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Le biogaz : une énergie issue des déchets 1 La production biologique du biogaz

Synthèse bibliographique

1. Le biogaz, une ressource et des besoins

1.1. Le biogaz : une énergie issue des déchets 1 La production biologique du biogaz

La digestion anaérobie est un processus biologique de dégradation de la biomasse fermentescible. En l’absence d’oxygène, différentes familles de bactéries anaérobies consomment la matière organique et la restituent sous forme de gaz riche en méthane (CH4)

appelé biogaz. La matière résiduelle est appelée digestat.

Le processus se déroule en quatre phases consécutives mettant en jeu différents groupes de bactéries (Figure 3) (Moletta, 2008) :

 l’hydrolyse : dégradation enzymatique de la matière organique composée de molécules complexes en monomères. Cette étape est généralement la plus lente et donc cinétiquement limitante ;

 l’acidogénèse : consommation des monomères produits lors de l’étape précédente pour produire des Acides Gras Volatiles (AGV) tels que l’acide acétique, propionique, butyrique et valérique ;

 l’acétogénèse : dégradation des AGV pour produire les précurseurs directs de l’étape suivante: les acétates et l’hydrogène ;

 la méthanogénèse : production de méthane par consommation de l’acétate (voie acétoclaste) et de l’hydrogène (voie hydrogénotrophe).

Figure 3. Mécanisme biologique de digestion anaérobie

1.1.2 Les modes de production du biogaz

La fermentation anaérobie est un processus qui peut se produire de façon naturelle mais également en conditions contrôlées afin d’optimiser la production de biogaz. On distingue alors deux types de biogaz : le biogaz de décharge et le biogaz de méthanisation.

Le biogaz de décharge est issu de la fermentation anaérobie des ordures ménagères en

Centre d’Enfouissement Technique (CET). La fermentation de ces matières se réalise en deux étapes. Une première phase aérobie qui consomme l’oxygène présent dans le gisement suivie d’une seconde phase anaérobie dès lors que la matière organique se trouve en absence d’oxygène. Le biogaz est alors produit spontanément.

Le biogaz de méthanisation est issu de la digestion anaérobie de matières organiques dans

une cuve de méthanisation en conditions contrôlées. Les déchets utilisés proviennent principalement de l’agriculture (déjections animales, résidus de culture), de l’agro-industrie (boues industrielles, sous-produits animaux, jus de cuisson, graisses, …) ou des municipalités (boues de station d’épuration (STEP), déchets de tonte, Fraction Fermentescible des Ordures Ménagères (FFOM), …). Différentes technologies peuvent être mises en place : elles peuvent être continues (infiniment mélangée ou piston) ou discontinues (batch). Le choix se fait principalement en fonction de la quantité de matière sèche des produits. Les produits secs (type fumier ou ordure ménagère) seront plutôt valorisés par voie sèche (réacteur batch ou

piston) alors que les autres produits (type lisier, boues de STEP,…) seront méthanisés par voie liquide (infiniment mélangé). Les paramètres dimensionnants d’une unité de digestion anaérobie sont le volume de déchet à traiter et le temps de séjour hydraulique appliqué à la matière. En pratique, la digestion anaérobie est généralement mésophile (autour de 38°C) car elle assure un compromis intéressant entre rendement et consommation de chaleur (Kim et al., 2006).

1.1.3 De la biomasse au biogaz : qualité et quantité

Il existe autant de biogaz que de sources de matières organiques. La biomasse fermentescible, d’origine végétale ou animale, se compose de carbone, d’hydrogène et d’oxygène. Ces atomes se trouvent sous forme de glucides (

 C6H12O6), lipides (  C12H24O6) et protéines (  C11H25O7N3S)

dont les proportions varient d’une biomasse à l’autre. La dégradation par les micro- organismes de ces molécules, notées



CcHhOoNnSs, entraine alors la production d’un gaz riche en CH4 et CO2 dont les proportions dépendent de la stœchiométrie de la réaction

(éq. 1). D’autres molécules peuvent également se trouver dans le biogaz tels que NH3 et H2S

dans le cas d’utilisation de matière contenant des protéines (Deublein and Steinhauser, 2011).

 CcHhOoNnSs.H2Ox.CH4

cx

.CO2n.NH3s.H2S éq. 1 Avec   1 4

4ch2o3n2s

x 1 8

4ch2o3n2s

    

Chaque biomasse ayant une composition organique bien définie, le biogaz résultant de sa fermentation anaérobie se caractérise par :

 son potentiel de production de méthane, exprimé en Nm3CH4/tMO, qui correspond au

volume de méthane produit par tonne de matière organique ;

 sa composition volumique, exprimé en %vol., qui correspond à la teneur en unité de

volume en chacune des molécules présentes dans le biogaz.

