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2. La problématique de l’échange fracture matrice

2.3. Modèles d’échange entre fracture et matrice

2.3.3. Autres formulations de l’échange fracture-matrice

nombreuses expériences et observations montrent qu’il ne peut en tant que tel rendre compte de la totalité de la dynamique des échanges. Deux possibilités ont été proposées pour étendre le modèle double-porosité. La première possibilité a consisté à modifier l'expression de l’échange entre fracture et matrice pour rendre compte de la dynamique des structures. La deuxième possibilité conserve un échange dépendant linéairement de la différence de pression (ou concentration) mais intègre l'hétérogénéité des structures dans sa représentation du milieu fracture-matrice.

Classiquement l’échange est une fonction linéaire de la différence de pression entre fracture et matrice. Pour rendre compte de l'effet de la dynamique des structures, les alternatives proposées ont été soit de modifier cette dépendance linéaire soit d’intégrer un effet mémoire. En ce qui concerne la première alternative, l'hypothèse de l'établissement d'un régime quasi- stationnaire pour l'échange n’est valable strictement que pour les temps longs, lorsque tout le bloc réagit aux sollicitations des fractures. Pour les temps courts, seules les zones du bloc proches des fractures réagissent. A partir d’un modèle de strates, Dykhuizen [1990] propose une approche où la somme infinie de l' équation (6) (section 2.3.2) est approximée de manière différente pour les temps courts et les temps longs. Il raccorde une solution aux temps courts, correspondant à la sollicitation de la matrice essentiellement voisine des fractures, et une solution aux temps longs, correspondant aux échanges en régime quasi-permanent (Figure 12). Cependant, la fonction de raccordement entre solutions aux temps courts et longs est non linéaire, entraînant donc la modélisation d’un phénomène fondamentalement linéaire (la diffusion) par une expression non linéaire. Dans la même gamme d’alternatives, Zimmerman et al. [1993] utilisent aussi une représentation de la dynamique transitoire du coefficient d'échange pour y ajouter l'effet de l’évolution transitoire de la pression dans les fractures. Ils expriment l'évolution de la pression moyenne dans le bloc matriciel en prenant en compte l'évolution temporelle de la pression dans les fractures.

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Figure 12 – Comparaison de la qualité de représentation de l'évolution de la pression dans la matrice pour un milieu stratifié [Dykhuizen, 1990].

La courbe intitulée "quasi-steady solution" est obtenue avec l'hypothèse d'un échange en régime quasi-permanent à tous les temps (sollicitation totale du bloc) et la courbe intitulée "new model" est obtenue en prenant en compte

une sollicitation partielle du bloc pour les temps courts et totale pour les temps longs. La solution avec un échange indépendant du temps sous-estime la pression réelle aux temps courts en considérant que tout le bloc

réagit.

La deuxième alternative pour prendre en compte la dynamique des structures consiste à faire dépendre l’échange de l’historique antérieur des différences de concentration entre fracture et matrice. La pondération temporelle des différences de pression est donnée par le noyau du produit de convolution suivant Noetinger and Estebenet [2000]

. (11) En utilisant aussi un produit de convolution, l'effet de la variation de la concentration dans la fracture au cours du temps peut être pris en compte dans la représentation des échanges de solutés [Carrera et al., 1998; Haggerty et al., 2000]. En posant la concentration dans la matrice et la concentration constante dans la fracture et en sachant que ces concentrations sont liées par une relation du type

, (12)

la concentration pour une concentration qui varie au cours du temps s'exprime par superposition des solutions à chaque temps en utilisant un produit de convolution

(13) où est la fonction mémoire du modèle.

La deuxième généralisation, visant à prendre en compte l'hétérogénéité des structures, conserve un échange dépendant linéairement de la différence de pression (ou concentration). Il s’agit d’intégrer implicitement les zones d’altération entre fracture et matrice [Hamm and

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Bidaux, 1996; Moench, 1984] ou l’hétérogénéité hydraulique de la matrice à l’intérieur du bloc (échelle intra-bloc). Dans le cas d’écoulement de fluide, le coefficient d’échange a été déterminé essentiellement à partir d’essais de puits. Il existe également des méthodes pour le déterminer à partir de simulations numériques de modèles de réseaux de fractures. Il s’agit de procéder à une homogénéisation numérique des équations locales à l'échelle du bloc. La taille des blocs du modèle double-porosité étant à priori contrainte par la taille du REV du milieu fracturé, l’échelle de discrétisation du modèle est souvent inadaptée pour une homogénéisation directe de la matrice. La contrainte de la définition d'un REV pour la modélisation des réseaux de fractures sera discutée plus en détails dans la suite du manuscrit. En ce qui concerne la représentation de la matrice, la solution majoritairement adoptée est de déterminer une première échelle d’homogénéisation du bloc matriciel (appelée échelle unité ou échelle locale) correspondant à une échelle de discrétisation intermédiaire entre la représentation continue et la discrétisation en blocs [Alboin et al., 2002; Kfoury et al., 2004; Zyvoloski et al., 2008] (Figure 13).

Figure 13 – Prise en compte de l’hétérogénéité du bloc matriciel [Kfoury et al., 2004]. L'homogénéisation des propriétés hydrauliques de la matrice à l'échelle du bloc est faite par deux étapes d'homogénéisation consistant en une première homogénéisation à une échelle intermédiaire (Unit-Scale)

et une seconde à l’échelle du bloc (Block-Scale).

Pratiquement, il peut être aussi attractif de résoudre les équations dans le domaine de Laplace où l’effet de la matrice est de modifier le terme d’emmagasinement en y adjoignant une fonction d’échange comme montré par l’équation (10) de Noetinger and Estebenet [2000]:

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avec la pression moyenne dans les fractures exprimée dans le domaine de Laplace, le rapport de volumes entre le domaine fracturé et le domaine total et la fonction d'échange exprimée dans le domaine de Laplace. La fonction d’échange peut être déterminée en utilisant une méthode de marcheurs aléatoires à temps continus puisqu'elle est égale à l'inverse des temps moyens d'arrivée dans la fracture de particules lancées uniformément dans les blocs matriciels [Noetinger et al., 2001]. Avec cette méthode, le coefficient d’échange peut être déterminé pour des blocs hétérogènes de taille et de forme diverses [Noetinger and Estebenet, 2000; Noetinger et al., 2001] (Figure 14).

Figure 14 – Détermination numérique du coefficient d'échange [Noetinger, 2010].

Le coefficient d'échange est calculé comme l'inverse du temps de diffusion moyen dans le bloc matriciel, ce temps étant évalué numériquement par une méthode de marcheurs aléatoires.

Le concept fondamental des modèles double-porosité est également utilisé pour d’autres processus tels que les écoulements multiphasiques. Kazemi et al. [1976] ont été les premiers à développer un modèle double-porosité capable de représenter les écoulements multiphasiques avec prise en compte du phénomène d’imbibition. En présence de deux phases, les échanges entre porosités sont éventuellement plus complexes amenant par exemple Uleberg and Kleppe [1996] à introduire des contacts capillaires entre les blocs matriciels.