• Aucun résultat trouvé

Cardiopathies cyanogènes

La cyanose, coloration bleue des téguments, a une valeur sémiologique considérable. Lorsqu'elle est discrète, c'est au niveau des extrémités, des lèvres, des pommettes, de la langue qu'on la recherchera.

La cyanose apparaît lorsque, en l'absence d'anémie, le taux d'hémoglobine réduite pour 100 ml de sang capillaire atteint au moins 5 gr. Elle n'est pas toujours d'origine cardiaque : en effet 3 grands mécanismes physiopathologiques peuvent expliquer la désaturation du sang :

- cardiaque,

- respiratoire avec mauvaise hématose pulmonaire,

- métabolique lors de certaines intoxications (méthémoglobinémie). Les cyanoses d'origine cardiaque obéissent à 3 mécanismes : - L'établissement d'un shunt D-G nécessite deux conditions :

• une communication entre les circulations systémique et pulmonaire,

• au niveau de cette communication, une pression supérieure dans la petite circulation à la pression de la grande circulation. Cette élévation de la pression dans la petite circulation est la conséquence d'un obstacle en aval. Cet obstacle peut ne pas exister à la naissance mais se constituer secondairement, ce qui explique pourquoi une cardiopathie initialement non cyanogène peut le devenir ensuite.

- Dans les transpositions des gros vaisseaux, la cyanose est due au contraire à l'absence de shunt (les deux circulations n'étant plus comme normalement "en série" mais presque totalement indépendantes). Dans ce cas l'hématose n'est pas possible d'où la désaturation du sang artériel.

- Plus rarement, la cyanose est secondaire au mélange des sangs dans une cavité unique (oreillette ou ventricule unique). La cyanose peut s'accompagner de signes associés : hippocratisme digital, polyglobulie dangereuse si > 7.000.000 GR, > 20 g d'Hb, > 65 % d'Hb.

La radiographie pulmonaire permet de distinguer deux grands types de cardiopathies cyanogènes :

- cardiopathies cyanogènes à poumons clairs, - cardiopathies cyanogènes à poumons foncés.

1 Cardiopathies cyanogènes à poumons clairs

Il s'agit de cyanose liée à un shunt D-G avec un obstacle au niveau du coeur droit ou de l'artère pulmonaire, d'où l'aspect clair des poumons peu vascularisés. L'exemple typique et de loin le plus couramment rencontré est la tétralogie de Fallot.

1.1 La tétralogie de Fallot (obstacle pulmonaire à septum ventriculaire ouvert)

Elle associe :

1.1.1 Anatomiquement :

- essentiellement une CIV haute de type infundibulaire et une sténose pulmonaire le plus souvent infundibulaire, - s'y ajoute une dextro-position de l'aorte,

- une hypertrophie ventriculaire droite.

L'élément important pour le diagnostic et le traitement est l'aspect et la taille de l'arbre artériel pulmonaire permettant de distinguer :

- des formes favorables : tronc de l'artère pulmonaire et branches de bonne taille,

- des formes moyennes : hypoplasie de l'anneau et du tronc de l'artère pulmonaire mais branches de bonne taille, - des formes mauvaises : atteinte des branches ++.

1.1.2 Cliniquement :

La cyanose est d'apparition plus ou moins précoce (le plus souvent au cours du 2ème trimestre de la vie, à l'occasion des cris d'abord, puis permanente). Après l'âge de la marche, on observe un accroupissement (squatting).

A l'auscultation, on note un souffle systolique d'éjection au 2è-3è E.I.C, d'intensité moyenne. Le 2è bruit pulmonaire est faible ou aboli.

1.1.3 La radiographie est caractéristique : volume cardiaque normal mais sur la radiographie de face la pointe est

relevée et l'arc moyen concave, réalisant l'aspect "en sabot". Dans 20 % des cas, la crosse aortique passe à droite de la trachée. Les champs pulmonaires sont très clairs.

1.1.4 L'électrocardiogramme montre un axe de QRS à droite avec une surcharge ventriculaire droite (dite "de type

égalité des pressions").

1.1.5 L'échocardiographie reconnaît facilement la malformation.

- visualisation des 2 ventricules, du défaut septal haut situé,

- visualisation de l'aorte à cheval sur le septum interventriculaire ; la voie artérielle pulmonaire en position normale est plus ou moins hypoplasique.

1.1.6 l'évolution est marquée par l'aggravation de la cyanose et de la polyglobulie qui lui est secondaire.

Des épisodes de dyspnée paroxystique, avec aggravation brutale de la cyanose et parfois syncope peuvent survenir, surtout chez le nourrisson. Ces accidents sont traités par les beta-bloquants, mais leur survenue imposent une solution chirurgicale rapide.

