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Chapitre II : Techniques de caractérisation des dispositifs sous tests

2.3. Procédure de caractérisation développée au LAAS pour les analyses de faillibilité

2.3.6. Caractérisations en bruit basse fréquence

2.3.6.5. Caractérisations en bruit basse fréquence sur le lot Picowatt 36/37B

Le banc de mesure en bruit à basse fréquence a été ajusté afin de pouvoir caractériser les niveaux de courant de drain élevés des dispositifs AlGaN/GaN testés ; pour cela, le réseau de polarisation a été aménagé afin d’augmenter le courant de drain jusqu’à 300 mA. La procédure a très bien fonctionné pour la filière GH50. Néanmoins, les transistors de la filière GH25 et plus spécifiquement ceux du lot Picowatt 36/37B, sont caractérisés par des niveaux trop élevés de courant de drain, et il n’est pas possible de réaliser des mesures proches du canal ouvert.

Les faibles fuites rendent impossible l'analyse en bruit basse fréquence du courant de grille des composants vierges avec les performances actuelles de notre banc de mesure (le plancher de bruit de notre banc expérimental se situe à 10-24 A²/Hz). Par conséquent, seuls quelques

transistors vieillis HTOL (qui possèdent des courants de fuite de grille élevés, et des puissances de sortie plus faibles) nous permettent d’extraire des informations pour notre étude quant à la distinction des défauts de la commande sous la grille de ceux situés dans le canal.

Une procédure a été développée afin d’assurer la stabilisation du dispositif sous test (DUT) pour chaque bande de fréquence et pour chaque condition de polarisation. Cependant, une correction doit être appliquée sur le courant continu dans le but d’obtenir les continuités des bandes, tel que nous pouvons le remarquer dans les Figure II - 49 et Figure II - 50.

Chapitre II : Techniques de caractérisation des dispositifs sous tests Mesures électriques et transitoires

a) b)

Figure II - 49. Spectres en bruit basse fréquence de D2 (dispositif stressé HTOL), sous différentes conditions de polarisation : a) SIG en fonction de la fréquence, et b) SIG/IG en fonction de la

fréquence. Les couleurs claires représentent la polarisation de la diode, avec le drain en l’air, tandis que les couleurs foncées désignent la polarisation de la diode, à VDS = 0 V. Nous avons codifié les

polarisations de grille en bleu, vert, et rouge, pour VGS = -5 V, VGS = -7 V, et VGS = -9 V,

respectivement.

Les variations du courant de fuite de la grille ont été surveillées (en début, et à la fin de la campagne de mesures en bruit basse fréquence) pour chaque mesure :

Tableau II - 8. Fluctuations du courant de fuite de grille de D2, à différents points de polarisation.

VGS = -5 V VGS = -7 V VGS = -9 V

Drain en l’air VDS = 0 V Drain en l’air VDS = 0 V Drain en l’air VDS = 0 V

IGS (nA) 10 10 30 - 40 40 40 - 60 110 – 90 - 800

Afin d'avoir des spectres fiables pour l’interprétation des données, notre solution consiste à normaliser SIG par rapport au courant IGS. Les spectres en bruit basse fréquence illustrent

une tendance en 1/fγ. De plus, des effets mémoire longue durée (LTM pour Long Term Memory

Effects) est prouvée (centres de GR aux plus basses fréquences), et viennent conforter les

mesures transitoires précédentes (même si les mesures spectrales ne permettent pas d’accéder à des temps au-delà de la seconde !). Les comportements transitoires et en BBF (Bruit Basse Fréquence) montrent une grande dispersion dans les constantes de temps et les énergies, puisque les constantes de temps sont généralement obtenues entre 0,1 ms et plusieurs minutes, avec des contributions importantes également entre 0,1 s et quelques secondes (spectres en BBF plus bas autour de 1 Hz, et les comportements transitoires).

En ce qui concerne la densité spectrale du courant de drain, nous constatons que de nombreux centres de G-R apparaissent dans la bande spectrale de l’étude, traduisant de fait des défauts dans le canal et/ou au niveau des résistances de contact et d’accès. Cependant, les centres de G-R identifiés dans la Figure II - 50 ne changent pas fortement pour les dispositifs vieillis une fois que la normalisation par rapport à l’IDS est effectuée ; ceci indique que le stress

n’a pas d’action sur les défauts activés dans le canal, mais que seule la densité de porteurs est

1E-24 1E-23 1E-22 1E-21 1E-20 1E-19 1E-18 1E-17 1 10 100 1000 10000 100000 SIG (A² /H z) Fréquence (Hz) D2 : SIG(f) VGS=-5V VGS=-7V VGS=-9V VGS=-5V & VDS=0 VGS=-7V & VDS=0 VGS=-9V & VDS=0 1/f 1E-16 1E-15 1E-14 1E-13 1E-12 1E-11 1E-10 1E-09 1 10 100 1000 10000 100000 SIG /IG (A /Hz ) Fréquence (Hz) D2 : SIG/IG(f) VGS=-5V VGS=-7V VGS=-9V VGS=-5V & VDS=0 VGS=-7V & VDS=0 VGS=-9V & VDS=0

modifiée dans le 2DEG – il s’agit bien d’un impact de la contrainte sur la commande située au niveau de la grille (ou sous la grille).

a) b)

Figure II - 50. Spectres en bruit basse fréquence de D2 et H1 (dispositifs stressés HTOL, représentés en rouge, et bleu, respectivement), sous différentes conditions de polarisation : a) SID en fonction de

la fréquence, et b) SID/ID en fonction de la fréquence. Nous avons codifié en couleurs les

polarisations du drain, allant de la plus claire, à la plus foncée, pour VDS = 4 V, VDS = 8 V, et

VDS = 12 V, respectivement.

