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CADRE THEORIQUE

DES ATTITUDES LINGUISTIQUES A PARTIR DE L’OUTIL CREE

Nous arrivons finalement à la collecte des données du troisième groupe. Il mé-rite une mention spéciale car il est constitué des informations nous permettant de répondre de manière très directe à notre objectif général : « Déterminer les Attitudes

Linguistiques envers le français des étudiants des Écoles de Langues et Éducation (mention langues) de l’Université des Andes de Mérida, au Venezuela (avant et après une intervention

pé-dagogique) »82.

Ces données correspondent à la mesure des AL et ont été recueillies au moyen du questionnaire que nous avons conçu. Cette collecte s’est faite en trois étapes : une première application de l’outil à T0, une réévaluation des Attitudes Linguis-tiques à T1 et une nouvelle évaluation à T2, avec deux interventions pédagogique entre T0 et T2.

Nous rappelons les objectifs spécifiques de la recherche en lien avec cette étape.

• Déterminer quelles sont les AL des étudiants envers le FLE ;

• Analyser les résultats dans une triple perspective, c’est-à-dire, les trois dimen-sions des Attitudes Linguistiques : affective, cognitive et comportementale ; • Déterminer s’il y a une relation entre les Attitudes Linguistiques des étudiants

et les variables sociolinguistiques considérées dans cette recherche (genre, âge, classe sociale, etc.) ;

• Mettre en place une intervention pédagogique auprès de divers groupes d’étudiants pour essayer de provoquer la modification de leurs AL ;

• Déterminer les relations entre les variables des résultats obtenus avant et après chacune des interventions pédagogiques (causes, dépendances et cor-respondances multiples) ;

• Déterminer, par l’analyse des questions ouvertes du questionnaire, quelles sont les raisons qui justifient les Attitudes Linguistiques des étudiants dans chacune de leurs dimensions.

Tout en respectant notre plan de travail, nous exposerons tout d’abord, dans cette section, les particularités liées à la première application du questionnaire

82 Nous tenons à rappeler que les données du premier groupe correspondent au diagnostic de la situation (cf.

(normes, organisation générale et aspects logistiques). Ensuite, nous développerons les aspects concernant nos interventions pédagogiques. Finalement, nous explique-rons la mise en place d’une réévaluation des AL auprès de la même population.

3.3.1.Définition de la population estudiantine pour

la mesure

Pouvant se faire d’une manière très contrôlée ou plus ouverte, la délimitation de la population accordera aux conclusions de la recherche un caractère complète-ment différent, selon le choix méthodologique.

Dans le premier cas, le chercheur aura recours à la création d’un corpus par échantillonnage où les individus qui le composent sont choisis dans le but de recréer artificiellement la population entière. Dans ce cas-là, les conclusions sont générali-sables à toute cette population, représentée de la manière la plus adéquate possible par l’échantillon. L’échantillon sera, pour ce faire, composé d’un nombre contrôlé de participants avec les mêmes caractéristiques (par exemple : même quantité d’hommes que de femmes, autant d’étudiants ayant le français comme langue A que ceux qui l’ont comme langue B, même quantité de personnes par tranches d’âge, etc.).

Dans d’autres cas, comme le nôtre, le chercheur peut travailler avec une popu-lation telle qu’il la trouve, sans créer ce genre d’échantillon. Les résultats ne seront pas forcément représentatifs du reste de la population et donc, il ne seront pas géné-ralisables, mais valables pour le groupe observé (Gauthier et Bourgeois, 2016).

Nous avons décidé de travailler sous la deuxième perspective en raison d’un ensemble de facteurs déterminant notre recherche, notamment le besoin de recueil-lir autant de données que possible dans une situation économique, politique et so-ciale instable (certitude de pouvoir mettre en place notre protocole de manière adé-quate dans les délais nécessaires).

Des facteurs géographiques et financiers sont aussi intervenus. Géographique-ment, nous avons dû faire face à tous les soucis liés au fait de nous trouver à presque huit mille kilomètres de distance de notre terrain de travail. Financièrement, cette distance a impliqué des dépenses très importantes pour faire des déplacements et travailler sur place. Nous expliquons comment les problèmes liés à cette réalité ont été surmontés dans la section « préparation ».

Notre recherche ayant démarré en septembre 2012, nous nous sommes con-centrée sur le travail pour la conception du questionnaire immédiatement. Il s’agissait d’une étape indispensable à franchir avant de pouvoir collecter des don-nées de bonne qualité. Nous avons programmé un travail de six mois afin d’appliquer le questionnaire à plusieurs groupes à partir du semestre B-2013. Ce-pendant, nous n’avons pas pu répondre favorablement à cet objectif car les évène-ments liés à la situation politique du pays à l’époque83 ont eu un impact négatif sur notre prévision.

