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Le champ d’application de la PESC, une politique en devenir

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 181-185)

Partie II : Vers une conception européenne de la sécurité environnementale

Section 1: La protection de l’environnement dans l’Union européenne, une histoire mouvementée

1. Politique étrangère et objectifs de l’action extérieure : une flexibilité à double tranchant

1.1 Le champ d’application de la PESC, une politique en devenir

Le TUE et TFUE, tels qu’amendés par le traité de Lisbonne, sont relativement succincts sur le point particulier de l’étendue et la nature des compétences permettant de

mener à bien la PESC. En ce qui concerne l’étendue des compétences, l’article 24 §1 TUE précise ainsi: « les compétences de l’Union, en matière de Politique étrangère

et de Sécurité commune, doivent couvrir tous les domaines de la politique étrangère et toutes les questions liées à la sécurité de l’Union, y inclus l’élaboration progressive d’une politique de défense commune qui pourrait conduire à une défense commune ». Deux éléments peuvent être retenus de cette définition. D’un côté la PESC couvre ainsi, tous les domaines de politique étrangère et de l’autre, toutes les questions relatives à la sécurité de l’UE. Ces deux éléments semblent donc suggérer une prise en compte potentiellement aisée de la sécurité environnementale dans le contexte européen.

Si le premier élément n’est pas défini, en revanche, la référence à la sécurité fait l’objet d’un large développement dans le cadre d’une section qui lui est entièrement consacrée, sous l’intitulé « dispositions sur la Politique de Sécurité et de Défense commune (PSDC) ». Ainsi, en vertu de l’art 42 § 1 TUE, la PSDC doit « fournir à l’UE la capacité opérationnelle, tirée de ses atouts civils et militaires, qui puissent être utilisés dans des missions, hors UE, dans le cadre d’opérations de maintien de la paix et de

181 renforcement de la sécurité internationale, en accord avec les principes de la Charte des Nations Unies ». L’article 43 § 1 TUE complète cette approche, en énonçant que les tâches, prévues au terme de l’article 42 § 1 TUE, doivent inclure « les opérations de désarmement, les missions humanitaires et de secours, le conseil militaire et les tâches d’assistance, les tâches de prévention des conflits et de maintien de la paix, les missions des forces de combat lors de la gestion de crise, y inclus le rétablissement de la paix et la stabilisation post-conflit. Toutes ces tâches peuvent contribuer à la lutte contre le terrorisme, y inclus en soutenant les États tiers dans leurs efforts visant à combattre le terrorisme sur leurs territoires »537. L’article 42 § 2 TUE précise également que la PSDC doit inclure le cadrage progressif d’une politique de défense commune, qui doit conduire à une défense commune lorsque le Conseil, statuant à la majorité en décidera ainsi.

Il est légitimement possible de s’étonner de cette abondance de détails sur la PSDC, face au silence du traité sur la définition de la politique étrangère. Dans sa version antérieure, le TUE prévoyait ainsi une série d’objectifs spécifiques pour la PESC, qui pouvaient, le cas échéant, être utilisés en soutien à l’exercice de détermination du champ d’application de la référence faite à « tous les domaines de politique étrangère ». Le traité de Lisbonne, dans un souci de rationalisation, a remplacé ces objectifs, spécifiques à la PESC, par des objectifs généraux, applicables à l’ensemble de l’action extérieure.

L’article 21 § 2 TUE est donc désormais ainsi formulé : « L’Union doit définir et poursuivre des politiques et actions communes et doit œuvrer pour un haut degré de coopération dans tous les domaines des relations extérieures dans le but de :

a) sauvegarder ses valeurs, intérêts fondamentaux, sécurité, indépendance et intégrité b) consolider et soutenir la démocratie, la règle de droit, les droits de l’homme et les

principes du droit international

c) préserver la paix, prévenir les conflits et renforcer la sécurité international dans le respect des buts et principes de la Charte des Nations Unies, avec les principes de l’acte final d’Helsinki et avec les buts de la Charte de Paris, y inclus ceux relatifs aux frontières extérieures

d) promouvoir le développement économique social et environnemental durable des pays en développement avec comme but principal l’éradication de la pauvreté e) encourager l’intégration de tous les pays dans l’économie mondiale, y inclus via

l’abolition progressive des restrictions au commerce international

537 Pour des développements sur la PSDC voir J.C.PIRIS, The Lisbonn Treaty-a Legal and Political Analysis, Cambridge, Cambridge University Press, 2010, pp. 77 et 265-279.

f) aider au développement de mesures internationales pour préserver la qualité de l’environnement et la gestion durable des ressources naturelles globales dans le but d’assurer un développement durable

g) assister les populations, pays et régions confrontées à des catastrophes naturelles ou provoquées par l’homme

h) promouvoir un système international basé sur coopération multilatérale renforcée et une bonne gouvernance globale »538.

