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Comme toutes les plantes, le manioc peut être affecté par différentes carences du sol en certains éléments minéraux ou au contraire par des toxicités dues à un excès de ces mêmes éléments (photos 8 à 14, cahier couleur).

Symptômes caractéristiques de carences Azote

Une carence en azote se traduit par une forte réduction de la taille des plantes. Les symptômes sur les feuilles sont souvent peu prononcés, avec des feuilles vert pâle présentant un léger jaunissement des extré-mités des pétioles. Chez certains cultivars, on peut cependant observer un jaunissement complet des pétioles commençant par la face infé-rieure. La carence en azote est fréquente sur sol à texture légère et à faible teneur en matière organique.

Phosphore

Une carence en phosphore se traduit par une réduction de la taille des plantes et un amincissement des tiges (photo 8, cahier couleur). Les folioles sont petites et les tiges grêles. Les feuilles sont vert foncé. Si la carence est forte, les feuilles basses peuvent devenir jaune voire orangé, flasques avec des nécroses, et tomber facilement, faisant disparaître tout symptôme reconnaissable.

Potassium

Une carence en potassium se traduit par une réduction de la taille des plantes et de la largeur des folioles, et une diminution du nombre de folioles (photo 9, cahier couleur). En condition de carence forte, des taches pourpres apparaissent sur les feuilles. Les limbes jaunissent avec brunissement des extrémités. Les feuilles, pétioles et tiges présentent des nécroses.

Soufre

Une carence en soufre se traduit par une décoloration tournant au jaunissement généralisé des feuilles supérieures. Elle est rarement observée au champ.

Calcium

Une carence en calcium se traduit par une réduction de la taille des racines. Les limbes des feuilles supérieures sont petits et déformés. Cette carence est rare en conditions de culture. Des réponses à l’apport

de chaux ont été observées en sol acide, à forte teneur en aluminium échangeable et très pauvre en calcium.

Magnésium

Une carence en magnésium se traduit par un jaunissement des espaces internervaires, les zones proches des nervures restant vertes (photos 10a et 10b, cahier couleur). Les symptômes apparaissent d’abord sur les feuilles inférieures puis progressent vers le haut de la plante.

Manganèse

Une carence en manganèse se traduit par un jaunissement des espaces internervaires qui peut s’étendre à toute la feuille si la carence est sévère. La croissance de la plante et des jeunes feuilles est réduite, mais sans déformation. Des symptômes similaires à ceux de la carence en magnésium apparaissent plutôt sur la partie moyenne des plantes. On rencontre ce type de carence soit en sol calcaire à pH élevé soit au contraire sur sol acide traité avec un excès de chaux.

Zinc

Une carence en zinc se manifeste par des points chlorotiques sur les jeunes feuilles, entre les nervures qui peuvent se rejoindre pour donner des zones entièrement jaunes à l’exception de la bande proche de la nervure qui reste verte (photo 11, cahier couleur). En cas de carence sévère, des zones chlorotiques plus étendues apparaissent et sont accom-pagnées de la déformation des marges et des extrémités des limbes. Elle peut être confondue avec les attaques de thrips. Cette carence est relative-ment fréquente sur le manioc, aussi bien sur sol acide que sur sol basique. Fer

Une carence en fer se traduit par une chlorose généralisée des feuilles supérieures qui peuvent devenir blanches en conditions sévères. La taille des plantes et des jeunes feuilles est réduite. Cette carence est assez fréquente sur sol calcaire. Elle est observée à l’emplacement d’anciennes termitières où on relève de fortes concentrations en Ca, Mg et K et un pH élevé. La carence en fer peut aussi être provoquée par un chaulage et un apport excessif de phosphore en sol sableux. Bore

Une carence en bore se traduit par un arrêt de la croissance de la plante avec raccourcissement des entre-nœuds et des pétioles, les jeunes limbes sont petits et déformés. Des taches violacées apparaissent sur les limbes plus âgés. Cette carence est peu fréquente en conditions de culture.

Symptômes caractéristiques de toxicité Aluminium

La toxicité en aluminium se traduit par la réduction des parties aériennes et des racines. Les symptômes sont souvent peu flagrants. En condition sévère, on observe le jaunissement des espaces interner-vaires. Le manioc est considéré comme très tolérant à l’aluminium du sol, mais des phénomènes de toxicité sont observés dans des sols très acides (pH < 4,5) pour des taux de saturation en aluminium de + 85 % (par rapport à la capacité d’échange cationique). Le CIAT en Colombie a sélectionné des cultivars qui restent productifs sur des sols à pH 4,3 et à forte concentration en aluminium échangeable.

