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le caractère intentionnel est constaté à partir de la connaissance que ce nom est celui d’un tiers et qu’il est, malgré tout, animé de la

Dans le document Les infractions consommées par le mensonge (Page 33-36)

volonté de l’utiliser. En matière de faux dans un document administratif la jurisprudence

indique que « l'intention coupable consiste en la conscience qu'a eue l'auteur de commettre

un faux dans un document protégé par la loi et de causer ainsi un préjudice

possible »

139

.Cette définition est applicable d’une manière générale aux autres faux publics. A

la différence du faux privé, les juges présument l’existence de l’intention sans le caractériser

dans chaque décision.

Comme pour le faux privé, en matière de faux public la qualité de professionnelle joue sur

l’appréciation de l’élément intentionnel. D’une manière générale, la doctrine et la

jurisprudence estiment que le professionnel possède l’intention de nuire

140

. En prenant en

considération sa qualité de professionnelle, les magistrats présument que l’agent ne pouvait

ignorer le caractère mensonger et illicite de l’acte

141

. Cependant, à la différence des

infractions en droit pénal des affaires, le manquement aux obligations professionnelles ne peut

134

Article 441-2 à 444-9 du Code pénal : le faux peut avoir pour support un document écrit, les marques de l’autorité, la monnaie, l’or, les timbres, les titres et les valeurs émises par l’autorité publique.

135 J. Y. Maréchal, J.-Cl. pén. code, art. 121-3, Elément moral de l’infraction, n° 33 s. 136

Cass. crim., 2 avr. 1868, Bull. crim. 1868, n° 88 ; Cass. crim., 18 févr. 1875, DP 1876, 1, p. 281 ; Cass. crim., 23 nov. 1889, Bull. crim. 1889, n° 353 ; Cass. crim., 27 déc. 1906, Bull. crim., n° 471.

137

M.-L. Rassat, J.-Cl. pén. code, art. 442-1, Fausse monnaie, n°38. 138

Article 433-19 du Code pénal. 139

Cass. crim., 22 oct. 2003, Bull. crim. 2003, n° 200, Gaz. Pal. 2004, 1, somm. p. 1325, obs. Y. Monnet. 140

Cass. crim., 20 juin 2007, op. cit ; Rev. sc. crim. 2008, p. 591, obs. C. Mascala ; Cass. crim., 18 mai 2005, Dr. pén. 2005, comm. 131, obs. M. Véron.

141

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suffire à caractériser l’élément intentionnel

142

. L’agent doit avoir réalisé l’altération

frauduleuse.

On constate que la Cour de cassation met en œuvre une « politique criminelle de l’intention »,

notamment lors de la sanction du mensonge

143

. Roger Merle indique que « tout se passe

apparemment comme s’il y avait au sein de la délinquance deux catégories de malfaiteurs :

les délinquants ordinaires, [….] envers qui il faut être secourable et pitoyable ; et la

délinquance opprimante, qui par sa puissance financière ou sa compétence technique abuse

de sa position, et vis-à-vis de laquelle il importe de sévir sans faiblesse. Ainsi peu à peu notre

droit pénal prend-il un double visage : compatissant lorsqu’il se tourne vers la masse des

délinquants, austère et sévère lorsqu’il considère certains d’entre eux »

144

. La disparité de

l’appréciation de l’intention amène à conclure que « le nouveau droit pénal est loin d’être un

droit pénal égalitaire »

145

.

B. Les conséquences de l’assouplissement de la preuve de l’intention dans les infractions

mensongères

Le droit pénal exige une intention pour la constitution des infractions sans en définir le

contenu et les moyens de preuve. En matière pénale, la preuve de l’intention est libre. En

l’absence de définition légale de l’intention, le législateur accorde une marge d’appréciation

aux juges lors de la caractérisation de cet élément. La jurisprudence met en œuvre une

appréciation subjective pour la caractérisation de l’intention. L’analyse de différentes

infractions consommées par le mensonge démontrent que la jurisprudence établie l’intention

par présomption à partir de la matérialité des faits. La jurisprudence, en marge de la loi,

reconnaît aux juges le pouvoir souverain d’effectuer une appréciation circonstanciée de

l’élément moral. Les juges doivent interpréter les faits dans le respect de l’adage in dubio pro

reo

146

. Dans cette tâche, ils emploient la technique de la preuve inductive ou indiciaire,

permettant d’établir l’intention par la constatation de la matérialité des infractions.

