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Dans cette étude, l’apport initial d’énergie nécessaire à la mise en oscillation a été caracté-risé, notamment du point de vue spectral. Il s’agit d’un apport d’énergie fait simultanément sur plusieurs des fréquences de résonance du résonateur. La bande de fréquence dans laquelle cette énergie est apportée dépend du musicien (entre 2kHz et 5kHz pour l’un et sous 1.5kHz pour l’autre). Ce phénomène a lieu avant que le jet n’ait atteint le biseau. Fort de ces observations le modèle de source proposé par M.P. Verge[Ver+94b] a été réécrit d’un point de vue acous-tique. Ce modèle permet de retrouver la répartition de cet apport d’énergie sur les fréquences de résonance du résonateur. L’amplitude des basses fréquences sont plutôt bien estimée, mais l’énergie en hautes fréquences (f > 1.5kHz) est sous-estimée. Cet écart semble associé aux caractéristiques des capteurs de pression utilisé. En effet, lorsque les composantes hautes fré-quences, non-mesurées par le capteur de pression d’alimentation son filtrées dans le signal de pression acoustique, la modélisation rejoins la mesure.

Pour confirmer ce modèle il serait intéressant de faire varier de manière contrôlée les para-mètres influant cet apport d’énergie. Pour ce qui est de la montée de pression, la difficulté réside dans la nécessité d’avoir une élévation très rapide de la montée de pression (de l’ordre de la milliseconde). Les équipements existants permettant ce type de montée de pression sont souvent incompatibles avec les pressions utilisées sur ce type d’instrument. Un deuxième point intéres-sant à étudier serait l’influence de la géométrie de la fenêtre de l’instrument sur l’importance du phénomène. En effet comme souligné précédemment, c’est principalement cette impédance qui

Bilan et conclusions du chapitre 77 va agir sur l’amplitude du phénomène pour une montée de pression donnée. Certains luthiers ont notamment remarqué qu’une modification de la géométrie de la fenêtre pouvait influencer la dureté de l’attaque d’une flûte à bec [Goh15]. Cette observation est cohérente avec le modèle présenté ici.

Le deuxième mécanisme proposé par Verge, a été ici exclue de la modélisation car l’impact du jet se fait après le maximum d’injection d’énergie observée. Cependant, ce phénomène peut malgré tout avoir son importance dans l’initiation de l’oscillation. On note par exemple, que contrairement à ce qui est prévu par le modèle proposé ici, l’amplitude de l’oscillation, hautes fréquences comprises semblent avoir un regain d’amplitude aux environs de 14ms pour les deux attaques dures présentées (fig. 4.8b et fig. 4.8c). Ce regain pourrait être lié à la formation de ce vortex. Le peu d’études existantes sur ce phénomène, nous empêche de conclure clairement sur son importance. Des exemples d’attaque intermédiaire sur des tuyaux d’orgues, avec des montées de pressions comprises entre les attaques dures et douces utilisées par les musiciens, sont présentées dans le chapitre (chap.7). Pour ces attaques nous verrons que le modèle présenté ici ne permet pas de rendre correctement compte de l’initiation observée, et que la prise en compte de l’impact du jet sur le biseau pourrait être une piste d’amélioration intéressante.

Dans les attaques présentées dans ce chapitre, les doigts du musicien étaient posés sur l’ins-trument. En condition de jeu, l’impact des doigts sur le résonateur peut également participer à l’initiation de l’oscillation. Cette technique, plus couramment évoqué dans le cas de la flûte traversière est également parfois évoqué dans le jeu de la flûte à bec basse [Bol16]. L’étude de cet outil dans le jeux de la flûte à bec et de son importance relative vis à vis du mécanisme évoqué ici pourrait également être une piste intéressante d’amélioration de la compréhension de l’initiation de l’oscillation.

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Chapitre 5

Croissance des différents régimes

5.1 Introduction

Le développement de composantes hautes fréquences pendant les transitoires d’attaque est une des spécificités des tuyaux d’orgues à embouchure de flûte. Cette spécificité, évoquée dans l’introduction (chap. 1), a fait l’objet de nombreuses études.

