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Augmentation de l’absorption intestinale du glucose

1.3 La résistance à l’insuline intestinale

1.3.7 Augmentation de l’absorption intestinale du glucose

Une augmentation de l’absorption intestinale du glucose alimentaire favorise l’hyperglycémie chez les sujets diabétiques (Madsen et al., 1996). Ce changement serait lié à une modification des expressions géniques et protéiques des transporteurs du glucose. Après hydrolyse des glucides alimentaires en monosaccharides, ces derniers sont absorbés par l’épithélium intestinal au moyen de transporteurs énergie-dépendants (SGLT1) ou

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indépendants (GLUT2). Le SGLT1 assure une partie du transport du glucose depuis la membrane apicale. Le transporteur facilitateur GLUT2 se situe dans la membrane apicale et basolatérale assurant le passage transcellulaire du glucose.

Burant et al. ont remarqué une augmentation de l’expression génique et protéique des transporteurs SGLT-1 et GLUT2 dans les entérocytes de rats diabétiques de type I. Le traitement de ces rats par l’insuline permettait de réduire l’expression protéique de ces deux transporteurs (Burant et al., 1994). Dyer et al. ont analysé l’expression des transporteurs du glucose chez des sujets sains et diabétiques à partir de biopsies duodénales. Ils ont observé une élévation de l’ARNm et du contenu protéique de SGLT1, de GLUT2 et de GLUT5 au niveau des membranes apicales des entérocytes des sujets diabétiques (Dyer et al., 2002). Plus récemment, Ait-Omar et al. ont montré une accumulation de GLUT2 au niveau des membranes apicales des entérocytes issus de chirurgie bariatrique chez des sujets obèses et insulino-résistants (Ait-Omar et al., 2011). Cette accumulation au niveau des membranes apicales serait liée à un défaut d’internalisation du GLUT2 par l’insuline (Tobin et al., 2008). Il s’agirait d’une réponse adaptative de l’organisme face à une diète riche en nutriments. Ces changements pourraient induire une exacerbation de l’hyperglycémie chez le sujet diabétique non traité (Figure 16). Une corrélation positive pourrait être alors établie entre le nombre de transporteurs GLUT2 à la membrane apicale et le niveau d’hyperglycémie (Ait-Omar et al., 2011).

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Ait-Omar et al.2011

Figure 16: Rôles du GLUT2 apical chez les sujets sains ou obèses dans l’absorption intestinale du glucose en fonction de sa localisation et dépendamment de la différence de concentrations de glucose entre la lumière et le sang. Chez les sujets sains et à jeun, les flux de glucose à travers les entérocytes s’effectuent via SGLT1 dans la membrane apicale et sortent via le GLUT2 basolatéral. Immédiatement après un repas riche en sucre, le GLUT2 s’insère rapidement et transitoirement dans les membranes apicales pour accroître l’absorption du glucose, permettant ainsi de compléter l’action de SGLT1. Les sujets obèses sont caractérisés par une présence permanente du GLUT2 dans la membrane apicale des entérocytes. L’hyperglycémie à jeun entraîne alors un flux de glucose depuis le sang vers la lumière intestinale via les entérocytes. Au contraire, après un repas riche en sucre, le GLUT2 présent en permanence dans la membrane apicale des entérocytes favorise l’entrée massive du glucose qui est ensuite libéré du côté basolatéral dans la circulation sanguine.

