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1.5 Bilan

Les mod`eles actuels de la m´ethode de dimensionnement des chauss´ees sont limit´es pour prendre en compte l’existence de discontinuit´es verticales ou des d´ecollements partiels entre couches. En effet, les inconv´enients report´es dans ce chapitre sont finalement les suivants : Certains de ces mod`eles ne semblent pas pouvoir :

— bien repr´esenter la mod´elisation du massif semi-infini du sol. Cet inconv´enient est pr´esent dans les mod`eles de Westergaad (Westergaard, 1926) et de Pasternak (Pasternak, 1954)

— bien repr´esenter la mod´elisation d’interface entre la chauss´ee et le sol. Cet inconv´enient est pr´esent dans les mod`eles de Westergaad (Westergaard, 1926), de Pasternak (Pasternak, 1954) et de Kerr (Kerr, 1964) et pour les autres ne peuvent pas mod´eliser des d´ecollements partielles — repr´esenter le complexe d’un multicouche de chauss´ee. Cet inconv´enient est pr´esent dans les mod`eles de Boussinesq (Boussinesq, 1885), de Westergaad (Westergaard, 1926), de Hogg (Hogg, 1938), de Pasternak (Pasternak, 1954) et de Kerr (Kerr, 1964)

— faire un calcul avec des charges de formes vari´ees (seulement avec une charge circulaire). Cet inconv´enient est pr´esent dans les mod`eles de Burmister (Burmister, 1943) et de Jeuffroy (Jeuf-froy, 1955). Cet inconv´enient est pali´e malgr´e tout par l’utilisation possible du principe de superposition des charges

— prendre en compte une discontinuit´e verticale ou un bord fini dans le multicouche de chauss´ee. Cet inconv´enient est pr´esent dans les mod`eles de Burmister (Burmister, 1943), de Jeuffroy (Jeuffroy, 1955).

D`es 1964, le d´eveloppement de l’informatique facilite l’usage des mod`eles multicouches ´elastiques. Ainsi depuis cette ´epoque la m´ethode de dimensionnement fran¸caise s’est construite sur le mod`ele de Burmister. La m´ethode prend en compte indirectement la visco´elasticit´e des mat´eriaux dans les structures de chauss´ees `a l’aide du module ´equivalent `a une vitesse de charge et temp´erature du mat´eriau donn´e. Mais cette m´ethode ne prend en compte que d’une mani`ere implicite approch´e et empirique d’´eventuels endommagements. En particulier seul un glissement total entre couche peut ˆ

etre possible d’une fa¸con explicite. Il existe dans le domaine des chauss´ees souples quelques logiciels de calcul adapt´es plus ou moins `a l’´etude de quelques cas de chauss´ees d´egrad´ees. Ces logiciels vont du simple outil de calcul des contraintes aux mod`eles que l’on pourrait qualifier de complets et qui permettent de d´eterminer les dur´ees de vie pr´esum´ees des chauss´ees en fonction de donn´ees relatives aux trafics, aux caract´eristiques m´ecaniques des mat´eriaux et aux conditions climatiques ; l’ensemble de ces donn´ees peut de plus ˆetre trait´e de mani`ere probabiliste. Le logiciel de calcul le plus utilis´e en France est Aliz´e, mis au point par le Laboratoire central des ponts et chauss´ees, et distribu´e exclu-sivement par la soci´et´e itech. Il utilise le mod`ele de Burmister et diff´erents coefficients cal´es sur des calculs aux ´el´ements finis ou exp´erimentations en vrai grandeur notamment pour les chauss´ees b´eton.

Aux ´Etats Unis, la m´ethode de l’AASHTO (American Association of State Highway and Transporta-tion Officials) est une m´ethode bas´ee sur une analyse empirique des r´esultats des essais de l’AASHO Road test r´ealis´es `a la fin des ann´ees 1950 sur plus de 500 sections tests de chauss´ees. Cette m´ethode a

1.5. BILAN

subi une ´evolution importante depuis 1961 jusqu’en 1993 suivant quatre versions. Son rˆole est d’´etablir une relation entre les caract´eristiques structurales de la chauss´ee et l’´evolution dans le temps du niveau de qualit´e des chauss´ees (exprim´e en indice de viabilit´e). La derni`ere version du guide de dimension-nement date de fin 2004, mais la version de 1993 reste encore la plus utilis´ee (Mengue et al., 2015).