En effet, en 2013, en raison des grèves et manifestations constantes, il n’y a eu qu’une période académique, dénommée semestre unique-2013. Ceci a étalé le travail sur

le questionnaire, avec les enseignants du Département de FLE, pendant plusieurs mois, en fonction de leurs disponibilités, et a rendu impossible son application du-rant l’année.

Le questionnaire a été prêt vers la fin de l’année 2013. Nous avons reporté la collecte des données à l’année 2014, en espérant avoir suffisamment de temps pour leur recueil et analyse. Les difficultés du pays ont continué et se sont aggravées, no-tamment pendant le premier trimestre de l’année 2014. Cette situation très instable

83 L’absence du pays de l’ancien Président de la République, M. Hugo Chavez, à partir du 8 décembre 2012 à cause de sa maladie et son postérieur décès, le 5 mars 2013 ont entrainé la réorganisation des pouvoirs politiques et l’organisation de nouvelles élections. Ce qui a provoqué d’innombrables manifestations et grèves dans tout le pays car une partie de la population dénonçait de fraudes dans ces processus.

nous a montré rapidement les limites de notre étude. Pour ces raisons, une fois que le questionnaire a été prêt, nous l’avons appliqué -à distance- à l’ensemble de la po-pulation disponible à ce moment-là.

Compte tenu de ces faits, notre seul critère d’inclusion étant l’inscription dans nos cours lors de la période choisie, notre population est ainsi composée de la totali-té des étudiants suivant des cours de français. C’est-à-dire, tous les étudiants de français I, II, III et IV du semestre A-2014 et les étudiants de français II du se-mestre B-2014.

Nous avons donc choisi de travailler avec une population très hétérogène, qui peut, à notre avis, présenter une structure comparable à celle de notre population totale de référence : les étudiants de FLE de la Universidad de los Andes, qui est composée de tous les étudiants qui passent par nos salles de cours au fils du temps. Cependant, nous restons consciente du fait que statistiquement, ce n’est pas possible de faire cette comparaison de manière totalement objective. Nous signalons donc, de ce fait, que notre étude, vise la description, l’exploration, l’évaluation et l’explication d’un phénomène, mais touche à ses limites quant à la possible prédic-tion que certaines recherches peuvent produire de par leur nature (Gauthier et Bourgeois, 2016 ).

Nous décrirons, explorons, évaluerons et essayerons d’expliquer ce que nous recueillerons au sein de la population visée. Ceci se traduit essentiellement sur le fait que nos résultats concernent spécifiquement cette population et que nos conclu-sions ne sont donc pas forcément extrapolables à d’autres contextes.

En effet, pour pouvoir extrapoler les conclusions de ce type de recherche « l’ethnographie de la communication préfère la sélection délibérée et intentionnelle [de la population], plutôt que l’élection au hasard. Cette dernière présuppose que tous les membres d’une population déterminée ont les mêmes caractéristiques –

comme on le pense souvent en linguistique variationniste84 » (Rodríguez, Gil et García, 1996, p. 135, cités par Álvarez, 2007, p. 59).

Même si notre choix est relativement délibéré, car nous avons décidé quels étudiants de quelle année et appartenant à tel établissement universitaire aborder, nous ne pouvons pas nier son caractère hasardeux, imposé par les circonstances dans lesquelles la recherche a été menée.

Notre population initiale totale était composée de 120 étudiants dont 103 ont participé à la première intervention pendant le semestre A-2014 et 17 à la deuxième intervention lors du semestre B-2014. Les caractéristiques de cette population à T0 seront précisées par la suite, en fonction du type de variable analysée.

Lors des applications du questionnaire à T1 et T2, les caractéristiques de notre population ont varié à plusieurs niveaux. Le changement le plus important est le nombre d’étudiants qui a diminué en raison, notamment, des absences et desiste-ments. D’autres changements importants concernent les variables basées sur les données extraacadémiques et contextuelles affectant les étudiants. Nous l’avons vu ci-dessus (cf. Les variables, page 165) les variables individuelles de notre étude sont

conformées par des données personnelles (genre, âge et classe sociale), des données académiques (cursus universitaire, semestre et niveau de spécialisation en français) et des données extra-académiques (français comme activité extracurriculaire, Immer-sion/séjour linguistique). Les variables contextuelles cherchent à mesurer l’influence des parents, des enseignants, des camarades, de l’université et des médias sur les AL des étudiants. Nous décrirons ici-bas tout changement des données individuelles

84 Notre traduction du texte original : “la etnografía prefiere antes que la elección al azar que presupone que todos los miembros de una población dada tienen las mismas características –así piensa la lingüística variacionista- la selección deliberada e intencional”

personnelles et académiques. Les données extraacadémiques et contextuelles seront entièrement décrites dans la Partie 4 (Analyse et discussion des résultats).

