1906b ; Guilcher, 1948 ; Cogné, 1974 ; Joly, 1994 ; Guillocheau et al., 2003 ; Ballèvre et al., 2013 ; Bessin,
2014). Il en résulte une grande variété lithologique, allant des grès quartzites très durs aux schistes tendres
en passant par des formations granitiques. Ces différentes formations affleurant sur le littoral, constituent
un facteur de la pluralité des côtes bretonnes.
A l’échelle globale, le Massif armoricain est constitué d’une double armature granito-gneissique. Elle
est composée, au Nord, d’un promontoire massif formé par la Côte d’Emeraude, le Trégorrois et le
Léon, et, au Sud, par l’anticlinal de Cornouaille, allant de Nantes jusqu’à la pointe du Raz, taillé dans des
micaschistes, des gneiss et des granites. En son centre s’étendent les bassins sédimentaires de Rennes (à
l’est) et de Châteaulin (à l’ouest), respectivement d’âge précambrien supérieur (Briovérien) et primaire.
Faiblement métamorphisé, le Massif armoricain est composé de roches très anciennes de gneiss, de
schistes, de micaschistes et de grès quartzite. Ces ensembles métamorphiques sont, en outre, traversés de
massifs granitiques, mis principalement en place durant l’orogénèse hercynienne.
Ces différentes formations rocheuses affleurent sur le littoral et en conditionnent l’évolution. Leurs
réactions face aux agents d’érosion, marins et continentaux, est variable selon leur composition
litho-logique, leur structure, et influent autant sur le tracé des côtes (présence de rentrants, de saillants ou
de façade longiforme) que sur les formes de leurs versants (versants à falaises ou continentaux). Les
micaschistes, gneiss, granite et grès quartzite constituent les principaux saillants du littoral, dont l’avancée
majeure de la côte septentrionale constituée par le massif du Trégor, ou les pointes du Grouin, du cap
Fréhel ou du Van. Tandis que les schistes et les micaschistes ourlent les baies, comme sur les faces est et
ouest la grande baie de Saint Brieuc ou dans la baie d’Audierne.
Les versants du littoral armoricain sont aussi conditionnés par leur variété lithologique. Les côtes
constituées de formations métamorphiques, de schistes et de micaschistes, présentent des profils de
ver-sant doux, avec de nombreuses fissures et anfractuosités favorables à l’implantation de la végétation. Les
côtes rocheuses de gneiss sont plus massives que ces dernières et constituent des versants escarpés au
profil convexe avec une rupture de pente le plus souvent apparaissant dans les 10 derniers mètres à leur
base. Les côtes de gneiss présentent des versants sensiblement proches des versants littoraux granitiques.
Si les granites ne sont pas majoritaires dans la structure du Massif armoricain, ils sont très présents sur
le littoral. Ils affleurent tout du long du littoral breton, du Mont Saint Michel au NE jusqu’à au SE, en
passant par le massif du Trégor, la côte du Nord Léon, Ouessant ou encore la pointe du Raz et « forment
l’ossature des littoraux, constituant des pointes, des caps ou des avancées » (Lageat, 2000). Les côtes granitiques « se
signalent par les multiples découpures du dessin du rivage tributaire du réseau de diaclases, la mise en valeur de gros bancs
d’exfoliation, des falaises à pente modérée et à recul lent, etc. » (Godard, 1977). De plus, « le lavage sélectif opéré par
la mer explique le fourmillement d’îles et d’îlots rocheux, comme sur les estrans du Trégor » (Lageat, 2000). Comme
dans les versants gneissiques, les falaises des côtes de granites ne présentent souvent qu’une part minime
de la totalité du versant, prolongeant des versants continentaux réglés et végétalisés. Vestiges de la
régu-larisation des versants durant les périodes froides, ces versants continentaux faiblement redressés à leur
base, témoignent de leur résistance à l’érosion mécanique de la mer et d’une grande stabilité. Toutefois, la
fracturation de la roche est responsable de la formation de grottes, de puits de déferlements (cap Sizun)
et de récifs (pointe Saint Mathieu) ainsi que du tracé de détail. Par ailleurs, leur profil sont souvent
irré-guliers dans le détail, résultant de l’exploitation des diaclases inhérentes aux granitoïdes et exploitées par
l’érosion. Elle donne des formes ruiniformes, constituées de blocs en place, observables aussi bien au
sommet des versants (tor de sommet), dans leur pente (tor de versant) qu’à leur base et dans les estrans
(tor d’estran). Les versants de gneiss et de granite sont de plus très souvent coiffés d’un sol d’une
épais-seur de quelques mètres, constitué de fragments de socle. Ils correspondent à des coulées de solifluxion
formant parfois de petites falaises meubles au niveau de la rupture de pente entre le versant continental
et le versant marin.