Cependant, la caractérisation élémentaire de la matière ne permet pas de déterminer le potentiel réel de production de méthane d’un déchet en raison de la complexité du processus qui dépend notamment des inhibitions et de l’accessibilité de la matière.

l’expérience. En effet, cette production peut être estimée à l’aide de tests dit de potentiel méthanogène biologique (PMB). Ils permettent de déterminer le volume de méthane produit par unité de masse de matière brute ou organique et sa teneur en méthane. Le test consiste à incuber une petite quantité caractérisée de matière à l’aide d’un inoculum anaérobie. La production de biogaz totale est quantifiée par mesure de la pression et l’analyse de la compostion permet de connaitre la teneur en méthane du biogaz (Hansen et al., 2004). Comme le montrent le potentiel méthane de quelques déchets agricoles, urbains ou d’agro- industries (Tableau 1), la production de méthane est très variable pour un seul et même substrat. A titre d’exemple, les potentiels méthane des déjections animales, des boues de STEP ou des graisse d’abattoirs peuvent varier du simple au triple. Ceci peut être du à la fois à la matière elle-même (alimentation des animaux, origine des effluents épurés, …) mais également à la méthode d’échantillonnage, les conditions de réalisation des tests PBM, …

Tableau 1. Synthèse des compositions et potentiels méthanes de divers déchets dans la littérature

Biomasse %MS %MO/MS Potentiel méthane m3CH4/tMO Références Déchets agricoles Fumier bovin 16-25% 80-88% 125-450 (Al Seadi, 2008, Moletta, 2011, Amon et al., 2007)

Lisier bovin 5-12% 80-82% 150-400 (Al Seadi, 2008,

Moletta, 2011)

Lisier porcin 3-8% 65-80% 260-550 (Moletta, 2011)

Cannes de maïs 82-88% 78-96% 196-419 (Raposo et al., 2012)

Sorgho - - 260-538 (Raposo et al., 2012)

Déchets urbains

Boues de STEP 15% 75% 240-1200 (Moletta, 2011)

FFOM * 32-60% 32-63% 60-573 (Raposo et al., 2012,

Moletta, 2008)

Tonte de pelouse - - 280-970 (Moletta, 2011)

Déchets d’agro- industries

Déchets de table - - 245-525 (Raposo et al., 2012)

Papier cartons 65% 80% 144-369 (Raposo et al., 2012,

Moletta, 2008) Graisses

d’abattoirs 700-1600 (Moletta, 2011)

* FFOM = Fraction Fermentescible des Ordures Ménagères

La matrice gazeuse du biogaz est complexe (Tableau 2). On constate notamment que le biogaz de méthanisation peut être plus riche en méthane que le biogaz de décharge. Ce phénomène est essentiellement dû à l’optimisation des paramètres de digestion mis en place dans les méthaniseurs tels que la régulation de la température, le temps de séjour hydraulique ou encore l’homogénéisation par agitation.

On peut ainsi trouver dans le biogaz de l’H2S, du NH3, du H2, de l’O2 et du N2 en quantité

variable. En revanche, les siloxanes sont principalement observés à l’état de traces dans les biogaz de décharge. Ils proviennent des cosmétiques, des détergents, des emballages plastifiés ou encore de la pate à papier pouvant se trouver dans les ordures ménagères (Dewil et al., 2007, Ricaurte Ortega, 2009). Par augmentation de la température, les siloxanes se volatilisent et sont transférés dans le biogaz (Rojas Devia, 2013). De façon générale, le biogaz est également saturé en eau à la température du digesteur ce qui correspond à une teneur en eau de 50 geau/Nm3 dans un biogaz mésophile (38°C).

Tableau 2. Composition moyenne du biogaz dans la littérature

Gaz Biogaz de décharge Biogaz de méthanisation

Méthane 30-75 % (Moletta, 2008) 50-75 % (Al Seadi, 2008,

Moletta, 2008) Dioxyde de carbone 30-50 % (Moletta, 2008) 25-50 % (Al Seadi, 2008,

Moletta, 2008)

Eau Saturé (Moletta, 2008) Saturé (Al Seadi, 2008,

Moletta, 2008) Hydrogène sulfuré (H2S) < 3 000 ppmv (Moletta, 2008) < 10 000 ppmv (Al Seadi, 2008)

Azote ammoniacal 0-20 ppmv (Tirnoveanu,

2004) < 1%

(Ryckebosch et al., 2011)

Hydrogène < 5 % (Moletta, 2008) < 1 % (Al Seadi, 2008)

Oxygène 3-5% (Moletta, 2008) < 2 % (Al Seadi, 2008)

Azote < 3% (Moletta, 2008) < 2 % (Al Seadi, 2008)

Siloxanes (COVSi) < 400 mg/Nm3 (Rojas Devia,

2013) -

(Rojas Devia, 2013)