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Catégories légèrement dégénérées

3.2.5 Comparaison des deux données modulaires

On va maintenant comparer les deux données modulaires, en faisant de sorte que l’ob-jet unité V0,0 corresponde au symbole spécial fsp. Considérons la bijectionϕg0 composée de la bijectionϕ avec la translation par (−g0, 0) :

f 7→ ij=0 f(k − 1 − j ) − i−1j=0 kj(f ) ! 0≤i ≤k −1 − g0, (ki(f ) − f (k − 1 − i )) 0≤i ≤k −1 ! .

L’image du symbole spécial parϕ est ((i +1)0≤i ≤k −1, 0) donc on choisit pour g0l’élément (1,2,...,k) de (Z/d Z)k.

Théorème 3.2.10. La catégorie de fusion D((Z/d Z)k)-mod munie de la structure pivotale

ag0 est une catégorification de la donnée modulaire associée à la familleF .

Plus précisément, la S -matrice renormalisée ˜S et la matrice S sont reliées par

˜

Sϕg0(f ),ϕg0(g )= sgn(f )sgn(g )Sf ,g,

pour tous f , g ∈ Ψ#(Y ,π), avec sgn(f ) = (−1)k−1

i=0ki(f )ϵ(f ), et le twist θg0 et la valeur du Frobe-nius sont reliés par

g0)ϕg0(f )= Fr(f ),

pour tout f ∈ Ψ#(Y ,π).

Remarque 3.2.11. Le symbole cospécial fcospcorrespond à l’objet 1. En effet, dans ce cas le symbole cospécial est donné par

fcosp(i ) = d − k + i , pour tous 0 ≤ i < k et ki(fsp) = d − i − 1, pour tous 0 ≤ i ≤ k − 1, et ainsi∑i

j=0fcosp(k − 1 − j ) − ∑i−1

j=0kj(fcosp) = −i − 1 et ki(f ) − f (k − 1 − i ) = 0 pour tout i , ce qui donne bienϕg0= (−2g0, 0).

Plus généralement, on aVϕg0(f )= Vϕg0(f ).

3.3 Catégories légèrement dégénérées

On commence par rappeler la notion de super-espace vectoriel, en soulignant les dif-férences entre deux structures pivotales existantes. On s’intéresse ensuite aux catégories légèrement dégénérées et on montre que les S et T -matrices fournissent des données Z-modulaires.

3.3.1 Les super-espaces vectoriels

Un super-espace vectoriel est un espace vectoriel Z/2Z-gradué, c’est-à-dire un espace vectoriel V muni de deux sous-espaces V0et V1tels que V = V0⊕V1. Pour v ∈ V homogène, on notera|v | son degré, c’est à dire |v | = i si v ∈ Vi. Les éléments de V0sont dits pairs tandis que ceux de V1sont dits impairs.

Une application linéaire f : V → W entre deux super-espaces vectoriels est dite paire si

68 Chapitre 3. Catégorification de données Z-modulaires

des applications linéaires de V dans W d’une structure de super-espace vectoriel de sorte que pour f et g homogènes et composables|g ◦ f | = |g | + |f |.

Le produit tensoriel de deux super-espaces vectoriel V et W est encore muni d’une graduation par Z/2Z, à savoir (V ⊗W )0= (V0⊗W0)⊕(V1⊗W1) et (V ⊗W )1= (V0⊗W1)⊕(V1⊗W0). On définit le produit tensoriel de deux application homogènes f : V → Vet g : W → W par

(f ⊗ g )(v ⊗ w ) = (−1)|v ||g |f(v ) ⊗ g (w ), pour v et w homogènes, de sorte que|f ⊗ g | = |f | + |g |.

Si on considère la catégorie dont les objets sont les super-espaces vectoriels de dimen-sion finie et les morphismes sont toutes les applications linéaires, on n’obtient pas une ca-tégorie monoïdale, la relation

(g ◦ f ) ⊗ (g◦ f) = (−1)|f ||g′|(g ⊗ g) ◦ (f ⊗ f)

étant vérifiée et⊗ n’est pas un bifoncteur. Néanmoins, si on se restreint aux morphismes pairs, on obtient une catégorie monoïdale, que l’on notera sVect.

