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Augmentation du pH d’un pur jus pressé à la main : effet sur la qualité après 1 mois de stockage

Résultats et discussions – Chapitre 2 Qualité aromatique du jus d’orange : Recherche sur la

2. Augmentation du pH d’un pur jus pressé à la main : effet sur la qualité après 1 mois de stockage

L’évolution des composes d’arôme du jus d’orange à base de concentré a été étudiée dans le chapitre 1. Cette évolution ne dépendait pas du type d’emballage utilisé et de sa perméabilité à l’oxygène mais de réactions propres à la matrice. Ces réactions de catalyse acide dues aux conditions de pH (3,9) conduisent à la formation de composés d’arômes de dégradation comme le furfural, le 4-vinylgaïacol et l’α-terpinéol et débouchent sur la nécessité de travailler sur la matrice pour améliorer la qualité aromatique du jus. Une diminution de l’acidité du jus pourrait permettre de limiter ces réactions de catalyse acide. Pour se faire, une étude modèle est conduite au laboratoire à partir de pur jus pressé à la main dont le pH est modulé par l’ajout de différentes teneurs en hydroxyde de sodium.

2.1 Effet sur la teneur en vitamine C

La teneur en acide ascorbique du pur jus pressé à la main au pH initial de 3,2 est de 538 ± 13 mg.L-1. Les valeurs obtenues dans le même jus après 1 mois de stockage ambiant, et dans le

même jus aux pH ajustés à 3,5; 4,0; 5,0; 6,0 et 7,0 par ajout de soude avant le stockage sont présentées dans le Tableau 34.

Tableau 34. Teneurs en acide ascorbique (mg.L-1) (moyenne ± écart-type, n=3) du pur jus d’orange en fonction de son pH après 1 mois de stockage ambiant

pH Teneur en acide ascorbique (mg.L-1)

3,2 267 ± 8 a 3,5 300 ± 6 b 4,0 330 ± 14 c 5,0 313 ± 10 bc 6,0 416 ± 7 d 7,0 473 ± 9 e

Le Tableau 34 montre que plus le pH est élevé et plus les pertes en vitamine C sont faibles. A pH 3,2 la teneur en vitamine C après 1 mois de stockage est de 267 ± 8 mg.L-1 et à pH 7,0 elle est de 473 ± 9 mg.L-1. Excepté à pH 5 où la teneur en acide ascorbique demeure proche des valeurs obtenues à pH 3,5 et 4,0, toutes les valeurs sont significativement différentes (p<0.05) et supérieures lorsque le pH augmente. Ce résultat est en accord avec les observations de Yuan et Chen (1998) qui montraient que la voie de dégradation aérobie de la vitamine C donnant naissance au furfural est favorisée à de faibles pH compris entre 1 et 3. De même Li et al. (1989) ont diminué le pH d’un jus à 2 et 2,5 et ont observé des pertes plus importantes en vitamine C.

La protection de la vitamine C par un pH supérieur devrait donc limiter la formation des composés d’arôme de dégradation comme le furfural.

2.2 Effet d’une augmentation du pH sur les teneurs en composés d’arôme

Evolution des composés d’arôme du pur jus par rapport au jus à base de concentré au pH natif

La modulation du pH et son effet sur les teneurs en composés d’arôme ont été effectués sur du pur jus en condition modèle au laboratoire. Nous avons donc comparé les compositions du jus à base de concentré et du pur jus et leurs évolutions après 1 mois de stockage. Les concentrations de 30 composés d’arôme du pur jus d’orange (Naveline, Espagne) pressé à la main à t0 et après 1 mois de stockage sont données dans le Tableau 35 en fonction du pH du

jus. Ces concentrations ont été comparées à celles du jus à base de concentré et à son évolution, étudié dans le chapitre 1 (Tableau 22).

Le pur jus obtenu est beaucoup moins riche en limonène (5 fois moins) et de façon plus générale moins riche en terpènes. Le concentré d’orange contenait déjà des concentrations plus élevées en ces composés que le pur jus. En effet, l’extraction mécanique du jus augmente les teneurs en constituants des huiles essentielles par rapport à une extraction manuelle (Moshonas et Shaw, 1994), procédé utilisé pour notre pur jus. La fraction aromatique huileuse ajoutée dans le concentré et constituée majoritairement de limonène et d’autres terpènes a amplifié les écarts entre le jus à base de concentré et le pur jus.

Concernant les esters, le butanoate d’éthyle n’a pu être quantifié car il a coélué avec l’α- pinène. Néanmoins, nous pouvons constater que le pur jus contient plus d’esters aussi bien en quantité de matière qu’en nombre de composés (hexanoate d’éthyle, 3-hydroxy butanoate d’éthyle et 3-hydroxy hexanoate d’éthyle). Le concentré ne contient en effet aucun de ces composés et le butanoate d’éthyle est l’ester très majoritaire de la fraction aqueuse ajoutée. Pour les alcools aliphatiques, hormis l’octanol présent dans le concentré et dans la fraction huileuse et donc dans le jus à base de concentré, le pur jus contient plusieurs autres alcools comme le 2-méthyl-1-propanol et le cis-3-hexen-1-ol. Au contraire, les alcools monoterpéniques sont moins concentrés dans le pur jus que dans le jus à base de concentré. Le linalol, comme les terpènes, est présent dans les huiles essentielles du flavedo (Bazemore et al., 2003), sa teneur est donc plus élevée dans le concentré. Les autres alcools monoterpéniques sont des produits générés par catalyse acide ou oxydation, il est donc logique d’obtenir des teneurs plus faibles de ces composés dans le pur jus, qui a été pasteurisé une seule fois et n’a pas connu de transport et stockage avant son utilisation. Les aldéhydes octanal, nonanal et décanal sont absents du pur jus alors qu’ils sont présents dans le concentré et dans la phase huileuse. Ils sont présents dans les huiles essentielles (Mitiku et al., 2000). Seul l’hexanal est présent dans le pur jus mais il reste moins concentré que dans le jus à base de concentré dont l’apport provient de la fraction aqueuse.

Le 4-vinylgaïacol, produit de dégradation, est détecté dans le pur jus pasteurisé natif alors qu’il n’était pas présent dans le jus à base de concentré à t0. Ces 2 jus n’ont pas le même pH :

3,9 pour le jus à base de concentré et 3,2 pour le pur jus. De plus, le traitement thermique appliqué est différent. Le jus à base de concentré a été deux fois flash-pasteurisé pendant 20s à 92°C alors que le pur jus a subi une augmentation progressive de sa température pendant 5 min jusqu’à 92°C. Marcotte et al. (1998) ont étudié l’effet de la température du traitement thermique et du pH sur la formation de 4-vinylgaïacol dans le jus d’orange. Les purs jus ont été chauffés par immersion dans des bains d’eau à des températures de 75, 85 et 95°C pendant 15, 30 et 60 min. Ces auteurs ont montré que les augmentations de la durée et de la température du chauffage provoquaient une augmentation de la concentration de 4- vinylgaïacol. Les différences de pH et de traitement thermique entre le jus à base de concentré (flash-pasteurisation) et le pur jus (pasteurisation plus longue) pourraient ainsi expliquer la présence de 4-vinylgaïacol dans le pur jus pasteurisé à t0.