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•v.
Le
dimanche ausoir, 13 janvier dernier, à cinq heu*resde nuit. Messieurs JeanVialiprofesseuren chirurgie,
&
JoachimMeiliApoticaire,vinrentcheîmoi,& m’engagé»rent a
me
rendre aveceuxau corpsde garde delarué Fra-tine,oùleDocteur Bussanm’attendoit avecinquiétude&
impatience, pour soignerunFrançoisgrièvementbles-sé.Ils
me
firentaussi lesmêmes
instances,aunom
de’
T
officierde garde.Je
me
transportai surlechamp,endéshabillé,àce corps de garde.j’yarrivaiaumoment
où 1*on admini-stroitaumaladeleSaint Viatique&
1’extrême onction•DurantlaCérémonie,leDocteur BussanquiétoitdanJ la sallevoisine,
me
fitl’expositiondel’espèce&
del’état delablessure,&
detout cequ’ilavoitfaitjusqu’alors*poursoulagerlemalade.Dés queleCuréentachevé sea fonctions, le
même
Docteur Bussanme
présenta au ma-ladeenluidisant:M, De
Bentcville ,voilàle chirurgien du Pape. Le malademe
pritparlamain,enme
conju-rant dele délivrerd’unedouleuraiguë qu’iléprouvoità
{aplaye, danslarégiondubas ventre•Ilm’ajoutaqu’il avoit prévûce quivenoit delui arriver ;quetout cel*
«’étoirfaitcontresonavis’jqu’ilne seseroit rienpass£
k
Rome,
siM.Flotte n’yétoit pasvenudç Naplçs,&<ju*ilenétoit lui seul lavictijujes Je
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Jeluidemandai
comment
ilavôitétéblessé. ilmi
réponditqu’effouvrantJaporte de lachambre,ils’étoit Senti frapp/ aubafventra,etqu’ilcroyoit qu’ eny en-trant{«iMWBulte-»- on»luiavoit portéce coup,parcequ*
ilavoitdeutpistoletsdanslesmains. Il
m’avoua
quillesravo# arraché*àjtf.flotteponr1’einpêcherde tuer per-sonne
Ü
ccquiauroit tuiles fairemassacrer J’uix StJ’ au-tre»demême
quesafemme &
sonfils.t
A
préscerécitqu’ilme
fitenprésence du Docteur Éussan,je visitai lapartiemalade.Je trouvaiune large blessure danslaRégionIliaque,ducôtégauche,&
d’une forme'irrégulière*Le Doctciu Bussanme
ditqueces sin-uosités provenoieatdecequ’il avoit aggrandilaplaye enquelques endroits,pourfaciliterla rentrée de l’inte-stin, quis’étoitéchappé au dehors,&
qui formoitun
grosvolumefort enflé&
d’unrouge foncé."N’ayantpû leremettredansla cavitédubas ventre,ill’avoittenu cou-verteny
appliquant desfomentations;&
pouréloigner J’inflammation,ilavoit fait tirerdubras du maladedix onces de Sang. Le vomissements’étoitdéjàmanifesté plusieurs fois,comme
unesuite inévitablede 1’ étran-glementoccasioné par unesifâcheusesituationqui du-roitdepuis plusieurs heures.x Jenetrouvaipointl’intestinblessé:ilétoit seule-menttrès altéré•Jepré.érai enconséquence à tout autre remède local, de procéder à son replacement.Je fis coucherlemaladeducôtéopposé;
&
Sansbeaucoup d’em-barras,jeparvinsentrèspeu de minutes àrétablir l’in-testindanssa cavité,ce qui Soulagea surlechampM.De
Basseviile.Je pansai ensuiteledehors delaplayeparla voiedelaréunion,enlacouvrantd’emplâtres aggluti-natifs soutenuspar des bandelettes.Lacessation Soudai-nedeladouleur qui l’avoitjusqu’alorsobligéderester couchédans une positiontrèsincommode,me
permitde leplacer horizontalement dans sonlit.Le maladen’étoit assurément pasenétatd’ être transportéailleurs ,puis qu’ avantdeprescrire aucun remède, lememe
médecin Bussan,craignant qu’ilnemourût peud’instants apiés, luiavoitfait,avant tout, administrerle sderniers Sacre-mentssy
ordonnailacontinuationdes fomentations&
i.
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sfcmbrûcattonsd*huileRozatsur toutlebas ventre.Les 'remèdes
&
tousles autres secoursnécessaires setrouvè-rentprêts sur lechamp. ,
.
Le Docteur Bussanvoulut^
comme
amiparticulierdu malade, passerianuit auprès delui,pourleSoigner avec
M.
VialiprofesseurenChirurgie.Jene trouvaidans au-cunepartieducorps,niblessure,nicontusion.Avant de partir,jefiséteindrelefeu quiétoitdanslachambre du malade.Cettepièce etoitbeaucouptrop échauffée$ d’au-tant plusquedansla sallequiétoitàcôté,ilyavoitun
grandbrasier,b l’usage des Soldats.Jeprisensuite con-gédu malade.Ilme
priadevisiterlelendemainmatin, safemme &
sonfils;&
ilme
dit qu’il étoit forttouchédel’intérêtqueluitémoignoitM.
Gamma
officierde garde• Ilme
recommandaen outre dedireauPape,qu’il par-donnoitàceluiqui1’avoitblessé,&
qu’ildesiroitque personnenefutpoursuivià sonsujet.
