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Voici un rappel des quatre hypothèses qui ont été évaluées au chapitre 3, ainsi que les grandes conclusions qui ressortent de chacune d’elles :

(7) les biomasses racinaires du millet perlé sucré et du sorgho sucré sont supérieures à celle du maïs-grain;

(8) l’apport annuel en carbone résultant de la culture du millet perlé sucré et du sorgho sucré est supérieur à celui résultant de la culture du maïs-grain;

(9) les longueurs et surfaces racinaires du millet perlé sucré et du sorgho sucré sont supérieures à celles du maïs-grain et;

(10) les racines très fines (diamètre < 0,5 mm) représentent une plus grande proportion de la surface racinaire chez le sorgho sucré que chez le millet perlé sucré et le maïs-grain.

La biomasse racinaire du maïs a été largement supérieure à celles du millet perlé sucré et du sorgho sucré aux deux sites, et cela pour les deux couches de sol étudiées, ce qui infirme l’hypothèse 7. Pour la couche de surface du sol (0-15 cm), les biomasses racinaires du maïs, du sorgho et du millet ont été, respectivement, de 647, 421 et 220 g m-2 à Ste-Anne-de-Bellevue, et de 636, 436 et 250 g m-2 à St-Augustin. Pour la couche de sol de 15 à 30 cm de profondeur, la biomasse racinaire du maïs était de 61 g m-2 à Ste-Anne-de-Bellevue et de 51 g m-2 à St-Augustin, alors que celles du millet perlé sucré et du sorgho sucré, semblables, étaient de 33 g m-2 à Ste-Anne-de-Bellevue et de 25 g m-2 à St-Augustin. Similairement, l’apport annuel en carbone a été supérieur pour le maïs-grain aux deux sites (moyenne de 243 g C m-2 pour le maïs, 197 g C m-2 pour le sorgho et 131 g C m-2 pour le millet), infirmant aussi l’hypothèse 8.

L’hypothèse 9 a été confirmée. Le millet perlé sucré et le sorgho sucré ont montré une plus grande longueur racinaire spécifique (longueur des racines par unité de masse) et une plus grande densité de longueur racinaire (longueur des racines par unité de volume de sol) et de surface racinaire (surface des racines par unité de volume de sol) que le maïs, aux deux sites. Les racines très fines (diamètre < 0,5 mm) ont représenté une plus grande proportion de la surface racinaire totale pour le millet perlé sucré et le sorgho sucré (moyenne de 60 % à Ste-Anne-de-Bellevue et 63 % à St- Augustin) que pour le maïs-grain (moyenne de 45 % à Ste-Anne-de-Bellevue et 55 % à St-Augustin).

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Toutefois, aucune différence significative n’a été observée entre la proportion de racines très fines du millet perlé sucré et celle du sorgho sucré, ce qui infirme l’hypothèse 10.

Principales contributions de ce projet

Ce projet de recherche contribue à l’avancement des connaissances de différentes façons. Tout d’abord, alors que la plupart des études précédentes sur le sorgho sucré avaient été réalisées aux États-Unis, en Italie et en Chine, les présents travaux permettent de situer le potentiel du sorgho sucré et du millet perlé sucré dans les conditions pédoclimatiques du Québec. Les résultats du chapitre 1 complètent ceux de Bouchard et al. (2011), Leblanc et al. (2012), Crépeau et al. (2013) et Dos Passos Bernardes et al. (2014), notamment sur la régie de culture du millet perlé sucré et du sorgho sucré au Québec, en démontrant la non-nécessité de fractionner l’azote appliqué et en identifiant les doses optimales d’azote pour favoriser les meilleurs rendements en matière sèche et en sucres solubles des deux espèces. Concrètement, ces résultats permettront d’élaborer des recommandations de fertilisation destinées aux producteurs agricoles. De plus, le chapitre 1 établit les rendements en éthanol du millet perlé sucré et du sorgho sucré auxquels il est réaliste de s’attendre dans deux régions du Québec. Cette information pourra permettre autant à l’industrie qu’aux gouvernements de faire des choix quant à l’utilisation du millet perlé sucré et du sorgho sucré pour la production d’éthanol au Québec. Les rendements estimés en éthanol sont loin d’être à la hauteur des attentes du milieu agricole. Ces résultats pourront donc permettre dès maintenant aux acteurs québécois de l’agriculture d’entrevoir d’autres débouchés pour le millet perlé sucré et le sorgho sucré, deux espèces qui par ailleurs s’avèrent fort prometteuses à bien d’autres égards.

