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La cartographie des matrices de flux antisymétriques : l’exemple des transferts nets bilatéraux (Fij )

des matrices de flux : la matrice ordonnée, le graphe et la carte « Si ton œil était plus aigu tu verrais tout en mouvement : comme le papier

Encart 3-1. Sur le calcul de la migration totale et de la migration nette

3.3 Les trois grandes méthodes de cartographie des matrices de flu

3.3.3 La cartographie des matrices de flux antisymétriques : l’exemple des transferts nets bilatéraux (Fij )

La troisième famille de méthode est celle des matrices antisymétriques, que nous illustrons avec la matrice (Fij-).

Les données de la matrice (Fij-) sont plus difficiles à manier que celles du (Fij+), car le sens du flux a une signification. La valeur de (Fij) étant potentiellement différente de celle de (Fji), celle de (Fij-) est susceptible de varier en fonction de la formulation de calcul, comme illustré par la Figure 3-16. En fait, l’une des matrices de cette figure étant la transposée de l’autre : (Fij-Fji) = T

(Fij-Fji) = (Fji-Fij) Figure 3-16. Illustration de la variation de la valeur du solde, en fonction de la formule

La formule de calcul du solde bilatéral n’est pas sans importance, car elle est susceptible de modifier les résultats de l’analyse et l’apparence de la carte, puisque les flèches n’auront pas le même sens en fonction des cas et cela n’est pas négligeable lorsque les lieux d’origine ne correspondent pas à ceux de destination. C’est le cas, par exemple, des matrices de flux commerciaux qui représentent l’exportation (Fij) ou l’importation (Fji) quand celle des flux de navetteurs quotidiens décrivent l’attractivité des bassins d’emplois ou l’émissivité des zones résidentielles plus ou moins bien dotées en emplois. Elle nécessite d’être appliquée à la thématique analysée. Pour notre part, nous faisons le choix de la formulation (Fij-Fji)=Sij qui correspond au solde bilatéral ou transfert net que nous avons évoqués dans la section 1.1.1 du chapitre 1 (page 31).

Sur le plan sémiologique, la cartographie du transfert net diffère fondamentalement de celle du

volume bilatéral. En effet, pour tout (i) ≠ (j), (Fij-) n’est pas différent de (Fji-) mais est son exact opposé : (Fij-)= -(Fij-), sa transposée, tandis que dans la matrice (Fij+), pour tout (i) ≠ (j), (Fij) est égal à (Fji). Cette spécificité de la matrice (Fji-) nécessite de prendre en compte le sens du flux dans sa cartographie, en utilisant une flèche, comme dans le cas de la représentation de la matrice (Fij) illustré par la Figure 3-12. Cependant, à la différence de cette matrice (Fij) où les valeurs (Fij) et (Fji) qu’elle contient renseignent sur des informations différentes (Fij) ≠ (Fji), les valeurs de la matrice (Fij-

) présentent la même information de part et d’autre de la diagonale principale mais de signe opposé, sauf lorsqu’elle est nulle (Fij=0), que le bilan est équilibré. Du point de vue des lieux, cette différence entre les valeurs de flux entrants et sortants correspond à la variation de leur population, tandis que du point de vue des liens, elle décrit le transfert net dont il faut représenter le sens, par une flèche, pour distinguer les lieux qui perdent de ceux qui gagnent.

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La cartographie du transfert net (Fij-) consiste à représenter l’ensemble des valeurs de la matrice sur la même carte, à l’instar de la cartographie de la matrice (Fij). Déjà présentée sur la Figure 3-11, nous la reprenons ici pour le besoin de la démonstration.

Figure 3-17. Illustration de la cartographie classique du transfert net (Fij-)

La représentation sur la même carte de valeurs de flux identiques, mais symétriquement négatives et positives entraîne une confusion dans la caractérisation des lieux émetteurs et récepteurs et une démultiplication des figurés de tailles identiques et d’orientations opposées. Nous l’avons déjà mentionné et poursuivons le raisonnement.

En effet, sur la Figure 3-17, lorsque (Fij-) vaut +2, cela signifie que (j) a reçu 2 pièces de (i), soit (+2) qu’il n’en a donné [(Fij-

)=2] ; ou bien que (i) a donné 2 pièces à (j) soit (-2) de plus qu’il n’en a reçu [(Fji-)=-2]. De ce point de vue, la Figure 3-17 réalisée sur l’ensemble des valeurs de la matrice (Fij-) représente à la fois les gains et les pertes, respectivement les créances et les dettes si l’on file cette métaphore financière.

Pour remédier à cet écueil lié à la prise en compte du caractère antisymétrique des flux, conduisant à représenter sur la même carte les créances et les dettes, la pratique usuelle consiste à ne réaliser qu’une seule des deux cartes : l’une pour chacune des situations. La Figure 3-18 présente ces deux cartes de flux, aux valeurs respectives strictement positives (les créances) ou négatives (les dettes) issues d’une sélection de la matrice (Fij-

).

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Cette méthode présente aussi l’avantage d’autoriser la représentation d’une somme marginale. Ici, le figuré ponctuel symbolise la somme marginale dirigée dans le sens du flux entrant dans chaque lieu. Ainsi, sur la carte des transferts positifs : le lieu A reçoit +5 de C et émet +2 vers B, son bilan est donc de +3.

Les cartes du transfert net, positif et négatif, non symétrisées, présentent la particularité d’être identiques, à la différence près du sens des flèches. Il est donc inutile de réaliser les deux cartes, le choix de l’une ou de l’autre dépendant de la thématique, puisqu’elle entraîne un changement de l’orientation des flèches.

