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Besoins d’aide et recours aux services d’aide à domicile des personnes âgées

Chapitre 2 : CONTEXTE DE L’ÉTUDE

2.1 Problème du vieillissement de la population

2.1.2 Besoins d’aide et recours aux services d’aide à domicile des personnes âgées

Une personne âgée est considérée comme dépendante « lorsqu’elle ne peut pas accomplir les actes élémentaires de la vie quotidienne sans l’aide d’un tiers » (Ministère du travail des relations sociales et de la solidarité, 2016), elle a besoin d’aide humaine ou technique pour accomplir les activités de la vie quotidienne (AVQ) et les activités de la vie domestique (AVD) ou activités instrumentales de la vie quotidienne (AIVQ), terme souvent utilisé en France.

Suivant les pays, des appellations différentes sont utilisées pour désigner les prestations dont bénéficient les personnes âgées dépendantes pour assurer leur maintien à domicile (Ennuyer, 2006). Le terme de soutien à domicile, plus fréquemment utilisé au Québec, se voudrait synonyme de l’aide à domicile en France. Néanmoins, l’acception de l’aide à domicile dans le contexte français est parfois plus restreinte que celle du soutien à domicile et ne désigne que l’aide au ménage. Avec l’adjonction du terme accompagnement, l’aide à domicile retrouve l’aspect social qui est compris dans la notion du soutien à domicile aux personnes âgées dépendantes.

Plusieurs outils existent pour mesurer le niveau de la dépendance d’une personne âgée, le choix des activités (AVQ, AIVQ) qui sont prises en compte dans cette mesure ne fait pas toujours consensus et poursuit plusieurs objectifs à la fois, notamment l’allocation des

ressources et la mesure de la charge de travail des équipes soignantes (Benaim et al., 2005). Le non-consensus justifie, en partie, l’existence d’une multitude d’outils utilisés pour l’appréciation du niveau de dépendance. On peut citer entre autres la grille AGGIR (Autonomie Gérontologie Groupes Iso-Ressources), InterRAI, Indice de Katz, Test de Lawton, Le système de mesure de l'autonomie fonctionnelle (SMAF), etc. En France, depuis 1994, malgré ses limites connues « depuis de longue date » comme le souligne le rapport du Sénat (Vasselle, 2008), la grille AGGIR reste la référence nationale utilisée pour apprécier le niveau de dépendance afin de déterminer l’éligibilité à l’APA, de définir un plan d’aide et le montant de l’allocation financière. Cette grille classe ces personnes en six groupes dits « Groupe Iso-Ressources » (GIR), allant du GIR 1 à GIR 6 (voir Tableau I). Les personnes âgées du GIR 1 sont les plus dépendantes, donc ayant le plus besoin d’aide. Ainsi, 88% des personnes âgées de GIR 1 et GIR 2 reçoivent de l’aide en soins personnels contre 12% du GIR 5 et 6 (Soullier, 2011).

Tableau I : Classement des personnes âgées en perte d’autonomie selon la grille AGGIR (Coutton, 2001)

Groupe Iso- Ressources (GIR)

Niveau d’incapacités

GIR 1 Les personnes confinées au lit ou au fauteuil ayant perdu leur autonomie mentale, corporelle, locomotrice et sociale, qui nécessitent une présence indispensable et continue d’intervenants

GIR 2

Les personnes confinées au lit ou au fauteuil dont les fonctions mentales ne sont pas totalement altérées et qui nécessitent une prise en charge pour la plupart des activités de la vie courante, ou celles dont les fonctions mentales sont altérées, mais qui ont conservé leurs capacités motrices.

GIR 3 Les personnes ayant conservé leur autonomie mentale, partiellement leur autonomie locomotrice, mais qui nécessitent quotidiennement et plusieurs fois par jour des aides pour leur autonomie corporelle. GIR 4 Les personnes qui n’assument pas seules leur transfert, mais qui, une fois levées, peuvent se déplacer à l’intérieur du logement. Elles

doivent être aidées pour la toilette et l’habillage.

GIR 5 Les personnes âgées ayant seulement besoin d'une aide ponctuelle pour la toilette et l'habillage.

GIR 6 Les personnes âgées n'ayant pas perdu leur autonomie pour les actes essentiels de la vie courante.

59% de l’ensemble des bénéficiaires de cette allocation (vivant à domicile et en établissement). Cette enquête précise qu’en moyenne 93 % des montants versés au titre de cette allocation sont affectés au financement d’un aidant professionnel (Amar et al., 2016). En prenant en compte l’ensemble des personnes âgées de 60 ans ou plus vivant à domicile et ayant recours à l’aide, les résultats de l’enquête HSM (Handicape santé en ménages ordinaires) réalisée en 2008 ont montré qu’elles étaient 3,6 millions (soit 28%) à être aidées régulièrement dans les tâches de la vie quotidienne (Soullier, 2011). Bien qu’une partie de ces personnes ne soit pas considérée comme assez dépendante pour bénéficier de l’APA au titre de la loi de 2001 relative à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie, la même enquête montre que 80 % de celles qui étaient classées en GIR 5 et 20% en GIR 6 a recours également aux services d’aide. Cependant, quelques départements, moins d’une dizaine, attribuent l’APA aux personnes en GIR 5 et 6 dans le cadre de « l’action sociale extralégale » (Aubree et al., 2006), les personnes qui en bénéficiant ne représentent que 0,01% des bénéficiaires de l’APA à domicile (Amar et al., 2016).

