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L’AFIBRINOGÉNÉMIE CONGÉNITALE

III- Aspects cliniques

L’afibrinogénémie congénitale est une maladie dont les symptômes s’apparentent à ceux de l’hémophilie A, puisque dans ces deux pathologies, une protéine essentielle à la coagulation sanguine est déficiente : le facteur VIII pour l’hémophilie A, le fibrinogène pour l’afibrinogénémie.

Le diagnostic d’afibrinogénémie est en général évoqué dès la période néonatale par une hémorragie ombilicale.

Cette hémorragie ombilicale est suivie par l’apparition d’hématomes sous-cutanés plus au moins importants liés à des traumatismes de naissance, plus rarement d’une hémorragie touchant le tractus gastro-intestinal et autres muqueuses.

Plus tard dans la vie, Il y a tendance aux saignements et à la formation d'hématomes à intervalles de temps variables. La maladie évolue sur un mode latent. Les poussées sont plus rares que chez un hémophile. Elles sont retrouvées chez 20 % des patients.

Dans cette clinique on distingue :

1- Hémorragie cutané

Des ecchymoses et des hématomes sont constamment décrits.

El Boussaadni [54] a rapporté un cas à Oujda d’afibrinogénémie congénitale suite à un hématome post vaccinal chez un nourrisson de 10 mois; bien que les ATCD aient été marqués par une hémorragie de moyenne abondance à la chute du cordon ombilical, qui n’avait pas été arrêté par les hémostatiques locaux et avait nécessité une électrocoagulation et une transfusion de culot globulaire. Et l’apparition à 10 jours de vie, d’un hématome au point d’injection d’un vaccin BCG pris pour une complication habituelle de ce vaccin, puis l’apparition d’autres hémorragies aux points d’injection des vaccins ultérieurs.

Devant ces éléments anamnestiques, la consanguinité de 1er degré des parents, le diagnostic d’une dyscrasie a été retenu chez ce nourrisson à l’âge de 10 mois.

Le bilan biologique ayant révélé un taux de plaquettes normal, un temps de saignement (TS) allonge´ (>70 s), un temps de céphaline-kaolin (TCK) non déterminable avec un sang

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incoagulable, un taux de prothrombine (TP) < 10 %.

Les facteurs II, VII, VIII, IX, X de la coagulation étaient normaux mais le fibrinogène était indétectable de même que les produits de dégradation de fibrine (PDF). L’évolution a été marquée par la survenu de plusieurs incidents hémorragiques : épistaxis, ecchymoses, pour lesquels l’enfant a reçu du plasma frais congelé (PFC) avec bonne évolution.

Les saignements qui affectent le cerveau, le thorax ou l’abdomen peuvent menacer le pronostic vital et requièrent une attention médicale immédiate. Ces hémorragies peuvent survenir suite à un accident ou spontanément. [59]

2- Hémorragie cérébrale

Elle constitue la principale cause de décès chez ces patient et se manifeste cliniquement par :

 Céphalées

 Troubles de la vision

 Nausées et vomissements

 Signes de focalisation

 Plus tardivement troubles de la personnalité, obnubilation, convulsions et Coma. -Le mécanisme de survenue des hématomes intracérébraux reste encore obscur. Ces saignements spontanés intracérébraux, traités précocement, sont curables. Mais le plus souvent, le décalage entre la clinique et l’imagerie médicale occasionne un retard dans la mise en route du traitement. Aussi, devant une forte présomption clinique de saignement malgré des images normales au scanner, le traitement substitutif doit être immédiatement mis en route et poursuivi [60, 61].

3- Hémorragie intraoculaire

Elle peut exister, et peut être associée à une hémorragie intracérébrale d’où l’intérêt d’un IRM cérébral. Elle se manifeste par une « pluie de suie », perception d'une multitude de petits points noirs qui tombent, suivie d'une baisse de l'acuité visuelle.

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Un cas a été rapporté en 2008 au service d’ophtalmologie en Turquie, il s’agit d’un nourrisson de 3 mois admis pour l'évaluation de leucocorie bilatérale qui a été noté un mois plus tôt, la TDM et l'IRM ont montré une hémorragie intra vitréenne et un hématome sous-dural, l'examen du fond d'œil dilaté a révélé des hémorragies vitreuses bilatérales denses. Les bilans biologiques ont détecté un fibrinogène inexistant dans le plasma. [62]

4- Hémorragie des muqueuses

Méléna, hématémèse, épistaxis et gingivorragies sont également fréquents

5-

Hémorragie intra-thoracique

Les signes cliniques au niveau thoracique sont :

 Douleurs localisées au niveau du thorax

 Dyspnée

 Toux accompagnés de crachats sanglants

 Hémoptysie

6-

Hémorragie intra-abdominale

Méléna, hématémèse, sont également fréquents.

