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1.4 Quand n = 2

Terminons ce chapitre par un calcul explicite des caractères c -cellulaires pour le groupe

G(d ,1,2), pour n’importe quel paramètre c . On relie par la suite ces caractères aux carac-tères constructibles que l’on obtient à l’aide des expressions des vecteurs de la base cano-nique sur la base standard de l’espace de Fock. Ici, on va plutôt noter(x , y ) la base standard de C2et(X , Y ) sa base duale.

Pour 0≤ k ≤ d − 1 la réflexion s1,2,k est donnée par la matrice

s1,2,k=  0 ζk ζ−k 0  ,

et on la notera sk pour simplifier. On note s la matrice s0et t la matrice diagonale diag(ζ,1), de sorte que G(d ,1,2) admet pour présentation

〈s , t | s2= 1, td= 1, s t s t = t s t s 〉.

On a vu que les représentations irréductibles de G(d ,1,2) sont paramétrées par les d -partitions de 2 : on dispose de 2d représentations de dimension 1 correspondant à une

d -partition de 2 concentrée en une seule position, et de d2 représentations de dimension 2 correspondant à une d -partition de 2 concentrée en deux positions différentes.

Pour 1≤ i ≤ d , ηi désignera la représentation associée à la d -partitionλ = (λ(1), . . . ,λ(d )) avecλ(i )= (2) et λ(j )= ; pour j ̸= i , η

i désignera la représentation associée à la d -partition

λ = (λ(1), . . . ,λ(d )) avec λ(i ) = (1,1) et λ(j ) = ; pour j ̸= i . Enfin, pour 1 ≤ i < j ≤ d , ρi , j

désignera la représentation associée à la d -partitionλ = (λ(1), . . . ,λ(d )) avec λ(i )= λ(j )= (1) et

λ(k)= ; pour k ̸∈ {i , j }. Les caractères correspondants seront notés χi,χ

i etχi , j. Matriciellement, ces représentations sont données sur les générateurs s et t par

s t ηi, 1≤ i ≤ d 1 ζi−1 η i, 1≤ i ≤ d −1 ζi−1 ρi , j, 1≤ i < j ≤ d  0 1 1 0  i− j 0 0 ζj−i 

On fait le choix d’un paramètre c : R´ef(G (d ,1,2)) → C constant sur les classes de conju-gaison. Comme expliqué dans la partie1.1.2, on va plutôt travailler avec le jeu de para-mètres ki pour 0≤ i ≤ d et c0, ce qui est équivalent à se donner le jeu de paramètres c . On pose enfin k#

i = k1−i.

Remarque 1.4.1. On travaille avec ces paramètres pour plusieurs raisons. Dans le

corol-laire1.2.7, les conditions pour avoir des caractères c -cellulaires simples s’expriment mieux avec ces derniers. Ces paramètres sont également ceux de l’algèbre de Hecke cyclotomique adaptée à la situation, voir[BR17b, Chapter 15].

Les deux générateurs de Gauc(d ,2) sont notés Dx etDy et sont respectivement égaux à

Dx= d−1k=0 ckζk 1 k 1− c0 d−1k=0 1 X − ζkY sk,

28 Chapitre 1. Familles de Calogero-Moser et caractères cellulaires et Dy = d−1k=0 ckζk 1 Y σk 2+ c0 d−1k=0 ζk X− ζkY sk.

Enfin, comme Gauc(d ,2) ⊂ C(V )G (d ,1,2), tout Gauc(d ,2)-module simple apparaît dans une restriction à Gauc(d ,2) d’une représentation simple de l’algèbre C(V )G (d ,1,2). On no-tera alorsLi (resp.L

i, resp.Li , j) la restriction à Gauc(d ,2) de C(V )ηi (resp. C(V )η

i, resp. C(V )ρi , j).

Afin de calculer les Gauc(d ,2)-modules ainsi définis, on récapitule dans le lemme sui-vant des identités de fractions rationnelles afin de simplifier certaines sommes qui appa-raîtront.