Dans un premier temps, nous avons travaillé avec 103 étudiants de la Faculté de Sciences Humaines et de l’Éducation, inscrits au semestre A-2014, distribués se-lon leur niveau de formation de la manière suivante : 35% des étudiants étaient ins-crits en Français I (36 étudiants), 29,1% en Français II (30 étudiants), 18,4% en Fran-çais III (19 étudiants) et 17,5% en FranFran-çais IV (18 étudiants). ).

Pour chaque niveau de langue du semestre A-2014, le total d’étudiants se di-vise en deux sections différentes. Cette caractéristique pratique de la distribution de la population en deux sections (presque) chaque fois, nous a été très utile pour l’intervention pédagogique. Dans ce sens, il faut évoquer les propos de Gauthier et Bourgeois, 2016 , qui attirent notre attention sur la possibilité que deux groupes ne soient pas vraiment comparables lors d’une recherche. Selon les auteurs, il est très important de s’assurer d’accroître cette éventualité. Il faut faire en sorte, que, sur la base du pairage, le groupe témoin soit aussi proche que possible du groupe expéri-mental (Gauthier et Bourgeois, 2016, p. 182). Chaque section de notre population partageant le même niveau de langue, le programme et le même enseignant, nous considérons qu’elles sont comparables. En effet, lors de la période A-2014, nous avons profité de cette dualité pour établir de manière aisée une expérimentation au-près d’une section tout en considérant l’autre en tant que groupe contrôle.

Premièrement, nous avons sur le total des étudiants enquêtés, plus de la moitié (66%) sont des femmes. Quant à la variable « âge », le groupe s’est montré assez hétérogène. Nous avons un ample éventail de catégories variant entre 18 et 46 ans, avec une concentration majeur de population sur la tranche d’âge 19-25 ans.

Par rapport à la classe sociale, 7,1% des étudiants représentaient la classe « me-dia-alta » (qui est une tranche intermédiaire entre les classes moyenne et aisée), presque 70% appartenaient à la classe sociale moyenne, 22,4% à la clase «

media-baja » (tranche intermédiaire entre moyenne et modeste) et seulement un étudiant s’est catalogué lui-même comme appartenant à la classe défavorisée.

Nous constatons, également, que plus des trois quarts de ces étudiants étaient inscrits à l’École de Langues Modernes, alors que 17,5% suivaient la licence de l’École d’Éducation, mention langues. Les étudiants objet de notre étude étaient distribués dans des semestres divers de ces deux licences, la plus grande partie d’entre eux se situant au 5ème et 6ème semestres (25,5% et 28,7% respectivement).

82,5% de la population a fait des études en français comme langue B, 12,6% l’a fait comme langue A et moins de 5% comme langue C. Cette dernière catégorie n’étant pas représentée par une quantité d’étudiants vraiment significative et nous rendant compte que, en tous cas, cette catégorisation n’était pas vraiment distinctive et déterminante pour notre étude, nous avons recatégorisé plus tard les modalités de cette variable en deux au lieu de trois options :

1. Langue de spécialisation Français 2. Langue de spécialisation Anglais.

En effet, les étudiants qui apprennent le français comme langue C sont obligés de choisir l’anglais comme langue A, l’italien ne pouvant être étudié qu’en tant que langue B ou C et l’allemand en tant que langue C seulement.

Tous ces résultats sont repris dans la grille ci-dessous (Tableau 14) et le détail est consultable dans l’annexe n° 11.

Tableau 14 - Variables sociolinguistiques et académiques du premier groupe de la population à T0. Écoles de Langues Modernes et Éducation mention Langues. Université des

Andes, Mérida Venezuela, 2014.

Variable Catégories % n Niveau Français I Français II Français III Français IV 36 30 19 18 35.0 29.1 18.4 17.5 103 Genre Masculin Féminin 35 68 34.0 66.0 103 Âge 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 34 36 38 46 3 8 16 19 12 5 10 7 6 4 3 1 1 1 2 1 1 1 2.9 7.8 15.5 18.4 11.7 4.9 9.7 6.8 5.8 3.9 2.9 1.0 1.0 1.0 1.9 1.0 1.0 1.0 101

Classe Sociale Media – alta

Media Media – baja Baja 7 68 22 1 7.1 69.4 22.4 1.0 98

Cursus Langues modernes

Éducation, mention Langues modernes 85 18 82.5 17.5 103

Semestre Deuxième Troisième Quatrième Cinquième Sixième Septième Huitième Neuvième 5 6 8 24 27 11 11 2 5.3 6.4 8.5 25.5 28.7 11.7 11.7 2.1 94 Français langue A B C 13 85 5 12.6 82.5 4.9 103 Pour la deuxième application du questionnaire (T1) la population s’est réduite d’un 22,33%. Elle s’est redistribuée de la manière suivante : 25 étudiants de Français I

au lieu de 36 ; 23 étudiants de Français II au lieu de 30 ; 16 étudiants de Français III au