D'autres complications redoutables peuvent apparaître :

- abcès cérébral, dû au fait que le sang veineux court-circuite le filtre pulmonaire. Il faut toujours y penser devant un syndrome infectieux, a fortiori si des signes neurologiques sont associés.

- thrombose cérébrale particulièrement redoutée lorsque la polyglobulie est majeure. - syndrome hémorragique, lié à une thrombopénie.

- endocardite d'Osler, enfin, comme dans toute cardiopathie congénitale.

1.1.7 Le traitement

Après une exploration hémodynamique et une angiocardiographie pratiquée soit lorsque la cardiopathie est mal tolérée, soit si elle est bien tolérée, après l'âge de deux ans pour préciser les conditions anatomiques avant l'acte chirurgical. Chez le petit nourrisson dont la cardiopathie est mal tolérée, on peut être conduit à une intervention palliative provisoire : anastomose de Blablock-Taussig entre l'artère sous-clavière et l'artère pulmonaire. Mais dans toute la mesure du possible actuellement on tend à faire une correction complète dont le risque est faible après deux ans et dont les résultats

fonctionnels sont bons. Donc :

- bonne tolérance : réparation complète entre 2 et 4 ans,

- mauvaise tolérance : (cyanose importante, malaises anoxiques) et forme favorable, réparation immédiate même chez le petit nourrisson.

- mauvaise tolérance et forme anatomique moyenne ou mauvaise : 1er temps anastomose palliative systémo-pulmonaire BLALOCK-TAUSSIG ou tube de Gore-tex entre l'aorte ou une de ses branches et une branche pulmonaire.

1.2 La trilogie de Fallot

Il s'agit d'une sténose pulmonaire à septum inter-ventriculaire intact. Elle associe :

1.2.1 Anatomiquement :

- une sténose orificielle pulmonaire. - une CIA,

1.2.2 Cliniquement :

- une cyanose retardée (2-3 ans) et inconstante (en dehors de la forme du nouveau-né)

- un souffle systolique d'éjection au 2è E.I.C. avec un frémissement et abolition du B2 pulmonaire ou doublement espacé de B2 avec composante pulmonaire affaiblie.

1.2.3 La radiographie montre :

- un coeur de volume modérément augmenté dont la pointe est relevée, surtout une saillie de l'arc moyen en oeuf.

1.2.4 L'électrocardiogramme montre :

- un axe QRS très à droite.

- une hypertrophie ventriculaire et auriculaire droite.

1.2.5 A l'échographie sont visibles :

- l'hypertrophie des parois ventriculaires droites. - l'anomalie de l'appareil valvulaire.

- le doppler permet de mesurer le gradient VD - AP.

1.3 L'atrésie tricuspidienne

- Cliniquement donne une cyanose intense ;

- La radiographie montre une grosse oreillette droite,

- L'ECG, une hypertrophie auriculaire droite et ventriculaire gauche et un axe gauche de QRS.

- L'échographie confirme le diagnostic et précise les anomalies associées : taille de la CIV, obstacle pulmonaire, position des gros vaisseaux.

Traitement : geste palliatif dans l'attente d'une dérivation oreillette droite - artère pulmonaire (type opération de Fontan). 2 Cardiopathies cyanogènes à poumons foncés

2.1 Les transpositions des gros vaisseaux

Ce sont des cardiopathies fréquentes à la naissance et la cause majeure des cyanoses néonatales d'originie cardiaque (cf. cardiopathies du nouveau-né).

Cependant des transpositions peuvent être vues plus tardivement :

2.1.1 Transposition avec CIV et RP :

- diagnostic par échographie puis par cathétérisme, - traitement :

• du nourrisson : anastomose systémo-pulmonaire

• de l'enfant : opération de Rastelli (dérivation du sang du ventricule gauche vers l'aorte par la CIV + mise en place d'un tube entre le ventricule droit et l'artère pulmonaire) ou REV (Réparation endo-ventriculaire) (tunnelisation VG - CIV aorte et réimplantation de l'artère pulmonaire sur le VD).

2.1.2 Transposition avec RP sans CIV :

rare, problème thérapeutique difficile si sténose sévère.

2.2 Le shunt gauche-droit inversé

Une telle inversion peut se rencontrer dans l'évolution d'un canal artériel persistant, d'une CIA large, d'une CIV (complexe d'Eisenmenger).

La cyanose n'apparait que lorsque, par élévation des résistances artériolaires pulmonaires, les pressions droites deviennent supérieures aux pressions gauches.

On peut prévoir cette évolution lorsque le souffle diminue et que le 2ème bruit devient éclatant ; la radiographie montre une diminution de la vascularisation pulmonaire en périphérie alors qu'elle reste augmentée près des hiles.

Prof O Battisti, détresses cardio-

Documents relatifs