Lemme 1.4.2. Dans C(V ) = C(X , Y ), on a pour tout 1 ≤ l ≤ d

d−1k=0 ζk l X − ζkY =d X l−1Yd−l Xd− Yd . (1.1)

Démonstration. Commençons par montrer que

d−1k=0 ζk l X − ζk = d Xl−1 Xd− 1,

en effectuant une décomposition en éléments simples. Puisque Xd− 1 =∏d−1

k=0(X − ζk), il existe des complexes(ak)0≤k <d tels que

d−1k=0 ak X − ζk = d Xl−1 Xd− 1.

Pour 0≤ p < d , si on multiplie l’égalité précédente par X − ζp et que l’on évalue enζp, on obtient ap= ∏dζp(l −1) 0≤k <d k̸=p p − ζk)= p l1≤k <d (1 − ζk)= ζ p l .

On obtient alors l’égalité (1.1) en remplaçant X par X/Y .

Afin de simplifier les résultats, on va considérer d’autres générateurs de C(V ) Gauc(d ,2) qui diffèrent deDx et deDy par multiplication par un élément de C(V ) :

Dx = X(Xd− Yd)

d Dx et Dy =Y(Xd− Yd)

d .

Lemme 1.4.3. L’action des générateursDx etDy de C(V ) Gauc(d ,2) sur les restrictions des

représentations simples de C(V )G (d , 1, 2) est donnée dans la table1.1. Démonstration. Commençons par l’action deD

xsurLipour 1≤ i ≤ d . Elle est donnée par

ηi(D x) =X(Xd− Yd) d ‚ dr=1 ctζr i X − c0 d−1k=0 1 X − ζkY Œ = (Xd − Yd)k# i − c0Xd,

1.4. Quand n= 2 29 D x D y Li, 1≤ i ≤ d (Xd− Yd)k# i − c0Xd (Xd− Yd)k# i + c0Yd Li, 1≤ i ≤ d (Xd − Yd)k# i + c0Xd (Xd − Yd)k# i − c0Yd Li , j, 1≤ i < j ≤ d  (X d −Yd)k# i −c0Xd−( j −i )Yj−i

−c0Xj−iYd−( j −i ) (Xd−Yd)k#

j   (Xd −Yd)k# j c0Xd−( j −i )Yj−i c0Xj−iYd−( j −i ) (Xd −Yd)k# i 

TABLE1.1 – Action des générateurs de C(V ) Gauc(d ,2)

la dernière égalité provenant de la définition de k#

i et du lemme1.4.2. Pour l’action deD

y, on fait de même, tout comme pour calculer les actions deD

x etD

y

sur la représentationL

i.

Soient maintenant 1≤ i < j ≤ n et calculons l’action de Dx surLi , j :

ρi , j(D x) = Xd− Yd d d−1r=1 crr i 0 0 ζr j  −X(Xd− Yd) d c0 d−1k=0 1 X − ζkY  0 ζk(d −(j −i )) ζk(j −i ) 0  =  (Xd− Yd)k# i −c0Xd−( j −i )Y j−i −c0Xj−iYd−( j −i ) (Xd− Yd)k# j  , en utilisant à nouveau la définition de k#

i et k#

j et le lemme1.4.2. On fait alors de même pourD

y.

Les représentations de dimension 2 ont alors un comportement très différent selon si

c0s’annule ou pas.

1.4.1 Le cas c

0

= 0

Hypothèse. On suppose ici que c0= 0.

Comme toutes les matrices sont diagonales, il est immédiat queLi ≃ L

i et queLi , j ≃ ˜

Li , j⊕ ˜Lj ,i, où ˜Li , jest la représentation de dimension 1 sur laquelleD

xagit par(Xd−Yd)k#

i

etD

y agit par(Xd− Yd)k#

j. Remarquons alors queLin’est autre que ˜Li ,i. De plus, on a un isomorphisme entre ˜Li , jet ˜Lp ,qsi et seulement si k#

i = k#

pet k#

j = k#

q. On définit alors une relation d’équivalence sur l’ensemble{1, . . . , d } par i ∼ j si et seulement si ki#= k#

j. Les modules simples de C(V ) Gauc(d ,2) sont alors paramétrés par les paires de classes d’équivalences de cette relation : siO et Osont deux classes d’équivalences, un représentant de la classe d’isomorphie correspondante est ˜Li , j avec i ∈ O et j ∈ O.

