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Caractérisation structurale et propriétés des complexes protéiques

Chapitre 1 : Introduction Générale

1.4. Caractérisation structurale et propriétés des complexes protéiques

1.4.1. Introduction

La présence d’un nombre croissant de structures de complexes au sein de la PDB a permis à différentes équipes d’étudier les interfaces de complexes protéiques, afin d’en extraire les propriétés géométriques, physico-chimiques mais aussi évolutives.

1.4.2. Propriétés géométriques des interfaces de complexes

La taille des interfaces de complexes protéiques est généralement mesurée par la différence entre l’aire de la surface accessible (ASA) du complexe et celle des partenaires libres. Si on considère deux protéines A et B s’associant sous forme d’un complexe, la surface de contact est définie par :

S = ASAprotA + ASAprotB - ASAcomplexeAB

En 1999, l’équipe de J. Janin a analysé les caractéristiques structurales de 75 complexes protéiques, et plus particulièrement la taille de leurs interfaces. Les complexes analysés regroupent entre autres des complexes de type protéase-inhibiteur, anticorps-antigène, enzyme-inhibiteur ou encore d’autres complexes impliqués dans la transduction du signal (Lo Conte et al., 1999). Par cette étude, les auteurs ont montré qu’une grande proportion de ces assemblages, principalement des complexes de type protéase-inhibiteur ou antigène- anticorps, ont une interface dont la taille est de 1600 (+/-400) Å2. D’autres complexes ont la

particularité de présenter des interfaces de liaison particulièrement importantes, allant de 2000 à 4660 Å2. Les protéines constitutives de ces complexes ont de plus la caractéristique de

subir des changements conformationnels importants au cours de leur assemblage, à l’inverse des complexes protéiques de taille standard (Lo Conte et al., 1999).

En outre, il semblerait que la taille des interfaces de complexes soit reliée au caractère transitoire ou permanent des assemblages protéiques. En effet, il apparaît que les tailles des interfaces de complexes permanents sont plus importantes que celles des complexes transitoires (Jones and Thornton, 1996; Lo Conte et al., 1999).

1.4.3. Propriétés physico-chimiques des interfaces de complexes protéiques

Les propriétés physico-chimiques des interfaces de complexes protéiques ont été étudiées afin de déterminer les contributions majeures à la stabilité des interfaces.

Glaser et collaborateurs ont démontré, en analysant une base de données de 621 interfaces de complexes protéiques, regroupant entre autres des oligomères ou des complexes enzyme- inhibiteur, que la plupart des contacts entre paires de protéines aux interfaces de complexes impliquaient de larges résidus hydrophobes (Glaser et al., 2001). En outre, les auteurs ont remarqué une différence significative de la composition des interfaces entre de petites et de grosses interfaces. En effet, il apparaît que les résidus hydrophobes sont souvent retrouvés au sein de grosses interfaces, alors que les résidus polaires prévalent dans les petites interfaces. Compte tenu de ces résultats, il apparaît que l’effet hydrophobe, jouant un rôle primordial dans le repliement des protéines, a également un rôle majeur dans la stabilisation des complexes protéiques (Glaser et al., 2001). Les interactions électrostatiques et hydrophobes seraient les propriétés physico-chimiques qui contribuent le plus à la stabilité des complexes protéiques (McCoy et al., 1997; Sheinerman et al., 2000).

Un des aspects non appréhendé par l’étude de Glaser et collaborateurs concerne la distinction entre les complexes permanents et les complexes transitoires. Or en fonction du type de complexes, les forces qui régissent leur interaction sont différentes. En effet, il a été montré que les interfaces de complexes permanents étaient généralement plus hydrophobes que les interfaces de complexes transitoires (Carugo and Argos, 1997; Larsen et al., 1998).

Récemment, De et collaborateurs sont allés plus loin dans la comparaison des complexes permanents et transitoires, en analysant les différences de propriétés au cœur et en périphérie de ces interfaces (De et al., 2005). Ils ont en particulier montré que la périphérie des interfaces de complexes permanents et transitoires est de nature plus polaire que le cœur de ces interfaces. En outre, ils ont confirmé que les interfaces de complexes transitoires sont plus polaires que les interfaces de complexes permanents, aussi bien au cœur qu’en périphérie. Cette propriété peut s’expliquer par le fait que les résidus à l’interface des complexes transitoires interagissent avec le solvant lorsque les protéines constitutives de ce type de complexe existent sous leur forme libre.

Afin d’analyser la contribution de chaque type de résidus à la stabilisation d’un complexe protéique, Bogan et Thorn ont étudié plus précisément leur influence sur l’énergie de liaison (Bogan and Thorn, 1998). Pour cela, les auteurs ont analysé au sein d’une base de données de complexes protéiques d’hétérodimères, la contribution énergétique de chaque résidu dans la stabilisation de ces complexes. Par cette étude, ils ont montré que l’énergie de liaison n’est pas distribuée de façon uniforme sur une interface, mais qu’il existe certains résidus, appelés « hot spots », dont la mutation conduit à une chute significative de l’affinité de liaison. Il apparaît que ces « hot spots », principalement des tryptophanes, tyrosines et arginines, sont localisés préférentiellement au cœur des interfaces de complexes, et entourés de résidus dont le rôle serait de les exclure du solvant. Cette exclusion du solvant permettrait ainsi une diminution de la constante diélectrique, et aurait donc pour effet d’augmenter la force des interactions électrostatiques et des liaisons hydrogènes (Bogan and Thorn, 1998). Des analyses complémentaires concernant ces positions particulièrement importantes pour la spécificité de reconnaissance des assemblages protéiques, ont par la suite montré que ces résidus étaient particulièrement bien conservés (Halperin et al., 2004; Hu et al., 2000).

