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1.2 Particularités des lasers InGaN/GaN émettant dans le bleu

1.2.3 Aspect spectral, mode clustering

Les lasers étudiés sont fortement multimodes comme on le voit sur la figure 1.19 qui re- présente les spectres d’une diode pour différents courants de pompe, normalisés au seuil (Ith= 63mA)).

a) b)

Figure 1.19 – a) Spectre d’une DL LASPE décrite précédemment (longueur de cavité ' 792 µm) et b) vue agrandie des modes centraux, pour différentes valeurs du courant de pompe.

On constate que sous le seuil (0,63 Ith et 0,79 Ith) le maximum de la courbe se décale

vers les courtes longueurs d’onde à mesure que le courant de pompe augmente. Ce déca- lage résulte du phénomène d’écrantage du champ électrique décrit à la sous-section 1.1.5. Passé le seuil laser (1,27 Ith), le comportement reste multimode mais les modes situés

proche du maximum de gain sont amplifiés principalement. L’augmentation de tempéra- ture induit un décalage vers le rouge du maximum de la courbe. L’ISL du laser est évalué expérimentalement à 32 pm. La modulation d’amplitude du spectre optique visible sur la figure 1.19 constitue une caractéristique typique des lasers InGaN. Cette modulation est dans ce cas particulier apériodique et n’apparaît pas sous le seuil.

Sur d’autres lasers étudiés, comme celui dont le spectre est représenté sur la figure 1.20, on constate une modulation cette fois-ci périodique (de période 570 pm) et visible sous le seuil.

a) b)

Figure 1.20 – a) Spectre d’un laser LASPE dont l’ISL est de 37 pm, présentant une modulation de type mode clustering de période 570 pm. b) Puissance optique (courbe noire) et tension (courbe bleue) en fonction du courant de pompe. Le seuil laser correspond à un courant de pompe de 98 mA.

Les modes sont alors regroupés en clusters comportant moins d’une dizaine de modes. Ce phénomène, appelé mode clustering (MC) dans la littérature, bien que constaté depuis longtemps sur les lasers InGaN, reste mal compris et les explications confuses. Il semble que son origine soit multifactorielle. On peut toutefois tenter de classer les différentes causes possibles.

En 2005, Eischler explique le cas apériodique par la fluctuation de l’épaisseur ou de la composition des puits quantiques [57]. Dans le but de réduire le QCSE très prononcé dans les lasers InGaN et d’augmenter le confinement des porteurs, il convient de réduire autant que possible l’épaisseur des puits (voir 1.1.5). Les puits quantiques sont donc géné- ralement très fins (4 nm dans le cas du laser de la figure 1.192). La variation d’épaisseur

d’une ou deux monocouches, typiquement observée lors du processus d’épitaxie, serait

alors suffisante pour moduler le gain de façon importante le long du guide optique. Seuls quelques défauts de ce genre suffisent à moduler spatialement le gain. En outre, les auteurs n’excluent pas la possibilité d’une fluctuation de la composition des puits quantiques. Le gain inhomogène favorise certains modes au détriment d’autres. Dans cette explication, l’influence du substrat est exclue car la même modulation est observée pour deux échan- tillons crus sur des substrats différents.

En 2008, Meyer et al. étudient les spectres de deux types de lasers, l’un crû sur du GaN et possédant par conséquent peu de dislocations et l’autre crû sur du SiC [50]. Dans le second cas, la différence de paramètre de maille entre GaN et SiC entraine une grande densité de dislocations (> 108 cm2 [58]). Les courbes extraites des spectres d’électrolumi-

nescence (sous le seuil) par la méthode Hakki-Paoli (HP) (cette méthode sera introduite au paragraphe 1.3.1.1), sont présentées sur la figure 1.21.

Figure 1.21 – Spectres obtenus par la méthode HP de lasers sur substrat GaN et SiC respectivement. Ces courbes sont extraites de la référence [50].

Comme il sera discuté plus tard, ces courbes représentent le gain modal si l’on fait l’hy- pothèse que les pertes de la cavité sont indépendantes de la longueur d’onde. On peut seulement affirmer que dans ce cas, la nature du substrat (indépendamment de son épais- seur) semble jouer un rôle soit sur le gain soit sur les pertes. La courbe du laser sur SiC présente en effet des fluctuations importantes du gain en comparaison à la courbe du laser sur GaN. Meyer et al. ne donnent pas vraiment d’explication convaincante quant à l’origine de ces irrégularités.

Une autre explication du MC est l’existence de sous-cavités à l’intérieur de la cavité prin- cipale, qui par interférences constructives ou destructives, modulent le spectre. En 2014, Zeng et al. constatent, dans le cas de dispositifs non commerciaux, que le phénomène s’am- plifie et que la période des oscillations augmente lorsque les composants vieillissent [19].

Les dislocations présentes dans les lasers à base de GaN [59] pourraient être à l’origine de microfissures. Les contraintes intrinsèques dues à l’épitaxie et les contraintes mécaniques induites par la gravure et le clivage des facettes seraient alors relâchées par la propagation de ces fissures, en amplifiant le phénomène. L’augmentation de la période s’explique par la diminution des longueurs des sous-cavités à mesure que le nombre de fissures croît. L’existence de modes parasites dans les couches (substrat, couche tampon), dont les in- dices sont proches de celui du guide, est évoquée par Laino en 2007 [60]. Des observations en champ proche et en champ lointain ont été réalisées sur des lasers tant sur substrat SiC que GaN, montrant l’existence d’ondes stationnaires dans le substrat dues à des fuites d’une fraction des modes optiques. Du recouvrement spatial des modes optiques et des modes de substrat, il résulte un fort couplage qui crée des pertes sur les modes optiques. Les fuites dans le substrat peuvent être réduites par une augmentation de l’épaisseur de la gaine inférieure du guide. Les modes de substrats ne sont plus observés pour une épaisseur de 2 µm et le courant de seuil laser est fortement réduit.

Un phénomène d’oscillation du plasma électron-trou est aussi évoqué comme origine du phénomène du MC [39]. Ces oscillations modulent spatialement le gain dans la cavité et produisent un filtrage des modes longitudinaux.

La détermination de l’origine précise du MC est donc peu aisée. Il faut noter par exemple que la modulation observée peut être une superposition de composantes périodique et apériodique ou de deux modulations de périodes différentes. L’étude du phénomène de MC, bien que très présent dans le cas des lasers basés sur le GaN, ne constitue pas l’objet de cette thèse. Il était cependant important de le mentionner dans ce paragraphe car les phénomènes étudiés au paragraphe 1.3.3 en sont une conséquence directe.