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Dans les années 70, la recherche d’une politique environnementale optimale tenant compte des coûts de dépollution a été explorée. On pourra citer Keller et al. [46] qui étudient deux modèles dont l’objectif est identique mais qui diffèrent par la structure de leur fonction de production, ainsi que Plourde [71] qui s’intéresse à l’accumulation des déchets. Van der Ploeg et de Zeeuw [70] ont considéré des modèles sans espace. Cependant, cette hypothèse n’est pas réaliste au regard de la vitesse d’écoulement dans les nappes phréatiques. Les travaux de Bordenave et al. [14] appuient cette remarque en montrant que les flux dans le sous-sol étant lents, il faut tenir compte d’un délai entre l’émission et les apports d’eau polluée aux points de captage.

D’autres travaux prennent en compte ce délai, ce qui permet de modéliser le fait que l’application de politiques environnementales n’a pas de résultats visibles immédiatement. Winkler montre dans [87] que les trajectoires optimales des émissions de pollution sont

monotones si l’objectif est séparable en un composant émission et un composant stock de pollution, mais qu’elles peuvent osciller si ce n’est pas le cas. Bourgeois et Jayet [16] considèrent l’influence d’un délai entre l’épandage de l’engrais et son impact environ-nemental dans l’aquifère, et ils prouvent que cet effet est amplifié par une information asymétrique entre les agriculteurs et le planificateur social (qui ne disposent pas de la même information). Il a été prouvé par Augeraud et Leandri [9] que prendre en compte les temps de délai peut entrainer des politiques optimales cycliques.

Cependant, ces modèles considèrent l’environnement de manière simplifiée. D’autres auteurs ont donc choisi d’être plus précis dans leur modélisation en introduisant des termes non linéaires plus réalistes. C’est le cas de Kossioris et al. [50] qui, en plus d’un terme linéaire de dégradation, considèrent un terme non linéaire dans l’équation d’état. Leur exemple d’application en lacs peu profonds est une référence pour les problèmes de contrôle de pollution.

La théorie des jeux a aussi été utilisée pour comparer des problématiques économiques avec et sans politique environnementale de coopération. On peut citer de nouveau Kossio-ris et al. [50] qui comparent les équilibres de Nash pour des stratégies open-loop (adoptées lorsque les joueurs ne disposent d’information que sur l’état initial) et feedback (définies à chaque instant pour chaque état), mais également Ploeg et Zeeuw qui, dans [70], com-parent les émissions optimales quand chaque pays applique sa propre politique environne-mentale sans coopération et quand tous les pays coordonnent leurs actions. Ils montrent entre autres que lorsque les gouvernements ne coopèrent pas, cela mène à une pollution plus importante. Dockner et van Long ont également comparé les stratégies coopératives et non coopératives dans [30] avec un modèle de contrôle de pollution internationale im-pliquant deux pays voisins. De Frutos et Martín-Herrán [35] étudient eux aussi ce cas de figure.

Récemment, de nouveaux modèles ont pris également en compte l’espace afin de mieux modéliser le transport et la diffusion du polluant. Un exemple d’étude de modèle de contrôle optimal en temps et en espace est le cas des lacs connectés, traité par Brock et Xepapadeas dans [21], qui y étudient la diffusion du phosphore grâce à un système de réaction-diffusion. D’autres modèles spatio-temporels ont été étudiés, en particulier par Boucekkine et al. dans [15]. Dans [22], Camacho et Pérez Barahona étudient un problème d’utilisation optimale des terres, en prenant en compte la pollution de l’air. De Frutos et Martín-Herrán [35] considèrent un problème de pollution en sous-sol sur plusieurs régions. Ils fournissent, pour leur modèle d’advection-diffusion à coefficients constants, une étude numérique permettant de calculer les équilibres de Nash.

1.2.2 Notre modèle

Au vue de notre système d’état présenté au paragraphe 1.1, notre problème de contrôle optimal se place dans le cadre des modèles prenant en compte le temps et l’espace. Cependant, notre modélisation est plus fine que dans les travaux cités ci-dessus. En effet,

certains aspects du transport du polluant ne sont généralement pas pris en compte dans les modèles cités précedemment : à part dans les travaux de De Frutos et Martín-Herrán [35] qui considèrent un problème en deux dimensions, les modèles sont souvent en une dimension et la vitesse du fluide ainsi que les coefficients de diffusion sont supposés donnés et constants. Enfin, nous considérons un objectif économique en temps infini, afin de prendre en compte les conséquences à long terme d’une politique optimale.