La catégorie sVect est de fusion, admet deux classes d’isomorphismes d’objets simples. Un premier représentant est l’espace noté |1|0correspondant à un super-espace concentré en degré 0 et de dimension 1 : c’est l’unité pour⊗. Le second représentant est l’espace noté |0|1correspondant à un super-espace concentré en degré 1 et de dimension 1. Le dual à gauche de V = V0⊕ V1est l’espace des formes linéaires V → |1|0,(V)0étant le sous-espace des formes linéaires paires et (V)1 celui des formes linéaires impaires. Les morphismes d’évaluation et de coévaluation sont les mêmes que pour un espace vectoriel.

La catégorie sVect peut être munie de deux structures pivotales distinctes. La première associe à v∈ V l’élément ϕ 7→ (−1)(|ϕ|+1)|v |ϕ(v ) de V∗∗. Si f : V → V , on peut vérifier que les traces quantiques positive et négative de f sont égales à

Tr±V(f ) = trV0(f|V0) + trV1(f|V1),

tr désignant la trace usuelle d’un endomorphisme d’un espace vectoriel. La dimension quantique d’un super-espace vectoriel V est alors sa dimension en tant qu’espace vecto-riel, et en particulier est toujours positive.

La seconde change le signe relatif au degré des éléments : elle associe à v ∈ V homogène l’élémentϕ 7→ (−1)|ϕ||v |ϕ(v ) de V∗∗. Si f : V → V , on peut vérifier que les traces quantiques positive et négative de f sont égales à

Tr±V(f ) = trV0(f|V0) − trV1(f|V1),

qui est parfois appelée super-trace. La dimension quantique d’un super-espace vectoriel

V = V0⊕V1, que l’on note sdim, est alors sdim(V ) = dim(V0)−dim(V1). Elle peut bien entendu être négative.

Enfin, la catégorie sVect est tressée, et est même symétrique. Le tressage tient compte de la graduation : pour v ∈ V et w ∈ W homogènes

cV ,W(v ⊗ w ) = (−1)|v ||w |w⊗ v.

Le morphisme de Drinfeld associe alors à v ∈ V homogène l’élément ϕ 7→ (−1)|ϕ||v |ϕ(v )

de V∗∗. Siθ est le twist associé à la première structure pivotale, on a θ|1|0 = 1 et θ|0|1= −1. Siθ est le twist associé à la seconde structure pivotale, on a θ|1|0= θ|0|1= 1. Pour les deux structures pivotales, on remarque que dim(|0|1|0|1= −1.

3.3. Catégories légèrement dégénérées 69

3.3.2 Catégories légèrement dégénérées et S -matrice

Dans la partie3.1.4, on a étudié des catégories avec un centre symétrique le plus pe-tit possible, c’est-à-dire égal à la catégorie des espaces vectoriels. Ici, on s’intéresse à des catégories avec un centre symétrique un peu plus gros, égal à la catégorie sVect.

Définition 3.3.1. SoitC une catégorie de fusion tressée. On dit que C est légèrement

dégé-nérée si son centre symétrique est égal à la catégorie sVect des super-espaces vectoriels.

On fixe désormais une catégorieC de fusion tressée et légèrement dégénérée, que l’on suppose également pivotale. On noteϵ l’objet transparent correspondant au super-espace

|0|1. En particulier,ϵ ⊗ϵ ≃ 1. On ne suppose rien quant à la structure pivotale induite sur le

centre symétrique. Puisqueϵ ⊗ ϵ ≃ 1, les deux dimensions quantiques de ϵ sont égales, et

on note dim(ϵ) ∈ {±1} leur valeur commune. On dispose toujours de diverses S-matrices, et pour X simple, les morphismes sX+et s

X sont toujours des caractères de Gr(C ).

Lemme 3.3.2. SoitC une catégorie de fusion tressée, pivotale et légèrment dégénérée. Pour

tout objet simple X , sX+et s

X sont des caractères de l’anneau quotient Gr(C )/([ϵ]−dim(ϵ)[1]).

