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CHAPITRE 1 : Les cyclopropanes monohalogénés : synthèse et réactivité

1.3 Autres méthodes d’halogénocyclopropanation stéréosélective

synthétique recensés dans la littérature et présentant une activité biologique sont sous forme énantioenrichie.23 Comme il est possible de le constater avec les synthèses totales de la callipeltoside A mentionnées précédemment, il serait avantageux de disposer de méthodes d’halogénocyclopropanation stéréosélectives et générales pour accéder à ces produits avec moins d’étapes. Il y a toutefois très peu de telles méthodologies rapportées dans la littérature et elles reposent presque toutes sur l’halogénocyclopropanation de Simmons- Smith diastéréosélective employant un carbénoïde α-substitué et un alcène chiral.

La fluorocyclopropanation diastéréosélective du (4R,5S)-4,5-diphenyl-3-vinyl-2- oxazolidinone 40 avec le carbénoïde de zinc α-fluoré EtZnCHIF, généré par l’échange d’alkyle entre le diéthylzinc et le fluorodiiodométhane, a été réalisée par le groupe de Terashima (Schéma 5).24 Bien que la diastéréosélectivité faciale (41 + 42/ 43 + 44) soit bonne (9:1), la sélectivité cis:trans (41 + 44 / 42 + 43) est plutôt faible (2:1).

Schéma 5. Fluorocyclopropanation diastéréosélective

Le modèle pour expliquer la stéréosélectivité de cette réaction est illustré dans le Schéma 6. Les deux conformations réactives probables sont celles où les orbitales π du groupe vinyle sont en conjugaison maximale avec le doublet libre de l’atome d’azote. Toutefois, la conformation A comporte une interaction stérique déstabilisante entre le groupe C=O et un atome d’hydrogène du groupe vinyle. La fluorocyclopropanation

s’effectue alors sur la face inférieure moins encombrée du conformère B. La faible sélectivité cis:trans s’expliquerait quant à elle par l’encombrement stérique similaire entre l’atome de fluor ou d’hydrogène (Schéma 6, en bleu) des deux conformations réactionnelles du carbénoïde de zinc monofluoré (Schéma 6, C et D) et l’atome d’hydrogène (Schéma 6, en fushia) porté par l’auxiliaire chiral. En effet, bien que le rayon atomique du fluor (0,50 Å) soit le double de celui de l’hydrogène (0,25 Å),25 il demeure que l’encombrement stérique occasionné par l’atome d’hydrogène de l’auxiliaire chiral est plutôt faible et ne permet donc pas de discriminer significativement entre les deux conformations du carbénoïde de zinc monofluoré.

Schéma 6. Modèle expliquant la diastéréosélectivité de la fluorocyclopropanation

Le groupe de Walsh a mis au point une réaction en tandem d’addition énantiosélective d’un réactif alkylzincique sur un aldéhyde α,β-insaturé 45 à l’aide du ligand chiral (−)-MIB développé par Nugent,26 suivie par une halogénocyclopropanation diastéréosélective de l’alkoxyde de zinc allylique énantioenrichi 46 (Schéma 7).27 Le carbénoïde de zinc α-halogéné CF3CH2OZnCHXY 47, dérivé du CF3CH2OH, Et2Zn et de

l’haloforme CHX2Y, a été sélectionné en raison de sa réactivité supérieure par rapport aux

carbénoïdes EtZnCHXY et IZnXHXY. En effet, une conversion incomplète était observée avec ces carbénoïdes moins électrophiles. Fait intéressant, lorsque la réaction en tandem a été réalisée avec des aldéhydes de type trans-cinnamaldéhyde 49, une inversion de la

configuration absolue a été observée au niveau du carbone portant l’halogène (Schéma 7, (b)). Le modèle stéréochimique pour l’halogénocyclopropanation de Walsh est illustré à la Figure 4. La réaction de Simmons-Smith est une réaction qui procède par un état de transition de type papillon (traits pointillés rouges, Figure 4, A). Cette réaction est stéréospécifique dans le sens où la stéréochimie relative des substituants présents sur l’alcène de départ est conservée dans le produit cyclopropané.28 Lorsque des alcools allyliques présentant un centre chiral en position α de l’oxygène sont utilisés dans la réaction de Simmons-Smith, la conformation favorisée est celle où la tension allylique-1,3 est minimisée. L’alkoxyde de zinc peut alors se coordiner au carbénoïde de zinc et diriger la cyclopropanation sur l’une des deux faces diastéréotopiques de l’alcène. 29 Walsh a proposé que dans le cas de l’halogénocyclopropanation d’alkoxydes de zinc 46 ne présentant pas de substituants aromatiques, il y a complexation de l’halogène qui ne participe pas à l’état de transition papillon avec l’atome de zinc de l’alkoxyde (traits pointillés bleus, Figure 4, B). Ceci favoriserait la formation du diastéréoisomère 48 où l’halogène et le groupe alcool ont une configuration relative cis.

Schéma 7. Réaction en tandem d’addition énantiosélective d’un réactif dialkylzincique à un aldéhyde α,β-insaturé suivie de l’halogénocyclopropanation diastéréosélective

Toutefois, lorsqu’un substrat de type trans-cinnamaldéhyde est utilisé, Walsh et ses collaborateurs proposent qu’une interaction π-Zn de concert avec une coordination X-Zn viendraient favoriser la formation du diastéréoisomère trans 51 (traits pointillés fushias, Figure 4, C).

Figure 4. Modèle stéréochimique pour l’halogénocyclopropanation de Walsh

Une méthode indirecte pour accéder aux iodocyclopropanes, tels que 56, implique la zinciocyclopropanation diastéréosélective de l’alcool allylique énantioenrichi 52 suivie du traitement du zinciocyclopropane 55 avec de l’iode moléculaire (Schéma 8). Cette méthodologie développée par Alexandre Gagnon et Jean-François Marcoux du groupe Charette implique l’utilisation d’un carbénoïde gem-dizincique (IZn)2CHI 53 généré par un

échange d’alkyle entre le carbénoïde α-iodozincique IZnCHI2 et l’iodoéthylzinc. Le

conformère ayant la tension allylique-1,3 minimale serait favorisé et l’alkoxyde de zinc ainsi que l’éther benzylique viendraient se coordiner (54, traits pointillés bleus) à l’atome de zinc n’étant pas impliqué dans l’état de transition papillon (54, traits pointillés rouges). Cette complexation gouvernerait la diastéréosélectivité de la réaction de zinciocyclopropanation, formant ultimement l’iodocyclopropane 56, dans lequel l’atome d’iode et la chaîne portant le groupe tert-butyle ont une configuration relative cis.

Enfin, le groupe de Hu a tout récemment élaboré une méthodologie de monofluorocyclopropanation énantiosélective par la voie d’une réaction de fermeture de cycle induite par une addition de Michael (MIRC) impliquant l’addition de l’anion chiral 59 du (R)-N-tosyl-S-phenylsulfoximine 58 à des amides de Weinreb α,β-insaturés 57 (Schéma 9).30 Cette méthode est le premier exemple de monofluorocyclopropanation de composés éthyléniques donnant des énantiosélectivités élevées.

Schéma 8. Zinciocyclopropanation diastéréosélective de l’alcool allylique énantioenrichi 59 suivie du traitement du zinciocyclopropane à l’iode moléculaire

Schéma 9. Méthodologie de monofluorocyclopropanation énantiosélective par la voie d’une réaction de fermeture de cycle induite par une addition de Michael