Plus localement se trouvent des littoraux métamorphiques de grès durs quartzites (grès quartzites
et quartzites). Ils constituent les versants les plus massifs et les plus résistants, comme au cap Fréhel,
extrême avancée septentrionale de la baie de Saint-Brieuc, ou sur la presqu’île de Crozon, étroite
avan-cée centrale du trident de la Bretagne occidentale. Leur présence est originale sur le littoral breton et est
propice à la formation de grandes falaises. Ces versants durs présentent généralement les profils les plus
verticaux / subverticaux, comme au cap Fréhel ou sur les pointes de la presqu’île de Crozon (Chèvre,
Dinan, Pen-Hir). Ils sont, au même titre que les côtes granito-gneissiques, prolongés d’îles et de récifs
(les Tas de Pois de Pen-Hir ou l’Amas du cap de la pointe du Jas à Fréhel) et sont percées de grottes et
d’arches (Château de Dinan, réseau de grottes traversantes de la pointe du Jas). Toutefois, leur diaclasage
vertical est aussi propice à la formation de pinacle, caractéristique des grès durs comme au cap Fréhel. Ces
versants très résistants ont de plus été dégagés des formations superficielles et ne comportent que peu de
coulées de solifluxion. Le ravinement y est de plus quasiment inexistant en raison de la faible épaisseur du
sol, de l’inefficacité du ruissellement et de l’infiltration de l’eau dans le réseau de diaclase. Ce sont donc
des littoraux résistants et stables, conservant la marque d’anciennes époques interglaciaires (corniches,
falaises héritées).
Malgré leurs différences lithologiques, les côtes rocheuses armoricaines ont en commun une grande
résistance. Elles sont aujourd’hui plutôt stables, au regard du passé, et soumises à une évolution
relative-1.2.3. Situation géo-climatique du Massif armoricain
Le Massif armoricain affleure à l’extrême ouest de la France et constitue un saillant occidental du
continent européen. Dans cette configuration, il forme aujourd’hui une péninsule très exposée aux vents
et courants des influences marines.
Toutefois, le trait de côte actuel n’a pas toujours été le même. Il a été soumis aux alternances des
cli-mats, influant sur le niveau marin. Ce dernier détermine l’érosion, continentale et marine, influant sur
les reliefs, littoraux en particulier. La variation du niveau marin est responsable des formes particulières
des côtes armoricaines, formées de versants continentaux réglés (fausses falaises) et de versants marins à
falaises plus ou moins abruptes.
Depuis la dernière transgression Flandrienne, la mer est remontée progressivement jusqu’au niveau
0 actuel. Elle s’y est stabilisée, malgré de modestes fluctuations de deux à trois mètres, et de cinq à six
mètres (Bessin, 2014). Bien que ces fluctuations du niveau marin aient laissé des traces dans le paysage
littoral (hauts niveaux, platier hérité ou plage perchée comme à Quiberon ou sur la côte nord d’Erquy), les
littoraux du trait de côte actuels ont été repris par l’érosion marine à la suite de la dernière transgression.
Au préalable, les versants du trait de côte actuel ont été régularisés pendant des siècles où la mer était à
une centaine de kilomètres en retrait, dirigés par l’érosion continentale. Désormais, le processus de sape
de la mer, tend à leur redressement par le bas, engendrant de nombreux versants composites,
caractéris-tiques des littoraux armoricains.