Démonstration. Commeϵ est dans le centre symétrique, le double tressage de ϵ avec

n’im-porte quel objet deC est l’identité. Ainsi SW ,++ϵ= dim+(W )dim(ϵ) pour W simple et on trouve bien que sW++(ϵ) = dim(ϵ)s++

W (1).

L’objetϵ étant inversible, la tensorisation par ϵ induit une involution sur Irr(C ). En vertu

de[EGNO15, Proposition 9.15.4], pour tout objet simple X de C , X et ϵ ⊗ X ne sont pas isomorphes. La question suivante est soulevée dans[BGH+17, Question 2.8], dans un cadre où l’objetϵ n’est pas nécessairement transparent.

Conjecture 3.3.3. SoitC une catégorie de fusion pivotale, tressée et légèrement dégénérée.

Alors pour tous objets simples X , Y , Z deC , on a NZ

X ,YNX ,Yϵ⊗Z = 0, ϵ désignant un générateur

du centre symétrique.

On choisit désormais J ⊂ Irr(C ) un système de représentants sous l’action de tensori-sation parϵ, de sorte que 1 ∈ J . L’anneau Gr(C ) est un Z-module libre de base Irr(C ). La

tensorisation parϵ n’ayant pas de point fixe, l’anneau quotient Gr(C )/([ϵ] − dim(ϵ)[1]) est

également un Z-module libre, une base étant donnée par J , donc le rang de cet anneau est la moitié de celui de Gr(C ). Pour X , Y ,Z ∈ J les constantes de structure de cet anneau quotient sont

s NX ,YZ = NZ

X ,Y + dim(ϵ)Nϵ⊗Z

X ,Y . On remarque également que sX+= s+

ϵ⊗X pour tout objet simple X . Une application directe de[EGNO15, Theorem 8.20.7] montre que pour X et Y simples l’égalité entre caractères

sX+= s+

Y est vérifiée si et seulement si X ≃ Y ou X ≃ ϵ ⊗ Y . La S-matrice S++décrit alors tous les caractères de Gr(C )/([ϵ] − dim(ϵ)[1]).

Ayant fait un choix J de représentants de Irr(C ) sous l’action de tensorisation par ϵ, on peut à nouveau définir une involution ¯ , non par sur Irr(C ) mais sur J . Pour X ∈ J , ¯X est

l’unique élément de J tel que les caractères sX¯ et Y 7→ sX+(Y) sont égaux.

Proposition 3.3.4. SoitC une catégorie de fusion pivotale, tressée et légèrement dégénérée.

Si dim(ϵ) = 1 alors l’objet ¯1 est inversible. Si dim(ϵ) = −1 et si la conjecture3.3.3est vraie alors l’objet ¯1 est inversible.

70 Chapitre 3. Catégorification de données Z-modulaires

De plus, sous l’hypothèse d’inversibilité de ¯1, pour X ∈ J , on a ¯X ≃ X⊗ ¯1 ou ¯X ≃ ϵ⊗X⊗ ¯1

selon les choix faits pour l’ensemble J .

Démonstration. Similairement à la preuve de la proposition3.1.17, on montre que pour tout objet simple X deC , on a sX+(¯1 ⊗ ¯1) = |¯1|2. Ainsi dans | ⊗ZGr(C )/([ϵ] − dim(ϵ)[1]) on a l’égalité[¯1 ⊗ ¯1] = |¯1|2. De là, il existe des scalaires(nX)X∈J tels que dans | ⊗ZGr(C ) on ait

[¯1 ⊗ ¯1] = |¯1|2[1] +

X∈J

nX([X ] − dim(ϵ)[ϵ ⊗ X ]).

