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Champ d’éclairage non paramétré

4.4 Applications

5.1.6 Champ d’éclairage non paramétré

L’ensemble des modèles d’éclairage que nous avons dérivés du modèle de source primaire lambertienne (5.12) sont explicites, mais ce caractère explicite pose plusieurs questions.

Tout d’abord, les modèles explicites dépendent des paramètres de la source : par exemple, la position du centre d’une source sphérique, tout comme la forme d’une source étendue, influent directement sur l’expression du champ vectoriel s(x). Ce champ dé- pend donc d’un ensemble de paramètres qui doivent être soit étalonnés (ce qui est le principe de la stéréophotométrie calibrée), soit estimés automatiquement au cours de la reconstruction 3D (stéréophotométrie non calibrée : ce problème a été étudié pour des éclairages directionnels, cf. chapitre 3).

5.1. QUELQUES MODÈLES D’ÉCLAIRAGE

Figure 5.6 – Évaluation qualitative du modèle de luminance pour une source étendue non uniforme. À gauche : image affichée à l’écran (en haut) et luminance normalisée mesurée sur la feuille de papier (en bas). Comme l’écran et la webcam sont tous deux orientés vers la feuille de papier, une zone claire sur la partie gauche de l’image affichée se traduit par une zone claire sur la partie droite de la feuille. Au milieu : approximation de l’image par n = 4 rectangles (en haut) ; luminance simulée en utilisant soit notre modèle (au milieu), soit le modèle de Clark [61] (en bas). À droite : idem pour n = 256. D’autre part, un modèle explicite dépend des coordonnées du point x, qui constituent justement l’inconnue dans tout problème de reconstruction 3D. L’utilisation de tels mo- dèles en stéréophotométrie augure donc de difficultés, tant du point de vue numérique que de celui du caractère bien posé du problème. Nous reviendrons sur ces questions dans le paragraphe5.3.

Nous avons également mis en évidence le problème des ombres portées, ainsi que celui de la pénombre dans le cas de sources étendues : ces phénomènes sont difficiles à expliquer car ils dépendent de la géométrie globale de la scène. Aussi précis soit-il, un modèle explicite peut donc être partiellement ou totalement mis en défaut par la complexité de la géométrie de la scène observée.

Enfin, s’il semble raisonnable de chercher à modéliser le flux primaire, le flux lumineux réel reçu par la surface est égal à la somme du flux primaire et de flux secondaires dus aux réflexions mutuelles (cf. figure 1.6). Nous avons déjà signalé que ces phénomènes étaient relativement faciles à simuler par lancer de rayons, mais extrêmement complexes à prendre en compte en reconstruction 3D car, comme les ombres et la pénombre, ils dépendent de la géométrie globale de la scène.

Coupler la stéréophotométrie avec les techniques modernes de rendu, afin d’intégrer le calcul de la visibilité au processus de reconstruction 3D, constitue une piste de re- cherche prometteuse. Nous avons choisi une autre approche, qui consiste à abstraire le champ d’éclairage s(x) : cette approche présente l’avantage de bien mieux se prêter à l’optimisation numérique. On peut toujours écrire que le vecteur d’éclairage total est obtenu en sommant les contributions de toutes les sources élémentaires :

s(x) =ZZ

xs∈sourcesdsxs(x) (5.37)

quitte à supposer que, si une source élémentaire est masquée, alors dsxs(x) = 0, de façon à ce que cette source élémentaire ait une contribution nulle dans l’intégrale. Puisque nous ne cherchons pas à expliciter cette intégrale, rien ne nous empêche non plus de supposer que les sources élémentaires secondaires sont également prises en compte dans le calcul. Par conséquent, que le flux lumineux incident soit purement primaire ou non, et en présence ou non d’ombres (ou de pénombre), on pourra toujours écrire que l’éclairage est un champ quelconque de R3 dans R3 :

s(x) = φ(x)s(x) (5.38)

et considérer que s(x) représente le flux lumineux incident effectif au point x de la surface. Cette approche nécessite toutefois de connaître parfaitement le champ s, qui est un champ vectoriel dense de l’espace à trois dimensions. En pratique, il faut connaître un vecteur de R3 en chaque point de l’espace 3D et pour chaque configuration d’éclairage, ce qui constitue un problème. Comme nous ne souhaitons pas expliciter sa dépendance en x, nous préférons paramétrer le champ s par les coordonnées (u, v) :

s : Ω ⊂ R2 −→ R3

(u, v) 7−→ s(u, v) = s(x(u, v)) (5.39) Pour représenter de façon plus compacte les champs si, on peut les supposer suffi-

samment réguliers et les décomposer en harmoniques sphériques [23,25]. Il a été montré dans [24,26] que dans le contexte de la stéréophotométrie, la reconstruction 3D sous des éclairages très généraux devenait possible à partir de neuf harmoniques sphériques : 9m scalaires suffisent donc pour représenter de façon assez précise chaque éclairage.

Cependant, et comme cela est illustré sur la figure 5.7, un champ d’éclairage n’est décomposable en harmoniques sphériques que s’il est régulier. En effet, les harmoniques sphériques constituent une base orthonormée de l’espace de Hilbert L2(S2) contenant les fonctions sphériques de carré intégrable, définies sur la sphère unité S2 ⊂ R3. Les travaux de Basri et al. [26,23,24,25] montrent qu’en général, le flux lumineux peut être effectivement assimilé à une fonction de ce type, mais ceci n’est plus vrai en présence d’occultations. En effet, les phénomènes d’ombres et de réflexions mutuelles violent la contrainte de régularité du champ d’éclairage : le champ s, s’il n’est pas continu, n’est plus décomposable en harmoniques sphériques. Nous avons montré dans [216] qu’il pouvait cependant être supposé régulier par morceaux : on peut par exemple supposer seulement qu’il s’agit d’un champ à variations bornées, pouvant comporter des « sauts » importants près des discontinuités de la surface, mais lisse ailleurs.