Les études de Keeler [Kee72] permettent de mettre évidence que l’importance de ces compo-santes et leur fréquences dépendent du type de tuyau d’orgue utilisé. Il associe les fréquences de ces composantes aux fréquences de résonance du tuyau. Les composantes correspondent alors à la deuxième ou troisième fréquence de résonance de l’instrument selon le type de tuyau. Cela correspond plus ou moins à 2 ou 3 fois la première fréquence de résonance si le tuyau est ouvert, comme les tuyaux de type diapason, ou 3 et 5 fois la première fréquence de résonance pour les tuyaux fermés tels les bourdons. Ces hautes composantes ont des amplitudes comparables à l’amplitude de l’oscillation acoustique en régime stationnaire. De plus le maximum de ces am-plitudes est atteint après une étape de croissance progressive et un certain temps après le début de l’attaque. Elles ne semblent donc pas associées à un mécanisme d’initiation de l’oscillation tel que celui décrit dans le chapitre précédent (chap. 4).

Nolle [Nol+92] montre expérimentalement sur deux tuyaux d’orgue (un ouvert et un fermé) que le développement du deuxième mode du résonateur est d’autant plus important que la mon-tée de la pression d’alimentation est rapide. Il retrouve cette relation en simulant des attaques avec un modèle simplifié. Ce modèle, basé sur le modèle « jet-drive » (Chap. 2.3.1), inclut es-sentiellement un retard temporel lié à la vitesse de jet ainsi qu’un résonateur multi-modal. En se basant sur un modèle plus détaillé, Fletcher [Fle76] obtient le même type d’observations sur des attaques simulées. M.P. Verge [Ver+97b] simule quelques transitoires d’attaque en utilisant une formulation du modèle « jet-drive » proche de celle proposée ici (chap. 2). En ajustant les paramètres de ce modèle il réussit à obtenir pour une attaque, un développement du deuxième mode de l’instrument très proche de ce qu’il mesure.

Comme évoqué précédemment (chap. 4), il est difficile de savoir si le phénomène décrit par Castellengo [Cas99] est identique au phénomène décrit jusqu’ici. Les transitoires d’attaque présentés sont également caractérisés par la présence de hautes fréquences favorisées par une montée rapide de la pression d’alimentation. Cependant ces fréquences correspondent à celles de résonances très élevées du résonateur, qui sont généralement supérieures à la quatrième. Ces hautes fréquences sont associées à un mécanisme appelé mouth-tone, assimilable à un son de biseau coloré par le résonateur de l’instrument. Ce mécanisme est repris dans l’étude de Miklós et Angster [Mik+00] pour expliquer la croissance d’une composante correspondant à la deuxième fréquence du résonateur pendant l’attaque des tuyaux d’orgue.

modi-80 Chap. 5 – Croissance des différents régimes fier l’importance de ces composantes. Ségoufin [Ség00] montre ainsi que la longueur du canal ou la présence de chanfrein peut influer sur l’amplitude de ces composantes. Plus le canal est court, plus le développement pendant l’attaque de la deuxième fréquence de résonance du résonateur est important. Auvray [Auv13] montre également que cette fréquence peut être favorisée par un couplage entre le résonateur de l’instrument et le conduit d’alimentation.

La plupart des études évoquées ici se limite à la description du phénomène. Certaines mettent en évidence l’influence d’éléments de facture sur le développement de ces composantes hautes fréquences, tel que le type de résonateur utilisé [Kee72] ou la géométrie du canal [Ség00], et d’autres s’attachent à décrire l’influence de la vitesse de montée de pression [Nol+92 ; Fle76 ; Cas99]. Cependant, aucune de ces études ne quantifie ces observations.

Ce chapitre présente tout d’abord une étude de ce phénomène sur les données acquises pour l’étude du chapitre 3. Cela permet notamment de mettre en évidence l’existence de ce phénomène dans des attaques de flûte à bec en condition de jeu ainsi que celle d’un lien entre leur présence et le doigté utilisé. Dans un second temps, des attaques sont générées sur un tuyau d’orgue qui est alimenté par un dispositif expérimental contrôlant la pression d’alimentation. L’étude de ces attaques permet de quantifier la relation entre la montée de pression et l’importance de ces composantes au cours du transitoire d’attaque. Ce phénomène peut ainsi être interprété comme un changement de stabilité des différents régimes au cours des transitoires d’attaque.