Afin de mieux comprendre, ´evaluer et analyser le comportement des chauss´ees d´egrad´ees, les chercheurs ont continu´e leurs travaux pour proposer des mod`eles qui puissent compl´eter les mod`eles pr´esent´es ci-dessus. Parmi ces mod`eles, il existe ceux qui prennent en compte d’une mani`ere directe des lois de comportement visco´elastique des mat´eriaux bitumineux pour l’´etude des chauss´ees souples `a faible trafic ou soumises `a de forts gradients thermiques (Heck et al., 1998), (Nguyen, 2008). A l’IFSTTAR, le mod`ele semi analytique 3D de ViscoRoute© (Duhamel et al., 2005b) (Chabot et al., 2010) (Chupin

et al., 2010) prend en compte la loi de comportement thermo-visco´elastique des enrob´es bitumineux de Huet-Sayegh (Huet, 1963), (Sayegh, 1963) (Huet, 1999). Le logiciel ViscoRoute© permet de mod´eliser

d’une mani`ere semi analytique les structures multicouches 3D semi-infinies non fissur´ees sous passage de charges roulantes, avec des pressions de contact pouvant ˆetre non verticales (Hammoum et al., 2010) et des interfaces coll´ees (version 2.0) ou d´ecoll´ees (version 2.1), (Chupin et al., 2013). La vitesse des charges est constante non nulle et les mat´eriaux ont un comportement ´elastique ou visco´elastique lin´eaire. Cependant ce mod`ele 3D r´esolvant les ´equations dans le rep`ere de la charge roulante exige une continuit´e de l’espace c.`a.d que ni le d´ecollement partiel ni la pr´esence de fissures verticales ne peuvent ˆetre trait´es par ce logiciel.

Aussi l’utilisation des Mod`eles aux El´ements Finis s’impose chaque fois que des mod`eles multicouches continus, ´elastiques et lin´eaires s’av`erent trop simplistes. Cette approche permet notamment de traiter les cas suivants :

— caract`ere tridimensionnel de la structure

— non lin´earit´e ou ´evolution des conditions de contact

— comportement visco´elastique des mat´eriaux de chauss´ees sous charges roulantes, etc.

Pour le dimensionnement des chauss´ees effectu´e par les bureaux d’´etudes, la rapidit´e, la simplicit´e, l’ind´ependance et surtout l’exactitude des calculs sont exig´ees. Le mod`ele de Burmister contenu dans la plupart des logiciels de dimensionnement comme Aliz´e de l’IFSTTAR (ex LCPC) assure ces crit`eres pour le dimensionnement d’une chauss´ee neuve et sans fissures. L’inconv´enient est qu’il ne permet pas de prendre en consid´eration les discontinuit´es dans la chauss´ee (fissure ou d´ecollement). Cependant, dans le cas de dimensionnement des chauss´ees rigides ou le cas de renforcement des chauss´ees fissur´ees, quand il existe des discontinuit´es ou des bords finis dans le multicouche de chauss´ee, les mod`eles sim-plifi´es existants ne peuvent ainsi pas en calculer les contraintes et les d´eformations.

L’utilisation de la m´ethode des ´el´ements finis peut ˆetre utile mais cela reste un outil assez lourd pour un calcul de chauss´ee 3D fissur´ee. Ceci limite son utilisation en bureau d’´etude notamment pour effectuer des ´etudes param´etriques.

Chapitre 2

Revue des mod`eles existants prenant

en compte des discontinuit´es

Nous avons vu que la m´ethode fran¸caise de dimensionnement des chauss´ees ne prend pas en compte les discontinuit´es d’une mani`ere explicite. Dans ce qui suit, nous listons quelques concepts de fissuration et mod`eles d´edi´es `a leur ´etudes.

2.1 G´en´eralit´es sur la fissuration dans un mat´eriau

La rupture d’un mat´eriau se produit lorsque les efforts exerc´es sur ce mat´eriau d´epassent les contraintes ou les d´eformations limites. Suivant que l’on s’int´eresse `a la d´egradation du mat´eriau d’un point de vue micro-m´ecanique ou macro-m´ecanique, deux approches peuvent ˆetre utilis´ees : la m´ecanique de l’endommagement (Lemaitre and Chaboche, 1990), (Benallal, 2000) et la m´ecanique de la rupture (Bui, 1978). De nombreux travaux existent sur le sujet. Pour les mat´eriaux de chauss´ees, notamment `

a la Rilem quelque soit le mod`ele utilis´e, le lecteur int´eress´e peut trouver des ´el´ements d’informations dans les actes de diff´erentes conf´erences dont celles r´ef´erenc´ees dans (Petit et al., 2004), (Al-Qadi et al., 2008), (Scarpas et al., 2012), (Chabot et al., 2016a).

