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PARTIE 1 – LE CONSENTEMENT ET LE REFUS DE SOINS : ETAT DES LIEUX

A. Le consentement

1. Aspects du consentement

a. Définitions

Le consentement est défini comme « l’action de donner son accord à une action » (36). La définition du verbe consentir ; « accepter qu’une chose se fasse », se rapproche du proverbe « qui ne dit mot consent ». Cependant cette définition parait peu satisfaisante pour les soins médicaux, qui nécessitent un accord conscient et volontaire, émis après réflexion. Une définition médicale du consentement pourrait être : « la capacité à prendre une décision de manière libre et éclairée ».

Le principe de consentement a une place importante dans la relation soignant-soigné, et depuis la loi du 4 mars 2002 le consentement aux soins est la condition indispensable à toute prise en charge médicale.

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b. Un consentement libre et éclairé

Le consentement du patient avant tout acte médical doit être « libre et éclairé ». Nous verrons dans cette partie ce qu’impliquent ces deux notions.

Selon Léger, la notion de consentement libre mêle trois types de capacités : le libre arbitre, la capacité juridique et la capacité physique (37). Le libre arbitre implique que le sujet soit capable de décider ce qu’il souhaite sans être induit éventuellement par une pression extérieure. La capacité juridique est la capacité d’une personne physique à exercer ses droits et ses obligations. Et enfin la capacité physique implique le fait pour le sujet d’être physiquement capable de consentir aux soins, celle-ci peut être atteinte dans certaines circonstances, par exemple si le sujet est inconscient ou s’il présente des troubles de vigilance.

La notion de consentement éclairé fait référence à l’information délivrée au patient. En effet, comme détaillé précédemment, le recueil du consentement nécessite au préalable la délivrance d’une information « claire, loyale et appropriée » qui doit être comprise par le patient afin que celui-ci puisse donner un consentement valide. Il a été démontré que l’usage de feedbacks répétés permettait d’améliorer la compréhension des informations nécessaires au consentement éclairé pour participer à une recherche clinique (38). Cependant, comme le précisent certains auteurs, il est difficile de déterminer précisément ce que le patient retient de l’information délivrée et ce qui l’aide à formuler sa décision. De plus, il faut aussi tenir compte de la dimension psychologique et affective dans laquelle se fonde l’alliance thérapeutique (7).

c. Un consentement légal et légitime

Lachaux et Cassan différencient deux niveaux au consentement : celui de sa légalité, garantie par les juristes, et celui de sa légitimité, dont les médecins sont responsables

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(39). Ainsi la recherche du consentement du patient est une obligation légale mais a aussi une dimension éthique pour le médecin. Les auteurs mettent en évidence « le caractère pluriel évolutif et nuancé » du consentement en pratique clinique. Le praticien ne peut donc pas réduire le consentement au concept juridique qui apparait relativement binaire (le patient consent ou non). La légitimité du consentement suppose que le patient soit capable de recevoir une information, de la comprendre et ensuite de prendre une décision. Le principe de consentement inclut ainsi les notions d’autonomie, de discernement et d’insight.

o L’autonomie :

Dans le domaine médical, le terme « autonomie » désigne deux notions distinctes. La première a trait aux droits des patients et à la liberté de choix dont le patient jouit, tandis que la seconde notion est la capacité pour un individu d’assurer les actes de la vie quotidienne. Quand cette capacité diminue, notamment du fait de l’âge ou de la maladie, on parle de « perte d’autonomie », qui renvoie à la notion de dépendance (40). Nous nous intéresserons ici à la première notion.

Le principe d’autonomie est un des quatre principes fondamentaux de l’éthique biomédicale définis par Beauchamps et Childress, que nous détaillerons ultérieurement (41). On retrouve aussi cette notion dans le serment d’Hippocrate, qui précise : « Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans aucune discrimination selon leur état ou leurs convictions » (42). L’autonomie peut ainsi être définie comme « le fait de se donner à soi-même sa propre loi » : c’est la faculté d’agir librement (43). Il s’agit du socle de la capacité à consentir et donc à décider.

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L’autonomie suppose un ensemble de capacités intellectuelles et cognitives telles que la compréhension, la réflexion, le jugement, la délibération et la prise de décision. Ces différentes capacités peuvent être hiérarchisées. L’autonomie présente ainsi une multiplicité de dimensions et de degrés. La dépendance physique n’empêche donc en rien l’autonomie, comprise principalement d’un point de vue psychique. L’autonomie n’est pas le contraire de la dépendance, ni le synonyme de la liberté. Elle suppose aussi la liberté de l’individu à l’égard de contraintes externes et internes (44).

o Le discernement :

Le discernement est la capacité à distinguer une chose d’une autre, à faire la différence entre deux choix (45). Il s’agit pour le sujet d’être capable de comprendre une situation donnée et les choix qui s’offrent à lui dans cette situation, d’évaluer les conséquences de chacun de ces choix et de finalement décider pour lequel d’entre eux opter (46). Cette notion implique du bon sens et de l’intelligence, afin d’apprécier les choses et d’en démêler les rapports. La capacité de discernement est un pilier essentiel du consentement libre et éclairé.

La question du discernement est principalement abordée en psychiatrie médico- légale. En effet, plusieurs pathologies psychiatriques peuvent dans certaines circonstances conduire à une altération voire à une abolition du discernement et à des actes illégaux. Les psychiatres sont alors requis par la justice pour préciser par des expertises si le sujet ayant commis l’acte illégal présentait, au moment du passage à l’acte, une altération ou une abolition du discernement.

o L’insight et la conscience du trouble :

L’insight est un terme anglais qui est traduit en français par « la conscience du trouble ». Dans le champ de la psychiatrie, le défaut d’insight, qui reflète un manque

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de reconnaissance de la maladie et de la nécessité d’un traitement, freine voire empêche les soins proposés. Il s’agit d’un symptôme fréquent dans la schizophrénie, mais on le retrouve aussi dans d’autres troubles psychiatriques sévères (47). Souvent comparée au déni et à l’anosognosie des affections neurologiques, l’absence d’insight est toutefois différente : il ne s’agit pas d’une défense psychologiquement protectrice mais d’un déficit lié à un dysfonctionnement cérébral et corrélé aux troubles des fonctions exécutives et aux atteintes frontales (48). La notion de conscience de la maladie a aussi son importance en soins somatiques, notamment dans les pathologies chroniques. Il semble primordial que le patient ait conscience de ses troubles, afin de pouvoir accepter les soins et d’en comprendre la nécessité.

Ainsi le principe de consentement dépend de ces différentes notions. Afin de garantir sa légitimité, il incombe au médecin d’évaluer si le patient est en capacité de consentir aux soins.