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Conclusion bilan économique et financier

5. Analyse sociale de la chaine de valeur manioc Introduction et méthode de travail

5.5. Le capital social

Le droit d’association est relativement connu des acteurs de la chaîne de valeur manioc. Celle-ci comprend trois grandes formes d’organisations : les sociétés coopératives, les associations et les groupements informels.

- Les sociétés coopératives sont régies par l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés coopératives adopté le 15 décembre 2010 à Lomé. Elles sont placées sous la tutelle du Ministère de l’Agriculture et du Développement Rural. En son article 4, il définit la société coopérative comme « un groupement autonome de personnes volontairement réunies

pour satisfaire leurs aspirations et besoins économiques, sociaux, et culturels communs, au moyen d’une entreprise dont la propriété et la gestion sont collectives et où le pouvoir est exercé démocratiquement et selon les principes coopératifs (…)».

La personnalité juridique (existence juridique) est conférée par l’immatriculation au registre des sociétés coopératives. Autrement dit, si l’on n’a pas procédé à cette formalité, on ne peut revendiquer la qualité de société coopérative. Ces sociétés coopératives exercent principalement dans le secteur agricole bien que la loi indique clairement qu’elles peuvent exercer dans tous les domaines de l’activité humaine. Selon la Direction des Organisations Professionnelles Agricoles (DOPA), il existe à la date de fin novembre 2016, 4112 sociétés coopératives en Côte d’Ivoire dont :

- 2832 dans le secteur du Café-cacao ; - 421 dans la filière Anacarde ;

- 301 dans le vivrier,

- 265 dans le secteur du Coton ; - 151 dans la filière Riz ;

- 58 dans la filière Hévéa ;

- 48 dans la filière Palmier à Huile ;

Bien que représentant moins de 10% du nombre total de sociétés coopératives régulièrement constituées, celles du vivrier se classent à la troisième place après respectivement celles du secteur café-cacao et de l’anacarde. Selon le REEA (2016), 38% des exploitants agricoles de végétaux appartiennent à une Organisation Professionnelle Agricole (OPA). Ce qui dénote de l’attrait que suscite cette forme d’organisation auprès des producteurs. Malheureusement, cette forte présence ne s’accompagne pas nécessairement d’une organisation et d’un fonctionnement satisfaisants des sociétés coopératives du secteur du vivrier.

- Les associations, quant à elles sont régies par la loi n°60-315 du 21 septembre 1960 relative aux associations. Aux termes de l’article premier de cette loi, « L'association est la convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun d'une façon permanente leurs connaissances ou leur activité dans un but autre que lucratif. Elle est régie, quant à sa validité, par les principes généraux du droit applicables aux contrats et obligations. »

Le principe en la matière est la déclaration préalable (et non l’autorisation préalable). En effet, selon l’article 7 de la loi du 21 septembre 1960, « Toute association doit faire l'objet de la part de ceux qui sont chargés de l'administration ou de la direction, d'une déclaration préalable à la préfecture ou à la circonscription administrative où l'association à son siège social. » Ce qui signifie que les requérants ne devront qu’informer l’Administration de la création de l’association. Celle-ci ne peut qu’en prendre acte pour autant que les conditions requises soient satisfaites. Cette déclaration se fait à la préfecture du siège de l’association.

La capacité juridique qui se traduit par l’existence juridique est conférée par la publicité au journal officiel ainsi qu’il résulte de l’article 11 de la loi80, est la dernière étape du

80 Article 11 : « Toute association déclarée, qui veut obtenir la capacité juridique, doit être rendue publique par les soins de ses fondateurs dans le délai d'un mois à compter de l'expiration du délai prévu à l'article 9, au moyen

processus de création. C’est la publicité qui confère à l’association la personnalité juridique. Au niveau de la filière manioc, on note deux formes d’association : les associations professionnelles et les associations interprofessionnelles.

- Les associations professionnelles regroupent les professionnels situés à un même stade de la chaîne de valeur manioc ; à savoir les associations des producteurs, les associations des commerçants, les associations des transformateurs ou les associations des commerçants. Toutefois, au niveau des transformateurs industriels, il n’existe pas d’associations professionnelles.

- Les associations interprofessionnelles sont des associations qui comportent dans une même association plusieurs acteurs de la chaîne de valeur. Elles sont conçues selon le modèle prévu par l’ordonnance et comprennent des collèges des producteurs, des commerçants et des transformateurs. Certaines de ces associations sont d’initiative totalement privée (Entreprise KASSIO, SIVIM-TROPIC), tandis que d’autres ont été suscitées dans le cadre de plusieurs projets dont le projet West-Africa-Agricultural-Productivity-program (WAAP), la Fédération des Coopératives et Réseaux pour la Promotion du Manioc en Afrique (FECREPMA). Ces dernières prennent la dénomination de plateforme d’innovation. Bien qu’elles aient l’avantage de fédérer les principaux acteurs de la chaîne des valeurs, elles ne peuvent toutefois revendiquer la qualité d’organisation professionnelle agricole au sens de l’ordonnance parce qu’elles ne satisfont pas aux conditions requises par cette ordonnance, notamment la reconnaissance par décret. On note, entre autres associations interprofessionnelles, ADFMA, IFIMATCI, FECREPMA, etc. Les associations relèvent de la tutelle du Ministère de l’Intérieur.

