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I.10 Choix méthodologiques

I.10.1 Choix du système de la propriété intellectuelle dans le contexte des

I.10.1.2 Biotechnologie et propriété intellectuelle

D’après l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle6, la propriété intellectuelle

« désigne les œuvres de l’esprit : les inventions, les œuvres littéraires et artistiques et les emblèmes, noms et images utilisés dans le commerce » et englobe deux volets : la propriété 6 Source : www.wipo.int

industrielle (qui comprend les inventions, les marques, les dessins et modèles industriels, et les indications géographiques) et le droit d’auteur. L’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle utilise le terme de « système » de la propriété intellectuelle et précise que ce système vise à équilibrer les intérêts de l’innovateur et l’intérêt public, tout en créant un environnement propice à la créativité et à l’invention, au profit de tous. D’une part, il tente de fournir des incitatifs à l’innovation, par le biais de droits de propriété dont peuvent se doter les créateurs de nouveaux produits. D’autre part, il se doit de favoriser un accès, le plus large possible, à ces innovations (Barrett, 2004).

Tel que précédemment mentionné, le développement et la commercialisation des innovations biotechnologiques sont de plus en plus présents dans la société d’aujourd’hui, et ceci se traduit par le nombre croissant de brevets dans ce secteur (Arundel et Rose, 1999). Dès 1980, les mécanismes relatifs à la propriété intellectuelle ont été étendus aux innovations biotechnologiques, en prenant notamment en considération l’appropriation industrielle des organismes vivants (Desbois, 2004). Néanmoins, les ajustements réalisés ne sont pas toujours adaptés aux défis soulevés par le secteur des biotechnologies (cf. Gold et al., 2002) et les nouveaux régimes mis en œuvre sont, aujourd’hui encore, instables (cf. Coriat et Orsi, 2002). D’une manière générale, les recherches relatives au système de la propriété intellectuelle des innovations biotechnologiques s’intéressent aux impacts des brevets sur « la santé, la biodiversité et la sécurité environnementale, le partage des bénéfices générés par la recherche et les découvertes, et la dissémination de nouveaux produits et processus agricoles et pharmaceutiques » (Gold et al., 2002, p. 327). Une autre problématique centrale concerne les flux financiers, engagés dans les réglementations de la propriété intellectuelle et dans le secteur de la biotechnologie des pays développés (Gold et al., 2002). Les lois internationales et leurs effets sur le système de la propriété intellectuelle suscitent également un vif intérêt, les régimes de propriété intellectuelle implantés pouvant fortement différer d’un pays à un autre (Gold et al., 2003).

Avant de démontrer la complexité et le caractère dynamique du système de la propriété intellectuelle des innovations biotechnologiques, un survol des composantes de la propriété intellectuelle est proposé.

Composantes de la propriété intellectuelle

D’après Corbel (2007, p. 27), « les droits de la propriété intellectuelle constituent un ensemble assez vaste d’outils juridiques destinés à protéger la création intellectuelle ». L’un des droits fondamentaux est la protection des inventions par brevet. Ces droits incluent aussi les marques de commerce, les appellations commerciales et les droits d’auteur (Corbel, 2007)7. Les droits de la propriété intellectuelle constituent des actifs protégés, qui peuvent

être vendus, loués, échangés ou donnés ; et leurs propriétaires peuvent empêcher leur utilisation ou leur vente non autorisées (Schneider, 2002). Néanmoins, chacun de ces droits peut être contesté, contourné, voire enfreint (cf. Barrett, 2004). En outre, hormis les droits légaux, il existe d’autres mécanismes de valorisation intellectuelle, comme par exemple le secret industriel (cf. Schneider, 2002 ; Barrett, 2004) et le savoir-faire (cf. Corbel, 2007).

