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CHAPITRE IV : USINAGE ASSISTE LASER ET TENUE EN FATIGUE

3. ANALYSE DES CARACTERISTIQUES D’INTEGRITE DE SURFACE EN FONCTION DE

3.1. Cas du matériau 100Cr6 :

Les conditions d’UAL sur ce matériau sont choisies de telle sorte que l’usinage s’associe simultanément à un traitement thermique. Une transformation de phase martensitique apparaît alors en surface du matériau.

3.1.1. Rugosité :

Les états de surface des éprouvettes de traction-compression usinées conventionnellement et assistées laser (avec traitement thermique), avant et après polissage sont comparés (Fig. 92).

Les états de surface observés selon que l’on considère les éprouvettes usinées de manière conventionnelle ou avec traitement laser sont très différents. La valeur du paramètre Ra, représentant la moyenne arithmétique des surfaces comprises entre le profil et la ligne moyenne sur la longueur de mesure, peut varier de manière importante. Cependant, Ra est souvent considéré comme une mesure insuffisante pour qualifier correctement les effets de surface en fatigue. Deux autres paramètres Rt (amplitude totale du profil mesurée sur toute la longueur d’évaluation) et Rmax (valeur maximale du profil) semblent plus adaptés.

Fig. 92 – Eprouvettes de traction en 100Cr6 (Cr, Crul, Crp ou Crulp).

Les profils de rugosité sont représentés sur la Fig. 93. Les résultats moyens des mesures sur quelques éprouvettes par lot sont rassemblés dans le Tab. 23. Ils montrent que les éprouvettes non polies usinées conventionnellement présentent des stries d'usinage assez régulières par rapport à celles usinées avec assistance laser. Les valeurs obtenues montrent une diminution importante de la rugosité après le polissage mais aussi, une augmentation de la rugosité en surface avec l’UAL par rapport à un UC. Cette augmentation peut être associée à la transformation martensitique et en particulier à la variation de volume associée.

Eprouvette Cr Crp Crul Crulp

Ecart-moyen du profil de rugosité Ra (µm) 0.89 0.07 1.03 0.06 Hauteur totale du profil Rt (µm) 5.24 0.96 7.36 0.77 Hauteur maximale du profil Rmax (µm) 4.56 0.63 6.04 0.5

Tab. 23 – Résultats des mesures de rugosité sur quelques éprouvettes de chaque lot de traction en 100Cr6 UC ou UAL suivi

de polissage UAL

Cr8 Crul9 Crul7p Fig. 93 – Etat de surface des éprouvettes de 100Cr6

Il faut noter que les états de surface obtenus après polissage mécanique sont très fins ; l’influence du paramètre rugosité sur la tenue en fatigue peut alors être considéré comme peu importante. En revanche, dans ce cas, on doit tenir compte de l’introduction de contraintes résiduelles dues à l’opération de polissage.

3.1.2. Observations microstructurales et microdureté :

Une coupe polie et attaquée, ainsi que le faciès de rupture après un essai de fatigue de traction-compression d’une éprouvette UAL ont été observés respectivement au microscope optique et au MEB (Fig. 94). Les observations effectuées permettent de qualifier trois ZAT très distinctes en plus du matériau de base :

(a) (b)

Fig. 94 – Microstructure d’une éprouvette UAL polie observée

(a) par microscope optique (attaque au Nital 4% pendant 10s). (b) par MEB (faciès de rupture en fatigue).

 Proche de la surface :

- Zone 1 (à la surface de la pièce) : correspond à une couche martensitique dure mais très fragile d’une épaisseur de 30 à 40 µm. Au microscope, elle présente une structure en aiguilles. Les carbures Fe3C ont été totalement dissouts dans cette zone.

- Zone 2 : c’est une zone de transition (environ de 20 à 25 µm). Le matériau n’a été que partiellement austénitisé. De même, les carbures sont partiellement transformés. On a alors de la martensite, de la ferrite et du Fe3C. Plus on s’éloigne de la surface et plus les carbures sont nombreux.