En effet, grâce à la technique du traçage isotopique à l’azote-15 (chapitre 2), nos travaux ont permis de mettre en lumière la fascinante capacité du millet perlé sucré et du sorgho sucré à récupérer dans leurs parties aériennes l’azote minéral appliqué sous forme d’engrais, et ce dans des proportions variant de 54 à 82 %. Non seulement ces taux de récupération sont-ils plus élevés que ceux rapportés dans la littérature pour les cultures annuelles (Reddy et Reddy, 1993; Liang et MacKenzie, 1994; Tran et al., 1997; Stevens et al., 2005; Nyiraneza et al., 2010), mais nos résultats montrent qu’ils augmentent lorsque la dose d’azote minéral appliquée augmente. À notre connaissance, ceci n’a jamais été rapporté, alors que les taux de récupération des cultures annuelles diminuent généralement, ou à tout le moins restent stables, avec l’augmentation des doses d’azote (Liang et MacKenzie, 1994; Tran et al., 1997; Stevens et al., 2005). Conséquemment à ces forts taux de

141 récupération de l’engrais azoté, il s’ensuit de faibles pertes d’azote vers l’environnement (3 à 14% de l’azote appliqué), qui ont été déduites par la différence entre la quantité d’azote-15 appliquée au semis et non retrouvée dans le système sol-plante en fin de saison. Ces pertes vers l’environnement n’augmentent pas lorsque la dose d’azote minéral appliquée augmente. Ces résultats sont surprenants, car des études précédentes utilisant aussi le traçage isotopique ont montré que les pertes d’azote vers l’environnement augmentaient de façon marquée avec l’augmentation des doses d’azote minéral dans la culture du maïs (Reddy et Reddy, 1993; Tran et al., 1997). Ainsi, les résultats du chapitre 2 apportent des données nouvelles qui révèlent la haute efficacité avec laquelle le millet perlé sucré et le sorgho sucré peuvent utiliser les fertilisants azotés, et les faibles risques environnementaux qui y sont associés.

Plusieurs raisons pourraient expliquer les particularités de ces espèces à utiliser l’azote si efficacement. Nos travaux (chapitre 3) se sont penchés sur la morphologie de leurs systèmes racinaires, alors qu’aucune étude ne s’y était attardée de façon exhaustive. Des différences marquées ressortent de la comparaison des systèmes racinaires du millet perlé sucré et du sorgho sucré avec celui du maïs-grain, qui sont pourtant toutes des cultures annuelles en C4 et à haut rendement. Malgré des biomasses aériennes presque semblables, le maïs a une biomasse racinaire trois fois plus importante que celle du millet, et 1,5 fois plus importante que celle du sorgho. À l’inverse, la longueur du système racinaire est de loin la plus grande pour le millet. Il en résulte une longueur racinaire spécifique (longueur des racines par unité de masse racinaire, m g-1 de racine) nettement supérieure pour le millet (83 m g-1) que pour le sorgho (39 m g-1), et bien inférieure pour le maïs (22 m g-1). Sachant que la longueur racinaire spécifique indique l’habilité de la plante à rivaliser pour l’acquisition des éléments nutritifs (Eissenstat, 1992; Farley et Fitter, 1999; Cantarel et al., 2014), il ne serait pas surprenant que les caractéristiques particulières des systèmes racinaires du millet perlé sucré et du sorgho sucré soient liés à leur étonnante efficacité d’utilisation de l’azote. Nos travaux ne permettent toutefois pas d’établir un lien de causalité.

Certains des résultats obtenus soulèvent toutefois des inquiétudes quant à une éventuelle culture plus intensive et plus étendue du millet perlé sucré et du sorgho sucré au Québec. En effet, nos résultats montrent que le millet perlé sucré et le sorgho sucré, durant leur croissance, prélèvent une quantité d’azote supérieure à celle qui est apportée sous forme de fertilisant, et ce peu importe la quantité de fertilisant appliquée (0 à 160 kg N ha-1). Il en résulte un bilan azoté négatif (chapitre 2),