142

Cass. crim., 29 janv. 1998, n ° 97-80.414 : le notaire n’avait pas effectué les vérifications relatives à l’identité et donné les conseils nécessaires ; dans le même sens Cass. crim., 7 sept. 2004, op. cit.

143 B. Mercadal, Recherches sur l’intention en Droit pénal », Rev. sc. crim. 1967, p. 1 et s., spéc. n° 6. 144

R. Merle, « L’évolution du Droit pénal français contemporain », spéc. p. 304 et 305. Sur la sévérité des peines encourues par les délinquants d’affaires.

145 Ibid.. 146

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Les différents procédés employés sont différenciés même s’ils présentent des similitudes. A la

différence des deux procédés, en présence d’une présomption, les juges du fond ne

caractérisent pas l’élément intentionnel. L’intention est présumée exister par l’atteinte à la

valeur sociale protégée sans exiger une motivation dans la décision. Il en est ainsi du

mensonge réalisé dans des documents disposant d’une présomption de véracité par nature

147

.

Cependant, lors de l’application de la méthode par déduction, les juges caractérisent

l’intention à partir de l’acte matériel. Il est parfois difficile de distinguer ces deux méthodes.

En dépit du refus des juges de l’admission de la preuve par présomptions pour une grande

partie des infractions consommées par le mensonge, au sein de certaines infractions le

procédé emprunté s’apparente à la présomption. A titre d’illustration, la caractérisation de

l’intention dans le délit de tromperie peut s’effectuer par la constatation de la méconnaissance

des obligations légales générales de vérité. Cette déduction est à l’origine de la présomption

de mauvaise foi. Le refus de l’admission de la preuve par présomption trouve son fondement

dans l’obligation pour les juges de caractériser les éléments composant les infractions au

regard du principe de présomption d’innocence

148

.

En principe, l’établissement de l’intention par présomption est un procédé contraire aux

principes du droit pénal. En effet, la loi pénale n’instaure aucune présomption de mauvaise

foi. Cependant, les obligations légales de véracité et de sincérité associées aux difficultés

tenant à la preuve de l’intention, ont conduit la jurisprudence à avoir recours aux

présomptions. Par principe, le droit criminel n’admet pas les présomptions légales

149

. Selon la

qualification de la Chambre criminelle le procédé utilisé pour les infractions consommées par

le mensonge est la présomption du fait de l’homme

150

puisqu’aucun texte d’incrimination ne

prévoit ce mode de preuve de l’intention et qu’elle résulte de la pratique des juges. La

jurisprudence fournit de nombreux exemples où l’intention est déduite des présomptions

fondées sur le comportement incriminé. Ainsi, la jurisprudence tend à « objectiver

l’intention » en se référant à certains critères, tels que la nature des atteintes, la qualité de

l’agent, à l’aide d’un « processus inductif »

151

.

147

Il en est ainsi des faux publics, de la fausse monnaie et des autres infractions assimilées. 148

F. Desportes et F. Le Gunehec, Droit pénal général, op. cit., n° 473. 149

Par exception des présomptions légales existent en droit pénal : Article 225-6 du Code pénal considère comme établi l’élément matériel du délit de proxénétisme lorsque la personne vit avec une prostituée sans justifier de ressources. La présomption de recel qui figure à l’article 321-6 du Code pénal ou encore l’article L.121-2 du Code de la route.

150

Dictionnaire de Droit criminel Jean Paul Doucet, 12ème partie définit la présomption comme : « comme une conséquence probable tirée d’un fait connu à un fait non connu ».

151

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La présomption d’innocence constitue un droit fondamental et toute personne en bénéficie de

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