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Troisième partie : La vectorisation

I. Généralités sur le système de vectorisation :

I.4 Les avantages de la vectorisation :

a. Protection de la molécule encapsulée

Beaucoup de molécules biologiquement actives sont instables physico-chimiquement ou biochimiquement lorsqu’elles se trouvent dans le corps humain. Leur encapsulation dans des vecteurs permet de les protéger contre l’inactivation chimique, enzymatique ou immunologique. De cette manière on peut améliorer les propriétés pharmacocinétiques de ces molécules, ce qui est utile si les principes actifs choisis sont à faible durée de vie in vivo.

b. Réduction des effets secondaires et/ou toxiques des principes actifs

Pour certaines maladies, notamment le cancer, les molécules employées comme traitement peuvent s’avérer toxiques alors qu’il est nécessaire d’en injecter des quantités importantes et/ou de répéter les injections pour obtenir un effet thérapeutique. L’encapsulation de ces principes actifs dans des vecteurs permet une libération prolongée des principes actifs et donc une diminution du nombre d’injections.

c. Amélioration des profils pharmacocinétiques

Les fluctuations de concentration en principe actif dans le sang peuvent être réduites en contrôlant la libération de celui-ci, ce qui permet de la maintenir dans la zone d’efficacité thérapeutique (Figure 14).

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Figure 14 : Evolution de la concentration plasmatique du principe actif

en fonction du temps avec ou sans vectorisation.

En effet, la concentration en médicament doit dépasser le niveau minimum d’efficacité, tout en restant inférieure au niveau toxique. Le contrôle de la vitesse de libération du principe actif encapsulé dans un vecteur particulaire peut alors permettre d’assurer une concentration quasi constante, comprise entre ces deux niveaux, pendant une durée bien supérieure à celle obtenue avec une administration classique. Le principe actif encapsulé dans un vecteur pourra être libéré progressivement par dégradation de la particule sous l’effet de certains facteurs précis (pH, température, présence de certaines enzymes, magnétisme) ou par diffusion du principe actif. Ceci permet de maintenir la concentration en principe actif dans la fourchette souhaitée.

d. Sélectivité de la libération :

Dans certaines conditions, la vectorisation peut apporter un ciblage du médicament grâce à des ligands à la surface des vecteurs qui sont capables d’interagir avec des cellules cibles [51]. Ceci permet à la fois de limiter la biodistribution de médicament au sein de l’organisme et de réduire les effets secondaires indésirables au niveau des organes sains. Ainsi, la sélectivité et la spécificité de ces particules vis-à-vis de la cible peuvent permettre d’améliorer l’efficacité du principe actif.

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I .5 Stratégies de ciblage :

L’injection d’un vecteur chargé en principe actif dans l’organisme ne suffit pas toujours à améliorer l’effet de celui-ci. Il faut s’assurer que les molécules soient libérées au plus près possible de la zone à traiter sinon on risque de provoquer des effets secondaires, et d’observer l’opsonisation du vecteur. La libération à des endroits non stratégiques des principes actifs conduit à une intervention ratée.

Il existe plusieurs méthodes pour favoriser la présence des vecteurs à un endroit précis. Ce concept est défini sous le terme de ciblage. Il a été proposé dès la fin du XIXème siècle par le Dr Paul Ehrlich (prix Nobel de médecine 1908) qui a imaginé une « magic bullet », vecteur capable d’interagir spécifiquement avec un tissu ou une cellule donné [52].

Le ciblage constitue la délivrance du principe actif à proximité d’un tissu ou d’un type cellulaire. Il peut se faire soit par accumulation du vecteur qui va libérer les molécules qu’il contient au fur et à mesure de sa dégradation ou par endocytose, soit par déstabilisation de ce vecteur lorsqu’il circule à proximité de la cible.

On distingue deux types de ciblage : passif et actif.

I .5.1 Ciblage tumoral passif : « effet EPR »

Dans le cas des tumeurs solides, les vaisseaux de la tumeur présentent des ouvertures entre les cellules endothéliales qui permettent un approvisionnement important en nutriments et permettre ainsi une croissance rapide de la tumeur. Cette structure anormale des vaisseaux engendre une fuite importante des composés plasmatiques, comme les macromolécules, les nanoparticules ou les particules lipidiques, vers la tumeur. De plus, du fait de la déficience de système lymphatique dans les tissus tumoraux, les composés plasmatiques s’accumulent dans la tumeur [53].

Ce phénomène, décrit il y a une vingtaine d’années et appelé effet EPR pour Enhanced Permeability and Retention, est mis à profit pour permettre la libération de composés thérapeutiques d’une manière passive au sein des tumeurs solides (Figure15). On l’appelle « le ciblage passif » des tumeurs. Les composés thérapeutiques de taille appropriée peuvent

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traverser les vaisseaux perméabilisés mais aussi s’accumuler dans le compartiment où se situe la tumeur. Il est possible, en un à deux jours, d’atteindre de fortes concentrations locales en principe actif, 10 à 50 fois supérieures à celles obtenues dans les tissus sains [54].

Le ciblage passif nécessite l’utilisation de composés stables, non agrégés, furtifs et présentant un temps de circulation suffisamment long pour conduire à l’accumulation du composé dans les tumeurs. Il nécessite aussi que les composés aient une taille appropriée qui ne dépasse pas la taille de pores des vaisseaux perméabilisés (entre 380 et 780 nm) [55] et qui ne soit pas trop petite. En effet, l’effet EPR est négligeable pour les petites molécules qui peuvent se redistribuer dans la circulation sanguine par diffusion et/ou convection et sont éliminées préférentiellement par voie rénale [56] .Enfin, la taille de la tumeur est un paramètre important.

L’effet EPR est plus marqué dans les tumeurs de petite taille, ce qui est probablement lié à une plus grande densité des vaisseaux par rapport aux tumeurs de grande taille présentant une région avasculaire [57].

Les limitations du ciblage passif ont contribué au développement d’une approche alternative, le ciblage actif.

I .5.2 Ciblage tumoral actif :

Les nombreux progrès réalisés dans les domaines de la biologie moléculaire et cellulaire et de la génomique ont contribué à une meilleure compréhension des mécanismes moléculaires de formation des tumeurs, à l’identification de cibles et ont encouragé le développement d’approches de ciblage actif des tumeurs (Figure 15). Le ciblage actif de tumeur par des nanovecteurs repose sur deux éléments, la cible et la molécule reconnaissant la cible, qui doit être greffée sur le vecteur lui-même.

Le choix de la cible biologique doit répondre à différents critères :

- La cible doit être accessible : elle doit être exprimée à la surface des cellules et si possible être à proximité de la circulation sanguine.

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- La cible, appelée récepteur ou antigène, doit être spécifique de la zone tumorale ou au moins, être exprimée plus fortement au sein des tumeurs que dans les autre tissus. - Il doit exister un ligand ayant une grande sélectivité et une forte affinité pour la cible,

l’idéal étant de disposer d’anticorps en raison de leur spécificité.

Figure 15 : Représentation schématique de l’effet EPR (Enhanced Permeability and Retention),

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