Proposition 1.4.4. PourO une classe d’équivalence pour la relation ∼, le caractère

γO ,O = i∈O i+ χ i) + i , j∈O i<j 2χi , j

est un caractère c -cellulaire.

PourO et Odeux classes d’équivalences distinctes pour la relation∼, le caractère

γO ,O′= i∈O , j ∈O i<j χi , j+ i∈O , j ∈O i>j χj ,i

30 Chapitre 1. Familles de Calogero-Moser et caractères cellulaires

est un caractère c -cellulaire.

De plus, tous les caractères c -cellulaires sont égaux à unγO ou à unγO ,O′

Remarque 1.4.5. Toutes les représentations simples de C(V ) Gauc(d ,2) sont absolument simples dans ce cas, l’algèbre est déployée.

1.4.2 Le cas c

0

̸= 0

Hypothèse. On suppose ici que c0̸= 0. Les matrices donnant l’action deD

xetD

y sur la représentationLi , j n’étant plus diago-nales, les modules simples de C(V ) Gauc(d ,2) vont s’obtenir en trigonalisant ces matrices. On remarque que les matricesρi , j(D

x) et ρi , j(D

y) ont même trace et même déterminant, donc leurs polynômes caractéristiques sont égaux. On n’étudie alors que la matrice don-nant l’action deD x, ρi , j(D x) =  (Xd− Yd)k# i −c0Xd−( j −i )Y j−i −c0Xj−iYd−( j −i ) (Xd− Yd)k# j  .

Son polynôme caractéristique est

t2− (Xd− Yd)(k#

i + k#

j)t + (Xd

− Yd)2ki#kj#− c02XdYd, et est scindé dans C(V ) si et seulement son discriminant

(Xd − Yd)2(k# i + k# j)2 − 4ki#k#j(Xd − Yd)2+ 4c2 0XdYd= (k# i − k#j)2X2d+ 2(2c2 0 − (ki#− k#j)2)XdYd+ (k# i − k#j)2Y2d

est un carré dans C(V ), ce qui est équivalent à être un carré dans C[V ]. Ce polynôme ho-mogène de degré 2 en Xd et Yd est alors un carré si et seulement si k#

i = k#

j et d est pair ou

c0= ±(k#

i − k#

j) (rappelons que c0̸= 0). Dans le cas où k#

i = k#

j et d est pair, les deux valeurs propres de la matriceρi , j(D

x) sont (Xd − Yd)k# i + c0Xd/2Yd/2 et (Xd − Yd)k# i − c0Xd/2Yd/2, et puisque c0̸= 0, elles sont différentes. Par suite la matrice ρi , j(D

x) est diagonalisable dans C(V ) et des vecteurs propres associés aux deux valeurs propres ci-dessus sont

(Xd/2−(j −i ),−Yd/2−(j −i )) et (Xd/2−(j −i ), Yd/2−(j −i )). Dans cette base, les matricesρi , j(D

x) et ρi , j(D

y) sont diagonales et respectivement égales à diag((Xd − Yd)k# i + c0Xd/2Yd/2,(Xd − Yd)k# i − c0Xd/2Yd/2) et diag((Xd − Yd)k# i − c0Xd/2Yd/2,(Xd − Yd)k# i + c0Xd/2Yd/2).

1.4. Quand n= 2 31

Dans ce casLi , j≃ Li , j+ ⊕ L

i , j avecLi , j+ ̸≃ L

i , j puisque c0̸= 0. Les deux représentations non isomorphes de dimension 1 ainsi obtenues ne sont pas la restriction d’une représentation de C(V )G (d , 1, 2) à l’algèbre de Gaudin.