1) Le brevet

« Le brevet constitue à la fois la reconnaissance de la paternité d’une invention technique et un droit exclusif de l’exploiter » (Corbel, 2007, p. 28). Le brevet peut être vu comme un accord, à durée limitée, entre l’inventeur et le public : en échange de la fabrication et de la divulgation complète de l’invention, le public (représenté par le gouvernement) accorde à l’inventeur le droit d’empêcher un tiers de fabriquer, d’utiliser ou de vendre cette invention (Barrett, 2004). Le dépôt du brevet se fait auprès d’offices publics de propriété intellectuelle, qui ont la responsabilité d’accorder ou non ce droit de protection – voire de le retirer après octroi si sa non-validité est prouvée. Ces organismes spécialisés doivent notamment vérifier que l’invention est nouvelle, implique une activité inventive et est susceptible d’application industrielle. La protection accordée permet ensuite d’éviter que d’autres individus ou d’autres organisations exploitent le fruit de l’ingéniosité de l’inventeur. Tant que le brevet est en vigueur, son propriétaire dispose donc d’un monopole sur l’invention. Il peut l’exploiter seul, le céder, ou accorder le droit à d’autres entreprises de l’exploiter en contrepartie de redevances. Cependant, dès lors que le brevet expire (soit après vingt ans pour une grande majorité des pays et des inventions), l’invention peut être utilisée par chacun, sans autorisation ni paiement de droits à l’inventeur (Corbel, 2007).

La protection par brevet peut toutefois être difficile à faire respecter. Premièrement, il existe le risque de contrefaçon. Des recours sont évidemment possibles afin que le détenteur du

7 Corbel (2007) cite également les dessins et modèles, mais ces droits ne s’appliquent pas au secteur de la

brevet puisse défendre ses droits, mais les procès en contrefaçon sont généralement très longs et coûteux. Dans le domaine de la santé, les procès de contrefaçon sont d’ailleurs très nombreux. Deuxièmement, au-delà de la contrefaçon, subsiste le risque de contournement du brevet, soit la création de nouvelles technologies aboutissant au même résultat, mais par des moyens différents. Bien que le brevet doive constituer une barrière à l’imitation, de nombreuses recherches reconnaissent que la plupart des technologies brevetées sont imitées : le brevet ne permettrait pas d’empêcher les imitations, mais uniquement de repousser leur arrivée sur le marché. Troisièmement, il existe des risques reliés à l’utilisation de licences sur brevets, soit dans les situations où le breveté, tout en restant propriétaire, « loue » son brevet à un tiers, afin de lui accorder le droit de l’exploiter : 1) les licenciés peuvent perfectionner la technologie de base et renverser le rapport de dépendance ; 2) les licenciés peuvent devenir de redoutables concurrents, notamment à l’expiration du brevet (cf. Corbel, 2007).

Comme le souligne Goutal (2006, p. 34), « il y a peu de secteurs où les brevets sont plus indispensables que celui des produits de la santé, car aucune entreprise ne peut se permettre de faire les investissements nécessaires pour mettre de nouveaux médicaments sur le marché sans être assurée d’un minimum de protection ». Le processus de recherche et de développement de nouveaux médicaments, et plus précisément de création de nouvelles molécules, est un processus si complexe, long et coûteux, qu’il nécessite effectivement d’être protégé par une situation de monopole. De ce fait, des brevets sont systématiquement déposés sur les molécules créées et potentiellement intéressantes. Il est de plus courant de déposer une série de brevets, visant à protéger toutes les technologies complémentaires qui peuvent être créées en rapport avec le médicament (par exemple, les procédés de fabrication). La question de ce qui est brevetable ou non est cependant complexe. Notamment, tandis que le brevet permet de couvrir des techniques d’obtention de nouvelles variétés végétales (que ce soit par des voies naturelles ou via le génie génétique), la protection de la nouvelle variété elle-même pose problème (Corbel, 2007). Les méthodes de protection des plantes varient d’un pays à un autre : aux États-Unis, il existe trois formes différentes de protection (le Plant Patent Act, le Plant Variety Protection Act, les brevets d’utilité) ; la majorité des pays en Europe utilise des « certificats d’obtention végétale », en accord avec la Convention internationale de l’Union pour la Protection des Obtentions Végétales (UPOV) ; dans les pays en voie de développement, la protection est généralement faible (Nelson, 2005). D’une manière générale, les interactions entre le système de brevet et

le domaine des sciences de la vie soulèvent de nombreuses questions et l’application des critères de brevetabilité aux inventions biotechnologiques est problématique. Afin de répondre à ces nouveaux enjeux, des efforts ont récemment été entrepris par l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle, pour définir clairement l’application de la propriété intellectuelle et des brevets aux sciences de la vie8 :

 En 1999, un groupe de travail constitué d’experts en biotechnologie s’est réuni afin de déterminer les questions clés liées à la biotechnologie et aux droits de la propriété intellectuelle.

