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Chapitre 1. Revue de littérature

1.3 Les fourrages dans l’alimentation des truies

1.3.1 Les fourrages

1.3.1.2 Caractéristiques nutritionnelles des fourrages

Cette section traitera des caractéristiques nutritionnelles des fourrages et plus particulièrement de leur contenu en fibres, en protéines et en énergie, ainsi que leur digestibilité. La composition nutritionnelle d’un fourrage varie considérablement selon le type de fourrage, notamment selon la composition botanique, le stade de développement des plantes à la récolte et la méthode de conservation (OMAFRA, 2017). L'analyse de la teneur en éléments nutritifs des fourrages peut être utilisée pour

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déterminer la qualité des fourrages (Ball et al., 2001). Par exemple, sur le marché, les critères pour déterminer la qualité du foin sont basés sur la concentration en protéines et en fibres ADF et NDF, mais aussi sur la digestibilité et l’ingestion du fourrage par les animaux (Schroeder, 1996). Un fourrage de bonne qualité se caractérise par une concentration en protéines et en énergie élevée, une bonne digestibilité (proportion de nutriment digérés par l’animal par rapport aux nutriments ingérés) et une teneur en fibre relativement faible.

Généralement, les légumineuses ont une concentration en protéines plus élevée que les graminées (Allard et al., 1998). Par exemple, dans l’étude de Sturludóttir et al. (2014), le trèfle rouge et le trèfle blanc avaient une concentration en protéines brutes supérieure à 140 g/kg MS en moyenne, alors que la concentration en protéines des deux espèces de graminées (pâturin et fléole) était en moyenne inférieure à 100 g/kg MS pour la première année de culture. De même, dans l’étude de Collins (1988), la concentration en azote de la luzerne (25,3 g/kg MS) était plus élevée que celle de la fléole (15,2 g/kg MS). À l’inverse, les graminées ont généralement une concentration en fibres plus élevée que les légumineuses. Par exemple, dans l’étude de Sturludóttir et al. (2014), le trèfle blanc avait une concentration en fibres NDF autour de 450 g/kg MS en moyenne, alors que la concentration en NDF de la fléole était approximativement de 600 g/kg MS pour la première année de culture. De la même façon, les concentrations en NDF, ADF, cellulose et hémicellulose étaient plus faibles dans la luzerne que dans la fléole, avec par exemple, une concentration en NDF de 490 g/kg MS pour la luzerne contre 656 g/kg MS pour la fléole (Collins, 1988). Il est reconnu que les légumineuses ont de meilleures qualités nutritives que les graminées puisqu’elles sont généralement plus riches en protéines et moins riches en fibres. Dans l’étude de Pelletier et al. (2010) au Québec, les légumineuses avaient une concentration en glucides non-structuraux (glucides présents dans le contenu cellulaire tels que les sucres solubles et l’amidon) plus élevée que les graminées en partie du fait de leur plus grande concentration en amidon par rapport aux graminées. En revanche, la concentration de saccharose était plus élevée dans les graminées (21,2 g/kg MS pour le brome inerme à 30,1 g/kg MS pour la fléole) que dans les légumineuses (15,9 g/kg MS pour le trèfle rouge et 16,2 g/kg MS pour la luzerne). Les associations légumineuses-graminées permettent d’obtenir du fourrage avec des compositions chimiques intermédiaires (Sturludóttir et al., 2014). La qualité nutritive des légumineuses ainsi que des graminées varie également d’une espèce à l’autre. Par exemple, dans l’étude de Halling et al. (2002), le trèfle blanc avait une concentration plus élevée en protéines brutes, en matière organique digestible, en sucres solubles et en énergie métabolisable, et avait une plus faible teneur en fibres brutes que la luzerne tandis que le trèfle rouge et le lotier présentaient des valeurs intermédiaires.

