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Beaucoup estimeront à tort, qu’il est sacrilège de vouloir associer l’informatique et la mécanique à l’art. Mais il ne faut pas percevoir le prototypage rapide comme une malédiction venue s’abattre sur l’artiste et gâcher son art, ce n’est qu’un outil de plus à la disposition de l’artiste. Le prototypage rapide n’est rien sans un créateur, comme peut l’être le burin du sculpteur ou le pinceau du peintre.

Au-delà de la profanation commise par l’introduction du pixel et de la commande numérique au sein de l’atelier du sculpteur, il est judicieux de s’interroger sur les réels intérêts d’un tel outil.

1.3.1. L'art numérique

La création et l’accès à de nouvelles formes sont sûrement les contributions les plus prestigieuses auxquelles puisse prétendre le prototypage rapide. Grâce cette technologie, il est possible de matérialiser des œuvres inconcevables avec d’autres outils, comme des formes décrites par des équations mathématiques particulières (voir, par exemple, [FERLEY, 1999]), ou de créer des formes dotées de propriétés difficilement réalisables, comme des symétries parfaites. C. Lavigne décrit dans [LAVIGNE, 1998] l’évolution de l’emploi de ces nouvelles technologies au bénéfice de l’art.

Figure 1.13. Double Squares par Bathsheba GROSSMAN, réalisé par le procédé ProMetal® [GROSSMAN, 2003]

B. Grossman est une artiste illustrant parfaitement l’utilisation du prototypage rapide en tant qu’outil et support de son expression artistique. Ces modèles sont initialement créés par ordinateur, puis réalisés par différents procédés de prototypage, tels que la stéréolithographie ou ProMetal®, pour être ensuite parachevés par l’artiste (voir Figure 1.13 et Figure 3.22).

1.3.2. La reproduction

Lorsque l’on combine les moyens de numérisation d’objet à ceux de réalisation de pièce par prototypage rapide, il devient possible de reproduire des œuvres d’art.

Cette opération de numérisation n’est pas une opération banale, il s’agit d’une opération qui, selon l’objet à numériser, peut s’avérer extrêmement compliquée, que ce soit lors de la prise de mesure de l’objet, ou lors de la construction du modèle numérique à partir des mesures (voir section 3.1.3 : « STL originaire d'une numérisation », p.91).

Au-delà de la connotation malhonnête de cette opération, la reproduction permet d’exposer une œuvre tout en préservant l’original ou d’en obtenir une copie à une échelle différente. Cette méthode présente l’intérêt de pouvoir se faire sans contact, contrairement à la méthode traditionnelle qui consiste en un contre-moulage au silicone. La reproduction du buste de Jules Ferry (voir Figure 1.14) [HUGUENIN, 1998] illustre parfaitement ce besoin de reproduire une œuvre sans contact.

Figure 1.14. Le buste de Jules Ferry (virtuel, à gauche ; reproduction avec finition, à droite) [HUGUENIN, 1998]

Stratoconception 1.3.3. La restauration

La restauration d’œuvres d’art par prototypage rapide consiste à numériser des objets ou fragments d’objets endommagés pour en obtenir une définition numérique, réparer ou reconstituer virtuellement l’objet à partir de cette définition numérique, et, finalement, de réaliser l’objet complet ou les fragments manquants par prototypage rapide.

L’intérêt de cette technique est de permettre l’accès à des outils informatiques en plus des outils traditionnels pour la restauration, mais aussi de réaliser une reproduction de l’objet complet sans avoir à rassembler les fragments.

Figure 1.15. Fragments virtuels de la statue de l’empereur Auguste (à gauche) et reproduction par prototypage rapide (à droite) [CTTM, 1997]

Le CTTM du Mans a démontré l’intérêt de l’utilisation du prototypage rapide lors de la reconstitution de la statue de l’empereur Auguste dans la ville d’Arles (voir Figure 1.15). Extrait de [CTTM, 1997] : (…)Une statue colossale de l'empereur romain Auguste présidait autrefois sur le mur du théâtre antique de la ville d'Arles. Les fouilles permirent d'exhumer: le torse et la tête en marbre, différents fragments de draperie en pierre calcaire. Aucune cassure commune ne pouvant étayer l'appartenance de la draperie à cette statue, seule une tentative de remontage aurait permis de vérifier (…) la concordance des fragments.

Préalablement à la restauration, il a été appliqué une simulation numérique pour solutionner le problème. Après numérisation des différents blocs et réalisation d'une maquette en prototypage rapide, le clone de l'empereur Auguste tenait ses promesses et confirmait l'hypothèse des historiens. Restait à déterminer, en l'absence des jambes et de la base, son attitude naturelle et à concevoir à l'aide des données numériques un socle esthétique.(…)

1.3.4. Les ébauches et les rapports d'échelle

Figure 1.16. Appareil mis au point par le sculpteur D. Pollès destiné à reproduire fidèlement des modèles à une échelle différente [BLIN, 2003]

Certaines opérations, et plus particulièrement les rapports d’échelle, sont triviales et d’une grande exactitude lorsqu’elles sont effectuées sur un modèle virtuel, alors qu’elles sont fastidieuses et parfois hasardeuses sur un modèle réel. Reproduire un modèle ou une ébauche à une échelle différente est une épreuve que rencontre fréquemment le sculpteur, la tâche est ardue, longue et ingrate. De nombreux sculpteurs s’aident d’un pantographe pour effectuer ce type d’opération, mais le sculpteur D. Pollès a choisi de créer lui-même un appareil lui permettant de reproduire à une échelle différente ses modèles pour effectuer ce type d’opération (voir Figure 1.16) [BLIN, 2003]. C’est ainsi que l’on peut percevoir tout l’intérêt que présente la solution consistant à effectuer une numérisation puis une réalisation par prototypage rapide : créer une ébauche ou une reproduction fidèle1 avec un rapport d’échelle quelconque. Cette solution est d’autant plus aisée lorsque le sculpteur recherche une ébauche : la numérisation et la réalisation peuvent ainsi être réalisées de façon grossière, elles respecteront toujours les proportions du modèle,

1 Dans les limites de la précision de la numérisation et du procédé, qui, généralement, s’avère insuffisante pour s’affranchir d’une finition.

Stratoconception

qui sont le principal soucis du sculpteur. La démarche d’un artiste reconnu présentée dans la Figure 1.16 dissipe les éventuels réticences à l’introduction de la technologie dans l’atelier d’un artiste.

Figure 1.17. Maquette de la Tour de la Liberté de Saint-Dié-des-Vosges [HUGUENIN, 1998] (virtuelle, à gauche ; pièces détachées réalisées par Stratoconception®, au centre ;

assemblage, à droite)

La réalisation de maquettes est une autre application des rapports d’échelle sur des modèles virtuels. Le procédé de Stratoconception® en a fait la démonstration avec des maquettes d’urbanisme (voir Figure 1.17 [HUGUENIN, 1998] et Figure 1.18 [POIRIER, 2000]).

Figure 1.18. Maquette de la cathédrale de Saint-Dié-des-Vosges [POIRIER, 2000]

(virtuelle, à gauche ; maquette réalisée par Stratoconception®, à droite)

1.4. La réalisation d’œuvres d'art par le procédé de Stratoconception®

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