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Cellules de moelle osseuse sélectionnées et cellules stromales mésenchymateuses

CHAPITRE 3 : THERAPIE CELLULAIRE CARDIAQUE

5. Principaux résultats dans l’infarctus du myocarde et la cardiopathie ischémique

5.1. Infarctus du myocarde à la phase aiguë

5.1.2. Cellules de moelle osseuse sélectionnées et cellules stromales mésenchymateuses

Concernant les cellules de moelle sélectionnées, plusieurs études ont évalué la fraction de cellules CD34+. Tendera et collaborateurs ont étudié les effets de l’injection intra-coronaire de cellules CD34+ chez des patients en post-infarctus montrant une fraction d’éjection du ventricule gauche inférieure à 40%150. Ils n’ont observé aucune différence pour ce paramètre ou la survenue d’évènements entre les deux groupes. Plus récemment l’étude Preserve-AMI a randomisé 161 patients entre cellules CD34+ et placebo151. Le critère de jugement principal était la perfusion myocardique à 6 mois et aucune amélioration significative n’a été détectée. Cependant, après ajustement sur la durée d’ischémie, un effet dose dépendant de la thérapie cellulaire était observé sur la taille de l’infarctus et l’évolution de la fraction d’éjection.

La première étude ayant évalué les MSCs a été publiée en 2004 par Chen et collaborateurs152. Ils ont randomisé 69 patients entre injection intra-coronaire de MSCs et celle de sérum physiologique dans les 12 heures suivant un infarctus revascularisé et ont montré une augmentation significative de la fraction d’éjection à 3 et 6 mois (18% à 6 mois contre 5% chez les contrôles) qui était associée à une amélioration de la perfusion myocardique. Par la suite Hare et collaborateurs ont testé l’administration de MSCs par voie intra-veineuse en comparaison au placebo chez des patients ayant eu un infarctus du myocarde revascularisé avec succès153. L’administration des cellules était sans risque mais la fraction d’éjection n’était pas améliorée dans l’étude. Seules des analyses en sous-groupes portant uniquement sur les patients avec un infarctus antérieur permettait d’objectiver une amélioration de la fraction d’éjection. Ces deux études ont utilisé des MSCs dérivées de moelle osseuse. D’autres études ont utilisé des MSCs dérivées de tissus adipeux. Houtgraff et collaborateurs ont étudié la faisabilité de l’injection intra-coronaire de MSCs dérivées d’adipocytes dans les 24 heures suivant un infarctus antérieur revascularisé. Quatorze patients ont été randomisés entre les cellules et un placebo154. L’injection intra-coronaire a été bien tolérée par les 9 patients recevant les cellules. Par ailleurs, dans cette étude préliminaire de faisabilité, la taille de l’infarctus et la perfusion myocardique s’améliorait significativement chez les 9 patients traités par MSCs mais pas chez les 5 patients traités par placebo. Néanmoins, étant donné le très faible échantillon de cette étude, ces résultats sont

à prendre avec précautions, et une étude de plus grande ampleur est actuellement en cours (Advance study, NCT01216995). Plus récemment, Gao et collaborateurs ont évalué l’injection intra-coronaire de MSCs dérivés de sang de cordon ombilical155. Chez 116 patients randomisés en 1 :1, la fraction d’éjection et la perfusion myocardique étaient améliorées par la thérapie cellulaire à 4 mois de l’injection. Concernant la fraction d’éjection, le bénéfice était conservé jusqu’à 18 mois après traitement.

Toutes ces études convergent pour donner un signal positif en faveur de la thérapie cellulaire par MSCs en post infarctus précoce. Il convient néanmoins de noter deux choses. Premièrement, toutes ces études sont des études préliminaires de phase II ayant inclus un faible nombre de malades et n’étudiant à aucun moment des critères cliniques dits « durs ». Elles n’étudient que des marqueurs pronostics ou mécanistiques tels que la fraction d’éjection ou la perfusion myocardique. Deuxièmement, toutes ces études ont inclus les patients précocement en post infarctus mais toujours au minimum 6 heures après la revascularisation. Les mécanismes mis en jeu dans ce contexte pourraient potentiellement n’être pas liés à la prévention des lésions d’ischémie reperfusion, mais plutôt à la prévention du remodelage inverse et à la myogenèse et angiogenèse.

5.1.3. Infarctus constitué et insuffisance cardiaque post infarctus

L’hypothèse initiale de « régénération myocardique » permise par les cellules injectées a fait de l’insuffisance cardiaque post-infarctus une indication de choix pour les études de thérapie cellulaires.

Les premières études ont utilisé les myoblastes squelettiques en raison de leur facilité d’obtention et des résultats pré-cliniques prometteurs. Néanmoins les résultats négatifs de la première grande étude randomisée ainsi que les effets pro-arythmogènes suspectés ont diminué l’enthousiasme concernant l’utilisation de ces cellules99. Plusieurs études ont par la suite été rassurantes concernant l’arythmogénicité de ces cellules mais aucune n’a mis en évidence de bénéfice associé à leur utilisation.