Elle se manifeste par :  Méléna, hématémèse

 Douleurs abdominal progressive, localisée puis généralisée

Signe d’hémorragie interne

Le sang peut ne pas s’extérioriser, il s’agit alors d’une hémorragie interne ou hémopéritoine, soit parce qu’il se produit dans une cavité close, soit parce qu’il s’extériorise avec retard par un orifice naturel.

Les signes d’alarme qu’il faut rechercher sont :  La pâleur, sueurs froides, anxiété et agitation

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L’hypotension, la froideur des extrémités

7- Hémorragie intra-articulaires ou hémarthroses

Observées chez environ 20% des sujet atteints (En raison de cet aspect particulier, la maladie peut être confondue avec l’hémophilie A ou B); et peuvent se manifester par :

o Douleur au cours de la mobilisation de l’articulation ou au repos, surtout. o Gonflement et chaleur au niveau de l’articulation, avec ou sans bleu. o Diminution de la mobilité de l’articulation.

o Agitation ou pleurs chez l’enfant lorsqu’il bouge son articulation. Ce comportement peut être causé par une douleur due à un saignement surtout chez les nourrissons

Les parents doivent apprendre à palper et à évaluer le mouvement des articulations; cela est particulièrement important pour les genoux, les chevilles et les coudes.

8- Les Atteintes squelettiques

Elles sont très rares, caractérisées par des hémorragies intra-osseuses et l'apparition consécutive de kystes osseux résultant éventuellement en des fractures spontanées de l'os.

9- Symptômes thromboemboliques

Paradoxalement aux symptômes hémorragiques liés à l’absence du fibrinogène dans le plasma, des problèmes thromboemboliques peuvent se produire, quelques cas ont été rapportés dans la littérature [65]

Les mécanismes responsables ne sont pas encore clairs, mais il existe plusieurs hypothèses expliquant la survenue de ces thromboses. La stase veineuse et la prise de contraceptif oraux sont des facteurs favorisants. [66,67]

L’hyperagrégation des plaquettes peut être l’une des raisons responsables de la thrombose : un taux très bas ou quasiment nul du fibrinogène induit l’élévation du taux de thrombine plasmatique qui stimule l’agrégation plaquettaire. [68, 69]

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L’hypercoagulabilité peut être induite par un excès de facteurs de coagulations (Facteur VIII et facteur de Willebrand) suite aux perfusions répétées ou à des contaminations des cryoprécipités avec facteurs

Un taux élevé de thrombine peut causer des lésions vasculaires par la libération des cytokines et induire la prolifération myo-intimale. [70]

Les symptômes de thrombose restent rares dans l’afibrinogénémie, et apparaissent le plus souvent après l’administration du traitement de substitution. Il a été montré que le fibrinogène peut causer des thromboses suite à une altération de ses propriétés physiques ou chimiques, et aussi par l’action des anticorps antifibrinogène. [71]

10- Symptômes en cours de grossesse

Par ailleurs, le rôle du fibrinogène dans le maintien de la grossesse normale, n'est pas entièrement éclairci. Plusieurs observations de patientes afibrinogénémiques ont fait état d'une tendance aux avortements spontanés avec hémorragies post-abortales. [63]

Récemment en 2012, a été rapporté à l’hôpital Imam Khomeyni à Téhéran, un cas de grossesse réussie chez une patiente avec des antécédents d’avortements à répétitions et afibrinogénémie congénitale sévère (taux de fibrinogène <5mg/L) par la même occasion, il a été montré que le placenta et le fœtus peuvent être maintenus par des taux de fibrinogène supérieurs à 60 mg/dL. Le travail, l’accouchement et le post partum se sont déroulés sans complications hémorragiques. [64]

Les règles chez les patientes pubères paraissent être normales ou légèrement abondantes.

L'aspect frappant dans cette diathèse hémorragique est la modération et la nature épisodique des symptômes cliniques observés, et ceci dès la première observation de Rabe et Salomon, bien qu'il y ait absence totale du fibrinogène, facteur fondamental de l'hémostase. Les causes de cette modération des symptômes associés à l'afibrinogénémie congénitale restent obscures.

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D'autre part, on constate que les accidents hémorragiques associés à l'afibrinogénémie congénitale sont plus fréquent et plus sévères pendant l'enfance, et que leur fréquence diminue avec l'âge.

Un déficit en fibrinogène touche autant les hommes que les femmes. Cependant, l’impact est plus important chez les femmes en raison des menstruations et de la conception.

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