D’après l’étude de Tobin et al. 2008, il est important de noter que l’insulino-résistance intestinale chez les souris peut être induite par un régime riche en fructose pendant 30 jours ou bien par un régime riche en acides gras saturés pendant 12 semaines. Il en résulte une localisation permanente du récepteur GLUT2 au niveau de la membrane apicale. Néanmoins, la présence de GLUT2 en apical n’est pas reliée à son abondance globale dans l’entérocyte diabétique. En effet, les souris diabétiques sous diète riche en fructose expriment environ 3

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fois plus de GLUT2 que les souris diabétiques sous diète riche en acides gras saturés (Figure 17). Cependant, la perfusion d’insuline, dans les deux catégories de souris diabétiques, n’est pas capable d’internaliser le GLUT2. En ce sens, un régime riche en sucre ou en gras ne semble pas induire tout à fait les mêmes adaptations métaboliques. Néanmoins, dans les deux situations, la présence du GLUT2 apical favorise l’absorption intestinale du glucose et pourrait exacerber l’hyperglycémie.

Kellett et al.2008

Figure 17 : Le développement de l’insulino-résistance en réponse à une diète riche en sucre ou en lipides est associé à une localisation apicale permanente du transporteur du glucose GLUT2. Jaune : GLUT2 internalisé, Rouge : GLUT2 dans la membrane apicale, Vert : GLUT2 dans la membrane basolatérale. Les souris normales expriment transitoirement le GLUT2 apical après une diète riche en sucre. Une insulino-résistance peut être induite par une diète riche en fructose pendant 30 jours ou riche en acides gras saturés pendant 12 semaines. Il en résulte une insertion permanente du GLUT2 dans la membrane apicale des entérocytes et une redistribution cellulaire. L’adaptation métabolique en réponse à une modification de la diète est différente selon le type de diète (riche en lipides ou en sucre). Les souris nourries avec une diète riche en fructose expriment 3 fois plus de GLUT2 que celles nourries avec une diète riche en acides gras saturés. Quelque soit le type de diète, la présence permanente de GLUT2 apical favorise l’absorption intestinale du glucose et pourrait exacerber l’hyperglycémie en situation de diabète de type II.

Dans le jéjunum de rats normaux, Helliwell et al. ont montré que l’inhibition de la PI3- kinase par la wortmannine résulte en une localisation permanente des transporteurs GLUT2 et GLUT5 au niveau de la membrane apicale (Helliwell et al., 2000). Ainsi l’internalisation des transporteurs du sucre par l’insuline semble PI3-Kinase dépendante. Etant donné l’implication

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des MAPK dans le développement de la résistance à l’insuline, une altération des voies de signalisation ERK, p38 et JNK pourrait être reliée à une modification des niveaux de transporteurs du glucose et par conséquent de l’absorption intestinale du glucose. En effet, l’inhibition et l’activation simultanée des voies de signalisation ERK et p38 respectivement, induisent une augmentation de l’absorption du fructose associée à un phénotype diabétique. El-Zein et al. ont confirmé que l’absorption intestinale du glucose était PI3-Kinase dépendante dans les cellules Caco-2 (El-Zein et Kreydiyyeh, 2011). En revanche, les résultats concernant le contrôle de l’absorption du glucose par la voie des MAPK sont divergents. Pour Helliwell et al., la p38MAPK semble augmenter l’absorption intestinale du glucose, alors que pour El-Zein et al. elle la diminuerait. Ainsi, une meilleure compréhension des voies de régulation affectant le nombre et l’activité des transporteurs de la membrane apicale des entérocytes permettrait de mieux appréhender les perturbations d’absorption du glucose reliées au DT2.

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Tableau I : Tableau de synthèse des anomalies métaboliques reliées à la résistance à l’insuline intestinale

En résumé, de plus en plus d’évidences scientifiques ont identifié des marqueurs qui laissent croire que l’intestin développerait une résistance à l’insuline, tout comme le tissu adipeux, le muscle et le foie (Tableau I). Toutefois, il existe encore plusieurs controverses et les mécanismes impliqués dans cette résistance à l’insuline intestinale doivent être davantage approfondis et confirmés. En outre, contrairement au foie où la signalisation de l’insuline est bien décrite, beaucoup de travaux restent à accomplir en ce qui concerne l’intestin.

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1.4 L’AMPK : ACTIONS ET FONCTIONS DANS PLUSIEURS ORGANES