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Conclusions et perspectives

2.5 Chemin de fissuration

Enfin, le plus difficile reste la modélisation du mode de rupture en biseau. Les maillages utilisés pour cette thèse ne permettaient pas le basculement de la fissure en biseau car la taille des mailles était trop grande et la hauteur de maillage fin trop petite. Comme il a été indiqué dans le chapitre 3 la taille des mailles devrait être de l’ordre de grandeur de l’espacement inter-particules, c’est à dire cinq fois plus petite que celle qui a été utilisée. Besson et al. (2001b) ont montré que l’utilisation d’une taille de maille trop grande conduit à une rupture plate. Toutefois il ne suffit pas de réduire la taille de maille, il faut encore modéliser le mécanisme de localisation de la déformation en bande.

Le potentiel de Rousselier modifié, utilisé dans le chapitre 3, est un modèle de croissance de cavités, mais en identifiant les deux paramètres D et q à partir de la phase de propagation stable dans les éprouvettes Kahn, il représentait en fait implicitement les deux phases successives de croissance des cavités et de rupture par localisation de la déformation en bande. Une voie d’amélioration pourrait être de représenter la localisation de la déformation par un autre modèle et de réserver le modèle de croissance uniquement à la croissance des cavités. On peut par exemple activer de la germination de cavités pour endommager rapidement le matériau quand un critère de localisation est atteint. Au cours de la thèse, une telle modélisation a été tentée avec un résultat mitigé.

Une première tentative a été faite avec le potentiel de Rousselier (1987) comme modèle de croissance. Ce potentiel est donné par :

φ = σ¯ (1 − f )+D1σ1f exp  σm (1 − f )σ1  − R(p) (1)

où D1 et σ1 sont deux paramètres du matériau à ajuster. L’indicateur de localisation était simplement un niveau élevé de déformation plastique et une germination de cavités était activée quand la déformation plastique était suffisamment grande. De manière arbitraire, une distribution gaussienne de Chu et Needleman (1980) a été choisie et le taux de germination qui en résulte ˙fnest donné par :

˙fn=Bn˙p ; Bn= fn s√2πexp  −(p − ploc) 2 2s2  (2) Enfin, l’endommagement initial était représenté uniquement par une porosité initiale f0 regroupant les particules intermétalliques et les cavités.

Les paramètres du modèle sont donnés dans le tableau 1 et la figure 1 présente une carte de porosité dans une éprouvette EU05 où l’on peut observer que le triangle plat initial et le basculement en biseau sont bien représentés. Cependant, ce calcul avait été fait avec une porosité initiale six fois trop faible (valeur non connue au moment du calcul) et le même calcul effectué avec une porosité initiale réaliste a donné une fissuration plate. De plus, dans le cas des éprouvettes Kahn, la charge globale était très largement surestimée. Ce modèle n’est donc pas entièrement satisfaisant.

En fait, la localisation en bande est due à un état complexe de contrainte et de déformation qui n’est pas représenté correctement par la seule déformation plastique

2. PERSPECTIVES 135

D1 σ1(MPa) f0 ploc fn s `load (µm)

2 275 0,001 0,4 0,1 0,1 85

Tab. 1 : Paramètres du modèle avec indicateur basé sur la déformation plastique

direction

de

traction

entaille

0,0 f 0,4

Fig. 1 : Carte de porosité ( f ) dans une éprouvette EU05 (près d’une entaille) : on peut observer le triangle plat et le basculement en biseau. Un huitième seulement de l’éprouvette a été maillé.

équivalente. Pour essayer d’avoir un modèle représentant mieux le phénomène de localisation, l’analyse de Rice (1976) a aussi été utilisée. Rice a montré que dans certaines conditions, la solution d’un problème de mécanique n’est plus unique. Une solution non homogène peut apparaître avec une discontinuité de déplacement dans un plan. Cette théorie représente bien le phénomène physique qui se produit, c’est pourquoi l’indicateur de localisation de Rice a été utilisé. La condition de bifurcation est donnée par :

∃n tel que d (n) = detn · L

· n



=0 (3)

où n est le vecteur perpendiculaire au plan de discontinuité et L

∼ est le module élasto-

plastique tangent qui relie le taux de contrainte au taux de déformation ( ˙σ =L

∼: ˙ε∼). En

élasticité isotrope, la valeur del de d est positive et indépendante de n. La condition de localisation peut donc s’écrire :

min

n d (n) = 0 (4)

Comme il n’est pas possible, numériquement, d’obtenir exactement la valeur 0, on prend comme critère de localisation :

min

n d (n) < r × del (5)

où r est petit devant 1.

Quand la condition de localisation est atteinte, une germination de cavité est activée suivant une loi favorisant la rupture en cisaillement (biseau) par rapport à une séparation

normale (rupture plate). Le taux de germination est donné par : ˙fn=Bnsin(ψ)  min n d (n) < r × del  ˙p (6)

oùψ est l’angle entre la normale au plan de localisation et la direction de la discontinuité du déplacement.

L’indicateur de localisation de Rice a été testé conjointement avec le modèle présenté dans le chapitre 3 utilisé pour la croissance des cavités (modèle de Rousselier modifié, germination autour des particules intermétalliques et anisotropie plastique).

Une taille de maille très fine et différentes valeurs de Bnet r ont été utilisées (tableau 2) mais aucune configuration n’a permis l’obtention d’une rupture en biseau.

D q f0 fp Bn r `load(µm)

2,58 1 1,6·10−3 3,7·10−3 0,01 ou

0,02 0,01 ou0,005 40

Tab. 2 : Paramètres du modèle avec indicateur de Rice

La modélisation du biseau reste donc un problème ouvert. A l’heure actuelle, ceux qui sont parvenus à représenter le mode de rupture en biseau (Besson et al., 2001a ; Mathur et al., 1996) n’ont pas pu représenter de manière satisfaisante les paramètres tels que la charge macroscopique ou la vitesse de fissuration. Les modèles à CTOA ou à zone cohésive (Gullerud et al., 1999 ; Roychowdhury et al., 2002) ne peuvent quant à eux représenter que le mode de rupture plate. La simulation du biseau dépasse le simple cadre de la rupture dans les alliages d’aluminium et est emblématique des défis actuels de l’approche locale de la rupture. On retrouve notamment la même pierre d’achoppement pour les aciers (Rivalin et al., 2001b). Il faut en effet réduire considérablement la taille de maille, notamment dans les alliages d’aluminium où les distances entre particules sont très faibles. Il faudra donc recourir à des techniques de parallélisation et de remaillage efficaces pour conserver des temps de calcul raisonnables. Enfin il pourra être nécessaire d’utiliser des modèles non locaux afin de s’affranchir de la dépendance de la taille de maille, notamment si le maillage change au cours du calcul suite à un remaillage.

Plans détaillés des

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