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La bilingualité est la façon usuelle d’accès à une langue par un individu. Il apparaît clair que la bilingualité diffère de la diglossie dans la mesure où la diglossie met l’accent sur le fait qu’il doit y avoir, au sein de la même société, deux variétés de langue, ou de langue différentes qui remplissent des fonctions différentes, véhiculaires des cultures différentes, au fur et à mesure.

2-1-4- Bilinguisme et diglossie

Quelques réflexions sur le bilinguisme :

2-1-4-1- Le bilinguisme

Bien que certains chercheurs définissent le bilingue comme étant celui qui possède une maîtrise parfaite de deux (ou plusieurs) langues, la plupart d'entre eux sont d'avis que cette définition n'est pas réaliste (Béates-Beardsmore, 1986 ; Grosjean, 1982 ; Hakuta, 1986 ; Haugen, 1969 ; Romaine, 1989). Si l’on devait considérer comme bilingues uniquement les personnes qui passent pour être monolingues dans chacune de leurs langues, nous ne pourrions classer un grand nombre d'individus qui utilisent régulièrement deux ou plusieurs langues dans leur vie quotidienne sans toutefois posséder parfaitement l'ensemble des compétences linguistiques dans chacune de celles-ci. Ce constat a amené les chercheurs à proposer de nouvelles définitions du bilinguisme, telles que la capacité de produire des énoncés significatifs dans deux (ou plusieurs) langues, la maîtrise d'au moins une compétence linguistique

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(lire, écrire, parler, écouter) dans une autre langue, l'usage alterné de plusieurs langues, etc. Dans le cadre de cet article, nous entendrons par bilingues les personnes qui se servent de deux langues (ou dialectes) dans la vie de tous les jours. Ceci englobe les personnes qui ont une compétence de l'oral dans une langue et une compétence de l'écrit dans une autre, les personnes qui parlent deux langues avec un niveau de compétence différent dans chacune d'elles (et qui ne savent ni lire ni écrire dans l'une ou l'autre), ainsi que, phénomène assez rare, les personnes qui possèdent une maîtrise parfaite de deux (ou plusieurs) langues.

Pour A. Martinet « …Il est nécessaire de redéfinir le terme de bilinguisme (emploi récurrent de deux idiomes par un même individu ou à l’intérieur d’une même communauté) ne serait-ce que pour exclure l’implication très répandue qu’il n’y a bilinguisme que le cas d’une maîtrise parfaite et identique de deux langues en cause. »1.

En Algérie, nous restreignons le bilinguisme à un état scolaire, sans tenir en compte qu’il existe d’autres situations de bilingualité ; entre l’arabe algérien/berbère, berbère/français, arabe algérien/berbère/arabe classique/français.

Nous préférons parler de bilinguisme en Algérie, tout en distinguant :

-Le bilinguisme institutionnel : Ce cas de figure est dicté par la nécessité d’enseigner en français dans les universités, et les instituts spécialisés, et dans les domaines où le bilinguisme est présent entre le français et l’arabe dans les administrations publiques, et moins dans les entreprises privées, où le français est quasiment présent.

-Le bilinguisme sociétal non institutionnel : Dicté par la nécessité de communication, et la lourdeur de l’histoire. Or nous remarquons que le français a laissé des empruntes enracinées non seulement dans notre façon de parler, de penser parfois, mais également dans nos mœurs les plus intimes. Cependant, le berbère reste de plus en plus, en cours de s’éloigner, défaut de son inutilité sur le plan sociétal, ainsi que sur le plan des représentations, qui sont devenues, de plus en plus, obscures après les évènements de printemps noir.

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2-1-4-2- La diglossie

La disponibilité de plusieurs définitions de la diglossie procure un grand nombre de concepts à la disposition des acteurs sociaux concernant une situation sociolinguistique.

Nous limiterons notre présentation aux idées principales de la pluralité linguistique.

Etymologiquement, le terme diglossie (du grec di-gloss) signifie bilingue (du latin bi-ling). La première utilisation du terme « diglossie » remonte à 1885 et concerne, le cas du grec : Psichari helléniste français d’origine grecque parlait, dans son ouvrage, Essais de grammaire historique néo-grecque (1986) de « l’étrange diglossie dont souffre la Grèce. »1.

En 1918, c’est Hubert Pernot, disciple de Psichari, qui définit la diglossie en ces termes :

« La diglossie ou dualité de langues est l'obstacle principal auquel se heurtent non seulement les étrangers qui s'initient au grec moderne, mais aussi les Grecs dès leurs études primaires. De très bonne heure, en effet, le petit Hellène doit se familiariser, même pour la désignation des objets les plus usuels, avec des mots et des formes différents de ceux qu'il emploie journellement. »2.

Pour Ferguson, la diglossie n’est qu’ « une situation linguistique relativement stable, dans laquelle en plus des dialectes primaires de la langue existe une variété superposée, très divergente, hautement codifiée complexe grammaticalement, qui véhicule un corpus de littérature écrit.., variété apprise essentiellement à l’école et utilisée dans la plupart des communications écrites ou orales formelles, mais n’est utilisée pour la conversation ordinaire dans aucune partie de la communauté. »3. Psichari définit ainsi la diglossie comme une configuration linguistique dans laquelle deux variétés d’une même langue sont en usage, mais, un usage décalé parce que l’une des variétés est valorisée par rapport à l’autre.

1-Psichari, J. (1986). Essais de grammaire historique néo-grecque. Ernest Leroux éditeur. 2 tomes.

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-Pernot, H. & Poplack, C. (1918). Grammaire de grec moderne (langue officielle). Garnier. Ici l’auteur fait référence au grec scolastique et savant, la kathrevusa et au grec usuel, dit vulgaire, le dhimotiki.

3-Ferguson, Ch A. Diglossia. Dans : Dell, Hymes. (1971).Cambridge University Press. Chap. 45. Pp.

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Cependant, il introduit dans la signification du concept, à côté de faits purement linguistiques, l’aspect idéologique et conflictuel qui s’attache au phénomène.

En somme, depuis Psichari, en passant par Ferguson jusqu’aux nos jours, « la réflexion sur la diglossie n’a pas abouti à une définition qui fait l’unanimité des linguistes et les réalités des usages linguistiques. »1.

Après tout ce que nous avons présenté de la diglossie, il nous reste à ajouter pas mal d’ingrédients socio-psychologiques sur les comportements langagiers d’un algérien et le milieu d’influence qui nous parait digne d’intérêt d’être cité.

2-1-4-3-Le bilinguisme et la diglossie selon Fishman Diglossie