Les centres de G-R sont prononcés particulièrement à faible VDS, en raison d'un grand

nombre de pièges près de l'interface AlGaN/GaN (activés avec l’extension de la zone de charge d’espace, donc avec VDG ou VDS), alors que les pièges dans le volume GaN peuvent être

identifiés lorsque VGS varie (évolution de la bande de conduction relativement au quasi-niveau

de Fermi, qui s’étend plus dans le volume GaN lorsque la polarisation de grille est pincée).

2.3.6.6. Bruit en créneaux (RTN pour Random Telegraph Noise) sur le lot Picowatt 36/37B

Le bruit en créneaux, appelé également bruit en rafale, bruit popcorn, bruit impulsionnel, ou encore bruit télégraphique aléatoire, est un type de bruit électronique qui se produit dans les semiconducteurs, et les films d'oxyde de grille ultra-minces.

Il consiste dans des transitions brusques entre deux niveaux discrets de tension ou de courant, avec une amplitude pouvant aller jusqu'à plusieurs centaines de millivolts, de manière aléatoire. Chaque changement de tension ou de courant dure souvent plusieurs millisecondes, jusqu’à quelques secondes, et ressemble au bruit popcorn si l’on connecte la sortie du dispositif à un haut-parleur audio.

Le bruit en créneaux a d'abord été observé dans des diodes, puis découvert à nouveau lors de la commercialisation de l'un des premiers amplificateurs opérationnels à base de semiconducteurs (le 709). En ce moment, aucune source unique de bruit popcorn n'est théorisée pour expliquer toutes les occurrences, mais la cause le plus souvent invoquée est le

1E-20 1E-19 1E-18 1E-17 1E-16 1E-15 1E-14 1E-13 1E-12 1E-11 1 10 100 1000 10000 100000 SID (A ²/Hz ) Fréquence (Hz) D2et H1: SID(f) VGS=-3V & VDS=12V VGS=-3V & VDS=8V VGS=-3V & VDS=4V VGS=-3V & VDS=12V VGS=-3V & VDS=8V VGS=-3V & VDS=4V 1/f 1E-17 1E-16 1E-15 1E-14 1E-13 1E-12 1E-11 1E-10 1E-09 1 10 100 1000 10000 100000 SID /ID (A /Hz ) Fréquence (Hz) D2et H1: SID/ID(f) VGS=-3V & VDS=12V VGS=-3V & VDS=8V VGS=-3V & VDS=4V VGS=-3V & VDS=12V VGS=-3V & VDS=8V VGS=-3V & VDS=4V

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piégeage et dépiégeage aléatoires des charges aux interfaces à couches minces, ou au niveau des sites défectueux dans le substrat des cristaux semiconducteurs.

Dans les cas où ces charges ont un impact significatif sur les performances des transistors (par exemple sous une grille MOS, ou une base d’un transistor bipolaire), le signal de sortie peut être important. Ces défauts peuvent être causés par des processus de fabrication, tels que l'implantation d'ions lourds, ou par des effets secondaires involontaires tels que la contamination des surfaces.

Pendant la campagne de mesures en BBF sur Picowatt_36/37B, nous avons identifié la présence du bruit en créneaux sur les courants de grille pour tous les dispositifs issus des deux lots, avec des transitions plus ou moins fréquentes, et des amplitudes plus au moins fortes.

Nous allons illustrer les résultats pour D18, le composant stressé HTOL, qui s’est dégradé le plus depuis le début de nos analyses. Ce transistor montre également des sauts de courant/tension très fréquents, avec des amplitudes entre 12 mV et 200 mV (Figure II - 51 et Figure II - 52) [135].

Figure II - 51. Exemple de bruit en créneaux sur l'accès de grille de D18 (dispositif stressé HTOL pendant 105 heures [135].

Nous avons analysé l’ensemble des mesures réalisées sur la grille (plus d’une cinquantaine de saisies graphiques) afin d’extraire les différents profils de signaux RTN. Nous remarquons une grande variété de bruits en créneaux, avec au moins six signatures Lorentziennes différentes, présentant des fréquences de coupure comprises entre 100 Hz et 300 kHz, et un RTN inférieur à 1 Hz (donc en dehors de la mesure dans le domaine fréquentiel) (Figure II - 51 et Figure II - 52) [135].

Figure II - 52. Différents profils du bruit en créneaux sur l'accès de grille de D18 (dispositif stressé HTOL pendant 105 heures) [135].

Cette distribution de signatures Lorentziennes pourrait expliquer en partie la tendance en

1/fγ de la densité spectrale de bruit sur le courant de grille de la Figure II - 49, quelle que soit

la condition de polarisation. L'évolution des charges sous la grille peut affecter la polarisation interne de la grille en temps réel (de 12 mV à 200 mV), et simultanément, le courant de drain (Figure II - 40, référence [72]).

Si le transistor est soumis à un stress pendant longtemps, alors les pièges peuvent s'accumuler dans la couche d'interface passivation/AlGaN, et à l’interface AlGaN/GaN sous la grille. Chacune des deux contributions mène à une baisse d’IDS. Les donneurs en surface

contribuent majoritairement à la densité électronique dans le canal bidimensionnel (2DEG). De même manière, la polarisation interne de VGS joue un rôle équivalent en déplaçant les

niveaux d'énergie dans le canal, et en contrôlant ainsi la densité de porteurs dans le canal jusqu'au pincement [135].

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