Concernant les cellules issues de la moelle osseuse, une des premières études a été publiée par Perrin et collaborateurs qui ont inclus 21 patients recevant une injection trans-endocardique de cellules mononuclées de moelle ou de placebo156. Il y avait chez les

patients traités par les cellules une amélioration de presque 10% de la fraction d’éjection comparé au placebo. Suite à ces résultats rassurants sur le plan de la sécurité et prometteurs sur l’efficacité, deux études plus larges ont été menées. Dans la première, Assmus et collaborateurs ont randomisé 92 patients présentant une cardiopathie dilatée post-infarctus157. Ils ont reçu soit des cellules progénitrices circulantes, soit des cellules mononuclées de la moelle soit un placebo, par voie intra-coronaire. Les résultats ont mis en évidence une augmentation modeste mais significative de la fraction d’éjection après l’administration de cellules mononuclées de la moelle osseuse, amélioration qui n’était pas observée avec les cellules progénitrices circulantes ou le placebo. Cependant, ces résultats n’ont pas été confirmés par une deuxième étude publiée plusieurs années plus tard. En effet, l’étude FOCUS-CCTRN a randomisé 92 patients entre une thérapie cellulaire par des cellules mononuclées de la moelle et le placebo (2 :1) injectés par voie trans-endocardique158. Les résultats à 6 mois n’ont montré aucune différence significative que ce soit sur le remodelage ventriculaire, la taille d’infarctus, la perfusion myocardique ou les symptômes. Plusieurs méta-analyses vinrent par la suite confirmer ces résultats en ne montrant pas de bénéfice sur la fraction d’éjection avec l’utilisation des cellules mononuclées de moelle comparées au placebo.

Plusieurs études ont également étudié les MSCs dérivés de moelle osseuse. En 2014, Heldman et collaborateurs ont comparé les effets de l’injection trans-endocardique de cellules mononuclées de la moelle, de MSCs et de placebo chez 59 patients159. La taille de l’infarctus, la cinétique segmentaire du ventricule gauche et le test de marche de 6 minutes étaient améliorés uniquement chez les patients ayant reçu des MSCs. En revanche, le taux d’évènement était le même dans les 3 groupes. Etant donné les bénéfices potentiels de la thérapie allogénique décrits précédemment, des MSCs autologues et allogéniques ont été comparées dans l’étude POSEIDON160. Ces deux types cellulaires ont été comparés chez 30 patients (15 par groupe) sans groupe placebo. Les deux types cellulaires étaient associés à une diminution de la taille de l’infarctus mais seules les MSCs autologues amélioraient les symptômes. En 2014, Perrin et collaborateurs ont évalués les MSCs dérivés de tissus adipeux chez 27 patients (21 traités par cellules, 6 contrôles) ayant une cardiopathie dilatée post-infarctus161. Dans cette étude, la tolérance à l’effort, la masse ventriculaire gauche mais pas la fraction d’éjection étaient améliorés après thérapie cellulaire. Récemment une des plus

larges études de thérapie cellulaire a été publiée. L’étude CHART-1 a testé des MSCs modifiées vers un phénotype cardiopoiétique162. Cent cinquante-sept patients ont reçu les cellules par voie trans-endocardique et ont été comparés à 158 contrôles randomisés. Cette étude était négative pour le critère de jugement principal qui était un critère composite incluant les évènements, la fraction d’éjection et des scores de symptômes.

Au total, ces nombreuses études permettent de dégager deux messages importants. Le premier est que l’administration de cellules souches, qu’elle soit réalisée par voie intra-coronaire ou trans-endocardique semble être sans danger puisque plus de 1000 patients ont été traités jusqu’à présent sans évènement indésirable. Le deuxième est que les MSCs semblent être potentiellement plus prometteuses que les cellules mononuclées de la moelle.

Une seule étude a évalué des cellules souches cardiaques autres que les CDCs chez des patients163. Les cellules injectées dans cette étude sont une population comprenant uniquement des cellules c-Kit positive purifiées. Vingt-trois patients ont été traités dans cette étude, 16 par cellules c-Kit+ et 7 par placebo. Tous ces patients ont bénéficié d’un pontage aorto-coronarien au cours duquel l’auricule droit a été prélevé pour obtention des cellules souches. Les cellules ont été mises en cultures puis la fraction c-kit+ isolée. Ces cellules ont ensuite été injectées par voie intra-coronaire environ 4 mois après le pontage. Les résultats de cette étude ont été très rassurants en termes de sécurité et prometteurs en termes d’efficacité avec une amélioration de la fraction d’éjection du ventricule gauche et une diminution de la taille de la cicatrice d’infarctus chez les patients traités par cellules souches mais pas chez les patients traités par placebo. De plus, sur un plan fonctionnel, la classe NYHA ainsi que le score de qualité de vie de l’insuffisance cardiaque étaient significativement améliorés par la thérapie cellulaire.

6. Cardiosphères et cellules dérivées des cardiosphères