• Aucun résultat trouvé

B. La prise en charge thérapeutique de l’alcoolo-dépendance 1) Généralités

3) Modalités de prise en charge 3.1 Généralités

3.2. Manifestation aiguë

3.1.3. Cas particuliers

3.1.3.1. Comorbidités psychiatriques

3.1.3.1.1. Troubles anxieux

La prise en charge se fait dès l’initiation du sevrage, ou immédiatement après celui-ci. La pharmacothérapie utilise des benzodiazépines à demi-vie longue ou des antidépresseurs de la famille des inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine.

Ils régressent le plus souvent spontanément avec la poursuite de l’abstinence mais nécessitent une évaluation à 4 semaines.

3.1.3.1.2. Troubles dépressifs

Le sevrage alcoolique occasionne des troubles dépressifs chez 80% des patients. Leur prévalence est variable selon le stade de la prise en charge. En effet, 67% des patients montrent des symptômes dépressifs au début du sevrage, et seulement 13% une fois le sevrage achevé.

Pour les patients concernés, seuls 10 à 15% des épisodes dépressifs majeurs persistent au-delà d’un mois. Il est donc préconisé de respecter un délai de 2 à 4 semaines avant l’instauration d’un traitement antidépresseur, exception faite d’une forme sévère ou de l’existence d’un risque suicidaire. Dans ce contexte, l’hospitalisation du patient peut s’imposer.

Un renforcement de l’intervention psychosociale est préconisé chez les patients présentant ce type de perturbations.

3.1.3.1.3. Troubles psychotiques

Ils sont représentés par la schizophrénie et les délires chroniques. Leur expression est liée à la dépendance à l’alcool, mais aussi à d’autres substances psychoactives.

Chez ces patients, il est préférable de réaliser le sevrage en service de psychiatrie. Le traitement antipsychotique peut être poursuivi, ou réinstauré à la suite du sevrage.

3.1.3.1.4. Co-dépendances

L’arrêt de la consommation de tabac impacte favorablement le sevrage alcoolique. La prise en charge de la dépendance tabagique, dans un objectif de suppression de la consommation, est donc préconisée. Il est préférable de la réaliser conjointement au sevrage alcoolique, et non de façon différée.

Le traitement utilise des substituts nicotiniques. Il est préconisé d’utiliser deux formes galéniques différentes à doses élevées. Si la situation clinique l’impose, le recours au bupropion et à la varénicline est également envisageable.

Il est préférable d’associer la pharmacothérapie à une thérapie cognitivo-comportementale.

L’alcool et les benzodiazépines ayant des effets similaires, il est fréquent que les patients fassent usage de ces deux types de substances avant sevrage (30 à 40% d’entre eux). La prise en charge impose un sevrage différé d’au moins une semaine des benzodiazépines par rapport à l’alcool. Le sevrage alcoolique utilise la benzodiazépine cible du mésusage à une posologie plus élevée que celle initialement prescrite, ou une autre molécule à demi-vie longue. Elle est prescrite à une dose initiale déterminée selon la symptomatologie du syndrome de sevrage, à laquelle est ajouté

l’équivalent de la dose quotidienne de benzodiazépine consommée.[198] La dose administrée est de

25% par paliers de 3 jours.

La surveillance clinique du patient est pluriquotidienne avec une adaptation du traitement à la symptomatologie nécessaire.

La codépendance à l’alcool et à l’héroïne impose un sevrage conjoint des substances en milieu

hospitalier. La pharmacothérapie associe la clonidine, des antalgiques et des benzodiazépines.

La clonidine permet une diminution des signes d’hyperactivité adrénergique liés au sevrage, et inhibe l’expression psychique du syndrome de manque. Étant dépourvue d’activité anti-comitiale,

elle ne peut être prescrite seule. Elle est utilisée hors AMM, dans le traitement spécifique de la dépendance à l’alcool et à l’héroïne.

Un traitement substitutif, par buprénorphine ou méthadone, est également instauré chez le patient. S’il précède le sevrage alcoolique, il ne constitue pas un frein à la prise en charge ambulatoire.

3.1.3.2. Comorbidités somatiques

3.1.3.2.1. Troubles sexuels

Le mésusage d’alcool est associé à des difficultés d’ordre sexuel. Le sevrage (et le maintien de l’abstinence) n’est pas systématiquement assorti d’une amélioration immédiate. Une accentuation des troubles peut même être observée au sortir du sevrage.

Ce phénomène est vécu comme une déception par le patient, pouvant mener à un échec thérapeutique avec rechute. Il est donc judicieux d’envisager un traitement symptomatique des troubles, en association à une thérapie conjugale.

3.1.3.2.2. Troubles hépatiques

Chez les patients souffrant d’une insuffisance hépatocellulaire, il existe un risque d’accumulation de la benzodiazépine, induisant une majoration des effets indésirables.

L’oxazépam est alors une molécule de choix dans le traitement du sevrage alcoolique. Au-delà de sa demi-vie courte (4 à 15 heures), il est éliminé par conjugaison, et non par catabolisme hépatique. Il est prescrit à la posologie initiale de 15 à 25 mg, 3 à 4 fois par jour. Elle est rapidement diminuée de 50 mg par jour. La durée totale du traitement est de 1 semaine.

Cependant, son profil cinétique présente de grandes fluctuations plasmatiques, sans pour autant que le risque d’accumulation soit nul. [219] La surveillance doit donc être renforcée.

3.1.3.2.3. Encéphalopathie de Gayet-Wernicke

L’encéphalopathie de Gayet-Wernicke est caractérisée par une triade de symptômes : troubles de la conscience, ataxie et paralysie oculomotrice. Ces signes ne sont conjointement présents que dans 10% des cas. [220] Aussi, la démarche diagnostique de ce trouble est perturbée par la présence d’un delirium tremens, d’une encéphalopathie hépatique ou encore d’un traumatisme crânien. [221] De fait, le traitement s’impose dès la suspicion d’un syndrome de Gayet-Wernicke.

La prescription de thiamine est recommandée dans la prise en charge thérapeutique de l’encéphalopathie de Gayet-Wernicke. Elle est indiquée à titre préventif, mais elle a aussi fait ses

preuves dans le traitement de courte durée du syndrome.[208]

L’administration de thiamine par voie parentérale, à forte dose et sur une courte durée, est préconisée dès l’établissement du diagnostic présomptif de l’encéphalopathie de Gayet-Wernicke. Les recommandations internationales proposent une dose quotidienne de 500 à 1500 mg de thiamine, pendant 3 à 5 jours ; puis un relai par voie orale.

Chez les patients à risque de syndrome de Gayet-Wernicke nécessitant une administration par voie intraveineuse de glucose, l’administration préalable de 500 mg de thiamine dans 100 mL de chlorure de sodium 0,9% sur 30 minutes est préconisée.

Le traitement par la thiamine peut s’intégrer à une polyvitaminothérapie (B6, B12). La correction des désordres électrolytiques fait partie intégrante du traitement.

3.3. Prévention des rechutes