La m´ecanique de l’endommagement propose de d´ecrire continˆument la d´egradation progressive du mat´eriau due `a l’apparition, `a la croissance, puis `a la coalescence de micro-fissures ou de micro-cavit´es pr´esentes dans le mat´eriau. Pour les mat´eriaux bitumineux, on peut citer les travaux de Bodin sur le sujet au LCPC (Bodin, 2002), (Bodin et al., 2004a), (Bodin et al., 2016). Lorsque les microfissures, les microcavit´es cr´e´ees par croissance ou par coalescence des d´efauts sont de taille assez grande, cette fa¸con d’aborder le probl`eme n’est plus valable.

La fissuration prend en compte l’existence de d´efauts comme des inclusions ou des vides dans le mat´eriau ou encore des zones d’endommagement `a partir desquels des fissures vont s’initier puis se propager pour parvenir `a une taille provoquant la ruine de la structure. La m´ecanique de rupture a pour objet l’´etude du comportement m´ecanique d’un mat´eriau en pr´esence de fissures macroscopiques. Cela revient notamment `a d´eterminer le champ des contraintes et des d´eformations au voisinage de

2.1. G ´EN ´ERALIT ´ES SUR LA FISSURATION DANS UN MAT ´ERIAU

la pointe d’une fissure. L’´etude de ces champs m´ecaniques permettant ensuite de juger de la stabi-lit´e ou non d’une fissure. En g´en´eral, on distingue deux types de fissuration : la fissuration stable et la fissuration instable. La fissuration stable comprend la fissuration quasi-statique sous une charge constante, la fissuration par fatigue sous une charge r´ep´et´ee (cyclique) et la fissuration dynamique lorsqu’une charge est appliqu´ee soudainement. La fissuration instable est instantan´ee et peut conduire `

a une fissuration stable (Mercier et al., 1999).

D’un point de vu macroscopique, on distingue deux modes principaux de rupture : la rupture plate cor-respond `a une surface de rupture globalement perpendiculaire `a la direction de la contrainte principale maximale, et la rupture inclin´ee qui est inclin´ee dans le sens transversal par rapport `a la direction de propagation s’accompagne souvent de grandes d´eformations (Douai, 2011). La fissuration se manifeste par la s´eparation irr´eversible d’un milieu continu en deux parties, appel´ees l`evres de la fissure, ce qui introduit une discontinuit´e au sens des d´eplacements. Les mouvements possibles des l`evres de chaque fissure sont des combinaisons de trois modes ind´ependants (Figure 2.1) :

Figure 2.1 – Modes ´el´ementaires de sollicitations d’une fissure tridimensionnelle

• Le premier, appel´e mode I ou d’ouverture de la fissure : la contrainte de traction est normale au plan de fissure

• Le deuxi`eme, appel´e mode II ou de cisaillement plan : la contrainte de cisaillement agit pa-rall`element au plan de la fissure et perpendiculaire au front de fissure

• Le troisi`eme, appele´e mode III ou de cisaillement anti-plan ou encore de d´echirure : la contrainte de cisaillement agit parall`element au plan de la fissure et parall`element au front de fissure. De mani`ere g´en´erale, une fissure se propage dans un mat´eriau sous une combinaison de contraintes dans les trois modes.

Historiquement, la m´ecanique de la rupture est expos´ee par (Griffith, 1921) qui ´etablit une relation directe entre la taille du d´efaut et la contrainte de rupture. Il applique l’analyse des contraintes autour d’un trou elliptique `a la propagation instable d’une fissure. Une th´eorie de la rupture bas´ee sur la stabilit´e de la fissure valable uniquement pour les mat´eriaux fragiles, ne tenant pas compte de la dissipation de l’´energie due `a la plastification. En 1948, Irwin proposa une modification de la th´eorie de Griffith en incluant justement dans le bilan ´energ´etique, l’´energie due `a la plastification, pour que