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Après avoir abordé le fonctionnement de la mitochondrie, nous allons maintenant nous intéresser à la régulation de la biogénèse mitochondriale.

a) Généralités

La biogénèse mitochondriale (BM), aussi appelée « activation de l’expression protéique mitochondriale», se définit comme l’ensemble des processus menant à la formation de nouvelles mitochondries. La BM nécessite l’interaction des génomes nucléaires (ARNnuc)

et mitochondriaux (ARNmt), car comme le fait remarquer Hoppeler(Hoppeler & Fluck, 2003)

différentes protéines constituant les membranes internes et externes de la mitochondrie sont impliquées dans la bêta-oxydation, le cycle de Krebs ou encore la chaîne de respiration mitochondriale. Or, seulement quelques une de ces protéines sont codées dans l’ARNmt alors

que la plupart sont codées dans l’ARNnuc. En effet l’ARNmt n’est constitué que de 16 659

nucléotides (contre environ 3 milliards pour l’ARNnuc) codant notamment pour 13 ARN

messagers, 22 ARN de transfert et 2 ARN ribosomiques essentiels pour la fonction mitochondriale. Toutefois, l’ensemble des protéines codées dans le génome nucléaire ainsi que les phospholipides constituant la membrane vont être intégrés à leur emplacement propre (après avoir été synthétisés dans le cytosol) afin que la BM puisse avoir lieu. Pour exemple, une étude de Little et al. (Little et al., 2010) a mis en évidence qu’au repos la majorité de PGC1α (peroxisome proliferator-activated receptor gamma coactivator 1-alpha), un des régulateurs clé de la BM, était concentré dans le cytosol mais qu’après 90 min de pédalage à 65% de VO2max le contenu protéique nucléaire de PGC1α avait augmenté de 54% sans que le

contenu total (cytosol+noyau) n’ait été modifié. Ce résultat démontre bien que les protéines cytosoliques sont importées et non pas produites à l’intérieur de la mitochondrie. Par ailleurs, de nombreuses études (Liang & Ward, 2006; Gibala et al., 2009; Serpiello et al., 2012) ont mis en exergue que l’expression de ce gène était contrôlée par d’autres facteurs comme p38 MAPK (p38 mitogen-activated protein kinase), AMPK (5’ AMP-activated protein kinase), CaMK II (Calcium calmodulin-dependent protein kinase II) qui eux-mêmes étaient activés par la contraction musculaire (Figure 9). En effet, l’interaction coordonnée de ces molécules de signal, ainsi que des facteurs d’activation ou d’inhibition de transcriptions permettent à la BM d’être initiée. Ainsi PGC1α agit par exemple sur des facteurs de transcriptions clés tels que TFAM (mitochonrial transcriptor factor A), NRF1 (nuclear respiratory factor 1) ou encore MEF2 (myocyte enhancer factor 2). Aussi, HDAC (histone deacetylase) influe sur la BM en pouvant inhiber l’activation de certains co-activateurs et/ou facteurs de transcriptions.

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Il existe de nombreux stimuli pouvant initier la BM comme le stress cellulaire ou diverses sollicitations environnementales. Dans le cadre de cette thèse, nous nous intéresserons uniquement à l’un des stimuli les plus importants : l’exercice physique / la contraction musculaire (qui ne peut être dissocié de l’apparition du SO).

49 MEF2 NFAT tr an sc rip tio n HDAC AMPK ARNm Cn A CAMKs AMPK PGC1α ↘ ATP/AMP

Contraction Stress oxydatif

p38 MAPK Ca2+ Noyau TFAM PGC1α NRF ARN transcription ADNm Gènes mitochondriaux Cytoplasme

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b) Effet de l’entrainement sur la BM

En 1967, Holloszy (1967) fut le premier à montrer que l’entrainement en endurance permettait l’activation de la BM dans le muscle strié squelettique. Depuis d’autres études récentes ont apporté la preuve que l’interval-training (4x30 sec séparés par 4 min de récupération) (Burgomaster et al., 2008; Gibala et al., 2009) ou l’entrainement en endurance de force (Balakrishnan et al., 2010) pouvaient aussi initier la BM dans ce même tissu. Ces deux formes d’entrainement peuvent ainsi augmenter jusqu’à 50% le volume mitochondrial chez des hommes non-entraînés et augmenter en parallèle l’oxydation des lipides. Depuis, plusieurs travaux ont montré que la contraction musculaire par stimulation électrique in vitro (Xia et al., 1997; Connor et al., 2001) et in vivo (Essig, 1996; Hood, 2001) conduisait à la BM. A l’inverse, d’autres auteurs ont mis en évidence que la dénervation ou une activité musculaire diminuée, par immobilisation ou exposition à la microgravité, entrainait une diminution importante de la densité mitochondriale (Wicks & Hood, 1991; Ferretti et al., 1997).