Traitons le cas où c0= k#

i − k#

j. Les deux valeurs propres de la matriceρi , j(D

x) sont

ki#Xd− k#jYd et k#jXd− ki#Yd. Puisque c0 est non nul, k#

i ̸= k#

j et ces deux valeurs propres sont distinctes : la matrice

ρi , j(D

x) est diagonalisable dans C(V ). Des vecteurs propres associés à ces deux valeurs propres sont

(Xd−( j −i ),−Yd−( j −i )) et (Y j−i, X j−i). Dans cette base, les matricesρi , j(D

x) et ρi , j(D

y) sont diagonales et respectivement égales à diag(k# iXd− k#jYd, k#jXd− ki#Yd) et diag(k# jXd− ki#Yd, ki#Xd− kj#Yd). On obtient alors un isomorphismeLi , j≃ L

j ⊕ Li. Enfin, le cas où c0= k#

j − k#

i s’obtient de manière similaire. Les deux valeurs propres de la matriceρi , j(D

x) sont

ki#Xd− k#jYd et k#jXd− ki#Yd. Puisque c0 est non nul, k#

i ̸= k#

j et ces deux valeurs propres sont distinctes : la matrice

ρi , j(D

x) est diagonalisable dans C(V ). Des vecteurs propres associés à ces deux valeurs propres sont

(Xd−( j −i ), Yd−( j −i )) et (Y j−i,−Xj−i). Dans cette base, les matricesρi , j(D

x) et ρi , j(D

y) sont diagonales et respectivement égales à diag(k# iXd− k#jYd, k#jXd− ki#Yd) et diag(k# jXd− ki#Yd, ki#Xd− kj#Yd). On obtient alors un isomorphismeLi , j≃ Lj ⊕ L

i.

En ce qui concerne les isomorphismes entre les représentations obtenues comme res-trictions, ils sont décrits comme suit :

— Li≃ Lj si et seulement si k# i = k# j — L i ≃ L j si et seulement si k# i = k# j, — si c2 0 ̸= (k# i −k# j)2et c2 0 ̸= (k# p−k# q)2alorsLi , j≃ Lp ,q si et seulement si k# i = k# pet k# j = k# q ou ki#= k# q et k#j = k# p, — si d est pair, k# i = k# j et k# p= k# q,Li , j+ ≃ Lp ,q+ si et seulement si k# i = k# p,L i , j≃ L p ,q si et seulement si k# i = k# p.

On définit à nouveau une relation d’équivalence sur{1, . . . , d } par i ∼ j si et seulement si k#

i = k#

j. Deux classes d’équivalencesO et Osont dites liées si c2 0 = (k#

i − k#

j)2pour i ∈ O et j∈ O.

32 Chapitre 1. Familles de Calogero-Moser et caractères cellulaires

Proposition 1.4.6. PourO une classe d’équivalence pour la relation ∼, le caractère

γO = i∈O €χi+ j∈O′ j<i χj ,i+ j∈O′ j>i χi , j Š

est un caractère c -cellulaire, oùOest une classe d’équivalence pour la relation∼ telle que

k#

i − k#

j = c0pour tout i ∈ O et j ∈ O(la seconde somme étant vide si une telle classe n’existe pas).

PourO une classe d’équivalence pour la relation ∼, le caractère

γ O = i∈O €χ i+ j∈O′ j<i χj ,i+ j∈O′ j>i χi , j Š

est un caractère c -cellulaire, oùOest une classe d’équivalence pour la relation∼ telle que

k#

j − k#

i = c0pour tout i ∈ O et j ∈ O(la seconde somme étant vide si une telle classe n’existe pas).

PourO et Odeux classes d’équivalence pour la relation∼ non liées, le caractère

γO ,O′= i∈O , j ∈O i<j χi , j+ i∈O , j ∈O i>j χj ,i

est un caractère c -cellulaire.

PourO une classe d’équivalence pour la relation ∼ de cardinal supérieur ou égal à deux,

le caractère

γO ,O =

i , j∈O

i<j

χi , j

est un caractère c -cellulaire.

De plus, tous les caractères c -cellulaires sont égaux à unγO, à unγ

O, à unγO ,O′ou à un γO ,O.

Remarque 1.4.7. Dans le cas où c0̸= 0, l’algèbre C(V ) Gauc(d ,2) n’est pas nécessairement déployée : il peut exister des représentations irréductibles de dimension 2 bien que l’al-gèbre soit commutative.

