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Bilan d’énergie de surface

Dans le document THÈSE En vue de l’obtention du grade de (Page 62-67)

2.2 Article publié dans Geophysical Research Letters

2.3.1 Bilan d’énergie de surface

Les processus physiques et radiatifs à l’origine du « transport » de l’anomalie de SST atlantique sur l’Europe de l’Ouest ne sont qu’évoqués dans l’article précédent. Nous nous proposons dans cette partie de les étudier plus en détail, en réalisant notamment le bilan d’énergie de surface européen de l’automne 2006, à l’image des travaux de Shongwe et al.

(2009).

Nous disposons pour cette étude des flux de chaleur et des flux radiatifs fournis d’une part dans les ré-analyses NCEP — nous les nommerons abusivement « flux observés » en faisant l’hypothèse ces ré-analyses sont fidèles à la réalité — et d’autre part par les simulations MM5 effectuées dans l’article précédent. Pour ces deux jeux de données, nous définissons le bilan d’énergie de surface à l’équilibre par l’équation 1.5vue dans la section 1.3.3 :

(1−α)SW = ∆LW +SH+LH (2.1)

Notre objectif est ici d’analyser les anomalies des ces flux durant l’automne 2006, et leurs contributions à l’anomalie de température. Si le bilan des flux moyens est équilibré (équa-tion1.5), ce n’est pas nécessairement le cas pour les anomalies de flux, et un terme de stockage d’énergie dans le sol apparaît (∆E). Afin de décomposer ce terme selon les contributions respectives des différents flux, nous ré-écrivons l’équation 1.5 en comptant tous les flux dans la convention « descendante » :

E= ∆LW0+ ∆SW0+LH0 +SH0 (2.2) où :

• ∆LW0 (Net Long Wave Flux) est l’anomalie de flux infra-rouge (terrestre) net descen-dant ;

• ∆SW0 (NetShort Wave Flux) est l’anomalie de flux solaire net descendant ;

• LH0 (Latent Heat Flux) est l’anomalie de flux de chaleur latente net descendant ;

• SH0 (Sensible Heat Flux) est l’anomalie de flux de chaleur sensible net descendant.

Remarque 2.2 Précisons que pour les flux « observés » (NCEP), le terme anomalie désigne ici la différence à la climatologie 1961–1990, tandis que pour les expériences effectuées avec MM5, il doit être interprété comme la différence des flux entre deux simulations.

Nous nous intéressons dans un premier temps à l’anomalie d’énergie ∆E reçue par la surface continentale européenne pendant l’automne 2006, telle qu’elle est estimée à partir des anomalies de flux NCEP. La Figure 2.8 présente la moyenne saisonnière de ces anomalies, dans notre convention « descendante ». Les flux radiatifs montrent un excès de rayonnement

SW (solaire) — qui suggère un déficit de la couverture nuageuse liée à l’anomalie positive du Z500 (circulation anticyclonique) sur cette région (Figure2.3) —, et un déficit de rayonnement

LW (ou un excès de rayonnement infra-rouge émis) sur l’Europe Centrale (Figure 2.8a,b),

2.3 Processus radiatifs et contribution du « long-terme »

probablement dû à la chaleur du sol8. Ces anomalies radiatives s’accompagnent d’une anomalie positive de flux de chaleur sensible et d’un excès d’évapo-transpiration (LH0 < 0) sur le continent européen, probablement une conséquence de la chaleur du sol. Sur l’océan Atlantique, l’anomalie cyclonique réduit le flux∆SW, et semble augmenter le flux∆LW (moins clair), ce qui est probablement dû à un excès de couverture nuageuse. Les flux de chaleurs sont marqués par une forte évaporation (LH0 <0) et un dégagement de chaleur sensible (SH0 <0) dus aux SST anormalement chaudes (Figure 2.4) au large. Notons que le flux SH0 devient positif à l’ouest de l’Afrique où l’anomalie de SST a été identifiée comme importante et contribuant au réchauffement européen. Cet élément nouveau suggère que l’océan de surface y a été chauffé par l’atmosphère, et par conséquent que cette région ne constitue pas la principale source de chaleur (voir aussi section 2.3.2). Ces résultats sont quantitativement cohérents avec le bilan d’énergie effectué par Shongwe et al. (2009) à partir de ré-analyses différentes9.