- Zone 3 : correspond à une zone de transition de 10 à 20 µm d’épaisseur. Cette zone adoucie par le chauffage des couches supérieures a subi un revenu.

1

2

3 1

2 3

 A cœur : c’est la structure de base du matériau avec une structure globulaire (état recuit).

Le traitement thermique superficiel pendant l’UAL génère un cycle thermique de chauffage très localisé suivi par un refroidissement rapide. En effet, le chauffage laser étant seulement superficiel, le refroidissement est principalement dû à la conduction thermique vers le centre de la pièce qui reste froid. De plus, s’ajoute à ce ‘puits thermique’ la convection en surface de la pièce en rotation. Pour les vitesses très rapides de chauffage induites par le laser, la température de transformation austénite α - martensite γ est située à 850°C [Arata 1978]. Cette transformation de l’austénite en martensite dans la couche supérieure de la pièce, a lieu sans changement de composition. La martensite correspond en effet à une solution solide sursaturée de carbone dans le fer α et de même teneur en carbone que l’austénite dont elle provient.

Afin de vérifier l’influence de la modification superficielle de microstructure, des essais complémentaires de microdureté ont été réalisés. La dureté de chaque zone a été évaluée à travers des mesures à l’échelle micrométrique, réalisées sur une coupe transversale d’une éprouvette de 100Cr6 traitée par UAL. Les résultats obtenus sont regroupés sur la Fig. 95.

0 2 4 6 8 10 12 0 50 100 150 200 250 Distance à la surface (µm) H (G P a ) zone 1 zone 2 zone 3 structure de base surface coeur

Fig. 95 – Profil de dureté par essais de nanoindentation sur une éprouvette polie et traitée de 100Cr6 (Crulp5).

Les essais corroborent les observations précédentes de la microstructure. Le profil peut en effet être séparé en quatre zones correspondant aux trois ZAT et au matériau de base. En surface, la structure est très dure (autour de 10 GPa). Elle correspond à la couche totalement transformée en martensite. Ensuite la dureté diminue rapidement de 10 à 3 GPa, ce qui correspond à la zone de transition. En effet, à cette profondeur, le matériau s’adoucit progressivement jusqu'à atteindre la dureté de la troisième zone qui est légèrement moins dure que la structure de base du matériau. La dureté à cœur est enfin trois fois inférieure à la dureté en surface.

Il faut remarquer que ce gradient de dureté peut s’expliquer par le fait que la martensite, très riche en carbone, a une dureté maximale dans la couche de surface. En sous couche (zone 2), le carbone existe dans la martensite, mais aussi sous forme de carbures de fer Fe3C. La teneur en carbone dans la martensite diminue donc relativement, alors que par ailleurs la quantité de ferrite non transformée augmente vers le cœur de la pièce.

Le durcissement en surface peut donc correspondre, d’une part, à l’apparition de la structure martensitique, et d’autre part à une modification des niveaux de l’écrouissage.

3.1.3. Contraintes résiduelles:

Afin de compléter la caractérisation des zones traitées, des analyses de contraintes résiduelles ont été réalisées en profondeur des échantillons traités. Ces contraintes résiduelles peuvent provenir de

déformations plastiques et de changements de phases des différentes couches. Une comparaison des profils de distribution des contraintes résiduelles des éprouvettes polies usinées conventionnellement et avec assistance laser a été réalisée [Leguen 2006]. L’écrouissage du matériau a été également observé par l’analyse de la largeur de corde des raies de diffractions des rayons X. Cette valeur est aussi appelée largeur de pic moyen (LPM).

Les valeurs de contraintes résiduelles en surface des pièces usinées avec assistance laser et conventionnellement sont rassemblées dans le Tab. 24. Ces valeurs montrent qu’avec l’UC, les contraintes résiduelles superficielles sont en légère traction. En revanche, le traitement laser conduit à des contraintes résiduelles surfaciques en compression. Ceci est lié à l’échauffement local notable produit par ce traitement laser qui fait apparaître une transformation martensitique superficielle (paragraphe 3.1.2 précédent).

