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Chapitre 3. Les moyens des établissements

I. Les moyens

I.1. Cancérologie

En cancérologie, comme dans la plupart des services spécialisés, on note une opposition entre

des services qui souhaitent intégrer la démarche palliative en interne et des services qui n’y

sont pas prêts. Les premiers sont ceux qui ont un nombre de décès à gérer assez important et

qui éprouvent le besoin d’organiser les équipes en conséquence. La possibilité de convertir

une partie des lits en lits identifiés « soins palliatifs » est un moteur suffisant qui apporte de la

notoriété et un peu de moyens supplémentaires en soignants. Le fait que des services

spécialisés n’ont pas pleinement investi la démarche palliative tient à des raisons souvent

contingentes qui ne sont guère généralisables : chef de service peu enclin à investir la

démarche, manque de temps pour élaborer un projet et structurer des moyens, petit nombre de

patients posant des problèmes spécifiques en fin de vie…

Il faut insister sur le fait que dans un service mobilisé autour de traitements curatifs lourds et

techniquement exigeants pour les équipes, les lits « soins palliatifs » obligent les soignants à

une approche très différente, la confrontation de deux rythmes de travail et deux modes

relationnels auprès des patients opposés pouvant se révéler source de difficultés.

Dans les services à haute technicité médicale, comme la cancérologie, les équipes cherchent à

développer des démarches palliatives propres. Elles sont plus imbriquées au curatif et

cherchent à éviter la coupure fonctionnelle entre approche curative et approche palliative. Par

ailleurs, le développement d’approches palliatives propres en interne cherche à éviter le

transfert vers des services spécialisés, vécu par les équipes et les patients comme un

« abandon ». C’est à la lumière de cette contradiction entre curatif et palliatif que l’on peut

comprendre, par exemple, la « philosophie du rire » adoptée par un CLCC qui parait en

décalage assez marqué avec l’approche habituellement « en douceur » des soins palliatifs (cf.

cas n°31 H IdF).

« La philosophie, chez nous c’est le rire. Ça ça m’a impressionnée quand je suis arrivée ici. On se prend parfois des réflexions par notre direction, on rigole trop, on sourit trop mais les gens surtout dans ces services là souvent ont besoin de sentir la vie en fin de compte, ceux qui n’ont pas beaucoup de familles, de visites… quand on entre dans la chambre, on reste soignant et on reste dans un discours pas fou fou mais il y a une ambiance de vie c’est important pour eux et pour nous. Quand les personnes sont en fin de vie, on fait plus attention, on est plus calmes mais sinon on essaie d’avoir un contact joyeux. » (Inf. CLCC 31 H IdF).

L’état des besoins dans un centre de lutte contre le cancer Comment améliorer la prise en charge des soins palliatifs ? ƒ « Donner du temps : avoir plus de personnel, en conséquence.

ƒ Avoir du matériel : par exemple des pompes pour la prise en charge de la douleur, avoir du matériel pour le confort du patient, des lits médicalisés plus confortables, des matelas anti- escarres plus "au top"… ;

ƒ Une structure vraiment adaptée pour les personnes en fin de vie pour accueillir les familles ; un service spécifique dans l’institut avec du personnel formé et volontaire ;

ƒ La mise en place de groupes de parole aussi bien pour le personnel que pour les familles ; ƒ Plus de contact avec les intervenants extérieurs et des réunions où tout le monde se retrouve en

fait : médecin traitant, infirmière libérale, kiné pourquoi pas… ;

ƒ Des intervenants aussi par rapport au confort des malades comme la coiffeuse, l’esthéticienne… qu’elles aient plus de temps pour s’occuper des patients en fin de vie ;

ƒ Plus de facilités à domicile par rapport aux aides familiales, ménagères pour aider les familles pendant cette période.

Tout ça a un coût et ce n’est pas évident pour les familles de prendre une aide-ménagère par exemple dans cette période-là, ou une aide-familiale pour s’occuper des enfants.

Il y a aussi le problème du matériel, de la pharmacie, qui ne sont pas toujours remboursés à 100% à domicile. Je crois qu’il serait bien que les familles n’aient pas de problèmes financiers à ce moment-là [la fin de vie].

Ça serait bien aussi qu’il y ait des arrêts de travail des conjoints ou d’une personne de la famille, pour aider à l’accompagnement.

ƒ Par rapport au personnel : il faut qu’il y ait des formations continues régulières.

ƒ Pour que les personnes puissent appeler quand elles le désirent, il faudrait élargir les moments d’écoute : c’est vrai que le week-end, il n’y a pas d’infirmières de soins palliatifs ; pourquoi pas un service toujours disponible, notamment le soir… ? »

(infirmière CLCC, 2 B ChA).

« On aimerait avoir un ratio plus important [en personnel], parce que c'est des malades qui nécessitent plus de temps, plus de dialogue. (…) On va agrandir, on va regrouper les moyens. On a des douches, des chaises spéciales. Il nous faudrait une baignoire particulière, une baignoire qu’on ouvre et où on entre directement pour des gens qu’on a du mal à bouger. Mais ça coûte cher. (…) Les malades en soins palliatifs [alités], ils ont très peu de besoins. Mais pour des malades comme madame L. [encore valide], ça serait bien d’en avoir plus. On aimerait avoir du temps, du temps médical. Souvent, on me dit que je vais trop vite, mais bon, j'ai d’autres malades. On a 8 lits identifiés soins palliatifs, 30 lits de soins suite hémato cancéro, et on tourne à trois en gros dont une à temps partiel. » (médecin, SSR 33 I IdF).