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Brisure de la supersymétrie

La première chose à prendre en considération pour construire une théorie supersymétrique du SM est que les différents éléments d’un même supermuliplet ont la même masse. En effet, on peut d’abord constater que l’équation 1.30 peut être réécrite en utilisant l’algèbre de la section 1.2.3de la façon suivante

O(z) = O(y) + iθQO(y) +1 4θ

2Q2O(y). (1.35)

Ceci met en évidence le fait que les superpartenaires sont reliés entre eux par l’action des supercharges sur la composante zéro15du supermultiplet. Sachant que Q commute avec Pµ, on en conclut que la valeur propre PµPµ= −m2 n’est pas modifiée par l’action des supercharges et donc que O(y), ψ(y) et F (y) doivent avoir la même masse. De plus,comme les supercharges

Q et ¯Q commutent avec les générateurs des transformations de jauge, il va de soi que chaque

élément d’un supermultiplet vit dans la même représentation du groupe de jauge : on a donc les mêmes nombres quantiques pour caractériser les superpartenaires [33]. Cependant, il est clair qu’aucun superpartenaire respectant ces critères n’a été observé. Par exemple, il n’existe évidemment aucune particule scalaire de la charge et de la masse de l’électron. Il est donc nécessaire que la supersymétrie soit brisée. Le fait qu’une symétrie doive être brisée pour qu’une théorie soit viable ne nous est pas inconnu. On sait, par exemple, que la symétrie électrofaible du SM doit être brisée spontanément par le mécanisme de Higgs afin de donner une masse aux différentes particules. Cependant, il s’avère qu’il est beaucoup plus complexe de briser la supersymétrie d’une façon viable.

Comme aucun superpartenaire n’a été découvert, les masses de ces derniers doivent toutes être exclusivement plus élevées que leur partenaire connu. Une simple brisure spontanée provenant du MSSM, comme il est montré, ne permet pas de réaliser un tel phénomène. Il est donc nécessaire de se tourner vers une brisure explicite. Cependant, une telle brisure doit être effectuée avec précaution pour ne pas détruire les aspects attrayants de la supersymétrie, dont la suppression des divergences à tous les ordres.

1.4.1 Brisure spontanée et supertrace

De façon générale, pour briser une symétrie de manière spontanée, on veut que le Lagrangien soit invariant sous la symétrie mais que l’état de vide (ground state) ne le soit pas. Dans le cas de la supersymétrie, ceci implique qu’on a les conditions suivantes lorsqu’on applique une

15. On réfère à la composante scalaire du multiplet chiral comme la composante zéro, comme c’est fait dans la littérature.

transformation sur le vide

Q|0i 6= 0, Q|0i 6= 0.¯ (1.36) Également, il est possible de montrer que cet état du vide doit être strictement positif. En utilisant l’algèbre 1.17

{Qα, ¯Qα˙} = −2σα ˙0αP0+ 2σiα ˙αPi, (1.37) puis en utilisant le fait que P0 = H et que seule la matrice σ0 a une trace non nulle, on peut isoler l’hamiltonien en prenant la trace de chaque côté

{Q1, ¯Q˙1} + {Q2, ¯Q˙2} = 4H. (1.38)

En prenant la valeur moyenne, on obtient alors de façon explicite h0|H|0i = 1

4(|| ¯Q˙1|0i||

2+ ||Q

1|0i||2+ || ¯Q˙2|0i||2+ ||Q2|0i||2) > 0, (1.39)

qui est clairement une quantité strictement positive si l’espace de Hilbert a une norme positive et que la supersymétrie est brisée. On a donc la condition h0|H|0i > 0 à respecter pour avoir un bris de supersymétrie. Si on peut négliger le présence de condensats et des configurations de champs avec une topologie non triviale, alors la condition devient h0|V |0i > 0, où V est le potentiel scalaire16. On peut montrer que ce potentiel scalaire a la forme

Vscalaire = FiFi+ 1 2D

aDa, (1.40)

où les Fi et Da sont respectivement les champs auxiliaires des supermultiplets chiraux et de jauge pour lesquels on résout l’équation du mouvement. On voit donc que pour briser la supersymétrie, il faut avoir Da 6= 0, Fi 6= 0, ou une théorie qui ne permet pas d’obtenir simultanément Da = 0 et Fi = 0. Dans un premier temps, il est possible d’avoir un bris de symétrie causé par le terme D si on ajoute au potentiel scalaire un terme linéaire LFI= −ξD. C’est ce qu’on appelle le mécanisme de Fayet-Iliopoulos [16]. Pour qu’un tel terme linéaire apparaisse dans le Lagrangien, il est nécessaire que le groupe de jauge contienne une symétrie

U (1). Toutefois, il est possible de montrer que ce type de brisure ne peut survenir à travers

le U (1)Y du MSSM. Également, même si on suppose l’existence d’une symétrie U (1) à haute énergie et qu’on brise la supersymétrie avec le mécanisme de Fayet-Iliopoulos, il est très difficile de retomber sur les masses appropriées pour le MSSM.