1.4.3 Comparaison avec les caractères constructibles

Hypothèses. Dans cette partie, on suppose que c0 ̸= 0 et que pour tout 1≤ i ≤ d , k#

i est un multiple entier de c0. On suppose de plus que : k# 1 c0k # 2 c0 ≤ · · · ≤ k # d c0. Posons alors r= −c−1 0 (k#

1, k2#, . . . , kd#) le d -uplet décroissant d’entiers ainsi

obtenu.

Le but est de maintenant relier les caractères c -cellulaires obtenus à la proposition1.4.6 aux caractères constructibles associés au paramètre r de la définition1.3.2, en utilisant la bijection déjà décrite entre d -symboles de hauteur 2 et d -partitions de 2.

1.4. Quand n= 2 33

Proposition 1.4.8. L’ensemble des caractères c -cellulaires est égal à l’ensemble des caractères

constructibles associés au paramètre r.

Démonstration. On reprend les notations de la partie1.3.4, notamment la suite d’entiers (ij)−1≤ j ≤p +1 et les notations pour les symboles. L’orbite pour la relation∼ contenant i est {1 ≤ j ≤ d | rj−1= ri−1}. Ce sont alors exactement les ensembles Oj = {ij−1+2,ij+3,...,ij+1} pour 0≤ j ≤ p , et k#prend la valeur k#

ij+1= −c−1

0 rij−1sur cette orbite. Les orbitesOj etOl

sont alors liées si et seulement si(k#

ij+1− k#

il+1)2= c2

0 ce qui est équivalent à|i − j | = 1 et (rij− ril)2= 1.

Supposons queΣ = Sik. Le caractère constructible associé àΣ est

γΣ= ¨∑ik i=ik−1+1€χSi+ ∑ik−1 j=ik−2χSi , j Š si rik−1= rik+ 1, ∑ik i=ik−1+1χSi sinon.

Si rik−1 ̸= rik+ 1, on retrouve le caractère c -cellulaire γOk puisque la représentation corres-pondant au symbole Siest la représentationχi+1. Si rik−1= rik+1 ceci signifie que les orbites Ok−1etOk sont liées et que ki#

k+1− k#

ik−1+1= c0. Le caractèreγΣest alors aussi le caractère c -cellulaireγOk.

Supposons queΣ = Sik,il. Le caractère constructible associé àΣ est

γΣ= ¨∑ik i=ik−1+1€χS i+ ∑il j=il−1χSi , j Š si rik = ril+ 1, ∑ik i=ik−1+1χSi sinon.

Si rik = ril + 1 alors l = k + 1 et ceci signifie que les orbites Ok et Ok+1 sont liées et que

k#

1+ik+1− k#

1+ik = c0. Le caractèreγΣest alors égal au caractère c -cellulaireγ

Ok. Si rik̸= ril+ 1 le caractère constructibleγΣest égal caractère c -cellulaireγOk,Ol.

Supposons queΣ = Sik−1,ik avec ik− ik−1≥ 2. L’orbite Ok est alors de cardinal supérieur ou égal à 2. Le caractère constructible associé àΣ est

γΣ=

ik−1+1≤i <j ≤ik

χSi , j,

et est égal au caractère c -cellulaireγOk,Ok. Enfin, supposons queΣ = S

ik avec rk− rk+1≥ 2, ce qui signifie que les orbites Ok etOk+1

ne sont pas liées puisqu’alors|k#

1+ik− k#

1+ik+1| ≥ 2|c0|. Le caractère constructible associé à Σ est γΣ= iki=ik−1+1 χS i, et est égal au caractère c -cellulaireγ

Ok.

Tous les caractères constructibles sont des caractères c -cellulaires. Réciproquement, il est clair que tous les caractères c -cellulaires apparaissent comme caractère constructible.

On propose la conjecture suivante en ce qui concerne les caractères c -cellulaires de

G(d ,1,n), corroborrée par le résultat précédent et par des calculs effectués informatique-ment en rang supérieur.

