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Cas d’adultes plus ou moins h´et´erotrophes

1.3 La mycoh´et´erotrophie chez les orchid´ees

1.3.2 Cas d’adultes plus ou moins h´et´erotrophes

Traits d´eriv´es des mycoh´et´erotrophes. Parmi les 25 000 esp`eces d’orchid´ees (Dressler, 2006), on rencontre des esp`eces qui ne d´eveloppent pas la capacit´e pho- tosynth´etique durant tout leur cycle de vie. Ces plantes ont d’abord ´et´e nomm´ees plantes saprophytes, puis plantes mycoh´et´erotrophes apr`es que leur mode de vie ait ´et´e d´evoil´e (Leake, 1994). On les retrouve dans plusieurs familles d’angiospermes et mˆeme chez les H´epatiques (Figure 1.3), mais ce sont les orchid´ees qui en comptent le plus grand nombre avec pr`es de 200 esp`eces r´eparties dans 43 genres (Leake, 1994). Les orchid´ees mycoh´et´erotrophes ont une distribution g´eographique large `a l’´echelle du globe, mais sont in´egalement r´eparties entre les ´ecosyst`emes. La majorit´e d’entre elles vit dans les forˆets tropicales, en Asie du Sud-Est (au Japon notamment) et en Am´erique du Sud essentiellement. Seule une dizaine d’esp`eces habitent les forˆets temp´er´ees d’Am´erique du Nord et d’Eurasie. Paradoxalement, toutes les ´etudes ont ´et´e men´ees dans ces r´egions (Leake et Cameron, 2010). Elles colonisent les sous- bois sombres des forˆets (Leake, 1994) o`u l’humidit´e est importante. L’absence rela- tive de lumi`ere dans leurs habitats est d´efavorable au d´eveloppement de la plupart des plantes chlorophylliennes. Au niveau morphologique, elles partagent certains traits caract´eristiques. Leurs feuilles sont r´eduites `a des ´ecailles et ne pr´esentent g´en´eralement ni stomate ni pigment chlorophyllien. Les parties a´eriennes se limitent `a une tige—de coloration brunˆatre ou rougeˆatre, dress´ee sur quelques dizaines de cm tout au plus—qui n’apparaˆıt qu’au moment de la floraison (Leake, 1994; Ras- mussen, 1995). Les fleurs, en nombre variable, sont f´econd´ees en autogamie ou par de petits insectes, et les fruits produisent une grande quantit´e de graines microsco- piques. Les esp`eces mycoh´et´erotrophes produisent d’ailleurs plus de graines que les esp`eces autotrophes apparent´ees (Arditti et Ghani, 2000). Les parties souterraines (racines, rhizomes ou tubercules) sont souvent hypertrophi´ees, ce qui montre l’im- portance de la vie souterraine chez ces esp`eces (Leake, 1994; Rasmussen, 1995). Les parties a´eriennes, en revanche, apparaissent de fa¸con sporadique `a des saisons parfois variables.

Fonctionnement de la mycoh´et´erotrophie. Bien que la majorit´e des esp`eces habite les ´ecosyst`emes tropicaux, l’´etude des orchid´ees mycoh´et´erotrophes a ´et´e can- tonn´ee aux esp`eces temp´er´ees (Leake et Cameron, 2010). Leur mode de nutrition a ´et´e ´elucid´e progressivement par diff´erentes m´ethodes. Selosse et al. (2002) ont iden- tifi´e g´en´etiquement (barcoding sur l’ADNr ITS) les champignons dans les racines de

Neottia nidus-avis, d´emontrant ainsi que leurs partenaires endomycorhiziens ´etaient

les mˆemes que ceux identifi´es dans les ectomycorhizes d’arbres voisins. Certains au- teurs qualifient mˆeme ce ph´enom`ene d’´epiparasitisme ectomycorhizien (Taylor et

Bruns, 1997 ; Figure 1.8).

ORM

ECM

ECM

Figure1.8 – Fonctionnement de la mycoh´et´erotrophie chez les orchid´ees non chlorophyl- liennes temp´er´ees. ECM : ectomycorhizes ; ORM : endomycorhizes des orchid´ees ; fl`eches blanches : flux de carbone organique ; fl`eches bleues : flux d’eau et de sels min´eraux (N, P).

Plus tard, McKendrick et al. (2000) ont mis en ´evidence, apr`es marquage, un flux de carbone radioactif de deux esp`eces d’arbres, Salix repens (Saule) et Be-

tula pendula (Bouleau), vers des plantules de Corrallorhiza trifidata. Actuellement,

d’autres m´ethodes moins fastidieuses permettent d’identifier la source de carbone chez ces esp`eces. Les teneurs des plantes en isotopes stables 12

C et13

C sont des indi- cateurs indirects de la source de carbone (Dawson et al., 2002). Les isotopes stables du carbone sont naturellement pr´esents dans l’atmosph`ere. Lors de la fixation du carbone atmosph´erique, les organismes autotrophes assimilent pr´ef´erentiellement les isotopes l´egers (le ratio 13

C/12

C mesur´e dans les tissus est donc faible). Les orga- nismes h´et´erotrophes, en revanche, ont la mˆeme signature isotopique que la mati`ere organique qu’ils consomment. Il en est de mˆeme pour les isotopes stables de l’azote (14

N et 15

N), except´e pour les organismes h´et´erotrophes qui sont enrichis en 15

N par rapport `a la source. La comparaison des signatures isotopiques des plantes my- coh´et´erotrophes avec celles des champignons et des plantes autotrophes du milieu permet de retracer les chaˆınes alimentaires (Figure 1.9 ; Trudell et al., 2003). En facilitant l’exploration des mod`eles in situ, les m´ethodes isotopiques ont aussi r´ev´el´e l’existence de r´egimes mixtes chez des orchid´ees chlorophylliennes. Alors que les esp`eces mycoh´et´erotrophes re¸coivent tout leur carbone des mycorhiziens, certaines esp`eces chlorophylliennes de sous-bois obtiennent ainsi jusqu’`a 85% de leur bud- get carbon´e (Gebauer et Meyer, 2003). Ces esp`eces utilisent `a la fois le carbone atmosph´erique par la photosynth`ese et le carbone organique obtenu des mycorhi-

Chapitre 1. Revue bibliographique 39

Figure 1.9 – Signatures isotopiques du carbone et de l’azote des plantes autotrophes et mycoh´et´erotrophes. Vert : plantes autotrophes ; orange : champignons (dont ectomycorhi- ziens, EcMF) ; rouge : plantes mycoh´et´erotrophes. D’apr`es Trudell et al., 2003.

ziens : on les appelle mixotrophes (Bidartondo et al., 2004; Julou et al., 2005; Abadie

et al., 2006). La mixotrophie est susceptible d’ˆetre rencontr´ee chez des esp`eces appa-

rent´ees aux lign´ees mycoh´et´erotrophes. Les esp`eces mixotrophes constituent de fait des mod`eles id´eaux pour comprendre les voies qui m`enent `a la mycoh´et´erotrophie chez les orchid´ees.

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