Le stade de développement des plantes à la récolte est l’un des facteurs les plus déterminants de la qualité du fourrage pour une espèce donnée (Ball et al., 2001). Cherney et al. (1993) dans l’état de New

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York ont étudié l’évolution de la qualité de 5 espèces de graminées au cours de la saison : l’alpiste roseau (Phalaris arundinacea L.), le brome des prés (Bromus biebersteinii Roem & Schult.), le vulpin faux roseau (Alopecurus arundinaceus Poir.), la fétuque élevée et la fléole des prés. Les résultats ont montré que, de mai à juillet, la concentration en fibres NDF et en lignine augmentait de façon importante chez toutes ces espèces (NDF, de 400 à 627 g/kg MS; lignine, de 17 à 53 g/kg MS), conjointement à une diminution de la digestibilité (de 80 à 44%). L’avancement du stade de développement a globalement les mêmes effets sur la valeur nutritive des légumineuses. Par exemple, pour la luzerne, le lotier, et le trèfle rouge, Cassida et al. (2000) ont observé que la concentration en fibres NDF et ADF augmentait alors que la concentration en protéines diminuait avec le développement. Aussi bien chez les légumineuses que chez les graminées, les feuilles (ou limbes) des plantes ont une plus grande valeur nutritive que les tiges (Uijttewaal et al., 2016). Par exemple, la concentration en protéines brutes est généralement plus élevée dans les feuilles que dans les tiges, alors que la concentration en cellulose est souvent moins élevée (Uijttewaal et al., 2016). La digestibilité des feuilles est souvent supérieure à celles des tiges. Par exemple chez la fléole, la digestibilité in vitro diminue avec la réduction de la proportion de feuilles (Bélanger et McQueen, 1997). La proportion de feuilles diminue en faveur des tiges au cours du cycle de croissance de la fléole, ce qui a pour conséquences, notamment, d’augmenter la concentration en NDF du fourrage (Bélanger et al., 2001). Globalement, la qualité nutritive d’un fourrage dépend de son ratio feuilles:tiges et, comme ce ratio diminue avec le développement des plantes, il en résulte que la qualité du fourrage diminue avec l’avancement du stade de développement des plantes qui le composent (Schroeder, 1996). Par exemple, Lattemae et Tamm (1997) ont constaté que la concentration en protéines brutes et en énergie diminue dans les fourrages alors que la quantité en MS (rendement) augmente au fur et à mesure que les plantes se développent, et ce, chez différentes espèces (ex. fléole des prés, trèfle blanc, luzerne). Le stade auquel les plantes vont être récoltées a donc un impact sur la composition chimique des fourrages, mais aussi sur le rendement. De façon générale, il a été montré qu’il existait une relation négative entre la valeur nutritive des fourrages et la quantité de MS (Figure 1-14). Il y a donc un compromis à trouver entre rendement et qualité du fourrage. Dans une étude menée à la fois sur des monocultures et des mélanges, l’augmentation du rendement avec 2 coupes s’accompagnait d’une diminution de la valeur nutritive des fourrages par rapport aux fourrages obtenus avec 3 ou 4 coupes (Lattemae et Tamm, 1997). Ces auteurs concluent qu’une gestion avec 3 coupes apparait comme le meilleur compromis entre le rendement et la valeur nutritive des fourrages.

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La valeur nutritive des fourrages peut aussi varier entre les différentes coupes de l’année. Par exemple, lors d’une étude menée en Slovaquie, Drobná et Jančovič (2006) ont constaté une augmentation de la teneur en protéines et de la digestibilité des protéines du trèfle rouge entre la première et la troisième coupe. D’un autre côté, ces auteurs ont observé une diminution de l’énergie dans le fourrage de trèfle rouge entre la première et troisième coupe. Dans une autre étude réalisée au Québec, la luzerne en repousse estivale avait une plus grande concentration de fibres NDF et en azote que la première pousse du printemps (Morin et al., 2011). La valeur nutritive des plantes fourragères varie également au cours de la journée (Ball et al., 2001). Par exemple, dans l’étude de Bertrand et al. (2008), la fléole récoltée en après-midi (15h00) avait une concentration en fibres ADF et NDF moins élevée et une concentration en glucides non-structuraux plus élevée que la fléole récoltée le matin (09h00). De même, dans une étude menée sur la luzerne dans l’Est canadien, la concentration en glucides non-structuraux augmentait au cours de la journée jusqu’à atteindre un maximum entre 16h00 et 18h00, à l’inverse, les concentrations en fibres NDF et ADF diminuaient au cours de la journée (Morin et al., 2011).