Ces scalaires sont alors entiers vu la décomposition de[¯1 ⊗ ¯1] dans Gr(C ). Or N1

X ,X = 1 pour tout objet simple X et NX ,Xϵ = 0 puisque la tensorisation par ϵ n’a pas de point fixe sur l’ensemble des objets simples. On déduit donc que n1= 0 et que |¯1|2= 1 de sorte que

[¯1 ⊗ ¯1] = [1] +

X∈J \{1}

nX([X ] − dim(ϵ)[ϵ ⊗ X ]),

Si dim(ϵ) = 1 comme [¯1 ⊗ ¯1] est dans le monoïde engendré par Irr(C ), le coefficient devant X ∈ J , X ̸= 1, donne nX ≥ 0 et le coefficient devant ϵ⊗X donne nX ≤ 0. D’où ¯1⊗¯1≃ 1 et ¯1 est bien inversible.

Si dim(ϵ) = −1 l’argument précédent ne permet pas de conclure. La validité de la conjec-ture3.3.3implique alors que nX = 0 pour tout X ∈ J et donc que ¯1 est inversible.

Hypothèse. À partir de maintenant, et jusqu’à la fin du chapitre, on

sup-pose que l’objet ¯1 est inversible.

Extrayons de S++une sous-matrice carrée de rang maximal, à savoir la moitié de celui de S++. On définit S= (S++

X ,Y)X ,Y∈J de sorte que S++s’écrit, en ordonnant convenablement Irr(C ) = J ⊔ ϵ ⊗ J  S S S S  ou  S −S −S S  ,

selon si dim(ϵ) = 1 ou dim(ϵ) = −1. Un choix différent de J a pour effet de conjuguer la matrice S par une matrice diagonale avec entrées dans{±1}.

Comme dans la partie3.1.4, on définit une matrice carrée E = (EX ,Y)X ,Y∈J par EX ,Y = (dim(ϵ))δX ∗⊗¯1̸∈JδX , ¯Y. On introduit aussi la super-dimension de la catégorieC comme

sdim(C ) =

X∈J

|X |2=1

2dim(C ).

Cette dernière ne dépend pas du choix de l’ensemble J puisque|ϵ ⊗ X |2=|X |2.

Proposition 3.3.5. SoitC une catégorie de fusion pivotale, tressée et légèrement dégénérée

telle que l’objet simple ¯1 est inversible. Alors la matrice S vérifie S2= sdim(C )dim+(¯1)E .

Démonstration. Remarquons tout d’abord que siχ1et χ2 sont deux caractères de Gr(C ) tels queχ1(ϵ) = χ2(ϵ) alors

W∈J

3.3. Catégories légèrement dégénérées 71

En effet, en utilisant l’orthogonalité des caractères, 0= W∈J χ1(W )χ2(W) + W∈J χ1(ϵ ⊗ W )χ2(ϵ ⊗ W) = 2 W∈J χ1(W )χ2(W).

Comme dans la preuve de la proposition3.1.19, en utilisant le fait que pour X et Y dans

J , sX+= s+

Y si et seulement si X et Y sont égaux, on montre que(S2)X ,Y = 0 si Y ̸= ¯X et que

(S2)X , ¯X = sdim(C )dim+(¯1)s N¯1

X , ¯X. Or s NX , ¯¯1X = 1 si X⊗ ¯1 ∈ J et s NX , ¯¯1X = dim(ϵ) si X⊗ ¯1 ̸∈ J , ce qui permet de conclure.

Corollaire 3.3.6 (Formule de Verlinde). SoientC une catégorie de fusion pivotale, tressée

et légèrement dégénérée telle que l’objet ¯1 est inversible et X , Y , Z ∈ Irr(C ). Les constantes de

structure de Gr(C )/([ϵ] − dim(ϵ)[1]) sont données par

s NX ,YZ = (dim(ϵ))δZ ∗⊗1̸∈J sdim(C )dim+(¯1)W∈J SW ,XSW ,YSW , ¯Z dim+(W ) .

3.3.3 Twist dans une catégorie légèrement dégénérée

Après l’étude de la S -matrice, on étudie la T -matrice d’une catégorie légèrement dégé-nérée, que l’on définit comme la matrice diagonale T avec entrées−1

X )X∈J. Ici, on considère le twistθ associé à la structure pivotale de la catégorie C . On va maintenant faire une

hy-pothèse supplémentaire sur la structure pivotale deC , motivée par plusieurs raisons. Tout d’abord on remarque queθϵ⊗X = θϵθX et donc que siθϵ= −1, le twist dépend du choix de l’ensemble J .

