Soulèvements d’aérosols désertiques associés aux jets de basses Soulèvements d’aérosols désertiques associés aux jets de basses
4.3 La campagne BoDEx 2005
La mise en place de la campagne BoDEx en 2005 par plusieurs scientifiques était motivée essentiellement par le fait qu’aucune campagne de terrain n’avait jamais été conduite dans cette région et que les seules observations disponibles pour l’étude des émissions d’aérosols dans cette région étaient les observations spatiales passives qui donnent une vue intégrée verticalement (i.e. MISR, MODIS, TOMS, OMI,…).
Cette campagne avait donc pour objectifs principaux d’améliorer nos connaissances sur la région de Bodélé en tant que principale source d’aérosols minéraux en Afrique au nord de l’Equateur. En particulier, il s’agissait de mieux comprendre les mécanismes dynamiques qui pilotent les émissions et le transport des poussières depuis la dépression de Bodélé ainsi que de documenter les caractéristiques physiques et optiques des aérosols minéraux présents dans cette région, des éléments importants pour la détermination du forçage radiatif.
4.3.1 Description de la campagne
La campagne BoDEx 2005 est un projet anglais interdisciplinaire mené par une équipe de recherche composée de climatologues, météorologues, et des experts en télédétection, géomorphologie et géophysique. Ce projet était initié et réalisé par la ‘Gilchrist Educational
Trust’ et la ‘Royal Geographical Society’ du Royaume-Uni (Giles, 2005; Washington et al.,
2006; Todd et al., 2007).
La campagne de mesures s’est déroulée du 27 février au 13 mars 2005. Le site de mesures était localisé à Chicha (16°53’N, 18°33’E), au centre de la dépression de Bodélé. La météorologie de
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surface standard (i.e. la température, la température du point de rosée, la direction et la vitesse du vent, la pression et les flux UV et solaire) a été mesurée, puis moyennée, sur des intervalles de temps de 2 minutes et à une hauteur de 2 m en utilisant des stations météorologiques automatiques.
Figure 4.3: Une tempête de sable durant la campagne BoDEx 2005 (http://www.geog.ox.ac.uk/research/climate/projects/bodex/).
Des profils temps/altitude de l’intensité et de la direction du vent ont été obtenus à partir du suivi d’ascensions de « ballons pilotés » (Pilot Balloons, PIBALs). Durant la campagne BoDEx 2005, 9 ascensions de PIBALs ont été réalisées par jour (à 0000, 0600, 0700, 0830, 1000, 1230, 1500, 1700 et 2100 UTC), excepté pendant les soulèvements intenses d’aérosols minéraux (problèmes de visibilité). L’échantillonnage était plus fréquent le matin afin de mieux comprendre l’effet du réchauffement de la surface sur les champs de vents (Bouet, 2007).
De plus, un photomètre Cimel-318 (identique à ceux utilisés dans le réseau AERONET) et des photomètres portables «microtops» ont été utilisés pour caractériser les propriétés des aérosols présents dans la région de Bodélé en terme d’épaisseur optique (Aerosol Optical Thickness, AOT), du coefficient d’Angström et de la distribution en taille des particules. Enfin, des prélèvements d’échantillons ont été effectués pour la détermination de la composition physico-chimique des sédiments (Bouet, 2007).
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4.3.2 Principaux résultats
La campagne BoDEx 2005 a permis la documentation du LLJ dans la région de la dépression de Bodélé pour la première fois par observations directes. Il se présente donc comme étant le principal générateur des forts vents de surface responsables des soulèvements dans cette région (Washington et al., 2006; Todd et al., 2007). En effet, les mesures de profils de vent par PIBALs à Chicha ont montré un LLJ bien marqué vers 960 hPa associé à des vents de près de 16 m.s-1 durant la nuit et jusqu’au lever du soleil (Fig. 4.4). Par ailleurs, les mesures de vitesses de vent à Chicha à 2m du sol ont montré un maximum de vent peu après le lever du soleil (aux alentours de 9 heurs TU) sous l’effet du mélange turbulent induit par le chauffage au sol qui ramène les vents forts, en altitude durant la nuit, près de la surface (Fig. 4.5).
De plus, les observations acquises durant la campagne ont permis la quantification des vents de surface responsables des intenses soulèvements dans cette région; par exemple des vents de 15 m.s-1 à 2m du sol ont été observés lors du fort soulèvement enregistré les 10-12 Mars 2005 (Fig. 4.5).
D’autre part, les mesures effectuées à l’aide des photomètres solaires pendant la campagne ont montré que les aérosols minéraux produits à Bodélé ont un albédo de simple diffusion de 0.98 à 1022 nm et de 0.94 à 441nm. Par ailleurs, Warren et al. [2007] ont montré, via des analyses sur les échantillons de diatomées collectés durant la campagne BoDEx 2005, que les diatomées ont une densité de 2,1 g cm−3 (plus faible que celle des grains de sable). Aussi, les caractéristiques aérodynamiques des diatomées présents à Bodélé sont différentes de celles des grains de sable; par exemple des flocons de diatomée de 2 cm de diamètre ont été observés durant la campagne avant d’être entrainés par le vent jusqu’à 50 cm au dessus du sol. Des informations sur la distribution en taille des particules ont été également récoltées, ainsi la majorité des particules appartenait à un mode grossier centré autour de 1.5-2.0 µm et une minorité appartenait à un mode fin centré autour de 0.5 µm inhabituel pour des zones sources (Todd et al., 2007).
Enfin, à partir des observations de terrain, Todd et al. [2007] suggèrent que l’émission d’aérosols minéraux depuis la zone de sédiments (diatomées), qui couvre 10800 km2, est de 1.2 ± 0.5 Tg/jour pendant les événements substantiels de soulèvements d’aérosols.
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Figure 4.4: Cycle diurne moyen durant toute la période de la campagne du profil vertical du
vent à Chicha mesuré par PIBAL, l’axe des x représente le temps en TU (Todd et al., 2007).
Figure 4.5: Cycle diurne moyen durant toute la période de la campagne de la vitesse du vent mesurée à 2 m du sol à Chicha, l’axe des x représente le temps en TU (Todd et al., 2007).