Pour illustrer la cartographie du transfert net appliquée aux flux de l’ex-Tchécoslovaquie (1990), nous présentons sur la Figure 3-19 une carte des seules valeurs négatives du transfert net (Fij-) < 0. Il est important de noter que dans le cas où les lieux d’origine diffèrent de ceux de destination (importations / exportations ou domicile / travail, par exemple), le choix de représenter les valeurs négatives ou positives est crucial sur le plan thématique. Ce n’est pas le cas ici, car la matrice de l’ex- Tchécoslovaquie décrit une migration résidentielle (lieu de résidence * lieu de résidence).

La Figure 3-19 présente l’approche usuelle réalisée avec des seules flèches : le bilan des flux n’y est pas représenté du point de vue des lieux (c’est-à-dire le bilan net), mais seulement au niveau des liens. Ces derniers sont valués et orientés, afin d’indiquer le sens du transfert et son importance. Le choix de la teinte bleue est ici purement arbitraire.

Figure 3-19. Cartographie du transfert net (Fij-) < 0 des flux de l’ex-Tchécoslovaquie (1990)

De manière générale, le choix de cartographier les valeurs négatives ou positives tient à la problématique sous-jacente. Il ne pose pas de problème particulier. En revanche, ce qui en pose un, c’est la proposition de W. Tobler (n.d-b) de représenter la valeur absolue de (Fij-

). Le problème est en effet a priori insolvable en raison de l’orientation du flux. Aussi, plutôt que d’investiguer dans cette direction, nous préférons ajouter à cette figure la représentation du bilan net en introduisant deux composantes de sémiologie qui permettront de distinguer les lieux gagnants des perdants.

Ainsi, du point de vue des lieux, les symboles ajoutés sont des cercles dont la surface est proportionnelle à la valeur du bilan. De ce fait, leur Taille est équivalente à la somme des largeurs des bandes entrantes (ou sortantes) de chacun des lieux. Ces symboles seront également assortis d’une coloration discrétisée en fonction de la polarité du bilan (positive / négative) de sorte que les gagnants (que nous cartographions en jaune) se différencient clairement des perdants (que nous conservons en bleu). Nous conservons les têtes de flèches – éludant donc la suggestion de W. Tobler – afin de ne pas

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générer d’ambiguités. En effet, il n’est apparaît pas possible de connaître l’orientation des flux par la seule connaissance de l’information du bilan aux lieux. C’est pourquoi la Figure 3-20 illustre cette proposition, pour les flux de l’ex-Tchécoslovaquie (1990), en reprenant les figurés linéaires de la Figure 3-19.

Figure 3-20. Proposition de cartographie du transfert net des flux de l’ex-Tchécoslovaquie (1990) : (Fij-) > 0

L’intérêt de cette proposition de cartographie du (Fij-) est bien de ne réaliser qu’une seule carte

qui combine en outre la représentation du transfert net et du bilan net. En effet, pour deux lieux quelconques, on voit bien sur la Figure 3-20 que les valeurs de flux fortes (illustrées par de gros liens) impliquent des lieux qui gagnent ou qui perdent fortement soit parce qu’ils reçoivent de nombreux petits flux, soit parce qu’ils reçoivent peu de flux mais qui présentent des valeurs importantes : la différence entre ces deux éventualités dépend de la longueur des liens, c’est-à-dire d’une acception de la distance parcourue par le flux.

La proposition de W. Tobler de décomposer la matrice initiale (Fij) a donc une conséquence forte, puisqu’elle conduit in fine à réaliser deux cartes à partir d’une même matrice de données observées, chacune d’elle illustrant une partie de l’information disponible dans la matrice complète : l’une pour la composante symétrique (Fij+) et l’autre pour la composante antisymétrique (Fij-). Si la cartographie du (Fij+) ne pose pas de problèmes particuliers, celle du (Fij-) a pu être controversée et cela, outre le fait qu’il faille choisir ou non de réaliser l’une et/ou l’autre des deux cartes correspondantes. C’est pourquoi certains auteurs ont suggéré de cartographier plutôt un indicateur de l’asymétrie des flux, correspondant à un autre compromis de représentation qui associe le volume bilatéral et le transfert

net sur la même carte.

L’explication avancée par les détracteurs du solde est avant tout théorique100

et ne conduit pas à une nouvelle famille de méthode de cartographie. Sa principale caractéristique est de rendre plus complexe

100 A. Rogers (1990), dans un texte qui prend la forme d’un plaidoyer pour la notion de migrant net, souligne la

déficience de la migration nette pour analyser des mobilités. L’auteur liste pour cela différents problèmes qui découlent de son utilisation, parmi lesquels le fait que la représentation des transferts nets masque les gros flux en valeur absolue. Son utilisation serait alors préjudiciable à la modélisation des flux, puisque ses fondements théoriques sont inadaptés. C’est, en effet, comme s’il existait une corrélation entre le flux entrant et le flux sortant de chaque zone (Rogers, 1990 : 283, 299) ce qui n’est pas nécessairement le cas. L’auteur suggère alors soit de représenter le volume bilatéral (Rogers, 1990 : 299), soit un indicateur de l’asymétrie des flux.

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les trois principales familles, en combinant les aspects de sémiologie. Nous présentons dans la section suivante un exemple de carte de flux correspondant à la représentation d’un indice d’asymétrie des flux, traduisant l’attractivité des lieux, en utilisant la méthode de cartographie de type volume-volume-

asymétrie.

3.3.4 La cartographie des matrices de flux issues d’une combinaison entre (Fij+) et (Fij-),