34 Chapitre 1. Familles de Calogero-Moser et caractères cellulaires

Conjecture 1.4.9. Soit c : R´ef(G (d ,1,n)) → C invariante par conjugaison. On note toujours

c0 = cs1 et ki = 1

d

d−1

j=1ζj(1−i )csj

0, et on suppose que pour tout 1≤ i ≤ d , k#

i est un multiple entier de c0et que k# 1 c0k # 2 c0 ≤ · · · ≤ k # d c0. Soit r= −c−1 0 (k# 1, k# 2, . . . , k#

d) le d -uplet décroissant d’entiers ainsi obtenu.

Alors l’ensemble des caractères c -cellulaires coïncide avec l’ensemble des caractères r-constructibles.

35

Chapitre

2

Données modulaires associées aux

groupes de réflexions complexes

La notion de donnée N-modulaire se retrouve chez Lusztig, lors de l’étude des carac-tères unipotents des groupes réductifs sur des corps finis. Dans[Lus94], il en donne une définition en terme de représentation du groupe P S L2(Z), et la définition que l’on considé-rera sera moins stricte : certains coefficients entiers positifs pourront être négatifs. On pré-férera travailler avec une version faisant apparaître des représentations de S L2(Z), comme dans[Gan05].

Une grande source de données Z-modulaires provient d’une généralisation de la théo-rie de Lusztig à certains groupes de réflexions complexes. Une grande partie de la combina-toire des groupes de Weyl et de la théorie des représentations d’un groupe réductif sur un corps fini associé se prolongent à certains groupes de réflexions complexes et on dispose de données Z-modulaires. Les catégories modulaires fournissent également des données N-modulaires : ce sont ces catégories abéliennes et monoïdales, munies de tressage et d’une notion de dualité vérifiant encore quelques conditions supplémentaires[EGNO15, Defini-tion 8.13.4]. On reviendra sur cette notion dans le chapitre3.

On commence par donner la définition d’une donnée Z-modulaire, ainsi que celle de l’algèbre de fusion associée. On considère ensuite la combinatoire des “caractères unipo-tents” du groupe de réflexions complexes imprimitif G(d ,1,n), en insistant sur les données Z-modulaires qui y sont attachées. Enfin, on termine en donnant des exemples liés aux groupes de réflexions complexes exceptionnels. Le cas des groupes de la forme G(d ,d ,n) n’est pas traité, excepté l’exemple des groupes diédraux dans le chapitre5.

2.1 Données Z-modulaires

2.1.1 Donnée modulaire et algèbre de fusion associée

Commençons par donner la définition d’une donnée modulaire. On trouvera des défi-nitions similaires dans[Lus94] ou dans [Gan05].

Définition 2.1.1. Une donnée N-modulaire (resp. Z-modulaire) est un quadruplet (I ,S ,

T, i0) où I est un ensemble fini I , S ∈ MI(C) est une matrice carrée, T ∈ MI(C) est une matrice diagonale et i0∈ I est un élément dit spécial tels que

36 Chapitre 2. Données modulaires associées aux groupes de réflexions complexes

1. S est symétrique et unitaire,

2. pour tout i ∈ I , le coefficient Si0,iest non nul,

3. S et T définissent une représentation projective de S L2(Z), c’est-à-dire que S4 = id,

S2et T commutent et il existeγ ∈ C tel que (ST )3= γS2, 4. pour tous i , j , k∈ I , Ni , jk = l∈I Sl ,iSl , jS¯l ,k Sl ,i0 ∈ N (resp. ∈ Z). Les entiers Nk

i , j sont appelés les constantes de structure associées à la donnée modulaire. Comparativement à la définition[Lus94, 1.1] de Lusztig, on ne demande pas l’existence d’involutions compatibles à la conjugaison complexe. Notre définition se rapproche plus de celle de[Gan05, Definition 1], sauf que l’on n’impose pas la positivité des coefficients de la ligne spéciale.

Lemme 2.1.2. Soit(I ,S,T,i0) une donnée Z-modulaire. Alors (ST−1)3= γ−1id.

Réciproquement, si(I ,S,T,i0) est un quadruplet satisfaisant tous les axiomes d’une

don-née Z-modulaire, sauf (ST )3= γS2que l’on remplace par(ST−1)3= γid alors (I ,S,T,i0) est

une donnée Z-modulaire.

