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Chapitre 4. Etude de cas : les effondrements du bassin ferrifère lorrain

4.2. Le contexte du bassin ferrifère lorrain

4.3.2. Caractéristiques géomécaniques des piliers

4.3.2.1. Choix d’un modèle de comportement

La première étape de ce travail consiste à choisir un modèle de comportement représentatif de la formation ferrifère et suffisamment simple, qui puisse être utilisé pour

la modélisation numérique. Compte-tenu du fait que nous étudions l’ensemble des

secteurs et que nous ne disposons pas d’informations relatives à la présence éventuelle

de discontinuités structurales dans les piliers des différents secteurs, nous modéliserons

les piliers comme des milieux continus équivalents. Cela permettra, par ailleurs, d’être

cohérent avec les précédents chapitres. De plus, l’approche par milieu continu a souvent

-40 -30 -20 -10 0 10

Fonction discriminante déterminées pour 36 évènements

-40 -30 -20 -10 0 10

Fonction discriminante déterminées pour 15 évènements

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été utilisée dans la littérature (références ci-dessous) pour modéliser les piliers des mines du bassin ferrifère lorrain et ne semble donc pas irréaliste.

Dans les différents travaux de modélisation de la formation ferrifère et/ou de son recouvrement que nous avons pu recueillir dans la littérature, les lois de comportement utilisées (uniquement pour des modélisations en milieu continu) sont :

 une loi de Mohr-Coulomb parfaitement plastique, pour une approche globale

(piliers + recouvrement) (Fougeron, 2007),

 un loi élasto-plastique de type Mohr-Coulomb améliorée avec un écrouissage

pre-pic positif et à écrouissage post-pre-pic négatif pour caractériser le comportement des

piliers à court terme (Souley et al. 2002 et Grgic et al., 2003),

 un modèle visco-élasto-plastique pour modéliser le comportement à long terme

des piliers (Grgic et al., 2003).

Nous nous intéressons, pour notre part, aux caractéristiques des piliers à un instant donné et la modélisation de l’évolution qui a mené aux caractéristiques actuelles ne fait pas partie des objectifs de ce travail. Aussi, compte tenu du fait que notre analyse est, pour le moment, centrée sur les piliers et non sur le recouvrement, un modèle élasto-plastique de Mohr-Coulomb avec écrouissage nous semble pertinent.

Par ailleurs, certaines études dont les résultats sont présentés dans le paragraphe 1.3.2.3 ont montré que les modèles élasto-plastiques avec un écrouissage uniquement

dans le domaine post-pic permettent d’obtenir un comportement réaliste des piliers par

la modélisation numérique en milieu continu. Nous négligerons donc l’écrouissage positif

dans le domaine pré-pic. Ceci semble compatible avec les résultats d’essai de

compression uniaxiaux réalisés par Grgic (2001), dans lesquels la phase d’écrouissage

pré-pic est peu marquée (Figure 4.4). Notons que les piliers sont souvent considérés

comme globalement soumis à un état de compression uniaxiale bien qu’il existe une

contrainte de confinement non-négligeable au centre des piliers (cf. Chapitre 1).

Figure 4.4 : Résultats d’essais de compression triaxiaux réalisés en laboratoire sur le faciès gris du minerai de fer vieilli ; image tirée de la thèse de Grgic (2001)

Compression monoaxiale

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4.3.2.2. Choix des propriétés mécaniques Données issues de la littérature

Les propriétés nécessaires pour les futurs modèles sont, le module de Young du

minerai E, son coefficient de Poisson , sa cohésion initiale coh et sa cohésion résiduelle

cohr, son angle de frottement  et sa valeur résiduelle r, la valeur du paramètre de

déformation plastique p pour laquelle cohr et r sont atteintes (cf. Annexe 2) en

considérant une variation linéaire de la coh et de  en fonction dep, ainsi la résistance

en traction Rt. Par manque d’information, on considérera l’angle de dilatance  = 10°

(sachant que  varie typiquement de 0° à 20° dans les roches testées en laboratoire

d’après Vermeet et de Borst, 1984 ; Itasca, 2011).

Les propriétés élastiques considérées seront des valeurs typiques moyennes de la

formation ferrifère (Al Heib, 2002), à savoir E = 10 GPa et  = 0,25. Rt sera fixée à

0,5 MPa, ce qui est un ordre de grandeur classique pour les roches à l’échelle du massif

rocheux (ce paramètre n’aura que très peu d’effet sur les résultats étant donné que les piliers sont presque exclusivement soumis à des contraintes de compression).

En référence à la littérature spécifique au minerai de fer lorrain, 3 types de propriétés élasto-plastiques peuvent être définies :

 les propriétés « intactes » caractéristiques d’un échantillon de minerai « sain »

comprimé en laboratoire,

 les propriétés du « massif » obtenues par réduction des caractéristiques

« intactes » afin de tenir compte de la réduction de résistance au passage de l’échelle du laboratoire à celle du massif rocheux,

 les propriétés du minerai « vieilli » testé en laboratoire.

