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PARTIE II : le virus de l’hépatite B

VI. 1 : Caractérisation des cellules énucléées

Les tests d’énucléation ont été réalisés sur les lignées HuH7 (cellules d’origine hépatique qui permettent la réplication du VHB), U2OS (cellules ayant pour origine un ostéosarcome et utilisées pour les microinjections), HeLa (cellules provenant d’un cancer du col de l’utérus utilisées dans le laboratoire). Lors de la centrifugation, des cellules sont perdues mais il reste suffisamment de cellules adhérentes au fond de la boite (estimation visuelle 40-50%). Juste après la centrifugation les cellules ont une morphologie étirée qui se résorbe lors de leur incubation à 37°C. Ce taux de survie des cellules permet de disposer de temps pour réaliser des expériences. Lors des marquages en IF, j’ai également calculé un pourcentage de cellules énuclées pour chacune des lignées (Figure 66).

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Figure 66 : Pourcentage de cellules énucléées à 1h en fonction des lignées cellulaires

Représentation en histogramme du pourcentage de cellules énuclées de 3 lignées cellulaires HeLa, U2OS et HuH7. Les quantifications ont été réalisées par numération manuelle lors de l’observation des acquisitions effectuées en microscopie à épifluorescence. Les cellules marquées, soit actine soit Mt, sont identifiées. La présence du marquage Dapi dans les cellules permet d’estimer le nombre de cellules énucléées (absence de Dapi). Entre 6 et 8 quantifications indépendantes ont été accomplies pour chaque lignée. Représentation graphique en boite à moustache, toutes les quantifications sont représentées par les points, les extrémités (tiret noir) représentent le minimum et le maximum, les valeurs indiquées par les boites représentent 25% percentile et 75% percentile.

Les points sur l’histogramme de la figure 66 représentent les valeurs de pourcentage de cellule énuclées quantifiées dans des expériences indépendantes. Toutes lignées confondues, le pourcentage de cellules énuclées obtenues est compris entre 20% et 70%. La moyenne du pourcentage d’énucléation est entre 40 et 50% pour les trois lignées utilisées.

Pour caractériser les cellules énuclées j’ai choisi de marquer le cytosquelette et certains compartiments cellulaires pour analyser l’impact de l’énucléation sur la structure de la cellule ainsi que les protéines ayant un intérêt dans l’investigation du mécanisme de dissociation de cargo des Mt comme les protéines du transport cytoplasmique (dynéine) et du transport nucléaire (importines).

Une partie des observations ont été faites sur les trois lignées cellulaires utilisées dans les énucléations. Seuls les résultats des IF effectués sur les cellules U2OS sont présentés dans la figure 67.

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Figure 67 : Immunofluorescence des U2OS énucléées

1 à 2h après leur énucléation, les cellules ont été fixées par du PFA 4% puis marquées en utilisant des anticorps ou des trackers contre différentes cibles : actine : phalloïdine, Mt : Ac anti tubuline, pericentrine : Ac anti péricentrine, mitochondrie : MitoTracker®, lysosome ; LysoTracker®, importine alpha : Ac anti importine alpha, dynéine : Ac anti Lc8, ADN : Dapi. Acquisition réalisée au microscope à épifluorescence expérience réalisé 1h après énucléation pour les marquages anticorps, plus tardivement (environs 2 heures) pour les marquages LysoTracker® et MitoTracker®.

En suivant l’actine on peut observer l’impact de la cytochalasine B et de l’énucléation sur le réseau d’actine. Après énucléation, j’observe des filaments d’actine aussi bien dans les cellules avec noyau que sans. Les filaments d’actine se sont reformés après l’action de la cytochalasine B et l’énucléation. L’action de la cytochalasine B est donc

158 transitoire. Les fibres de stress sont caractéristiques et visibles dans le corps cellulaire. Ici, tant pour les cellules avec noyau que les cellules sans noyau, le marquage de l’actine est périmembranaire et je n’ai pas observé de fibres de stress. On retrouve un marquage typique des cellules.

Les marquages des Mt sont similaires entre les cellules avec et sans noyau donc l’énucléation n’a pas modifié le réseau de Mt. J’ai observé des Mt dans l’ensemble de la cellule. Dans les deux types de cellules on distingue une région plus dense en Mt ce qui suggère que la polarisation du réseau de Mt est maintenu. Le marquage de la péricentrine a permis d’identifier le MTOC dans les cellules avec et sans noyau. Dans les cellules énuclées, cette structure est localisée dans la région dense en Mt, comme dans les cellules avec noyaux.

