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3. P R É SENTATION DES R É SULTATS

3.2 Résultats des observations cliniques au Bénin

3.2.1 Bains et massages

Nous ne détaillerons pas ici le déroulement complet de la toilette qui figure en annexe page 182. Nous présentons cependant un rapide résumé de nos observations.

Le bain d’un jeune enfant au Bénin est un moment important : « chez nous les Africains,

quand on doit laver un enfant on dit /ago ago/ (poussez-vous) ». Cela occupe une grande

partie du temps de la mère qui le lave deux à trois fois par jour en cas de grandes chaleurs, ce qui n’est pas rien quand on sait qu’une toilette complète suivie des massages peut durer près d’une heure. Le terme de bain est sans doute mal choisi car la toilette n’est jamais un moment d’immersion : la toilette au Bénin se fait toujours par ablutions : on verse de l’eau sur l’enfant, elle doit ruisseler sur son corps : on ne le trempe pas. On considère d’ailleurs que la façon européenne de laisser les enfants « tremper » dans l’eau du bain garde les saletés en contact avec leur corps et ne les nettoie pas réellement.

Nous nous attacherons ici à décrire succinctement le déroulement de ce bain et nous nous focaliserons surtout sur les moments forts d’interactions mère/enfant qui le composent.

La mère apporte d’abord tout le matériel nécessaire au bain : produits de toilette, eau chaude et eau froide, tisane avec laquelle elle baignera l’enfant : c’est le début de la toilette et le signal pour l’enfant qu’un grand moment de plaisir va commencer.

La mère s’installe ensuite sur une chaise ou un banc assez bas et étend ses jambes devant elle. Elle place une grande bassine sous ses jambes et déshabille son enfant qu’elle place en travers de ses jambes, sur le dos. Cette position de l’enfant permet des interactions visuelles et verbales qui dureront une grande partie du bain. La mère observe son enfant : ses réactions, ses mimiques, ses vocalisations… Elle vocalise en retour, parle à son enfant pour commenter ses réactions ou le déroulement du bain. Les interactions sont multi-sensorielles : échanges de regards, adaptations kinesthésiques réciproques entre la mère et son enfant, communication verbale et non-verbale…

L’enfant est savonné puis rincé deux fois sur le ventre puis sur le dos. Les interactions avec sa mère sont plus riches quand il est positionné sur le dos, face à sa mère, cependant, même quand il est sur le ventre et ne la regarde pas sa mère continue parfois à lui parler.

Le bain évolue ensuite doucement vers le massage : le dos est rincé par des pressions assez appuyées d’un tissu mouillé sur le corps. On dit que l’enfant a « trop dormi » et que ces pressions vont le prémunir des courbatures. Le façonnage de tout le corps est très précis : chaque partie du corps doit être modelée à des fins esthétiques ou superstitieuses (pour une fille par exemple, les pieds plats risquent de ruiner son mari) mais également pour rendre l’enfant plus souple ou plus solide. Ses chevilles sont par exemple affinées avec des pressions circulaires répétées, ses fesses sont modelées pour être plus rebondies, ses bras sont ramenés en arrière pour qu’il puisse se gratter seul le dos… Cette étape du bain s’enracine dans la notion de handling développée par Winnicott. Le bébé apprend ici à se positionner et à s’adapter à la façon dont sa mère le soutient, le porte, le manipule.

Ces massages sont effectués avec de la pommade aux plantes très odorantes qui stimule sans aucun doute l’odorat de l’enfant.

On effectue également avec l’enfant plusieurs manipulations quelque peu acrobatiques. On le soulève par les bras, on le soulève par la tête, parfois même par les pieds, en le secouant légèrement, tout ça dans le but de le rendre souple et surtout courageux. On le « lance » également « en l’air » avant de le rattraper ; en fait, l’enfant quitte à peine les bras de sa mère, et n’est pas réellement lâché dans vide. Aussi surprenant que cela puisse paraître à la lecture de cette description, ces moments ne sont pas des moments de souffrance pour l’enfant : nous n’avons jamais observé d’enfant pleurer au moment de ce petit saut dans les airs.

On purge également l’enfant en versant de l’eau chaude sur son sexe et son anus, ce qui a pour effet de lui faire évacuer ses selles et ses urines en vue d’éviter les coliques et autres désagréments intestinaux. C’est en général ce moment du bain qui fait pleurer le bébé.

Une fois la toilette terminée, on applique du talc sur la peau et les vêtements de l’enfant pour éloigner les mouches et éviter la transpiration, pendant les premiers mois on chauffe également la cicatrice ombilicale de l’enfant.

On fait ensuite la couche de l’enfant à l’aide d’un tissu en pagne et d’un morceau de plastique. Le bain d’un enfant handicapé n’est pas spécifique : on le baigne de la même façon.

3.2.1.2 Bain d’un très jeune bébé (avant un mois).

Avant l’âge d’un mois ce n’est en principe pas la mère qui lave son enfant mais le plus souvent sa belle-mère ou sa tante. Les gestes en eux-mêmes sont identiques quoique réalisés plus précautionneusement en raison de la cicatrice ombilicale encore présente et des fontanelles qu’on masse pour qu’elles se ferment. On considère souvent que la mère, à fortiori s’il s’agit de son premier enfant, mais également pour les suivants, est trop fatiguée pour s’occuper de lui et risquerait d’être maladroite : une femme plus expérimentée lui enseigne donc pendant le premier mois, la marche à suivre. La fermeture des fontanelles obéit elle aussi à un rituel de modelage du crâne mais également à un traitement par une tisane bien spécifique dont on asperge le crâne de l’enfant. Pour favoriser la cicatrisation du nombril, on utilisera souvent pour les très jeunes enfants une éponge douce plutôt qu’un filet pour le savonner.

3.2.1.3 Bain d’un enfant qui marche.

Dès l’âge de 5 ans environ, un enfant béninois se lave seul et lave tous les soirs sa culotte qu’il met à sécher. Cependant, avant cet âge les enfants dépendent encore de leur mère ou de leurs aînés pour se laver. La démarche est identique à celle utilisée avec les bébés, sauf que l’enfant se tient debout appuyé sur le rebord de la bassine. On lui lave également deux fois chaque face du corps en terminant par les parties génitales, qu’on cesse cependant de purger assez tôt dans la fin de la première année de l’enfant. Les massages s’arrêtent pour la plupart aux alentours de 8 mois quand on considère que l’enfant est « suffisamment solide ».

3.2.2 Alimentation des enfants handicapés.