Ensuite on aimerait que la relation pour X , Y ∈ Irr(C )

θXθYSX ,Y++ =

Z∈Irr(C )

NX ,YZ dim+(Z )θZ (3.7)

s’exprime avec les constantes de structure s N de l’anneau quotient Gr(C )/([ϵ]−dim(ϵ)[1]), c’est-à-dire pour X , Y ∈ J

θXθYSX ,Y =

Z∈J

s NX ,YZ dim+(Z )θZ. (3.8)

En écrivant (3.7) pour des éléments X et Y de J , on obtient

θXθYSX ,Y = Z∈Irr(C ) NX ,YZ dim+(Z )θZ = Z∈J (NZ X ,Y + dim(ϵ)θϵNX ,Yϵ⊗Z)dim+(Z )θZ = Z∈J (NZ X ,Y − NX ,Yϵ⊗Z)dim+(Z )θZ,

puisqueθϵdim(ϵ) = −1 pour les deux structures pivotales sur sVect. On obtient donc la formule (3.8) si dim(ϵ) = −1.

Enfin, on souhaite obtenir une représentation projective de S L2(Z) comme dans le cas non dégénéré. Dans le cas où θϵ = −1, on peut facilement donner un exemple où la S-matrice et la T -S-matrice ne donnent pas lieu à une représentation de S L2(Z).

72 Chapitre 3. Catégorification de données Z-modulaires

Exemple 3.3.7. Considérons la catégorie modulaire dite de VerlindeC (sl2, q) où q est une racine 16-ième de l’unité[EGNO15, Section 8.18.2]. Cette catégorie a 7 classes d’isomor-phisme d’objets simples V0 = 1,...,V6. SoitC la sous-catégorie pleine de C (sl2, q) ayant pour objets V0, V2, V4, V6; c’est une souscatégorie stable pour le produit tensoriel. La S -matrice et la T --matrice deC sont

S= ⎛ ⎜ ⎝ 1 [3] [3] 1 [3] −1 −1 [3] [3] −1 −1 [3] 1 [3] [3] 1 ⎞ ⎟ ⎠ et T = ⎛ ⎜ ⎝ 1 0 0 0 0 −i 0 0 0 0 i 0 0 0 0 −1 ⎞ ⎟ ⎠,

[3] = q−2+ 1 + q2et i = q4. Le centre symétrique deC est engendré par V6en tant que catégorie tensorielle, et c’est un objet de dimension quantique 1 et de twist−1. Le centre symétrique deC est donc égal à sVect, et les matrices S et T sont

S=  1 [3] [3] −1  et T=  1 0 0 −i  .

Conformément à3.3.5, on a bien S2= sdim(C )id mais (ST)3n’est pas un multiple de l’iden-tité.

Tout ceci motive l’hypothèse suivante.

Hypothèse. À partir de maintenant, on suppose que la structure pivotale

de la catégorieC est telle que dim(ϵ) = −1 et θϵ= 1. On définit les super-sommes de Gauss de la catégorieC par

±(C ) =

X∈J

|X |2θ±1

X =1

2τ±(C ). Commeθϵ= 1, elles ne dépendent pas du choix de l’ensemble J .

Proposition 3.3.8. SoitC une catégorie de fusion pivotale, tressée et légèrement dégénérée

telle que l’objet ¯1 est inversible. La S -matrice et le twist vérifient, pour tout Y ∈ JX∈J θXdim(X )SX ,Y = θ−1 Y dim+(Y )s τ+(C ) (3.9) etX∈J θ−1 X dim+(X )SX ,Y = θY dim+(Y )s τ(C ). (3.10) Démonstration. D’après (3.3), on a ∑ X∈Irr(C ) θXdim(X )S++ X ,Y = θ−1 Y dim+(Y )s τ+(C ). Maisθϵ⊗Xdim(ϵ ⊗ X )S++ ϵ⊗X ,Y = θXdim(X )S++ X ,Y et donc ∑ X∈Irr(C ) θXdim(X )S++ X ,Y = 2 X∈J θXdim(X )SX ,Y.