a. Types d’aides dont bénéficient les personnes âgées

Le niveau de dépendance détermine souvent la nature et la quantité des services d’aide auxquels a recours une personne âgée dépendante (Joël, 2003; Rotermann, 2005). Ces services peuvent être dispensés pour une courte période correspondant à des périodes dites de crise notamment lors d’une maladie aiguë ou après une hospitalisation, également sur le long terme dans le cadre des « soins de longue durée » (Isaacs & Neville, 1976). Cette aide peut être formelle, informelle ou les deux à la fois. Le recours à l’aide formelle, dite professionnelle, augmente avec le degré de dépendance. Plus le degré de dépendance est élevé, plus les personnes âgées ont recours à de nombreux aidants diversifiés ; 71% des personnes âgées de 60 ans ou plus très dépendantes, classées en GIR 1 et GIR 2, reçoivent de l’aide mixte, formelle et informelle (Soullier, 2011).

L’aide informelle est dispensée par les membres de famille ou de l’entourage appelés « proches aidants ». Elle est plus fréquente et concerne huit personnes sur dix aidées régulièrement dans les tâches de la vie quotidienne, alors que la proportion de celles qui bénéficient de l’aide formelle est de cinq sur dix (Soullier, 2011).

L’aide formelle concerne « tous les services fournis dans le cadre de la régulation du travail officiel », c’est-à-dire que les intervenants ont un contrat régi par le Code du travail, ils sont rémunérés et déclarés à la sécurité sociale (Colombo et al., 2011). Presque la moitié (42%) des personnes âgées aidées régulièrement dans les tâches de la vie quotidienne a un aidant professionnel (Dutheil, 2001). Certains de ces intervenants appelés souvent « aidants professionnels » peuvent être formés, mais certains ne le sont pas. Si on se réfère aux travaux d’Hugues et Dubar (Dubar, 2002; Hugues, 1958), définissant le processus de socialisation professionnelle, le qualificatif « professionnel » appliqué aux intervenants ne correspond pas aux exigences de qualification, de socialisation, d’appartenance, etc., que ce terme implique.

Les intervenants formels sont divers, ils comprennent les aides à domicile, les auxiliaires de vie, les employés de maison, les aides-soignants, les infirmières, les aides médico- psychologiques. Ils participent tous à la dispensation des services du maintien à domicile comme l’aide à la toilette, soins d’hygiène, etc. Par exemple, dans les zones urbaines et périurbaines, plus de 50% des infirmiers libéraux interviennent dans les soins d’hygiène et l’aide à la toilette (Buyck et al., 2014). D’après Com-Ruelle et al. (2002) , la complémentarité de l’ensemble de ces intervenants reste difficile dans un contexte où les rôles se chevauchent et où la compétence des uns et des autres n’est pas clairement définie. Ces auteurs soulignent également que la multiplicité d’intervenants et le manque de clarté dans le partage des compétences et des responsabilités sont parmi les causes de difficultés de coordination (Com-Ruelle et al., 2002).

En plus des services d’aide pour les activités de la vie quotidienne, la personne âgée dépendante bénéficie aussi des aides techniques et de l’aménagement du logement. Comme pour le cas de l’aide aux activités de la vie quotidienne, ces aides augmentent avec le niveau de dépendance, 86% des personnes les plus dépendantes ont recourt aux aides techniques et à l’aménagement du logement (Bérardier, 2012). La personne âgée bénéficie également de l’aide financière notamment l’aide sociale à l’hébergement (ASH), l’APA, l’allocation compensatoire pour tierce personne (ACTP) remplacée depuis 2006 par la prestation de compensation du handicap (PCH) (Amar, 2014). L’APA et la PCH ne sont pas soumises aux conditions de ressources, leur montant est fonction du degré de la dépendance et elles ne sont pas cumulables. La personne en GIR 1 reçoit un montant mensuel d’APA le plus élevé pouvant aller jusqu’à 1 312,67 €, celle en GIR 4 a droit à 562,57 €.

Les bénéficiaires participent financièrement aux services reçus par le biais de ticket modérateur9 en fonction de leurs ressources. Le nombre de ceux qui payent le ticket modérateur a augmenté ces dernières années, de 77% en 2007 il a atteint 84% en 2011 (Bérardier, 2014). Cette participation financière limite parfois l'accès aux services requis. Il a été souligné dans les différentes enquêtes que les bénéficiaires se limitent fréquemment aux heures payées avec l’aide financière reçue, celle-ci étant parfois en dessous du temps nécessaire pour leur prise en charge (Weber, 2006b). Presque un tiers (27%) des demandes d’aide qui n’aboutissent pas à la dispensation d’un service est dû aux problèmes de financement (Com-Ruelle et al., 2002). Les auteurs identifient d’autres causes de la non-délivrance de services comprenant le manque de personnel disponible et le refus de l’aide par la personne âgée ou par sa famille. Par ailleurs, Soullier (2001) rapporte que « 42% des personnes âgées les plus dépendantes estiment avoir besoin d’une aide supplémentaire pour les activités essentielles de la vie quotidienne ».