Longtemps, les mécanismes pouvant expliquer pourquoi l’entrainement en endurance pouvait augmenter la capacité oxydative du muscle sont restés flous. Ainsi Gollnick en 1969 (Gollnick & King, 1969) et Kiessling en 1971(Kiessling et al., 1971)ont respectivement fait état d’une augmentation du nombre de mitochondrie et de leur taille après l’entrainement sans toutefois pouvoir aller plus loin dans leurs analyses de résultats du fait du manque de moyens techniques. Plus récemment, une étude basée sur 10 sujets sédentaires s’entrainant 5 fois 30 min par semaine pendant 6 semaines a montré une augmentation de 40% du volume total mitochondrial du vastus lateralis (Hoppeler et al., 1985). Cette augmentation importante ne s’accompagna que de seulement 14% d’amélioration de la VO2max. Ceci peut toutefois

facilement s’expliquer car les adaptations dues à l’exercice ne s’observent que majoritairement dans les muscles spécifiques de la tâche (i.e vastus lateralis pour exercice de pédalage). Les 40% d’augmentation du volume en mitochondries sont donc à relativiser par le désentraînement des muscles statiques en cyclisme (bras). Ainsi Rösler et al. (1985) montra une chute de 20% de la densité mitochondriale dans le deltoïde après 8 semaines d’entrainement sur ergocycle.

Enfin, des études utilisant différentes techniques ont montré que l’entraînement en endurance augmentait en majorité le contenu en mitochondries sous-sarcolemmales (SS) plutôt que le contenu en mitochondries inter-myofibrilles (Hoppeler et al., 1985; Bizeau et al., 1998; Chilibeck et al., 1998; Roussel et al., 2000).

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c) Effet de l’exercice aigu sur la BM

Bien que peu d’études soient disponibles sur les effets potentiels de l’exercice aigu d’intensité modérée à maximale sur la BM, certains auteurs ont toutefois explorées différentes voies de signalisation. Ainsi Gibala et al. (2009) ont montré qu’immédiatement après la 4ème répétition de 30 sec de pédalage maximal, entrecoupées de 4 min de récupération, la forme phosphorylée d’AMPK (p-AMPK) et p38MAPK étaient significativement augmentées comparativement aux valeurs de repos. De plus 3 h post-exercice, l’ARNmt de PGC1α était

approximativement multiplié par 2 par rapport au repos. Cependant, cette augmentation ne s’est pas traduite en parallèle par une augmentation du contenu protéique en PGC1α, comme précédemment montré dans deux autres études effectuées chez l’homme mais cette fois pour des intensités modérées de respectivement 1 h et 3 h d’exercice (Watt et al., 2004; Coffey et

al., 2007). Une autre étude (Little et al., 2011) a aussi mis en évidence que le même

protocole utilisé par Gibala et al. (4 x 30 secondes de sprints maximaux séparés de 4 min de repos) (Gibala et al., 2009) permettait une augmentation concomitante de l’ARNmt ainsi que

du contenu protéique nucléaire de PGC1α 3 h post-exercice. De plus, cette augmentation de PGC1α c’est accompagnée de l’augmentation des ARNm de COX II, COX IV (cytochrome c

oxydase II et IV) et de CS (citrate synthase), puis de l’augmentation du contenu protéique de ces mêmes enzymes. Cependant, bien qu’une augmentation nucléaire de PGC1α ait été observée, le contenu protéique dans l’ensemble de la cellule n’a pas changé. Ainsi la modification de la concentration en PGC1α pourrait principalement être due au temps nécessaire pour synthétiser la protéine, soit comme déjà étudié chez l’homme, au bout de 24 h de récupération (Perry et al., 2010). A l’inverse les résultats du travail de (De Filippis et al., 2008) ont permis de voir une augmentation de respectivement 20 et 40% du contenu en protéines de PGC1α, respectivement 30 min et 5 h après 4 exercices de pédalage d’intensité modérée. (Gibala et al., 2009) avancent l’hypothèse que ces différences de résultats pourraient être dues à un volume et temps de travail bien plus important dans l’étude de De Filippis (rapport de 1/20) (De Filippis et al., 2008).

Cette hypothèse pourrait être validée par les résultats obtenus par des chercheurs (Serpiello et al., 2012) ayant comparés le même type d’exercice une première fois en session unique puis en répétition pendant 4semaines). En effet, ils ont trouvé, en aigu, une augmentation seule de l’ARNmt de PGC1α, puis une augmentation de l’ARNmt et du contenu

en protéine. Ainsi la charge de travail (volume et temps) pourrait effectivement être un facteur pouvant modifier le temps nécessaire pour synthétiser PGC1α.

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3. Le lactate : un carburant de la mitochondrie et un précurseur de la