Un type de brisure plus intéressant pour respecter la phénoménologie est la brisure de type F , donnée par la condition Fi6= 0. Toutefois, il n’est pas trivial d’obtenir un modèle qui permet une telle brisure. Par exemple, si on prend le superpotentiel avec un seul superchamp Φ

W = 1

2

2, (1.41)

16. Le potentiel des fermions ne peut évidemment pas apporter à la théorie un vev non nul sans briser l’invariance de Lorentz.

et qu’on cherche l’équation du mouvement pour F† à partir des interactions Lint =

Z

d2θ W = mφF + fermions, (1.42) et du terme cinétique FF , on trouve F= −mφ, qui donne évidemment F = F† = 0 pour la valeur φ = 0 (ce qui correspond à la figure 1.3a où la supersymétrie est préservée). Pour illustrer comment le mécanisme de type F fonctionne, on utilise le modèle de O’Raifeartaigh [38], qui est probablement le modèle le plus simple permettant une telle brisure. On a donc le superpotentiel WO’R= −kΦ1+ mΦ2Φ3+ y 2Φ1Φ 2 3, (1.43)

avec les Φ des superchamps chiraux. On obtient le potentiel scalaire avec

V (φi, φi) = |F1|2+ |F2|2+ |F3|2. (1.44)

Les différents Fi sont obtenus à l’aide de l’équation du mouvement ∂Lint

∂F = ∂Lint ∂F† = 0 avec, Lint= Z d2θWO’R= −kF1+ m(φ2F3+ φ3F2− ψ2ψ3) + y(φ1φ3F3+ 1 2F1φ 2 3− 1 2φ1ψ3ψ3− φ3ψ1ψ3) + h.c., ce qui nous donne pour les Fi† suivants,

F1= k −y 2φ 2 3 (1.45) F2= −mφ3 (1.46) F3= −mφ2− yφ1φ3. (1.47)

Très clairement, on voit qu’il est impossible d’obtenir F1= 0 et F2† = 0 simultanément, ce qui brise la supersymétrie spontanément (figure 1.3b). Pour confirmer que cette dernière est bel et bien brisée, on peut vérifier le spectre des différentes particules de la théorie.

Sans démonstration, on obtient pour un régime particulier de paramètres les masses suivantes pour les 6 ddls bosoniques [31]

0, 0, m2, m2, m2− yk, m2+ yk. (1.48)

En contrepartie, on peut montrer que

0, m2, m2, (1.49)

sont les masses carrées pour les 3 spineurs de Weyl à 2 composantes. Ainsi, on voit en compa- rant1.48et1.49que la dégénérescence sur les masses des superpartenaires est levée. Toutefois, on peut déjà entrevoir un problème au niveau phénoménologique avec cette brisure. Parmi les

φ V (φ, φ†)

(a) Minimum supersymétrique pour le po- tentiel scalaire

φ V (φi, φi)

P

i|Fi2|

(b) Minimum non supersymétrique pour le potentiel scalaire

Figure 1.3 – Potentiel scalaire pour un minimum supersymétrique et non supersymétrique sans bris de symétrie interne. La symétrie U (1)R est préservée par ces potentiels.

masses 1.48, on retrouve la masse carrée m2− yk qui est inférieure à celle du fermion. Ceci est bien évidemment interdit par l’expérience. Le modèle de O’Raifeartaigh ne semble donc pas approprié pour briser la supersymétrie. Il s’avère en fait que cette conséquence est une caractéristique générale des modèles de brisure par le terme F . Ceci s’explique par le fait que pour toute interaction en type d’arbre, la supertrace définie par,

STr(M2) = X

particules

(−1)2s(2s + 1)m2, (1.50)

doit toujours être nulle, si on suppose la conservation des saveurs [33]. On peut d’ailleurs vérifier que c’est bien le cas pour les masses précédentes. La seule façon de contourner adé- quatement17cette règle est de supposer que la supersymétrie est brisée, possiblement par un terme F , mais dans un secteur autre que celui du MSSM, ce qu’on appelle le secteur caché. La brisure est ensuite transmise de manière radiative ou indirecte au MSSM. C’est ce qui est étudié au prochain chapitre.

1.4.2 Brisure explicite

Il est donc évident qu’on ne peut briser la supersymétrie directement dans le secteur du MSSM sans obtenir des masses problématiques pour les superpartenaires. Ceci implique qu’on doit supposer que la supersymétrie est brisée dans un secteur caché, puis transmise d’une manière quelconque au secteur visible. Toutefois, sans même s’attarder au mécanisme de brisure et de transmission, il est possible de paramétriser notre ignorance par l’ajout d’une brisure explicite au Lagrangien du MSSM par ce que l’on appelle des termes soft. Ces termes doivent bien sûr être contraints à plusieurs niveaux pour préserver la suppression des divergences quadratiques à tous les ordres. On peut montrer que les termes respectant les critères suivants,

17. Il est toujours possible d’introduire des termes de mixage qui brise la symétrie des saveurs, mais il devient très difficile de construire un modèle viable [33].

1. Le produit de champs scalaires φ(x) doit être holomorphe et superrenormalisable ; 2. Les termes de masses des scalaires φ(x) et des gauginos λa(x) peuvent être présents ; 3. Le champ auxiliaire F(x) peut apparaître dans une interaction superrenormalisable,

permettent effectivement de préserver l’attrait principal de la supersymétrie [23]. Le Lagran- gien des termes soft peut donc s’écrire en toute généralité comme

Lsoft= − 1 6a abcφ aφbφc+ 1 2b abφ aφb+ taφa+ uabφaFb†+ vaFa†+ h.c.  − (m2)abφaφb†,

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