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2.1 Protection contre l’environnement

La plupart des espèces bactériennes formant des biofilm produisent une matrice d’exopolymères qui enrobe les cellules. Cette matrice est composée d’un mélange de composants, tels que des exopolysaccharides (EPS), des protéines, des acides nucléiques et d’autres substances (Sutherland 2001). Parmi ces composants, les EPS ont été particulièrement étudiés et certains avantages leur ont été attribués.

La matrice d’EPS d’un biofilm peut procurer un environnement favorable au développement de certaines bactéries. En effet, les bactéries qui sécrètent des EPS sont capables de former des agrégats qui peuvent constituer un squelette dans lequel d’autres organismes ne formant pas de biofilm peuvent être englobés. De cette façon, certaines bactéries anaérobies strictes peuvent ainsi vivre dans un microenvironnement où le niveau d’oxygène demeure très faible.

De plus, la matrice d’EPS peut empêcher l’accès de certains agents antimicrobiens au biofilm, en agissant comme un échangeur d’ions qui réduit la diffusion des composés du milieu environnant vers le biofilm (Gilbert, Das et al. 1997). Cette caractéristique dépend de la nature de l’agent et des bactéries productrices de biofilm (Hoiby, Bjarnsholt et al. 2010). Cet effet semble être très prononcé avec les antibiotiques hydrophiles et chargés positivement tels que les aminoglycosides (Nickel, Ruseska et al. 1985; Nichols, Dorrington et al. 1988; Nichols, Evans et al. 1989; Subramanian, Shanmugam et al. 2012). Il a également été montré que les EPS permettaient d’emprisonner des métaux, des cations ainsi que des toxines (Flemming 1993; Joshi and Juwarkar 2009; Ruas-Madiedo, Medrano et al. 2010). De plus, non seulement les biofilms sont capables de concentrer les métaux, mais ils jouent également un rôle important dans leur transfert au sein des écosystèmes (Farag, Woodward et al. 1998).

Enfin, il a été montré que la présence d’EPS fournissait une protection contre divers stress environnementaux, tels que les radiations UV, les changements de pH, les chocs osmotiques et la dessiccation (Flemming 1993).

2.2 Disponibilité en nutriments et coopération métabolique

Il a été montré qu’au sein de certains biofilms, les microcolonies sont séparées par des canaux aqueux. Ces canaux forment un réseau de circulation permettant, d’une part, d’acheminer l’oxygène et les nutriments dans les régions enfouies du biofilm, et, d’autre part,

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d’évacuer les déchets (Costerton, Lewandowski et al. 1995). Les caractéristiques métaboliques des bactéries au sein d’un biofilm sont différentes de celles de ces mêmes bactéries en condition planctonique. L’architecture du biofilm permet la mise en place d’une coopération métabolique entre les membres de la communauté bactérienne. Par exemple, pour la dégradation de la matière organique en méthane et en dioxyde de carbone en condition anaérobie, l’association d’au moins trois catégories de microorganismes est nécessaire. Tout d’abord, les bactéries fermentatives initient le catabolisme en produisant des alcools et des acides qui seront utilisés par la suite par les bactéries acétogènes. Au final, les bactéries méthanogènes obtiennent l’énergie nécessaire pour convertir l’acétate, le dioxyde de carbone et l’hydrogène en méthane (Davey and O'toole 2000). Un biofilm apparaît donc comme un environnement idéal pour la mise en place d’interactions syntrophiques.

2.3 Brassage génétique

Le transfert horizontal de gènes joue un rôle important dans l’évolution des communautés bactériennes. En effet, c’est un moyen rapide pour les bactéries d’acquérir de nouveaux caractères, et notamment des capacités d’adaptation et de résistance à un environnement hostile. Or, les biofilms permettraient d’augmenter le brassage génétique entre les diverses espèces, en facilitant le transfert horizontal de gènes (Madsen, Burmolle et al. 2012). En effet, il a été montré que les phénomènes de conjugaison étaient plus fréquents au sein d’un biofilm qu’en condition de croissance planctonique (Hausner and Wuertz 1999; Sorensen, Bailey et al. 2005). Il en est de même pour les phénomènes de transformation qui permettent non seulement le transfert de petits fragments d’ADN mais également de plasmides initialement considérés comme non mobiles (Hendrickx, Hausner et al. 2003; Maeda, Ito et al. 2006). De plus, il a été montré que certains plasmides possédaient des gènes codant pour des facteurs impliqués dans la formation de biofilm. C’est notamment le cas de plasmides contenant des gènes codant des fimbriae chez E. coli isolés de souches capables

d’adhérer à des surfaces abiotiques (Norman, Hansen et al. 2008). Il existerait donc des interconnections importantes entre la formation de biofilm et le transfert horizontal de gènes via les éléments génétiques mobiles, qui s’autoréguleraient de façon positive (Madsen, Burmolle et al. 2012).

L. monocytogenes est considérée comme un faible producteur de biofilm comparé à

d’autres genres bactériens comme Pseudomonas aeruginosa ou Staphylococcus aureus. De plus, contrairement à ces dernières, la présence de matrice extracellulaire de nature

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polysaccharidique n’a jamais été mise en évidence chez L. monocytogenes. Cependant, selon les souches et les conditions de cultures, différentes architectures de biofilms ont pu être mises en évidence.

3. L’architecture des biofilms chez L. monocytogenes

L’architecture des biofilms de L. monocytogenes a été étudiée par différentes techniques comme la microscopie électronique à balayage (Kalmokoff, Austin et al. 2001; Chavant, Martinie et al. 2002; Borucki, Peppin et al. 2003), la microscopie à épifluorescence (Lundén, Miettinen et al. 2000; Kalmokoff, Austin et al. 2001; Carpentier and Chassaing 2004; Monk, Cook et al. 2004; Pan, Breidt et al. 2006) et la microscopie confocale à balayage laser (LSMC) (Chae and Schraft 2000; Rieu, Briandet et al. 2008). Plusieurs tentatives de modélisation de formation de biofilm ont été réalisées (Kreft and Wimpenny 2001; Zameer, Gopal et al. 2010).

L. monocytogenes est capable de coloniser aussi bien les surfaces hydrophiles comme

l’acier inoxydable, que les surfaces hydrophobes telles que le polytetrafluoroéthylène (PTFE) (Figure 9) (Chavant, Martinie et al. 2002; Renier, Hebraud et al. 2011).

Figure 9 : Formation de biofilm au cours du temps chez L. monocytogenes EGDe (Renier, Hebraud et al. 2011). Biofilm sur coupon d’acier après A) 10 secondes, B) 5 heures, C, 8 heures, D) 24 heures, E) 5 jours, F) 7 jours d’incubation à 20°C. Les flèches

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