Bore

La toxicité en bore se traduit par de petites nécroses aux extrémités et sur les marges des feuilles âgées. Ces symptômes ont été observés uniquement en cas d’apports élevés en bore. Ils disparaissent généra-lement après quelque temps.

Manganèse

La toxicité en manganèse se traduit par le jaunissement des feuilles âgées avec des taches brun-noir le long des nervures (photo 12, cahier couleur). Les limbes se flétrissent et tombent.

Sodium

Les symptômes de la toxicité en sodium sont caractérisés par un jaunis-sement uniforme des feuilles supérieures, s’étendant rapidement sur la plante entière (photo 13, cahier couleur). En condition de toxicité forte, les feuilles se nécrosent et tombent, la croissance s’arrête jusqu’à parfois la mort de la plante. Les problèmes liés à la salinité apparaissent pour des pH supérieurs à 7,9, une conductivité > 0,5 μS/cm et une saturation du sol en sodium (par rapport à la CEC – capacité d’échange cationique) supérieure à 2,5 %. De plus, les pH élevés induisent des carences en oligo-éléments, en particulier en zinc (Zn).

Si le manioc est assez tolérant aux sols acides, il supporte mal les sols alcalins ou salins. Il est plus sensible à ces situations que le maïs, le sorgho ou le riz. Dans la réalité, on observe assez rarement cette toxi-cité car le manioc est peu cultivé sur sol alcalin-salin, les agriculteurs sachant qu’il n’est pas adapté à ces conditions souvent associées à un mauvais drainage. On rencontre parfois cette toxicité sur les efflores-cences salines dans certaines zones côtières ou dans les vallées à faible

pluviométrie. Quand cela est possible, les problèmes de salinité des sols peuvent être contrés par l’inondation des parcelles, l’amélioration du drainage et l’application de soufre et de gypse (sulfate di-hydrate

de calcium de formule CaSO4·2H2O). Cependant, comme il existe

des différences marquées entre cultivars quant à la tolérance au sel, la solution la plus opérationnelle est d’utiliser des cultivars tolérants, combinée éventuellement à l’application d’oligo-éléments.

Tableau 17. Concentration en nutriments dans le limbe des feuilles les plus jeunes complètement développées (soit 3-4 mois après plantation) dans différentes situations nutritionnelles (d’après Howeler, 2012).

Concentration en nutriments (par rapport à la matière sèche) selon le statut nutritionnel

Déficit

élevé modéréDéficit Correct Élevé Toxicité Rendement observé (racines fraîches) en % du rendement maximum < 40 40-90 90-100 100-90 < 90 Azote (N) % < 4,0 4,1-4,8 4,8-5,89 > 5,8 Phosphore (P) % < 0,25 0,25-0,36 0,36-0,50 > 0,50 -Potassium (K) % < 0,85 0,85-1,26 1,26-1,88 1,88-2,40 > 2,40 Calcium (Ca) % < 0,25 0,25-0,41 0,41-0,72 0,72-0,88 > 0,88 Soufre (S) % < 0,20 0,20- 0,27 0,27-0,36 >0,36 -Magnésium (Mg) % < 0,15 0,15-0,22 0,22-0,29 > 0,30 Fer (Fe) ppm < 100 100-110 120-140 140- 200 > 200 Manganèse (Mn) ppm < 30 30-40 40-150 150-250 > 250 Zinc (Zn) ppm < 25 25-32 33-60 60-120 > 120 Bore (B) ppm < 7 7-15 15-30 30-64 > 65 Cuivre (Cu) ppm < 1,5 1,5-5,0 5,0-10,0 10-15 > 15 Aluminium (Al) ppm 100

ppm = partie par million (1 ppm = 1 μg/g) ; 1 % = 10 000 ppm

Importance des désordres nutritionnels

Dans l’ensemble, les symptômes de désordres nutritionnels ne sont pas toujours très apparents chez le manioc pour les macroéléments (NPK). Certaines de ces manifestations peuvent facilement être confondues avec les symptômes causés par d’autres stress comme l’hydromorphie du sol (jaunissement des limbes), l’anthracnose, les attaques d’insectes (nécroses sur les feuilles), la toxicité due aux herbicides (chlorose

et nécrose). Les diagnostics demandent donc à être confirmés par des analyses de la plante et des tests de réponse aux apports d’engrais. Les stress provoqués par les désordres nutritionnels peuvent aussi favoriser indirectement les attaques de pathogènes (champignons, bactéries, nématodes). Ainsi, les sols carencés en potassium favorisent les attaques de champignons pathogènes comme l’anthracnose et le phytophtora.