Lelendemainmatin,lundi 14,je
me
rendischezle malade,htreizeheures&
demie.Je trouvai qu’ilavoit Ïteudormi.Lepoulsétoitcependantmoinsfréquent,
&
’envie deVomirétoitdiminuée. Ledomestiquedu
ma-ladequ’onavoitlaisséentrerpourleservir,étoit alors auprès desonlit.M. De
Bassevilleme
demandasij’avois vûsafemme
.Son domestiqueluiditqu’elleétoit par-tieavecM.Flotte.Ilvoulutsçavoirçquilui avoitfourni de 1’argentpoutladépensedu voyage;&
son laquais luiréponditquec’étoitleMajor,
Immédiatementaprèscettevisite,j*allai chezle Pape,aquijerendiscompte del’étatdu malade•Sa Saintetéfut fort affligéed’apprendrequelablessureétoit mortelle.Ellem’ordonna enprésence deSon Eminence leCatdinalCampanelli,
&
deMonseigneurleFiscal,de luifournir toutessortesde secours, delevoirsouvent»&
decommander,ensonnom
,tout cequime
paroitroitnécessairepoorcontribuer àsaguérison
.
- Avant midije retournaichez lemalade.je luifia partdes ordresduSaintPere,enprésencedu Docteuc Bussan.Î1futforttouché de cerécit,
&
ilme
répétaqii*11pardonnoit àceluiquil’avoitblessé. Je reconnusque toutceque-j’avoi#prcèwrit avoit étéfidcllementexécuté.
"
* Le
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Lemalade neseplaignoitderien avecnioî;ilse lotioit
même
beaucoupdelamanièredont onletraitoit,&
il voypitlecuré volontiers&
avecplaisir.Ilétoitinquiet dese sentirextrêmementfoible.Lepouls ètoit petit&
fréquent.ce quiétoitun
symptôme
des approches dela gangrène.Jeluiordonnai àcet effet quelques cuillerées devin deliqueurquiluifurentservies surlechamp
.
j’ordonnai en outre qu’onne permit plus àpersonne d’entrer danslachambre,
&
qu’onlelaissât en repos.*Jetransmis àl'officierde garde1*ordrede ne paslaisser plus de dix Soldatsdanslapiècevoisine:telleétant la -volontéexpressedu Pape.Ladernièrefoisqueje levis, àvingt-trois heures
&
demie,jetrouvailepoulstrès foible,lesextrémitésfroides,&
lemaladeseplaignoit d’uneagitationgénérale.Ilme
demandasijecroyoisle danger imminent;ilm’ajouta qu’il ne craignoit pointla mort,&
quejepouvoisassûrertoutlemonde,qu’ilavoit toujours vécuainsiquesa,femme
, danslafoide IaReli-gionCatholique.Je ne devoispas lui dissimulerle dan-ger danslequelilétoit.Il fitalorsplusieursactesd’une véritablereligion&
d’uuegrande résignation;&
àdeux heures de nuitdumême
jour,ilmourutau milieud’un vomissement.
Lablessuredefeu Basseville n’ètoitpasmortelle par sa nature.Le coupn’avoit pénétréque danslarégiondu bas ventre:ilavoitfaitsortir,ilest vrai,dans une lon-gueétenduel’intestinIlion*maissans l’offenser aucune-ment.Cette blessure ne pouvoitêtrerendue mortelle,ni parlepeu d’espace delachambre où ilfutconduit,ni parlaprésencedu Curé, niparlaprivationprétendue des secours,niparlemoindreobstacleàlatranspiration, niparaucune contusion,niparaucun coupalatêtepour luiarrachersonchapeau avec violence,niparaucune brûlure au visage.Nul de ces accidents n’aexisté,*
&
lemalade nes’en estjamaisplaint avecmoi.
On
peut en-core'moinsattribuer samortàl’agitation,aubruit, aux•fréquentesvisites,oual’irritationdeses nerfs.Rien de toutcelanepeut causerenvingt quatre heures la
Gan-grène^
lamort.S’ileuétoitautrement,ceux qui re-çoiventdepareillesblessures*Siqui vont danslesHûpi-’ - taus
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taux,oùifsne trouvent assurément pas plus de
commodi-tés,que n’enaeuBasseviUedansJe corpsde garde, mourroient tousinfailliblement.Cependantleplusgrand nombreguérit,parlaréductiondel’intestinqu’opèrent lespremiers secoursdel’art.Lablessurede BasseviUeest devenuemortelle,parcequel’intestinest resté,durant plu-sieursheures, étranglé entreleslèvresde laplaye.
Une
fomentation extérieuren’ ètoitpas unmoyen
suffisant pour empêcher1’inflammation,&
par conséquentla gangrène.Le Docteur Bussanauroitdonné une vérita-blepreuve d’amitié&
d’humanitéà sonami BasseviUe, sidanslepremiermoment,
aulieude tenterl’inutile pro-cédéd’aggrandirlaplayepourreplacerV
intestin,&
de secontenter, en attendant ,de quelques fomentations,il avoit faitapellerun habileprofesseur en Chirurgie,le quelauroitsurlechampremisl’Ilion àsaplace:com-me
on yparvint aisément,en saprésence, mais après l’intervalle#deplusieurs heuresde retard.Il auroiteu peutêtrelasatisfactiondevoirlaguérison de sonami
,
&'ilse seraitépargnélahonted’imputersamortà tant de causespuériles
&
illusoires.A’