La conservation des organites tels que les mitochondries et les lysosomes sont des témoins de l’état général des cellules. Les organites tels que les mitochondries sont présents dans les cellules avec et sans noyau. Le concept de mitochondrie en tant qu’organite est aujourd’hui plutôt envisagé comme un réseau mitochondrial avec une dynamique et un équilibre entre la fusion des mitochondries, où l’on observera un vrai réseau mitochondrial, et la fission (ou fragmentation) où l’on observe des mitochondries bien individualisées. En comparant les réseaux mitochondriaux des cellules avec et sans noyau, il semblerait que le réseau soit plus fragmenté que la normale pour les cellules énucléées, comme cela s’observe dans des situations de stress, en réponse à certains antiviraux et dans certaines pathologies. Le marquage avec le MitoTracker® étant effectué sur cellules vivantes cela indique que la réaction chimique (estérification), permettant la rétention du tracker dans les mitochondries, est fonctionnelle dans les cellules sans noyau.

Les lysosomes marqués via le LysoTracker® sont également présents dans les deux types de cellules. Le marquage est également réalisé sur cellules vivantes ce qui indique que le pH est toujours acide dans les vésicules lysosomales.

Au-delà des résultats propres aux organites observés nous pouvons supposer que malgré l’expulsion du noyau par centrifugation les structures cellulaires plus petites telles que les mitochondries et les lysosomes sont conservées. On peut supposer qu’il en est de même pour d’autres compartiments, tels que l’appareil de golgi et le réticulum endoplasmique.

159 Des protéines du transport cytoplasmique (dynéine) et du transport nucléaire (importine alpha) ont également été analysées. Le marquage de Lc8 dans les cellules avec noyau est ponctiforme et localisé dans le cytoplasme et le noyau. Ce marquage ponctiforme est conservé dans les cellules sans noyau. Le marquage de l’importine alpha montre une localisation diffuse dans le cytoplasme et dans le noyau. Le marquage diffus dans le cytoplasme est retrouvé aussi dans les cellules sans noyau. J’ai toutefois observé que sur des temps plus longs (5h et 16h après énucléation) il y a eu une accumulation / agrégation d’importines alpha au centre de la cellule (à l’ancien emplacement du noyau).

Malgré le stress que représente l’énucléation des cellules par centrifugation, j’ai constaté que de nombreuses structures du cytosquelette de la cellule sont conservées. Dans un délai court après l’énucléation (1h à 2h) certaines activités métaboliques dans les cellules sans noyaux sont actives (MitoTracker® et LysoTracker®). Je ne les ai pas testées à des temps plus tardifs (5h ou 16h).

Ces cellules énuclées semblent être un outil de choix pour analyser des mécanismes indépendants du noyau en microscopie. Que ce soit pour les cellules HuH7, U2OS et HeLa, les pourcentages d’énucléation sont similaires aux alentours de 50%. Cela permet de disposer sur une même boîte de cellules avec et sans noyau. Des comparatifs entre les deux types de cellules sont possibles lors d’analyse en IF. Cependant, au cours du temps une partie des cellules énucléées adoptent une morphologie étirée. J’ai appelé cette morphologie « colibri like » en référence au phénotype des cellules épithéliales gastriques induit par CagA (toxine produite par

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Figure 68 : Pourcentage de cellules énucléées à morphologie « colibri like »

Représentation en histogramme du pourcentage de cellules énuclées ayant une morphlogie « colibri like » de 3 lignées cellulaires HeLa, U2OS et HuH7. Les quantifications ont été réalisées par numération manuelle via l’observation des acquisitions effectuées en microscopie à épifluorescence. Quantification réalisée sur l’aspect morphologique des cellules. Il y a entre 3 et 5 énucléations indépendantes par lignée et par temps (les points représentent les valeurs des quantifications avec la moyenne et l’écart type).

Les quantifications de ce phénotype « colibri like » des cellules énuclées ont été réalisées 1h et 5h après énucléation et sont représentées sur l’histogramme de la figure 68. A 1h, le pourcentage de cellules énuclées présentant une morphologie « colibri like » est inférieur à 10% pour toutes les lignées cellulaires. Ce pourcentage augmente à 5h post énucléation pour atteindre 15 et 30%. Cela signifie qu’au cours du temps une population croissante de cellules sans noyau perdent de l’adhérence et deviennent morphologiquement incompatible avec des microinjections ou des analyses en microscopie. On peut supposer que ce changement de morphologie est induit par une perte de la polarité cellulaire.