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c’est-à-dire qu’il y a moins d’azote dans le sol après la culture de ces espèces qu’avant. Et comme la quantité de résidus de culture retournée au sol après la récolte de ces espèces est très faible, on peut en conclure que le sol s’appauvrit en azote. Barbanti et al. (2006) ont aussi noté un bilan azoté négatif avec le sorgho sucré, en Italie, peu importe la dose d’azote apportée (0 à 120 kg N ha-1). D’une part, un bilan azoté négatif réduit les risques de pertes d’azote vers l’environnement (Barbanti et al., 2006). Cependant, un tel bilan peut menacer la fertilité à long terme du sol. Ainsi, tel que d’autres auteurs l’ont noté pour le sorgho sucré (Propheter et Staggenborg, 2010; Han et al., 2011), la prudence sera de mise dans le cas où on envisage une culture plus intensive du millet perlé sucré et du sorgho sucré au Québec, avec récolte entière des parties aériennes.

Tout comme le bilan de l’azote, le bilan du carbone a un effet sur la fertilité à long terme des sols et sur leur durabilité. Nos travaux ont montré que le maïs apporte au sol, au moment de la récolte, une quantité de carbone supérieure à celle apportée par le sorgho, puis par le millet (chapitre 3). Bien sûr, les résidus de culture retournés au sol après la récolte des grains de maïs apportent une grande quantité de carbone. Cependant, là où nos travaux apportent une information inconnue jusqu’à maintenant, c’est que même en excluant cet apport de carbone provenant des résidus du maïs (dans le cas où ces résidus seraient récoltés pour faire de l’énergie, par exemple), la différence entre les espèces est toujours significative (243 g C m-2 pour le maïs, 197 g C m-2 pour le sorgho et 131 g C m- 2 pour le millet). C’est donc la grande biomasse racinaire du maïs qui est responsable de son apport supérieur de carbone au sol. En comparaison, l’apport en carbone du millet perlé sucré et du sorgho sucré n’est pas plus élevé que celui rapporté pour des céréales lorsque la paille est récoltée (Swinnen et al., 1995; Bolinder et al., 1997). Le bilan de carbone ne se limite pas à l’apport de carbone par les racines et les résidus, mais dépend aussi des pertes de carbone (Monti et Zata, 2009; Paterson et al., 2009) qui peuvent être affectées par plusieurs facteurs (activité des microorganismes, conditions d’humidité du sol, travail de sol, etc.). Dans nos travaux, les pertes de carbone n’ont pas été évaluées, et ainsi il n’est pas possible de déterminer le bilan de carbone lié à ces cultures. Toutefois, on sait qu’en raison de leur plus faible biomasse racinaire et du nombre plus élevé d’opérations de travail du sol, les cultures annuelles tendent à diminuer le taux de carbone organique du sol alors que les cultures pérennes peuvent l’augmenter (Zan et al., 2001; Tonini et al., 2012). Ainsi, avec des apports en carbone au sol nettement plus faibles pour le millet perlé sucré et le sorgho sucré que pour le maïs, il est légitime de s’inquiéter du maintien de la qualité des sols, du moins si ces cultures sont utilisées à long terme.

143 En étudiant d’autres systèmes culturaux avec un faible retour de résidus au sol au Québec, notamment des rotations de maïs-ensilage et de céréales, Nyiraneza et al. (2009) ont observé que le contenu en azote, le contenu en carbone, de même que la structure du sol ne pouvaient pas être préservés à long terme avec uniquement des apports en fertilisants minéraux. Ceci confirme que nos inquiétudes concernant le millet perlé sucré et le sorgho sucré sont fondées, considérant la possibilité de récolte totale des parties aériennes. Toutefois, certaines pratiques, comme l’apport d’engrais organique durant plusieurs années ou la mise en place de bonnes séquences de rotation des cultures, pourraient atténuer ces inquiétudes et devraient faire l’objet de recherches dans un futur proche, dans l’optique d’un développement important du millet perlé sucré et du sorgho sucré au Québec.

Perspectives

Application à long terme d’engrais organiques

Dans nos travaux, l’effet des engrais organiques (lisier de porc et lisier de bovin) a été évalué après seulement une saison de croissance du millet perlé sucré et du sorgho sucré. Nos résultats ont montré un potentiel de fertilisation moindre pour les lisiers que pour une dose équivalente (80 kg N ha-1) d’azote minéral sous forme de nitrate d’ammonium calcique. En effet, la valeur fertilisante du lisier de porc a varié entre 28 et 52 % de celle de l’engrais minéral, et celle du lisier de bovin a varié entre 15 et 21 % (chapitre 1). Les taux de récupération de l’azote ammoniacal des lisiers dans les parties aériennes du millet perlé sucré et du sorgho sucré ont aussi été relativement faibles, variant de 20 à 48 % (chapitre 2).

