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La chambre obscure à lentille intégrée

Chapitre 4 Les systèmes multivoies au service d’une miniaturisation des systèmes

4.2 La chambre obscure à lentille intégrée

Compte tenu des contraintes cryogéniques, l’architecture optique à intégrer doit être la plus

simple et la plus compacte possible afin de minimiser la charge à refroidir. Par chance, les systèmes réfractifs infrarouges possèdent généralement des configurations plus simples que leurs équivalents

visibles. En effet, les indices élevés des matériaux infrarouges et leur faible dispersion facilitent

la correction des aberrations et limitent l’influence du chromatisme. Bien souvent, l’emploi d’un

matériau de faible dispersion et de très haut indice (comme le Germanium ou le Silicium) permet

de concevoir des systèmes optiques utilisant un seul composant. Par exemple, sur l’axe optique,

une lentille en germanium ayant un nombre d’ouverture égal à 2 satisfait le critère de Maréchal

et peut être considérée comme limitée par la diffraction. Dans le cas d’une optique simple, la

cambrure de la lentille - définie comme la demi somme des courbures de la lentille - est l’unique paramètre optimisable, la demi-différence des courbures étant fixée par la puissance de la lentille.

La puissance de la lentille et la cambrure peuvent être reliées dans un même terme B appelé

allure de la lentille :

B = C1+ C2 C1− C2

, (4.1)

où C1 est la courbure du premier dioptre, et C2 est la courbure du deuxième dioptre. En choi-

sissant l’allure de la lentille de la manière suivante :

B = n − 1

n + 1(2n + 1), (4.2)

l’aberration de coma peut être annulée dans le cas où la pupille se trouve au niveau de la lentille

et que l’objet se trouve à l’infini (n étant l’indice du matériau ) [212]. Il est préférable de donner

sa valeur minimale obtenue pour une allure de la lentille égale à :

B = 2n

2− 1

n + 2 , (4.3)

pour un objet situé à l’infini. La lentille est ainsi corrigée de la coma tout en conservant une bonne

qualité image axiale. Pour des matériaux de fort indice, une lentille simple corrigée de la coma

est un ménisque. De plus, l’aberration sphérique et la coma peuvent être corrigées simultanément

en asphérisant en plus un des dioptres de la lentille. Une telle lentille est appelée un aplanat.

En revanche, le système est limité par les aberrations d’astigmatisme et de courbure de champ

qui peuvent représenter un réel souci pour des applications grand champ. L’astigmatisme est

indépendant de la cambrure de la lentille si la pupille est au niveau de la lentille. L’astigmatisme dépend néanmoins de la puissance de la lentille et la courbure de champ décroît lorsque l’indice

croît. Choisir des matériaux ayant un fort indice comme le Germanium et le Silicium permet de

minimiser l’aberration sphérique, la coma et la courbure de champ. Ainsi, dans le cas d’un système

compact possédant une forte puissance optique et un fort indice, l’aberration prédominante sera

l’astigmatisme.

Si l’on souhaite corriger l’astigmatisme d’un système composé d’une lentille simple, alors il

faut éloigner la pupille de la lentille [212]. Il est alors possible de corriger l’astigmatisme par

l’introduction délibérée de la coma. De plus, dans le cas d’un système corrigé des aberrations du troisième ordre, le déplacement de la pupille n’entraînera pas de changement dans celles-ci.

Ainsi, plusieurs équipes ont montré que des contraintes importantes sur la qualité image peuvent

être satisfaites lorsque la pupille d’entrée est placée à l’avant du système optique [213, 214].

En suivant cette piste, j’ai optimisé une architecture de type ménisque de Wollaston constituée

d’une pupille d’entrée placée à l’avant du système et d’une lentille en silicium (ce matériau

ayant un fort indice et une divergence moins importante que le Germanium dans la bande II).

Ce système est illustré à la figure 4.1 A. Il a un F OV de 78◦ sur la diagonale d’un détecteur

de 320 × 256 pixels de taille 30 µm (correspondant à un champ de 60◦ sur la longueur du détecteur). Ce système a une longueur focale de 9, 26 mm pour un encombrement de 16, 17 mm.

Son nombre d’ouverture est égal à 4. La F T Moptique polychromatique [3 − 5 µm] de ce système est illustrée à la figure 4.1 B. Nous constatons que le contraste des hautes fréquences au niveau

2 .3 1 m m 1 2 ,2 8 m m 16.17mm

fréquence spatiale (en mm-1)

fréquence de Nyquist pour un pixel de taille 30µm

fréquence de Nyquist pour un pixel de taille 15µm

A B

pupille froide ménisque détecteur

FTM idéale

Fig. 4.1 – (A) Illustration de la chambre obscure à lentille intégrée, (B) illustration de la F T Moptique polychromatique [3 − 5 µm] pour différents champs d’observation.