Un résumé de caractéristiques intactes au pic coh et  pour la formation ferrifère

est disponible dans Al Heib (2002) ou Souley et al. (2002). Fougeron (2007) propose des

valeurs différentes dans sa thèse. Des propriétés à l’échelle du massif ont été estimées

par Homand et Dagallier (2004) à partir de la méthodologie de Hoek et Brown (1997) qui se base sur les méthodes de classification géomécaniques (Hoek, 2016). Des résultats d’essais triaxiaux réalisés dans le cadre de la thèse de Grgic (2001) ont été réinterprétés afin de définir des critères de rupture linéaires au pic et résiduels définis par les valeurs de coh et  et cohr et rpour le minerai sain et pour le minerai vieilli. Il s’agit de la seule

source de données en ce qui concerne les valeurs résiduelles cohr et r. En se basant sur

les résultats de ces mêmes travaux, la valeur du paramètre plastique p pour lequel la

résistance résiduelle est atteinte a été fixée à 0,002. L’ensemble des propriétés issues de la littérature est résumé dans le Tableau 4.1. Notons que les valeurs données sont

comparables à celles qui ont été utilisées par d’autres auteurs pour modéliser des piliers

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Tableau 4.1 : Synthèse des propriétés plastiques utilisées par différents auteurs pour modéliser le minerai de fer.

Gamme Auteurs Type coh (MPa)  (°) cohr (MPa) r (°)

1 Souley et al. (2002) Intactes 2,8 52 NC NC

2 Grgic et al. (2002)

réinterprété Intactes 3,5 45 NC NC

4 Grgic (2001) réinterprété Intactes 3,0 45 0,45* 35*

5 Fougeron (2007) Intactes 6,0 25 NC NC

6 Homand et Dagalier

(2004) Massif 1,2 35 NC NC

3 Grgic et al. (2002) Vieillies 2,0 41 NC NC

Moyenne** / Moyennes** 3,5 42 0,45 35

* Valeurs moyennes obtenues à partir de résultats d’essai de compression triaxiaux réalisés sur des échantillons sains et vieillis ** Moyenne des caractéristiques intactes uniquement

NC : non considéré

Modélisation préliminaire afin de choisir les propriétés adéquates

Afin de faire un choix parmi ces différentes gammes de propriétés, des essais de compression ont été modélisés (FLAC3D) sur un pilier dont les caractéristiques géométriques (ainsi que celles des galeries adjacentes) correspondent aux caractéristiques moyennes des piliers des zones effondrées de la base de données

(Annexe 10), à savoir : largeur l = 9,5 m longueur L = 16,5 m, hauteur h – 5 m, largeur

des chambres c = 8 m. Le modèle considéré est représenté dans la Figure 4.5.

Le toit et le mur du pilier modélisé sont considérés comme élastiques linéaires

avec les propriétés suivantes : E = 10 GPa et  = 0,25. Les déplacements normaux des

limites latérales et basses du modèle sont fixés et une vitesse constante de 10-5 m/s,

dirigée vers le bas, est appliquée au sommet du modèle afin de comprimer progressivement le pilier. Les différentes gammes de propriétés plastiques sont testées tour à tour en considérant, à chaque fois, les propriétés résiduelles déduites de la thèse de Grgic (2001) qui constitue la seule source d’information à ce sujet. Les courbes de chargement obtenues sont présentées dans la Figure 4.5.

On sait que la rupture des piliers est vraisemblablement à l’origine des effondrements. La résistance d’un pilier aux caractéristiques géométriques représentatives (en moyenne) des zones effondrées de la base de données doit donc être inférieure à la sollicitation moyenne des piliers des zones effondrées qui a été estimée à environ 17 MPa sur la base de données. Mais elle ne doit pas être « trop » inférieure à cette valeur puisque l’on ne pourrait alors pas expliquer pourquoi les piliers

sont restés « intact » plusieurs années (voire dizaines d’années) avant de céder. On

souhaite donc obtenir une valeur de résistance inférieure mais relativement proche de 17 MPa.

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Figure 4.5 : Courbes de chargement d’un pilier de dimensions l = 9,5 m par L = 16,5 et h = 5 m obtenues numériquement pour les différentes gammes de propriétés plastiques (Tableau 4.1).

On remarque que, bien qu’un modèle de comportement à écrouissage post-pic

négatif ait été imposé aux mailles constituant le modèle, le pilier dans sa globalité n’a

pas toujours un comportement radoucissant (Gammes 2, 3, 4 et 6) en raison des mécanismes de report de contrainte internes au pilier (cf. sous-section 1.3.1).

Parmi les différentes gammes testées, les propriétés intactes (1, 2, 4, 5) sont celles pour lesquelles le pic de résistance est le plus proche de 17 MPa. Il se situe en moyenne à environ 12,5 MPa (voir Figure 4.5). Les pics de résistance sont

significativement plus bas lorsque l’on considère les propriétés « vieillies » (10,5 MPa) ou

celles du « massif » (10 MPa). Pour la suite de l’étude les propriétés moyennes du

minerai intact seront donc utilisées (Tableau 4.1).

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