L’application d’engrais organique durant une seule saison de croissance ne permet certainement pas d’évaluer tous les impacts de ces amendements sur le sol. Des effets positifs d’une application à long terme d’engrais organique sont indéniables et devraient être testés dans les conditions du Québec, d’autant plus que de tels essais ont déjà montré des résultats probants avec d’autres cultures. En effet, Nyiraneza et al. (2010) a noté une augmentation du prélèvement en azote de 44 % pour le maïs fourrager et de 23 % pour l’orge à la suite d’une rotation de céréales fertilisée à long terme avec du lisier de bovins laitiers, en comparaison avec la même rotation fertilisée exclusivement avec des engrais minéraux. Bayu et al. (2006) a aussi noté une augmentation du prélèvement en azote du

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sorgho-grain fertilisé avec des engrais minéraux, lorsque cette fertilisation a été précédée de six années continues d’application d’engrais organique.

L’ajout d’engrais organique améliore les propriétés chimiques et physiques du sol (Buerkert et al., 2000; Bielders et Michels, 2002; Okamato et Okada, 2004; Bayu et al., 2006; Nyiraneza et al., 2009), ce qui stimule le développement racinaire et par conséquent le développement de la plante entière (Buerkert et al., 2000; Okamato et Okada, 2004; Bayu et al., 2006). De plus, les éléments nutritifs des engrais organiques restent plus longtemps dans le sol et sont libérés plus lentement, en comparaison avec ceux des engrais synthétiques, ce qui assure un effet fertilisant résiduel pouvant s’étendre sur plusieurs saisons de culture (De Rouw et Rajot, 2004; Bayu et al., 2006; Akponikpe et al., 2008). Pour ces raisons, il est raisonnable de penser que l’application d’engrais organique à long terme pourrait bénéficier aux cultures du millet perlé sucré et du sorgho sucré.

Rotations de cultures

Un des avantages liés aux cultures énergétiques annuelles, comme le millet perlé sucré et le sorgho sucré, est le fait qu’elles peuvent s’intégrer facilement à des rotations de cultures (Cotton et al., 2013). Les rotations permettent en général d’augmenter la productivité des cultures tout en ayant un impact favorable sur l’environnement, par le biais d’une meilleure utilisation des ressources (Zegada- Lizarazu et Monti, 2011). L’augmentation des rendements observée lorsqu’il y a alternance de cultures aux caractéristiques différentes est nommée « effet rotation » : même en additionnant l’effet de chacun des facteurs impliqués dans l’augmentation des rendements d’une rotation de culture, il s’avère impossible d’expliquer en entier cette augmentation (Zegada-Lizarazu et Monti, 2011). À l’inverse, la culture d’une même plante au même endroit de façon consécutive sur plusieurs années occasionne une diminution des rendements (Nickel et al., 1995). Pour expliquer ce phénomène, abondamment observé avec la monoculture du maïs (Yakle et Cruse, 1984; Nickel et al., 1995), mais aussi avec la monoculture du sorgho (Guenzi et al., 1967), plusieurs auteurs ont suggéré que la santé des systèmes racinaires soit affectée par la présence de composés autotoxiques libérés lors de la décomposition des racines et des résidus de culture de l’année précédente. En contrepartie, ces auteurs (Guenzi et al., 1967; Yakle et Cruse, 1984; Nickel et al., 1995) ont conclu que l’effet rotation est entre autres causé par une amélioration des fonctions racinaires. Ceci y contribue sans contredit. Il a notamment été démontré que le millet perlé cultivé en rotation avec les pommes de

145 terre permettait de réduire l’incidence du nématode des racines (Pratylenchus penetrans) chez ces dernières (Bélair et al., 2006). Dans des pays où le sorgho est sujet aux infestations par des nématodes, Bagayoko et al. (2000) ont montré que le sorgho en rotation avec une légumineuse était beaucoup moins infecté que le sorgho en monoculture. En effet, le fait d’alterner une culture hôte avec une culture non-hôte réduit la population de nématodes dans le sol et augmente l’effet rotation. De plus, Dodd et al. (1990) ont démontré que le sorgho augmentait la présence d’endomycorhizes arbusculaires (EA) sur la culture suivante en rotation, dans les sols acides et peu fertiles de la savane Colombienne. Toutefois, outre une meilleure santé des racines, d’autres facteurs semblent contribuer à l’effet rotation. En particulier, les successions de cultures de différentes familles avec des systèmes racinaires variant dans leur biomasse et leur architecture améliorent les propriétés physiques, chimiques et biologiques du sol, principalement grâce à l’apport de matière organique à différentes profondeurs dans le profil de sol (Zegada-Lizarazu et Monti, 2011).

