, qui vient enrichir la nomenclature des distributions bornées à sélectionner pour réaliser un ajustement avec nos valeurs.

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