 En 2001, une enquête a été menée sur les pratiques en matière de protection par brevet des inventions biotechnologiques et sur les systèmes de protection des variétés végétales.  Entre 2002 et 2007, une série de colloques a été organisée, afin de traiter de questions

relatives à la coexistence des brevets et du droit d’obtenteur dans la promotion des innovations biotechnologiques, aux droits de la propriété intellectuelle dans le domaine de la biotechnologie végétale et de manière plus générale, en matière de sciences de la vie.

De nombreux efforts ont également été menés pour harmoniser le système des brevets au plan régional et international. Entre autres, l’accord Patent Cooperation Treaty (PCT) a comme objectif de faciliter l’extension internationale des brevets (Corbel, 2007). De même, la protection des plantes fait aujourd’hui l’objet de lois internationales, dont notamment : 1) les Accords Internationaux sur la Protection des Droits Intellectuels (ADPIC), qui préconisent la protection des variétés par un système de brevets, par un système sui generis ou par une combinaison des deux systèmes ; 2) la Convention sur la Diversité Biologique (Nelson, 2005). C’est d’ailleurs dans cette perspective d’harmonisation, qu’ont été créés des organismes multinationaux, tels que l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI), l’Office Européen des Brevets (OEB), ou encore, l’Organisation Africaine de la Propriété Intellectuelle (OAPI). Néanmoins, l’harmonisation internationale reste partielle, et des différences notables perdurent dans les législations concernant le brevet. Selon Corbel (2007, p. 29-30), ces différences concernent principalement :

 Les règles de priorité. Par exemple, en France, la priorité est généralement donnée au premier déposant du brevet, tandis que c’est la règle du premier inventeur qui s’applique aux États-Unis.

 La diffusion de l’information. Alors que dans la plupart des pays, le contenu d’un brevet est diffusé avant qu’il soit accordé, certains (dont les États-Unis) ne privilégient sa diffusion qu’au moment de la délivrance du brevet.

 Le champ de brevetabilité. Des différences existent au niveau de la brevetabilité du vivant (cas de la biotechnologie) et des logiciels. Sur ce point, l’Amérique du Nord est généralement moins restrictive que l’Europe.

En définitive, par le monopole qu’il permet d’obtenir sur une invention, le brevet représente une valeur économique pour l’inventeur (Schneider, 2002). Les bénéfices générés par cette protection sont néanmoins à comparer aux coûts qu’elle engendre. En effet, bien que le coût du dépôt d’un brevet soit faible (par exemple, en France, il se limite à quelques dizaines d’euro), les frais qu’il encourt peuvent devenir potentiellement élevés. Ces frais concernent notamment les services liés à la recherche d’antériorité, le conseil dans la rédaction des brevets, l’extension éventuelle à d’autres pays, ou encore, les procès en cas d’attaque ou de contrefaçon (Corbel, 2007).

2) La marque de commerce / l’appellation commerciale

« Une marque est un signe distinctif, source de différenciation pour les produits et services proposés par une entreprise » (Corbel, 2007, p. 30). Les marques jouent un rôle décisif dans le marché, étant donné qu’elles permettent aux consommateurs d’identifier la source des produits et services (Barrett, 2004). Pour pouvoir être déposée et utilisée, une marque doit être distinctive, disponible et licite. Néanmoins, dans certains pays, notamment au Canada et aux États-Unis, le dépôt des marques auprès de l’organisme responsable n’est pas obligatoire (Corbel, 2007).

3) Le droit d’auteur

Les droits d’auteur se veulent une protection de toute œuvre de l’esprit et ne nécessitent aucun dépôt, ni aucune formalité. Ces droits d’auteur incluent les droits patrimoniaux ainsi que les droits moraux imprescriptibles et inaliénables (Corbel, 2007). D’une manière générale, les droits d’auteur visent à stimuler la création de l’art, de la littérature, de la musique, et de toute autre forme de travaux d’auteur, afin d’en faire bénéficier le public. Ces droits peuvent par exemple concerner la description d’une nouvelle théorie publiée dans un article (Barrett, 2004).