Le fait d’alterner une culture hôte avec une culture non-hôte permet en général de diminuer l’incidence des maladies affectant les plantes cultivées. Une des maladies fongiques les plus présentes chez les céréales cultivées (maïs, seigle, triticale, blé, orge, avoine) au Québec, et dans le monde, est la fusariose de l’épi (Gilbert et Tekauz, 2000; Bailey et al., 2004). Cette maladie est causée par différentes espèces de champignons appartenant au genre Fusarium. Depuis quelques années, la maladie s’étend aux champs de maïs-ensilage, ces derniers étant destinés à l’alimentation des bovins. C’est principalement au moment de l’apparition des soies du maïs (Desjardins et al. 2002), ou dans une moindre mesure lors de la période de maturation des grains (Sobek et Munkvold, 1999), que l’infection du maïs se produit. Or, la présence de la fusariose est fortement associée à l’apparition de toxines, des métabolites secondaires du champignon (Bhatnagar et al., 2002), qui représentent une menace à la santé animale et des pertes de revenu pour les agriculteurs (Bhatnagar et al., 2002; Xu, 2003). Il s’ensuit des applications préventives de fongicides qui ont un impact néfaste sur l’environnement.

Le sorgho sucré pourrait constituer une culture alternative au maïs-ensilage pour nourrir les bovins, tout en étant une plante non hôte pour la fusariose de l’épi. En effet, comme le sorgho sucré ne possède pas de soies, possède une panicule située très en hauteur par rapport au sol et est récolté avant le remplissage des grains, le champignon peut difficilement infecter la plante. De plus, en étant cultivé dans une optique d’alimentation animale, le sorgho sucré pourrait possiblement être récolté à

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un stade encore plus précoce, soit juste avant la sortie des panicules, afin de favoriser une teneur élevée en protéines. L’introduction du sorgho sucré en rotation avec le maïs-ensilage pourrait donc possiblement réduire l’incidence de la fusariose et ainsi augmenter les rendements et la qualité du maïs-ensilage cultivé par la suite. La recherche sur l’utilisation de ces espèces comme plantes fourragères au Québec en est à ses débuts, mais montre déjà un certain potentiel (Dos Passos Bernardes et al., 2014). Par ailleurs, dans un contexte de changement climatique, la production du maïs comme plante fourragère pour les bovins pourrait être limitée, en raison de la difficulté de cette espèce à s’adapter aux conditions de sécheresse (Dante et al., 2010). Pour leur part, le millet perlé sucré et le sorgho sucré seraient au contraire mis à leur avantage dans de telles conditions. Il serait donc pertinent de définir d’abord le potentiel du sorgho sucré, et même du millet perlé sucré, comme cultures de remplacement au maïs-ensilage, puis d’étudier l’effet de la rotation de ces cultures sur l’incidence de la fusariose.

D’un point de vue environnemental, la rotation des cultures permet une meilleure efficacité d’utilisation des ressources du sol. En effet, le millet perlé est en mesure d’utiliser les éléments nutritifs du sol à des profondeurs hors de portée des systèmes racinaires de plusieurs autres cultures (Menezes et al., 1997). De la même manière, le sorgho en rotation peut utiliser l’eau et les éléments nutritifs en profondeur, et est ainsi en mesure de bien utiliser les ressources du sol lorsqu’en rotation avec des cultures présentant un système racinaire plus superficiel (Zegada-Lizarazu et Monti, 2011). De plus, lorsque la rotation comprend des plantes fixatrices d’azote atmosphérique, les autres cultures bénéficient d’un apport significatif en azote (Fustec et al., 2010; Zegada-Lizarazu et Monti, 2011) qui peut remplacer, ou du moins compléter, l’apport d’azote sous forme de fertilisants (Garg et

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