Il est alors intéressant de chercher à décomposer les contributions de la dynamique atmo-sphérique et de la SST à cet excès d’énergie reçue par l’Europe continentale durant l’automne 2006, à l’image de l’étude menée dans la section 2.2 sur la température de surface (T2m).

Nous nous basons ainsi sur les trois simulations CTL, WNC et WFC réalisées avec MM5, en considérant que :

• CTL−WNC correspond à l’influence de l’anomalie de SST de SON06 par rapport à la climatologie ;

• WNC−WFC correspond à l’influence de la dynamique atmosphérique de SON06 par rapport à une dynamique aux patterns spatiaux proches, mais moins prononcés, voir Figure2.7a ;

• CTL−WFC correspond à l’influence de la SST et de la dynamique, et doit donc se rapprocher des anomalies « observées » (NCEP).

La différence des flux d’énergie de surface entre les simulations CTL et WFC, présentée sur la Figure2.9, capture en effet les principaux processus radiatifs observés durant l’automne 2006 (cf. Figure2.8) : excès de∆SW et déficit de∆LW sur l’Europe Centrale, déficit de ∆SW et excès de ∆LW sur l’océan Atlantique (Figure 2.9a,b), dégagement de chaleur latente sur l’océan et le continent (Figure2.9c), et émission (absorption) de chaleur sensible par l’océan (le continent) (Figure2.9d). Cependant ces expériences MM5 semblent sur-estimer l’amplitude des réponses radiatives liées aux effets des nuages par rapport aux flux NCEP.

La réponse est ensuite décomposée en une contribution « SST » et une contribution « dy-namique », respectivement en comparant les flux d’énergie des simulations CTL et WNC d’une part (Figure 2.10), et WNC et WFC d’autre part (Figure 2.11). L’anomalie de SST se tra-duit principalement par un excès d’évaporation sur l’Atlantique, ce qui augmente la vapeur d’eau atmosphérique et donc le flux ∆LW (effet de serre) (Figure 2.10c,a). Ce processus est particulièrement détaillé dans l’étude de Shongwe et al. (2009), que le lecteur est invité à consulter. À noter que la vapeur d’eau semble transportée également sur le continent par

8Rappelons ici que l’émission infra-rougeLWest gouvernée par la loi deStefan-Boltzmann du corps noir, i.e. elle est proportionnelle à la puissance quatrième de la température :LW=σST4, oùσS est la constante de Stefan etT la température. Voir section1.3.3.

9Cette étude utilise en effet les ré-analyses du European Centre for Medium-Range Weather Forecasts (ECMWF) « ERA-Interim » sur la période 1989–2006.

Figure 2.8 – Anomalies des flux composant le bilan d’énergie de surface de l’automne 2006 : (a)LW0,(b)SW0,(c)LH0 et (d)SH0 (Données : NCEP). Unités : W/m2.

Anomalies of fluxes forming the surface energy budget of autumn 2006 :(a)LW0,(b)SW0, (c) LH0 and(d)SH0 (Dataset : NCEP). Units : W/m2.

les vents d’ouest (westerlies) caractéristiques des moyennes latitudes. La nébulosité ne semble pas modifiée par l’anomalie de SST (pas de réponse de ∆SW, Figure 2.10b), qui fournit en revanche de la chaleur sensible à l’atmosphère, principalement au sud du Groenland et le long des côtes nord-ouest européennes (Figure 2.10d). La région de forte anomalie de SST à l’ouest de l’Afrique n’apporte, dans cette expérience, qu’un flux mineur de chaleur sensible à l’atmosphère. Les réponses des flux à la SST sont relativement homogènes spatialement sur le continent, tout comme l’est la réponse en T2m (Figure 2.7b), ce qui confirme le caractère amplificateur « grande échelle » de la SST.

