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PARTIE  III   : LE ROLE ET L’INFLUENCE DE LA CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS

III.1.   Les conventions internationales des droits de l’homme pertinentes 83

III.1.2.   La Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne 88

Les droits accordés par cette Charte ne se limitent pas, à l’instar de la

Convention européenne des droits de l’homme, à ceux accordés aux citoyens

européens. En outre, les ressortissants des États tiers acquièrent des faisceaux de droits non seulement grâce au droit dérivé de l’UE, mais également grâce à la Charte des

droits fondamentaux. Après avoir étudié l’origine de cette Charte (a), nous verrons

qu’elle est d’application universelle dans l’UE (b).

a)   L’origine  de  la  Charte  des  droits  fondamentaux  de  l’Union  européenne  

La Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne a été, à l’origine, adoptée à Nice le 7 décembre 2000 par le Parlement européen, le Conseil de l’UE et la Commission européenne. Elle résulte des discussions qui se sont déroulées lors du Conseil européen de Cologne les 3 et 4 juin 1999, avec la participation, outre des fonctionnaires européens, de membres des parlements nationaux, d’experts et de la société civile. La Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne n’a pas créé de nouveaux droits, mais rassemble l’ensemble des droits dont les individus bénéficiaient déjà, et ce, dans un seul document. Toutefois, ce procédé a comme effet d’assurer une protection encore plus profonde des droits fondamentaux car il produit, comme le remarque la Professeure Elspeth Guild, un effet « centrifuge » : les droits,

lorsque rassemblés dans un même document, engendrent d’autres droits. En effet, pour bénéficier de certains droits, il est nécessaire de pouvoir bénéficier d’autres droits. Alors qu’à l’origine la Charte n’avait pas force contraignante, elle a acquis au fil des ans, une certaine valeur politique, et a servi de référence dans les débats politiques aux niveaux national et européen, par les juges nationaux et par les avocats généraux à la CJUE148.

Le souci du respect des droits fondamentaux inscrits dans les constitutions nationales, le besoin de clarté, la nécessité d’une protection face à l’élargissement et au pouvoir grandissant des institutions européennes notamment dans des matières touchant directement aux droits des personnes, l’obligation de se conformer à la

Convention Européenne des droits de l’homme, ont entraîné l’acquisition par la Charte

de la force juridique contraignante149 par le traité de Lisbonne en décembre 2009.

Les droits inscrits dans la Charte des droits fondamentaux ont principalement deux origines :

-­‐ Tout d’abord, certains droits qui existent déjà dans le droit de l’UE comme le droit à la liberté de circulation pour les citoyens européens (article 45),

-­‐ Ensuite, la Convention européenne des droits de l’homme et ses protocoles. Concernant cette deuxième source, la Charte spécifie que pour les droits présents de manière commune dans ces deux instruments, les droits de la Charte

                                                                                                               

148 Elspeth Guild, ibid. à la p. 3.   149 Ibid. à la p. 4.  

auront la même signification et portée que ceux de la Convention, ce qui n’empêche pas le droit de l’UE de fournir une protection plus renforcée150.

Examinons maintenant le champ d’application de la Charte des droits

fondamentaux de l’Union européenne.

b)   L’application  de  la  Charte  des  droits  fondamentaux  de  l’Union  européenne   L’applicabilité universelle de la Charte des droits fondamentaux de l’Union

européenne signifie qu’elle s’applique aussi bien aux ressortissants européens qu’aux

ressortissants des Etats tiers résidant dans un pays de l’Union européenne, à partir du moment où le requérant parvient à démontrer que son droit, reconnu par la Charte, est méconnu par le droit de l’Union européenne. Cela suppose que la situation du requérant soit en lien étroit avec le droit communautaire, dans la mesure où l’application de ce droit est susceptible d’affecter sa situation151.

En outre, l’applicabilité universelle de la Charte n’est pas remise en cause par le fait que la Pologne, le Royaume-Uni et la République Tchèque se soient désengagés de certains chapitres de cette Charte. En effet, la CJUE peut, comme elle a fait dans l’arrêt

                                                                                                               

150 Ibid. à la p. 5.  

Kücükdeveci, en janvier 2010, faire application des principes généraux de droit au lieu

de se baser directement sur des dispositions précises du traité152.

Ainsi, les ressortissants turcs, dont la situation concernant la protection contre l’expulsion de l’UE est plus fragile que celle des citoyens européens, verront leur situation s’améliorer en raison du champ d’application de la Charte des droits

fondamentaux au sein de l’UE, non restreint aux seuls ressortissants européens.

D’autres questions au sujet du champ d’application de la Charte seraient intéressantes à examiner en profondeur, mais ne font pas l’objet de notre mémoire. Pensons en particulier à l’application de la Charte des droits fondamentaux à d’autres populations défavorisées d’Europe comme les Roms. Le Canada a en 2009 reconnu le statut de réfugiés à plus de la moitié de Roms tchèques153. Pourront-ils être, de façon semblable aux autres citoyens européens et ressortissants d’États tiers, protégés contre l’expulsion de l’UE ? C’est une affaire à suivre.

Examinons maintenant la protection contre l’expulsion des étrangers d’Europe par une analyse de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme et son influence sur la Cour de Justice de l’Union européenne.

                                                                                                               

152 Morano-Foadi et Andreadakis, supra note 50 à la p. 1084; Seda Kücükdeveci c. Swedex GmbH & Co. KG,

Cour de Justice des Communautés Européennes (Grande Chambre), 19 janvier 2010, affaire C-555/07, en ligne: Eurlex: http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=CELEX:62007CJ0555:FR:HTML au point 3.

III.2 La convergence de la protection des individus de citoyenneté différente par

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