être aussi compatible pour un détecteur de 640 × 512 pixels de pas 15 µm, le contraste des

hautes fréquences autour de la fréquence de Nyquist (33 mm−1) étant supérieur à 10%. La

pupille d’entrée, placée à l’avant du système, permet de répartir les faisceaux de champ sur

différentes zones de la lentille, ce qui permet de corriger séparément les aberrations des différents

champs d’observation. Les aberrations sont donc dans l’ensemble bien corrigées, comme le montre

l’amplitude des coefficients de Seidel aux diagrammes A et B de la figure 4.2. La courbure

F O V = 6 0 ° 0,01mm 0,05mm aberration sphérique coma astigmatisme courbure chromatisme axial chromatisme latéral distortion A B C 6 0 °

Fig. 4.2 – Coefficients de Seidel avec (B) ou sans (A) la distorsion pour une chambre obscure à lentille intégrée conçue pour un détecteur de 320 × 256 pixels au pas de 30 µm et ayant un F OV de 60˚ sur la longueur du détecteur. (C) Image d’une mire de barres rectilignes par la chambre obscure à lentille intégrée.

de champ et la distorsion restent cependant les aberrations qui dégradent le plus le système.

plan du diaphragme. La distorsion de ce système est illustrée à la figure 4.2 C. Ce défaut peut

être cependant corrigé lors d’un post traitement après la calibration de la caméra [215, 216]. La

figure 4.1 A montre que cette architecture s’intègre parfaitement à l’intérieur du cryostat car la pupille d’entrée de ce système peut être placée au niveau de la pupille froide. Ce système est donc

une évolution de la camera obscura décrite à la section 3.2 page 90. Cette architecture sera par

la suite appelée chambre obscure à lentille intégrée. Ce système représente un très bon rapport

entre sa performance optique et sa simplicité. Il constitue une rupture dans la conception de

systèmes infrarouges hautes performances. En effet, traditionnellement, les objectifs infrarouges

se trouvent à l’extérieur du cryostat. Ces derniers peuvent être conçus de manière à ce que la

pupille froide du cryostat corresponde à la pupille de sortie du système. La pupille froide est

alors la conjugaison de la pupille d’entrée qui est placée sur un élément de tête de la combinaison optique. Le concepteur peut aussi choisir de placer délibérément la pupille du système sur le

diaphragme froid. Cependant, une telle combinaison présente un certain nombre d’inconvénients :

les aberrations sont difficiles à corriger car la pupille n’est pas placée sur un élément de tête. Le

déplacement de la pupille en fonction du champ sur les éléments de tête va nécessiter des optiques

de grand diamètre pour éviter des problèmes de vignettage. Dans les deux cas, nous constatons

que la présence de cette pupille froide est un point dur dans la conception d’une architecture

infrarouge, ce qui augmente la complexité de l’objectif. La chambre obscure à lentille intégrée

est conçue de manière à ce que la pupille froide soit la pupille d’entrée du système, supprimant alors la contrainte de conjugaison des pupilles. La chambre obscure à lentille intégrée a donc une

architecture plus simple et plus compacte que les objectifs traditionnels de mêmes performances.

De plus, la pupille froide étant à l’avant du système optique, nous pouvons espérer réduire de

manière optimale le fond. En effet, chaque pixel voit un fond sous un angle correspondant à un

nombre d’ouverture égal à 7. Ce dernier est donc supérieur au nombre d’ouverture associé au flux

utile qui est égal à 4. Il en résulte un flux de fond bien inférieur par rapport aux systèmes classiques

placés à l’extérieur du cryostat. Les angles de champ αu et αf correspondent respectivement au

flux utile et au flux de fond vus par un pixel du détecteur et sont illustrés à la figure 4.3. Ce point reste à être approfondi ultérieurement à la fois par le calcul optique (quelle est l’influence

αααα

u

αααα

f pupille froide

lentille

détecteur

Fig. 4.3 – Illustration des angles de champ αu et αf correspondant respectivement au flux utile

et au flux de fond vus par un pixel du détecteur.

En plaçant la pupille froide à une distance égale à la longueur focale du système, nous pouvons

obtenir un effet télécentrique (voir la figure 4.4). Dans un système télécentrique, les rayons de

lentille détecteur

pupille froide

13,22mm

Fig. 4.4 – Illustration d’une chambre obscure à lentille intégrée télécentrique.

champ (rayons obliques passant par le centre de la pupille d’entrée) arrivent sur le détecteur

parallèle à l’axe optique. La pupille de sortie de ce système se trouve alors à l’infini. La propriété

télécentrique peut être très intéressante dans le domaine infrarouge, où l’utilisation de filtres au

niveau du détecteur est particulièrement courante. Tous les faisceaux de champ verront ainsi le

4.3

Réflexion sur la conception de systèmes multivoies intégrés

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