Démonstration. En prenant l’inverse le la relation(ST )3= γS2, on obtient(T−1S3)3= γ−1S2

puisque S4= id. Il reste à simplifier à droite par S2et à utiliser le fait que S2et T commutent pour conclure. La seconde partie se fait de même.

L’intégralité des constantes de structure permet alors de définir l’anneau de fusion as-socié à une donnée modulaire.

Définition 2.1.3. Soit(I ,S,T,i0) une donnée modulaire. L’anneau de fusion associé AS est l’anneau unitaire associatif libre comme Z-module, disposant d’une base B = (bi)i∈I telle que la multiplication des éléments de la base vérifie

bi· bj =

k∈I

Ni , jk bk

pour tous i , j∈ I .

Remarque 2.1.4. Pour définir un tel anneau, on a seulement besoin d’une matrice S unitaire

avec une ligne spéciale non nulle. Dans le chapitre5, on considérera de tels anneaux. L’élément neutre est alors bi0 puisque Nk

i0, j = 1 = Nk

j ,i0 pour tous j , k ∈ I . L’associativité découle de l’unitarité de S : il suffit de montrer pour tous i , j , k , m∈ I l’égalité

l∈I

Ni , jl Nl ,km =

l∈I

Ni ,lmNj ,kl , et ces expressions sont toutes deux égales à

p∈I

Sp ,iSp , jSp ,kS¯p ,m

(Sp ,i0)2 .

La matrice S contient de nombreuses informations sur l’anneau AS, comme en atteste le lemme suivant.

2.1. Données Z-modulaires 37

Lemme 2.1.5. Soit(I ,S,T,i0) une donnée modulaire et AS l’anneau de fusion associé. Pour tout i ∈ I le morphisme de Z-modules si: AS → C défini sur la base par bj 7→ Si , j

Si ,i0 est un morphisme d’anneaux.

Démonstration. Il suffit de montrer que Si , jSi ,k = ∑l∈INl

j ,kSi ,i0Si ,l pour tous j , k∈ I , ce qui découle de l’unitarité de S et de la définition des constantes de structure :

l∈I Nj ,kl Si ,i0Si ,l = l ,m∈I Sm , jSm ,kS¯m ,l Sm ,i0 Si ,i0Si ,l= m∈I Sm , jSm ,k Sm ,i0 Si ,i0δm ,i= Si , jSi ,k.

2.1.2 Modification d’une donnée modulaire

On sera amené, par la suite, à modifier des données modulaires en conjuguant les ma-trices S et T par une matrice diagonale à coefficients dans±1. Une donnée N-modulaire peut ne pas rester N-modulaire après un tel changement, mais reste quand même toujours une donnée Z-modulaire.

Remarque 2.1.6. Il existe néanmoins des données Z-modulaires qui ne peuvent pas être

rendues N-modulaires par une transformation de ce type [Cun07, Example 5].

Au niveau de l’algèbre de fusion, cette modification revient à changer des signes de la base. En effet, si S et Ssont reliées par S= DSD−1où D = diag((di)i∈I) avec di ∈ {±1}, les constantes de structure Nk

i , j de AS et les constantes de structures(N)k

i , j de ASvérifient (N)k

i , j= didjdkdi0Ni , jk ,

pour tous i , j , k∈ I . Le morphisme de Z-modules AS→ ASdéfini par b

i 7→ didi0biest alors un isomorphisme d’anneaux.

Remarque 2.1.7. Lorsque l’on dispose d’une modification d’une donnée Z-modulaire (I ,S, T, i0) qui est une donnée N-modulaire, il existe alors une base (b

i)i∈I de ASobtenue par des changements de signes de la base(bi)i∈I telle que les constantes de structures de l’anneau

AS relativement à la nouvelle base(b

i)i∈I soient entières positives.

On peut également multiplier la matrice S d’une donnée Z-modulaire par une racine quatrième de l’unité sans changer l’algèbre du fusion associée. Une autre manière de mo-difier une donnée modulaire est de changer l’élément spécial i0 par j0 vérifiant lui aussi

Sj0,i ̸= 0 pour tout i ∈ I . Une donnée modulaire (I ,S, T, i0) étant fixée, on se demande si (I ,S,T, j0) est également une donnée modulaire. Pour spécifier le choix de la ligne spéciale dans les constantes de structure, on notei0Nk

i , j les constantes de structures calculées avec l’élément spécial i0.