1.4.4. Propriétés évolutives des interfaces de complexes protéiques

Le nombre croissant de données génomiques et structurales disponibles dans les banques de données a permis récemment d’entreprendre les premières études systématiques dans le but d’explorer les relations entre similarité de séquences et similarité de structures des complexes protéiques. L’objectif de ces études était alors de mieux appréhender les mécanismes d’évolution des interfaces de complexes protéiques.

En 2003, l’équipe de Russell a entrepris l’étude à grande échelle de structures de complexes protéiques domaine-domaine intra-moléculaires et inter-moléculaires caractérisés sur le plan expérimental (Aloy et al., 2003). En comparant les structures de complexes homologues selon la classification SCOP (Murzin et al., 1995), cette étude a révélé que les homologues proches (à plus de 30% en identité de séquence) interagissent de la même façon sur le plan structural. Les résultats de cette étude, portant sur plus de 30000 interactions, suggèrent ainsi qu’en dessous de 30% d’identité, les interactions entre protéines homologues peuvent différer complètement (Figure 18). Une seconde étude plus récente, portant sur plus de 4000 interactions domaine-domaine non redondantes, a confirmé ce résultat, et conclut que les

positions relatives des résidus situés aux interfaces de complexes protéiques sont généralement conservés même chez des homologues lointains (Kim and Ison, 2005).

iRMSD

%identité

iRMSD

%identité

Figure 18. Relation entre similarité sequentielle et structurale des interactions protéiques. (A) Chaque interaction est coloré en

fonction de leur classification SCOP (famille en rouge, superfamille en vert et type de repliement en bleu). (B) Chaque interaction est colorée en fonction de sa nature : inter-moléculaire en rouge, intra-moléculaire en vert et fusion de gène en bleu. Figure extraite de (Aloy et al., 2003). L’axe des abscisses représente le pourcentage d’identité de séquences des structures de complexes comparées. L’axe des ordonnées représente un critère géométrique quantifiant la différence entre les orientations des domaines en interaction (Aloy et al., 2003).

En se focalisant non plus sur la conservation structurale des interfaces de complexes protéiques, mais sur la conservation séquentielle des résidus situés à leur interface, différents groupes ont confirmé l’existence d’une pression évolutive (Caffrey et al., 2004; Jimenez, 2005; Mintseris and Weng, 2005). Ces études ont souligné certains faits importants, en particulier, les régions les plus divergentes sont généralement retrouvées de façon prédominante à l’extérieur des interfaces de complexes, tandis que les sites d’interaction sembleraient plus conservés à l’exception des complexes du type antigènes-anticorps (Figure 19) (Jimenez, 2005). Pour cette dernière catégorie de complexes, le site de liaison de l’anticorps est très variable, ce qui résulte du besoin que présente un organisme d’avoir un répertoire assez large pour cibler différents antigènes.

Figure 19. Conservation en fonction du type d’interface. Pour chaque type de complexes, les interfaces des interactants ont été

classées comme conservées (CONS), divergentes (DIV). Une troisième classe (NON) définit les cas ni conservés ni divergents. Les sous-ensembles représentés correspondent à des complexes acides-nucléiques-protéines (vert), homo-oligomères (cyan), antigène-anticorps (violet), enzyme-inhibiteur (rouge), ou autres hétéro-oligomères (jaune). Figure extraite de (Jimenez, 2005).

Une des hypothèses à la base des méthodes de prédictions des interactions protéine-protéine, concerne la co-évolution des partenaires en interactions. Un des concepts issu de cette théorie, l’existence de mutations corrélées, repose sur l’hypothèse qu’une mutation d’un résidu à l’interface d’un complexe protéique doit être compensée par une seconde mutation d’une position voisine au niveau structural (voir section 1.2.3).

Une des premières études visant à mesurer le degré de co-évolution des complexes protéiques par l’existence de mutations corrélées a été publiée en 1997 par le groupe de A. Valencia (Pazos et al., 1997). Les auteurs de cette étude ont en effet montré que les paires corrélées ont tendance à se regrouper aux interfaces de complexes protéiques intra- moléculaires. En étendant la recherche de mutations corrélées à un jeu de données regroupant 212 complexes transitoires, et 115 complexes permanents de complexes protéiques inter-moléculaires, Mintseris et Weng ont prouvé que cet effet concernait uniquement les complexes permanents (Mintseris and Weng, 2005). Les auteurs de cette étude ont ainsi conclut que les résidus situés aux interfaces de complexes permanents co- évoluent, alors que la plasticité inhérente aux complexes transitoires ne permet pas de

détecter la présence de mutations corrélées à leurs interfaces. Ces résultats ont été confirmés par l’étude d’Halperin et collaborateurs (Halperin et al., 2006).

1.5. Méthodes bioinformatiques pour la prédiction des structures de