4) Le secret industriel

Le secret industriel se définit comme « l’information, incluant une formule, un modèle, une compilation, un programme, un procédé, une méthode, une technique ou un processus, qui dérive de la valeur économique actuelle ou potentielle du fait qu’elle n’est connue ou facilement vérifiable par les autres et qui est sujette à des efforts raisonnables en vue d’être maintenue secrète » (Barrett, 2004, p. 5). La protection du secret industriel décourage ainsi les comportements abusifs de la part des concurrents et permet de maintenir une certaine moralité commerciale sur le marché (Barrett, 2004).

5) Le savoir-faire

Le savoir-faire d’une organisation englobe un ensemble d’informations pratiques non brevetées, qui résultent de l’expérience et qui ont été testées. Il s’agit tant de connaissances relativement formalisées et internes à l’entreprise, que de connaissances tacites plus difficiles à formaliser (Corbel, 2007). Comme le souligne Corbel (2007, p. 37), la gestion des savoir- faire soulève deux questions d’ordre managérial :

 La question de la préservation du savoir-faire dans un contexte d’utilisation croissante de l’intelligence économique (clauses de confidentialité et de non concurrence dans les contrats de travail, protections physiques et logicielles, etc.).

 La question de la formalisation, du stockage et de la diffusion de ces connaissances, de manière à éviter qu’ils ne disparaissent de l’entreprise avec le départ de certaines ressources clés.

Système de la propriété intellectuelle des innovations biotechnologiques

D’une manière générale, il est reconnu que les droits de la propriété intellectuelle constituent un outil juridique et de développement économique (Hiance, 2006), qui fournit un incitatif nécessaire à l’innovation. Cependant, il est difficile d’isoler les effets de la propriété intellectuelle sur l’innovation, et ce, d’autant plus dans le cas de la biotechnologie qui est un secteur soumis à de rapides changements (CIPP, 2004a) et qui s’appuie sur des méthodes ultra sophistiquées. En outre, les mécanismes de la propriété intellectuelle, et plus particulièrement des brevets, sous-tendent de plus en plus d’impératifs, ceux-ci concernant l’éthique, l’environnement, l’accès aux médicaments, la protection des ressources génétiques, la protection des savoirs traditionnels, le partage des avantages, etc. Face à ces nouvelles problématiques, la responsabilité de la propriété intellectuelle est peu comprise (Hiance, 2006).

Les régimes et les pratiques de la propriété intellectuelle doivent être compris en termes de système, qui inclut un ensemble de lois, de pratiques d’affaires, de pratiques gouvernementales et d’institutions, dans une nation, une région ou à l’échelle planétaire, qui crée ou limite les droits exclusifs relatifs aux nouvelles connaissances (CIPP, 2005). De ce fait, les composantes de la propriété intellectuelle ne peuvent être étudiées d’une manière isolée, ni indépendamment de leur contexte. Par exemple, l’effet des brevets sur l’innovation ne peut être évalué que dans le système intégral de la propriété intellectuelle, qui s’imbrique lui-même dans un système plus large qu’est celui de l’innovation (CIPP, 2004a), ce système étant à lui seul un système complexe dynamique (Milling, 2002). Ou encore, les effets du système de la propriété intellectuelle, et en particulier des brevets, dépendent de nombreux facteurs, tels que le type de la technologie protégée, le secteur et le modèle d’affaires de l’organisation détentrice du droit (Garrison et Austin, 2006).

Dans cette section, le système de la propriété intellectuelle des innovations biotechnologiques est décrit tel un système complexe à caractère dynamique, qui implique de nombreux éléments de nature diversifiée et en interaction, ainsi que de nombreuses parties prenantes.

1) Les éléments du système

Le système de la propriété intellectuelle ne peut être caractérisé uniquement en termes de « simples » problèmes juridiques (Corbel, 2007) : « il faut en effet aussi prendre en compte, et peut-être d’abord prendre en compte, toutes autres considérations que juridiques » (INPI, 2003, p. 135). Comme le souligne Vivant (2006, p. 189), « on ne peut pas penser un instrument juridique comme s’il existait dans un superbe isolément ». Selon cet auteur, les questions relatives à la propriété intellectuelle en matière d’innovations biotechnologiques soulèvent trois aspects : technique, éthique et économique. L’INPI (2003) recommande également de prendre en considération des éléments politiques et culturels. En définitive, le système de la propriété intellectuelle inclut tant des aspects relatifs au droit, qu’à la gestion, l’éthique et l’économie (CIPP, 2005), ces aspects ne pouvant être dissociés.

