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PARTIE 4 : Intoxications des rapaces en France par les éléments traces métalliques en

II. Présentation des principaux ETM à l’origine d’intoxications chez les rapaces

2) Le cadmium (Cd)

Le cadmium est un élément rare, présent naturellement dans la croûte terrestre en faible quantité. Il possède de nombreux dérivés tels que l’oxyde de cadmium, le chlorure de cadmium, le sulfate de cadmium et le sulfure de cadmium [126]. Sa présence dans l’environnement est majoritairement due aux pollutions anthropogéniques. A cause de sa forte toxicité et de sa grande persistance, il est considéré comme l’un des plus dangereux ETM pour l’environnement [10].

b. Usage, réglementation i. Production et usage

Le cadmium est un élément produit par différentes activités industrielles telles que la métallurgie du zinc, le raffinage des métaux non ferreux, les incinérateurs d’ordures ménagères, la combustion du charbon et des produits pétroliers. Il est utilisé dans la fabrication des batteries électriques, de piles et d’accumulateurs, de pigments, d’alliages, de stabilisants pour les matières plastiques… [126], [113]. Les sources de rejets de cadmium dans l’environnement sont nombreuses tels que la sidérurgie et la métallurgie, le traitement des déchets, les industries minérales…et sont à l’origine de la contamination de l’environnement. En effet, les eaux superficielles et les sédiments des cours d’eau en France contiennent en relative grande quantité du cadmium [113].

ii. Réglementation

Jugé comme polluant pour l’environnement et dangereux pour les organismes vivants, l’usage du cadmium a été interdite dans les équipements électriques et électroniques en 2006, dans les colorations et stabilisations de certains produits finis ou dans les traitements de surface de certains produits métalliques dans l’aéronautique, les transports, etc. [113]. Les piles et les accumulateurs doivent être collectés. Enfin, les rejets de cadmium dans l’environnement sont soumis à des seuils limites [126].

c. Propriétés physico-chimique et devenir dans l’environnement

Dans l’environnement, le cadmium est majoritairement sous sa forme oxydée Cd2+ et ses principaux composés sont l’oxyde de cadmium, le chlorure de cadmium et le sulfure de cadmium [126]. Il peut aussi se complexer à différents composés organiques influençant sa solubilité et sa mobilité dans l’environnement. Sa mobilité dans les eaux est relativement forte, notamment via les sédiments et celle dans les sols est variable essentiellement selon le pH mais reste relativement bonne. Enfin, le cadmium est peu volatile dans les airs [126] mais peut y être transporté, lié à de fines particules [19]. La persistance du cadmium dans l’environnement est grande [10].

Le cadmium est capable de bioaccumulation, en particulier pour les organismes d’eau douce, mais la bioamplification à travers la chaîne alimentaire reste à confirmer. Cependant, certaines études ont trouvé des niveaux plus élevées de cadmium chez des oiseaux plus hauts dans la chaîne alimentaire que ceux situé plus bas [19].

d. Métabolisme

Après absorption et distribution par le système sanguin, le cadmium se lie à une métallotionéine et est stocké dans le foie et les reins. Il n’est pas métabolisé et est éliminé via les plumes, la peau, la glande uropygienne et par dépôt dans les œufs en ce qui concerne les femelles [17]. Le cadmium est très persistant [144] et s’accumule ainsi avec l’âge : les concentrations en cadmium sont généralement plus élevées chez les adultes que chez les oisillons [24].

e. Mode d’action et toxicité i. Mode d’action

Lors d’intoxication aiguë, le mode d’action du cadmium est inconnue [47]. Cependant, dans la majorité des cas, il est à l’origine d’effets sublétaux et chroniques et ne possède pas de mode d’action particulier mais agit de manière globale sur l’ensemble de l’organisme. Dans des études expérimentales, les oiseaux exposés ont montré des signes de toxicité rénale, de

perturbation du métabolisme calcique, une diminution de la prise de nourriture et de la croissance ainsi qu’une perturbation du comportement [47]. Les oiseaux présentent également une perturbation du système immunitaire ainsi que l’apparition d’un stress oxydatif et des altérations hématologiques, telle qu’une destruction des globules rouges [107]. Le cadmium est également responsable de troubles de la reproduction comme une diminution du nombre d’œufs produits et du succès d’éclosion, une augmentation de la mortalité des oisillons [247] et des dommages testiculaires [47]. Enfin, le cadmium est carcinogène, tératogène et possiblement mutagène [19], [47]. Il n’existe cependant peu d’études portant sur la toxicité du cadmium chez les oiseaux en milieu naturel et sur les rapaces encore moins.

f. Risque d’intoxication chez les rapaces  Toxicité et sensibilité des rapaces

Les oiseaux sont des espèces relativement résistantes à l’intoxication du cadmium [47]. Expérimentalement, la buse variable a présenté une très grande sensibilité au cadmium, avec une EC50 10 fois plus petite que celle du canard [107]. Cependant, en raison du faible nombre d’études, notamment en conditions naturelles, il est difficile de conclure quant à la sensibilité des rapaces. Les oisillons apparaissent tout de même plus sensibles que les adultes [247].

Différentes études expérimentales ont conclu que le cadmium est plus toxique que le plomb et le mercure [47], [107].Une concentration dans le foie ou le rein de plus de 10 mg/kg de poids humide (ww) peut entrainer des effets sublétaux et une concentration de 200 mg/kg ww dans le rein représente une menace pour la vie de l’animal [47]. Cependant peu d’études ont portées sur la détermination de seuils de toxicité, notamment sanguine, et il n’existe pas de niveaux de toxicité communément accepté [25].

 Voie d’intoxication

La voir d’intoxication principale des rapaces est l’ingestion de cadmium situé dans leurs proies.

 Facteurs de risques

Comme vu précédemment, en raison du stockage du cadmium dans le foie et les reins, ce dernier est accumulé tout le long de la vie de l’oiseau. L’âge est ainsi un facteur de risque, les adultes sont exposés plus fortement que les oisillons et les juvéniles et possèdent des concentrations de cadmium plus élevées [24]. L’état de l’oiseau ainsi que la présence éventuelle de maladies intercurrentes sont aussi des facteurs de risque. En effet, un oiseau malade, parasité ou encore affamé est plus sensibles à l’intoxication au cadmium. Une carence en calcium, fer, protéines, zinc, cuivre et vitamine D peut augmenter l’absorption de cadmium est ainsi le risque d’intoxication [30]. Enfin l’exposition à d’autres métaux peu aussi augmenter le risque d’intoxication des rapaces [47], ou au contraire le diminuer [107].

 Evaluation de l’exposition

Chez les oiseaux sauvages, il a été trouvé que les concentrations dans le sang sont indicatrices d’exposition aigue tandis que celles dans le rein et le foie sont plutôt le reflet d’exposition chronique. En effet, ces derniers peuvent contenir jusqu’à plus de 92% de la totalité du cadmium dans l’organisme [86]. Les plus hauts niveaux de cadmium sont le plus souvent dans les reins [24], [203], [10]. Ainsi, un niveau de cadmium aux alentours de 3 mg/kg dw dans le foie et de 8mg/kg dw dans les reins pourrait indiquer une exposition environnementale [247].

3) Le mercure (Hg)