Il est donc possible de penser que, par son côté très général, cet article ne permet plus de déterminer le champ d’action de la PESC, par rapport à l’étude de ses objectifs539. Cette affirmation mérite cependant d’être nuancée. En effet, les objectifs d à g se réfèrent clairement à la politique de coopération et développement, au commerce, ou à la protection de l’environnement, en d’autre termes à des domaines reconnus des relations extérieures, relevant du domaine des compétences communautaires. D’un autre côté, cependant, l’objectif c, visant plus particulièrement le maintien de la paix, la prévention des conflits et le renforcement de la sécurité internationale, semble indéniablement liés au cœur de la PSDC. Les objectifs a, b, h sont, eux, plus problématiques par leur nature transsectorielle. En ce qui concerne les pouvoirs à utiliser, pour mettre en œuvre ces objectifs, le TUE, énumère également une série d’instruments auxquels il peut être fait appel dans le cadre de la PESC540. L’adoption d’actes législatifs y est exclue, mais l’Union peut conclure des accords internationaux dans le cadre de la PESC.

Dans une perspective d’identification des bases juridiques adéquates à de potentielles mesures, relevant de la sécurité environnementale, peut-on alors établir un parallèle avec la politique étrangère d’un État afin de mieux définir les contours de la PESC ? L’exercice semble périlleux. En effet, si les décisions et, dans une certaine mesure, les actions à prendre par l’UE dans le cadre de la PESC, relèvent de la catégorie des instruments diplomatiques et si l’UE a également à sa disposition des instruments militaires, force est de constater que l’utilisation d’instruments économiques et financiers, à des fins de politique étrangère, relève également, plus largement, du domaine des

538 Art. 21 § 2 TUE.

539 M. CREMONA ET B. DE WITTE (eds), EU Foreign Relations Law-Constitutionnel Fundamentals, Hart Publishing, 2008, p.47 ; V.MICHEL, « La diversité des objectifs et des acteurs de la politique juridique extérieure de l’UE, in Mélanges en l’honneur de P.DAILLER, op. cit., pp. 35-60 ; N.SKANDAMIS, « L’impératif de sécurité comme rationalité institutionnalisée », in E. NEFRAMI, L’action extérieure de l’UE-fondements, moyens, principes, Paris, LGDJ, 2010, p. 130.

540 Art. 25, TUE.

relations extérieures541. Déterminer juridiquement le champ d’action de la PESC devient donc un défi. Pour ce faire, Piet Eeckhout suggère d’aborder cette question par le biais de l’analyse des pouvoirs constitutionnels nationaux, dont dépendrait une politique étrangère efficace. Selon lui, la PESC n’a pas atteint un stade lui permettant de de couvrir toutes les fonctions de type constitutionnel qui seraient requises, dans ce cas, dans un cadre national, même si certains de ces éléments demeurent néanmoins présents. Ainsi, la référence opérée par le TFUE à « tous les domaines de la politique étrangère » pourrait potentiellement prêter à confusion542. En effet, là où un État parlerait clairement de politique étrangère, certaines des actions de l’UE tomberont dans le champ des relations extérieures, relevant du TFUE, un problème qui devient particulièrement visible dans le domaine de la sécurité environnementale…

Dans le contexte de l’action extérieure de l’UE et plus particulièrement en matière de sécurité environnementale, la délimitation entre ces deux sphères de compétences devient dès lors cruciale. Pourtant, les objectifs de la PESC, désormais intégrés dans les objectifs généraux d’action, applicables à l’ensemble de l’action extérieure de l’UE ne semblent pas être d’une grande utilité dans cet exercice. Pour Stephan Keukeleire, ainsi, ces objectifs relèveraient, en effet plus de principes, soutenant une action politique que d’objectifs opérationnels précis. Dans un contexte pré-Lisbonne, Martti Koskenniemi, critiquait, lui aussi, le côté abstrait et vague des objectifs de la PESC, qui les rendrait inutiles dans la définition de priorités pour la conduite d’une politique étrangère de l’Union543. Il faut cependant reconnaître aux objectifs de l’action extérieure de l’Union une dimension positive. Ils projettent et constitutionnalisent, du moins à un certain degré, certaines des valeurs fondamentales de l’UE et peuvent donc devenir, par là, une ligne directrice pour l’action extérieure de l’UE. Dans le cadre de notre sujet, il convient néanmoins de pousser cette réflexion, afin de mieux comprendre, dans quelle mesure ces questionnements sur la nature et l’étendue des compétences PESC, pourraient affecter l’avenir de la sécurité environnementale dans les relations extérieures de l’Union

541 S. de Keukeleire, spécialiste belge de la PESC énumère plusieurs catégories d’instruments qui constituent la marque d’une politique étrangère pleine et entière. Il distingue ainsi les instruments économiques et financiers, diplomatiques, militaires, voir S. KEUKELEIRE, « Het Buitenland beleid van de Europese Unie », cité par P. Eeckhout, op. cit., p. 176.

542 Ces pouvoirs devraient comprendre, le pouvoir de faire la guerre, lever une armée, signer des traités, la régulation du commerce, la gestion des frontières extérieures et la cession ou acquisition de territoires.

543 M. KOSKENNIEMI, “International Law Aspects of the Common Foreign and Security Policy”, in M. KOSKENNIEMI (ed.), International Law Aspects of the European Union, The Hague, Nijhoff, 1998, pp. 27-28.

voy. également, R. WESSEL, The European Union’s Foreign and Security Policy –a Legal Institutional Perspective, Dordrecht, Kluwer Law International, 1999, pp. 56-70.

1.2. La nature des compétences PESC et les enjeux liés à la base juridique des

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