Tout d’abord, bien que le système de la propriété intellectuelle soit effectivement un ensemble d’outils juridiques visant à protéger les savoirs, son rôle va au-delà : il contribue également à la création de nouveaux savoirs. En effet, le rôle des brevets n’est pas uniquement de protéger l’ingéniosité d’un inventeur. Il se veut également un moyen de

diffuser des connaissances, étant donné qu’en son absence, l’inventeur a intérêt à garder secrètes ses activités et avancées inventrices. Il peut notamment avoir un rôle dans la génération de nouveaux savoirs, d’une part en favorisant les possibilités de coopération entre les organisations, et d’autre part, en étant utilisé tel un outil de créativité et de gestion des connaissances et un outil de motivation (Corbel, 2007). La gestion des savoirs et des connaissances fait ainsi partie intégrante de ce système, tant au niveau macro que micro. Par ailleurs, les droits de la propriété intellectuelle sont eux-mêmes devenus des armes stratégiques très puissantes dont peuvent user les organisations. Dans cette logique stratégique, la gestion des brevets dépasse les enjeux juridiques : ils peuvent participer à la stratégie et aux questions d’ordre managérial des entreprises (Corbel, 2007) et être gérés comme une ressource immatérielle à l’origine d’un avantage concurrentiel (Ayerbe et Mitkova, 2005). D’après Schneider (2002), les organisations du secteur de la biotechnologie puisent effectivement leur fondation dans le système de la propriété intellectuelle, qui se veut une force motrice pour la croissance et l’investissement, et permet ainsi de renforcer les attributs d’affaires.

De plus, « on ne peut omettre les aspects éthiques du management des droits de la propriété intellectuelle » (Corbel, 2007, p. 194). En effet, la propriété intellectuelle soulève également des questions d’ordre moral. Cette vérité est d’autant plus présente dans les domaines sensibles, tels que la biotechnologie (Corbel, 2007) qui touche non seulement des problématiques environnementales, mais également liées à l’agriculture, à la nutrition et à la santé humaine (CIPP, 2005). Ainsi, la brevetabilité des inventions biotechnologiques sous- tend des défis non seulement techniques, mais également des enjeux moraux et éthiques (Huang et al., 2005a). De ce fait, le débat de la protection des innovations biotechnologiques se caractérise par la présence incontournable des préoccupations éthiques (Galloux, 2006 ; Gaumont-Prat, 2006) et philosophiques (INPI, 2003). Notamment, des recherches ont été conduites pour clarifier la justification morale des brevets pharmaceutiques, celle-ci s’articulant autour des concepts de justice, de liberté, de bien-être, de droits humains, etc. (cf. Gewertz et Amado, 2004). Indéniablement, des interactions existent entre le système de la propriété intellectuelle, la réglementation en matière de produits biotechnologiques et biomédicaux, la santé, la sécurité, l’efficacité et les incidences sur l’environnement9.

En outre, le système de la propriété intellectuelle se veut également un outil de développement économique (Hiance, 2006) : « en théorie, le but de la propriété intellectuelle est d’encourager la croissance intellectuelle et économique » (Huang, 2005b, p. 13). D’une manière générale, il est reconnu que les droits de la propriété intellectuelle jouent un rôle primordial de soutien à l’innovation, qui serait la clé première de la compétitivité (INPI, 2003). La propriété intellectuelle joue aussi un rôle de promotion de l’efficience et de l’innovation, et est inextricablement liée aux politiques de concurrence sur le marché. Les problématiques sous-jacentes s’articulent notamment autour de l’abus des droits de la propriété intellectuelle et la compétition déloyale, ou encore, de la pertinence des politiques de concurrence dans les pays en voie de développement (cf. Bhattacharjea, 2006).

Plus précisément, une étude menée par le CIPP (2005) a permis de dégager des axes d’investigation qui fournissent une manière d’étudier le système de la propriété intellectuelle, de mieux capturer les nuances qu’il revêt et d’obtenir une image plus complète