À présent, nous allons expliciter le problème d’optimisation afin de compléter notre problème de contrôle optimal. On considère un décideur (planificateur central) dont l’ob-jectif est de maximiser une fonction de bien être social qui prend en compte le bénéfice privé (provenant de la production agricole) et le dommage environnemental (caractérisé par les coûts de dépollution). L’objectif classique que nous considérons est celui de Ulph and Ulph [82] : Jpp, cq “ ªT 0 ˆª ˆ fpx, pq ´ Dpx, cq ˙ dx ˙ e´⇢tdt

où T ° 0 est l’horizon de planification qui peut être infini. Le taux d’actualisation ⇢ Ps0, 1r permet de comparer des coûts et des bénéfices se produisant à des dates différentes. Dans un rapport du groupe d’experts présidé par Daniel Lebègue [57], le taux d’actualisation est défini comme "[traduisant] le prix relatif qu’une collectivité attache au présent et [fixant] la limite de l’effort que cette collectivité est prête à consentir pour l’avenir ; [...] c’est en quelque sorte le prix du temps". Ici, il donne un "poids" plus important à la génération actuelle. Pour les investissements publics de court terme, le taux d’actualisation est de 4%, toujours d’après Lebègue, [57] ; pour les projets entre 50 et 100 ans, C. Gollier [39] préconise un taux de 5%.

La variable de contrôle est p § ¯p où ¯p P R˚

` est un seuil. On supposera ¯p suffisamment grand. En réalité, l’agriculteur ne peut pas épandre une quantité infinie d’engrais : il ne peut dépasser un seuil maximal. On supposera par ailleurs que p P E0

E0 Ä tq P L2p0, T ; L2p⌦qq, 0 § qpt, xq § ¯p, presque partout dans ⌦ ˆ p0, T qu. La fonction f représente le bénéfice de l’agriculteur, dépendant des quantités épandues sur le champ. La fonction D, qui dépend de la position du puits et de la quantité de pol-luant à traiter, modélise les dommages environnementaux par le coût de la dépollution des eaux pompées au puits de captage.

On choisit de modéliser le coût de dépollution au niveau du puits par un terme général Dpx, cq qui se localise près du puits d’extraction. On peut par exemple considérer en fait le puits comme un cylindre de petit rayon pénétrant dans le sol à la verticale d’un point de coordonnées pLx, Ly, 0q. Si on considère un cylindre de rayon un peu plus large (ou plus généralement un sous-domaine de taille caractéristique plus importante), on peut modéliser l’émergence de la nappe phréatique dans une rivière grâce à un opérateur de même type (le sous-domaine correspond alors à l’éponte).

Dans Augeraud-Véron and Leandri [9], ces deux fonctions satisfont les propriétés sui-vantes :

— fpx, pq est positive, croissante et définie pour p P R`; — fpx, pq est strictement concave ;

— p fiÑ fp¨, pq est continue ;

— Dpx, cq est croissante, strictement convexe et telle que Dpx, 0q “ 0 pour tout x P ⌦. Remarque 1.2.1 L’hypothèse de continuité de f par rapport à p peut en fait être légè-rement assouplie : il sera suffisant pour nous de supposer que f est semi-continue supé-rieurement et bornée par rapport à p. En effet, cette hypothèse est suffisante pour utiliser trois outils clef de ce travail : le Théorème 2.2.1 assurant qu’un problème de maximisation coercif est bien posé (pour lequel l’hypothèse de semi-continuité inférieure est suffisante), les résultats de semi-continuité inférieure des fonctions convexes (Tartar [78]) et le critère de compacité de Visintin via les fonctions semi-continues inférieurement et strictement convexes (Visintin [83] Théorème 3).

Remarque 1.2.2 Nous n’aurons pas besoin de supposer la fonction D continue dans les chapitres qui suivent. Cela permet en particulier d’inclure des cas où le coût du traitement évolue selon des seuils de pollution. L’hémicontinuité et la monotonie de D sont en fait les seules hypothèses indispensables pour nos analyses du problème de contrôle. La convexité de D sera utilisée pour obtenir un résultat d’unicité. Les strictes monotonie et convexité ne sont quant à elles nécessaires que pour des calculs explicites dans un exemple stationnaire. Le problème de contrôle optimal est alors le suivant :

max pPE0 ªT 0 ˆª ˆ fpx, pq ´ Dpx, cq ˙ dx ˙ e´⇢tdt sous la contrainte $ ’ ’ ’ ’ & ’ ’ ’ ’ % RBtc` v ¨ rc ´ divp Spvqrcq “ ´rpcq ` p ` pqp1 ´ cq ´ gc dans ⌦T, divpvq “ ` p ` g, v “ ´r , dans ⌦T, Spvqrc ¨ n “ 0 sur B⌦ ˆ p0, T q, c|t“0 “ c0 dans ⌦, “ 1 sur B⌦ ˆ p0, T q.

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