Eprouvette Cr Crp Crul Crulp

Ra moyenne (mm) 0,89 0,07 1,03 0,06

σR longitudinale (MPa) 95 ± 35 -225 ± 35 -245 ± 35 -640 ± 50

σR circonférentielle (MPa) 80 ± 10 -255 ± 30 -340 ± 15 -670 ± 55

LPM (°) 2,84 2,17 5,32 6,05

Tab. 24 – Contraintes résiduelles moyennes en surface des éprouvettes en 100Cr6.

L’effet mécanique dû au polissage crée de nouvelles contraintes résiduelles en compression dans le matériau. Dans le cas de l’UC, les valeurs de contraintes passent de 95 MPa à -225 MPa dans le sens longitudinal et de 80 MPa à -255 MPa dans le sens circonférentiel. L’UAL engendre des contraintes résiduelles en surface de compression (σRL=-245 MPa etσRC=-340 MPa). Le polissage mécanique après

l’UAL introduit des contraintes résiduelles superficielles de compression encore plus prononcées (σRL=-640

MPa etσRC=-670 MPa).

Tout cela est en accord avec certaines constatations expérimentales de la littérature [Lu 2004] mais ces mesures ne donnent qu’une information sommaire car les contraintes résiduelles peuvent varier de manière très importante en sous couche. Il est donc nécessaire de qualifier leur évolution en profondeur en réalisant des profils de contraintes résiduelles sur les éprouvettes polies UAL et UC. Les profils de contraintes en profondeur sont réalisés par des enlèvements de matière successifs par polissage électrochimique. La Fig. 96 illustre ces résultats de contraintes résiduelles dans le sens longitudinal, circonférentiel etégalement de la largeur des pics de diffraction correspondante.

Les valeurs maximales de contraintes résiduelles en compression, sur l’éprouvette UC, se trouvent en surface mais elles diminuent (en norme) rapidement pour revenir au niveau du matériau de base à une profondeur d’environ 80 µm. Elles sont principalement dues au polissage. Notons qu’aucune transformation microstructurale n’est visible sur la pièce usinée conventionnellement.

Pour les éprouvettes réalisées en UAL avec traitement thermique, de fortes contraintes résiduelles de compression sont engendrées dans la zone martensitique mais sur une faible profondeur, de l'ordre de quelques dizaines de micromètres. Dans la zone de transition (30 µm à 80 µm), les contraintes résiduelles remontent doucement vers la traction. Ensuite, au niveau de la zone adoucie (environ de 80 à 180 µm), une augmentation importante de contrainte est constatée. Les contraintes résiduelles deviennent alors des contraintes de traction à une profondeur de 110 µm à 250 µm. Puis elles tendent vers les contraintes du matériau de base. Ce profil de contraintes résiduelles semble cohérent avec les observations micrographiques et les mesures de microdureté réalisées.

Le profil des largeurs des pics de diffraction (Fig. 96c) reflète l’évolution du taux d’écrouissage du matériau. Il montre qu’il n’y a pas de modification notable de l’écrouissage pour les éprouvettes usinées conventionnellement. En revanche, il montre un très fort écrouissage sur toute la zone traitée thermiquement (zone martensitique et zone de transition).

Contraintes résiduelles circonférentielles -800 -600 -400 -200 0 200 400 0 100 200 300 400 500 Distance à la surface (µm) C o n tr a in te s r é s id u e ll e s ( M P a ) . . UAL_Crul12p UC_Cr14p contraintes résiduelles longitudinales

-800 -600 -400 -200 0 200 400 0 100 200 300 400 500 Distance à la surface (µm) C o n tr a in te s r é s id u e ll e s ( M p a ) . UAL_Crul12p UC_Cr14p Largeur de pic 0 1 2 3 4 5 6 7 0 100 200 300 400 500 Profondeur (µm) L a rg e u r d e p ic ( °) ( °) UAL_Crul12p UC_Cr14p

Fig. 96 – Profil en profondeur des contraintes résiduelles pour des éprouvettes UAL et UC polies du 100Cr6