- Les groupements informels : Il s’agit de tout groupement qui n’existe pas légalement au regard des lois en vigueur. Ainsi, tout groupement de producteurs, organisé et fonctionnant comme une coopérative mais qui n’a pas satisfait aux exigences de l’immatriculation au registre des sociétés coopératives ne peut se prévaloir de la qualité de société coopérative et ne devrait pas, corrélativement être traitée comme telle. De la même manière, toute association qui ne s’est pas déclarée et qui n’a pas procédé à la publicité au Journal Officiel n’existe pas légalement.

Malgré le droit d’association connu par les acteurs de la chaîne de valeur manioc, Celui-ci ne fait pas l’unanimité sur toute l’étendue du territoire ivoirien. Les toutes premières régions comme le centre (Toumodi, Yamoussoukro, Bouaké) ayant bénéficié des projets d’expérimentation du manioc ont la culture de se mettre en coopérative, tandis que les régions d’Adzopé et de Korohgo sont encore à la traine. Toutefois, le fait de s’organiser en association professionnelle ou interprofessionnelle (comme celle de Bouaké), impacte positivement les conditions de travail des membres. L’adhésion aux associations leur permet d’avoir accès à de nombreux avantages et services (réduction du temps de travail individuel par l’entraide des membres, accès au crédit, aux fertilisants, aux semences de bonne qualité, etc.). Les associations ou les groupements offrent une opportunité d’augmenter la productivité et de réduire les coûts de production et de transactions. Dans le Centre de la Côte d’Ivoire, surtout au sein de la plateforme innovation, les adhérents de l'insertion au Journal officiel de la Côte d'Ivoire, d'un extrait contenant la date de la déclaration, le titre et l'objet de l'association, ainsi que l'indication de son siège social. »

apprécient d’en faire partie et saluent cette forme d’organisation. Elle regroupe des producteurs, des transformateurs, des commerçants et des transporteurs (même si ces derniers ne participent pas régulièrement aux réunions). Le travail est fait à la chaîne, les producteurs approvisionnent les transformateurs en manioc, qui à leur tour, transforment le manioc en attiéké, en pâte (placali), en amidon, en cossette. Les commerçants se chargent de la vente de ces produits sur les marchés locaux, Abidjanais et de la sous-région. Les transporteurs sont sollicités à tous les maillons.

Toutes les associations professionnelles rencontrées souhaitent aller à l’interprofession. La raison essentielle évoquée, est que celles-ci ont des difficultés à trouver des débouchés lorsqu’elles sont constituées d’un seul maillon de la chaîne de valeur (producteurs), alors que l’on retrouve dans les associations interprofessionnelles, des commerçants et des transformateurs, qui pour eux, ne rencontrent pas ces difficultés et pourraient les aider à trouver des débouchés. De même, dans les zones visitées, des transformateurs ont expliqué qu’ils ont des difficultés d’approvisionnement liées à l’insuffisance de véhicules principalement affectés au transport du manioc, surtout pendant la période de collecte des cultures de rente. Ce phénomène est récurrent sur toute l’entendue du territoire. Dans le Nord ivoirien et le centre, les camions préfèrent prêter leurs services aux ramassages des noix de cajou et du coton que de s’adonner au manioc, tandis qu’au Sud, au Sud-est et au Sud-ouest, ils s’affairent à la collecte de l’hévéa, du cacao et du palmier à huile.

Au sein de la chaîne de valeur manioc, aucun contrat de travail formel ne lie les différents acteurs. Certaines tentatives résultent d’initiatives privées comme le cas du Bureau de Vente des Producteurs (BVP). C’est une agence marketing des petits producteurs de Côte d’Ivoire jouant le rôle d’interface entre les producteurs et leurs alliés, en priorité les acheteurs et les transporteurs, afin que leurs productions aient accès au marché dans de meilleurs conditions. Le BVP est installé dans presque toutes les grandes villes de la Côte d’Ivoire, mais c’est celui de Bouaké qui fonctionne normalement et favorise la mise en relation des acteurs. Il constitue par excellence pour l’ensemble des acteurs, un espoir dans la stratégie de création d’opportunité d’emploi des jeunes au sein du secteur agroalimentaire.

Au niveau des associations professionnelles et interprofessionnelles rencontrées, il n’existe qu’un contrat de confiance entre les adhérents. Les transformateurs ont l’obligation de se faire ravitailler par les producteurs qui à leur tour doivent privilégier l’intérêt général de la plateforme. C’est au sein de l’entreprise KASSIO qu’un protocole d’accord existe entre l’entreprise et le paysan qui souhaite mettre sa parcelle à la disposition de ladite entreprise.