A l’inverse, et comme pour la T2m (Figure 2.7c), la dynamique semble responsable des patterns spatiaux des anomalies de flux de l’automne 2006. Elle semble influer principale-ment sur la nébulosité, avec notamprincipale-ment une forte anomalie de ∆SW sur l’Europe Centrale (Figure 2.11b) qui rappelle l’anomalie NCEP (Figure 2.11b). Le flux ∆LW est également augmenté sur l’Europe (Figure 2.11a), suggérant que l’amplitude de l’effet de serre causé par

2.3 Processus radiatifs et contribution du « long-terme »

Figure 2.9 –Différences dans les flux composant le bilan d’énergie entre les simulations MM5 CTL et WFC :(a)LW0,(b)SW0,(c)LH0 et (d)SH0. Unités : W/m2.

Differences in fluxes forming the surface energy budget between MM5 CTL and WNC simulations : (a)LW0,(b)SW0,(c)LH0 and(d)SH0. Units : W/m2.

la couverture nuageuse est plus importante que celle de l’émission infra-rouge liée à la chaleur du sol. Les réponses des flux de chaleur à la dynamique sont également proches des patterns d’anomalies NCEP (Figures2.11c,d et2.8c,d), cependant l’excès d’évaporation sur l’Atlantique semble majoritairement causé par l’anomalie de SST.

Les flux moyennés sur les régions océaniques et continentales sont résumés sur la Fi-gure2.12. Il apparaît que les expériences MM5 représentent de manière relativement cohérente les flux de référence NCEP sur l’Europe continentale. Cependant, sous l’hypothèse que les flux NCEP sont fidèles à la réalité, elles sur-estiment clairement les effets de rétro-actions dus aux nuages, surtout à la surface de l’océan. Cette sur-estimation semble principalement causée par la réponse de MM5 au changement de dynamique, i.e. par les différences WNC−WFC des flux∆SW et∆LW. Les limites des expériences de sensibilité sont ici atteintes. En forçant la dynamique et les SST de manière indépendante, nous allons contre la physique du sys-tème et conduisons le modèle à effectuer certains ré-ajustements irréalistes. Ces limites sont

Figure 2.10 –Idem que la Figure 2.9pour les simulations CTL et WNC.

Same as Figure 2.9for CTL and WNC simulations.

par exemple discutées dans l’étude de Barsugli and Battisti (1998) qui analyse les effets du couplage atmosphère-océan sur les flux de chaleur. Cependant, tout en restant prudents sur l’interprétation des valeurs des flux obtenus par les expériences de sensibilité MM5, nous pou-vons néanmoins conclure cette analyse du bilan d’énergie de l’automne 2006 à la surface de l’Europe par les deux points suivants :

• l’anomalie anticyclonique sur l’Europe est responsable d’un déficit de nébulosité et donc d’un excès de rayonnement ∆SW;

• l’anomalie chaude de SST sur l’Atlantique dégage simultanément de la vapeur d’eau (évaporation) et de la chaleur sensible, ensuite advectées sur l’Europe par les westerlies et amplifiant l’anomalie de température, notamment via la rétro-action de la vapeur d’eau sur le flux ∆LW (par effet de serre).

Ces résultats sont en accord avec les récentes études de Shongwe et al. (2009) (sur l’automne 2006) et Laurian et al. (2009) (sur les effets d’un effondrement de la circulation thermohaline, et donc un refroidissement des SST nord-atlantiques sur le climat européen).

2.3 Processus radiatifs et contribution du « long-terme »

Figure 2.11 –Idem que la Figure 2.9pour les simulations WNC et WFC.

Same as Figure2.9for WNC and WFC simulations.

Dans le document THÈSE En vue de l’obtention du grade de (Page 62-67)