Lemme 2.1.8. Soit(I ,S,T,i0) une donnée Z-modulaire et j0tel que Sj0,i ̸= 0 pour tout i ∈

I . Pour tout i ∈ I on définit la matricei0Ni par (i0Ni)j ,k = i0Ni ,kj et de même pour j0Ni en remplaçant i0par j0. On a alors, pour tout i ∈ I

38 Chapitre 2. Données modulaires associées aux groupes de réflexions complexes

Démonstration. Il s’agit à nouveau d’un simple manipulation algébrique utilisant les

hy-pothèses sur S . D’après le lemme2.1.5, on a, pour j , k∈ I

j0Ni , jk = l∈I Sl ,iSl , jS¯l ,k Sl , j0 = l ,m∈I i0Ni , jmSl ,i0Sl ,mS¯l ,k Sl , j0 = m∈I i0Ni , j jm 0Nik 0,m, ce qui est bien la relation attendue.

En changeant d’élément spécial, on n’obtient donc pas nécessairement une donnée Z-modulaire. En supposant que (I , S , T , i0) soit une donnée Z-modulaire, le quadruplet (I ,S,T, j0) est une donnée Z-modulaire si et seulement si la matrice carréej0Ni0 appartient àMI(Z), ce qui est équivalent à demander à ce que la matricei0Nj0 appartienne à G LI(Z). Cette dernière est néanmoins toujours dans G LI(Q), puisquej0Ni0i0Nj0= id =i0Nj0j0Ni0.

Proposition 2.1.9. Soient(I ,S,T,i0) une donnée Z-modulaire et j0∈ I tel que Sj0,i̸= 0 pour

tout i ∈ I . On notei0ASl’algèbre de fusion associée à la donnée(I ,S,T,i0), dont on note la base

associée par(i0bi)i∈I. On définitj0AQ

S comme la Q-algèbre de base (j0bi)i∈I et de multiplication donnée sur la base par les constantes de structures associées au quadruplet(I ,S,T, j0).

L’élémentj0bi0est inversible dansj0AQ

S, son inverse appartient au Z-module engendré par la base(j0bi)i∈I et on a un isomorphisme d’algèbresi0ASZQ →j0AQ

S donné pari0bi7→j0bi−1

0 j0bi. Démonstration. Le lemme2.1.8implique que l’élémenti∈I i0Ni

j0, j0j0biest l’inverse dej0bi0. En effet, ∑ i∈I i0Nji 0, j0j0bi j0bi0 = k∈I ‚ ∑ i∈I i0Nji 0, j0j0Nik 0,i Œ j0bk = k∈I j0Njk 0, j0j0bk=j0bj0.

En ce qui concerne l’isomorphisme d’anneaux, il suffit de montrer que pour tous i , j

I ,k∈I j0Ni , j jk 0bk= k∈I i0Ni , j jk 0bi0j0bk, ce qui est à nouveau une conséquence du lemme2.1.8:

k∈I j0Ni , j jk 0bk= k ,l∈I i0Ni , j jl 0Nik 0,l j0bk = l∈I i0Ni , jl ‚ ∑ k∈I j0Nik 0,l j0bk Œ = l∈I i0Ni , j jl 0bi0j0bl.

2.1.3 Produit tensoriel de données modulaires

Si on se donne deux données Z-modulaires (I1,S1, T1, i1) et (I2,S2, T2, i2), on en définit une troisième(I ,S,T,i0) où I = I1× I2, les matrices S et T sont obtenues comme produit de Kronecker S= S1⊗ S2et T = T1⊗ T2et l’élément spécial i0est le couple(i1, i2).

Lemme 2.1.10. Le quadruplet(I ,S,T,i0) défini ci-dessus est une donnée Z-modulaire et son

algèbre de fusion AS est isomorphe au produit tensoriel AS1ZAS2 des algèbres de fusion des données Z-modulaires (I1,S1, T1, i1) et (I2,S2, T2, i2).