Le mode de conservation peut également influencer la composition chimique des fourrages. En effet, entre la fauche et la stabilisation du fourrage conservé, différentes transformations vont avoir lieu ce qui va modifier la composition chimique. Les opérations de récolte du foin entraînent généralement une diminution du contenu en azote, en sucres et en minéraux du fourrage notamment pendant le fanage du fait de la respiration des cellules végétales (transformation du sucre en CO2 et H2O), des pertes de

feuilles et, éventuellement, du lessivage par la pluie (Demarquilly et al., 1998). De façon générale, le fanage s’accompagne d’une perte des constituants intra cellulaires, notamment les sucres et les protéines (Baumont et al., 2009). Par exemple, dans une étude menée au Québec sur la luzerne, la concentration

Figure 1-14 : Représentation conceptuelle de la relation entre la valeur nutritive et le rendement en matière sèche des fourrages (adaptée de Bélanger et al., 2001).

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en glucides non-structuraux diminuait entre 0,2–3,5 g/kg MS par heure lors du séchage au champ (Morin et al., 2012). Ainsi, le foin présente généralement une concentration en protéines et une digestibilité moindre que le fourrage vert ainsi qu’une concentration en cellulose brute plus importante (Demarquilly et al., 1998). Globalement, le processus de récolte du foin entraine donc une diminution de la qualité nutritive du fourrage. Généralement, la concentration en glucides solubles des fourrages conservés est plus faible que les fourrages verts à cause de la respiration des cellules végétales après la récolte (Harris et al., 2017). Cette différence est plus marquée dans l’ensilage du fait de la fermentation lactique. Dans l’ensilage, les sucres solubles sont fermentés par des bactéries ce qui entraine une disparition presque totale des glucides solubles (Demarquilly et al., 1998). Par exemple, Tremblay et al. (2014) ont constaté que la concentration en glucides non-structuraux de la luzerne diminuait fortement au début de la fermentation de l'ensilage (0 à 8 jours), avec une diminution atteignant 70-80% à la fin du processus de fermentation. Dans l’étude de Müller et Udén (2007), le foin (88,4% de MS) et les deux fourrages enrubannés à 68,4% et 54,7% de MS contenaient plus de sucres solubles (101, 71 et 69 g/kg MS, respectivement) que l’ensilage à 30,9% de MS qui avait une concentration en sucres solubles de 26 g/kg MS. Du fait que la fermentation lactique est relativement limitée dans l’enrubanné, les pertes de glucides solubles vont rester relativement faibles par rapport à l’ensilage (Harris et al., 2017). De plus, avant que le pH de l’ensilage n’atteigne une valeur inférieure à 4, les protéines du fourrage sont dégradées par protéolyse, ce qui augmente la concentration en azote soluble du fourrage (Baumont et

al., 2011). La dégradation des protéines dans l’enrubanné est généralement moindre que dans l’ensilage

(Müller, 2012). En ce qui concerne la différence d’énergie entre les fourrages verts et les fourrages conservés, Baumont et al. (2009), rapportent une diminution moyenne de 5%, 7-8% et 10-15% de la valeur énergétique pour l’ensilage préfané, l’enrubanné et le foin respectivement, par rapport au fourrage vert.

La valeur nutritionnelle des fourrages est donc très variable ce qui va affecter la qualité du fourrage. Néanmoins, la qualité d’un fourrage ne s’évalue pas seulement par l’analyse de sa composition chimique. En effet, c’est avant tout la réponse des animaux nourris avec ce fourrage qui va permettre de déterminer la qualité d’un fourrage. Les animaux doivent manger une certaine quantité de fourrages pour atteindre de bonnes performances. Ainsi, la qualité des fourrages dépend, certes de leur valeur nutritionnelle, mais également de leur palatabilité et de leur ingestion par les animaux (Ball et al., 2001). D’après Ball et al. (2001), l’effet de fourrages sur les performances des animaux constituerait l’indicateur ultime de la qualité des fourrages. Il y a, à l’heure actuelle, relativement peu de connaissances sur les facteurs influençant l’ingestion de fourrages chez les truies en gestation.

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1.3.2 Ingestion de fourrages et performances chez les truies en