On conclut par définition de sτ+(C ). On fait de même pour la seconde assertion en partant de (3.4).

3.3. Catégories légèrement dégénérées 73

Exactement comme dans le cas non dégénéré, on montre que (cf. proposition3.1.23)

+(C )s τ(C ) = sdim(C ), (3.11) et on a également (similairement à la proposition3.1.24)θ¯1= 1.

Enfin, on termine avec l’analogue du théorème3.1.25dans le cas d’une catégorie légè-rement dégénérée, qui se montre de la même manière. On notepsdim(C ) la racine carrée positive de sdim(C ) pour un plongement |alg→ C fixé et on choisit une racine carrée de p

dim+(¯1) de dim+(¯1).

Théorème 3.3.9. SoitC une catégorie de fusion pivotale, tréssée et légèrement dégénérée

telle que ¯1 est inversible et telle que dim(ϵ) = −1 et θϵ = 1. On a (ST)3 = s τ(C )S2 et S4 = (sdim(C )dim+(¯1))2id. Ainsi

s7→p 1

dim+(¯1)psdim(C )S et t7→ T

définissent une représentation projective de S L2(Z).

Comme dans le cadre non dégénéré, la renormalisation ˜S de S est faite pour avoir ˜S4= 1. On a également(˜ST)3= s ξ(C )−1˜S et ˜ST−1= s ξ(C )1 où s ξ(C ) = p+(C )

sdim(C )

p

dim+(¯1) puisque ˜S2et T commutent.

Corollaire 3.3.10. On suppose que le corps de base est C. Soit C une catégorie de fusion

pivotale, tréssée et légèrement dégénérée telle que ¯1 est inversible et telle que dim(ϵ) = −1 et

θϵ= 1. Le quadruplet (J , ˜S,T,1) est alors une donnée Z-modulaire.

Démonstration. Il ne reste qu’à montrer que ˜S est unitaire. Puisque ˜S2est une matrice de permutation signée, il suffit de montrer que

˜SX ,Y = (−1)δY ∗⊗¯1̸∈J˜SX , ¯Y, pour tous X , Y ∈ J .

Le même raisonnement que la preuve de[ENO05, Proposition 2.12] montre que

˜SX ,Y = ˜S1,Y ˜S1,Y ˜SX,Y = ˜S1,Y ˜S1, ¯Y ˜SX , ¯Y. De là, on déduit que ˜SX ,Y =dim+(Y⊗ ¯1) dim+( ¯Y) ˜SX , ¯Y, ce qui fait apparaître le signe escompté.

On étend la définition3.1.27afin de donner un sens à la notion de catégorification de donnée Z-modulaire n’ayant pas de modification N-modulaire.

74 Chapitre 3. Catégorification de données Z-modulaires

Définition 3.3.11. On dira qu’une catégorie de fusion pivotale, tréssée et légèrement

dégé-néréeC sur C telle que ¯1 est inversible et telle que dim(ϵ) = −1 et θϵ= 1 est une catégorifica-tion de la donnée Z-modulaire (I , S, T, i0) s’il existe une matrice diagonale D = diag((di)i∈I) à coefficients dans{±1}, une bijection ϕ : I → J telle que la donnée Z-modulaire (J , ˜S, T, 1) et la donnée Z-modulaire modifiée (I , D SD−1, T, i0) coïncident à une racine quatrième de l’unitéλ près, c’est-à-dire :

ϕ(i0) = 1, Si , j= λdidj˜Sϕ(i ),ϕ(j ) et Ti= Tϕ(i ), pour tous i , j∈ I .

En particulier, lorsque la catégorie de fusion pivotale, tréssée et légèrement dégéné-rée C telle que ¯1 est inversible et telle que dim(ϵ) = −1 et θϵ = 1 est une catégorifica-tion d’une donnée Z-modulaire (I , S, T, i0), on dispose d’un isomorphisme d’anneaux AS≃ Gr(C )/([1] + [ϵ]).

3.4 Super-catégorie associée à une catégorie légèrement