Actuellement, le Massif armoricain se constitue d’une avancée terrestre de moyenne altitude et d’un
précontinent armoricain se prolongeant en mer (Joly, 1994, Bessin, 2014). Une partie du plateau
conti-nental armoricain est ennoyé, suite à la transgression flandrienne, constituant une vaste surface
d’aplanis-sement tout autour du littoral actuel. Cette surface, constituée de l’aplanisd’aplanis-sement de la Manche au nord et
de la Marge Sud-Armoricain au SO, s’étend sur des dizaines de kilomètres, entourant le massif terrestre
actuel de fonds marins de modeste profondeur (inférieur à 200 m, fig. 2.3). Ces fonds marins
continen-taux sont les plus riches en faune marine fournissant ainsi un réservoir d’alimentation pour les oiseaux
pélagiques. La situation géomorphologique des fonds marins confèrent aux eaux bretonnes une richesse
marine importante.
En outre, la situation péninsulaire du Massif armoricain lui confère toutefois un climat hyperocéanique.
Il est caractérisé par des précipitations moyennes (environ 1 000 mm/an, de 600 mm/an dans le bassin
de Rennes à 1 600 mm/an dans les Monts d’Arrée) et réparties tout au long de l’année (une centaine de
jours de pluie par an dans le bassin de Rennes à 170 dans le centre Finistère). Les températures
présen-tent en outre de faible amplitude thermique, avec des étés, des printemps et des hivers doux (température
moyenne annuelle de 11 à 13°C, avec des amplitudes allant en moyenne de 20 à 25°C en été à 4 à 10°C
en hiver). Ce climat hyperocéanique est inégalement réparti sur l’ensemble de la péninsule armoricaine. Il
présente un taux d’ensoleillement et des températures moindres, ainsi que des précipitations plus intenses
dans le centre Finistère, réparties entre les Mont d’Arrée et les Montagnes noires. A l’inverse, les littoraux
sont soumis à des précipitations moins importantes, en particulier le long des côtes du Morbihan et de la
baie de Saint-Brieuc à la pointe du Grouin. Les températures y sont également plus douces, en particulier
sur toute la côte méridionale, où les maximums estivaux sont les plus élevés. La neige et le gel sont donc
peu présents sur les côtes bretonnes (quelques jours dans l’année) et ne constituent pas un agent érosif
actif. A l’inverse, les précipitations régulières induisent un ruissellement continental réel, qui a, le plus
souvent, un rôle érosif plus important que l’action mécanique de la mer sur les versants côtiers.
Ces côtes au climat doux et peu humide subissent les influences marines de l’océan mais y sont
inégale-ment exposées. La pointe Finistère est la plus exposée aux courants marins et atmosphériques venant du
large, en particulier sur les pointes Saint-Mathieu, de Crozon et du cap Sizun, ainsi qu’en premier plan, les
îles Ouessant, Molène et Sein. A l’inverse, les grands rentrants de la péninsule sont plus abrités. La baie
de Saint-Brieuc, protégés par l’avancée du massif du Trégor, constitue un espace plus protégé sauf à son
extrémité Est, aux caps d’Erquy et de Fréhel. De même, le SE de la Bretagne, protégé par les avancées
que forment la presqu’île de Quiberon et Belle-Île, offrent des côtes plus abritées des influences marines.
Localement, les côtes ouest sont généralement plus exposées que les côtes est, tournées vers le continent.
Les côtes rocheuses de la Bretagne, issues de la longue histoire du Massif armoricain, constituent des
littoraux exposés aux influences marines, baignés par un climat hyperocéanique doux. Elles se distinguent
toutefois par leur composition lithologique et structurale d’ensemble. Localement, ces critères influent
sur la distinction des côtes, aussi bien sur leur tracé que sur leur profil. Il convient alors de les
caracté-riser plus précisément à travers une typologie, clé de l’identification des sites de nidification des oiseaux
pélagiques.
1.3. Un relief varié : typologie des côtes rocheuses
Le Massif armoricain est constitué de côtes bretonnes variées, formant une péninsule avancée vers
l’océan dirigée par les deux grandes zones de cisaillement Nord et Sud armoricain. Elle a façonné des
côtes rocheuses, formées dans des roches dures intrusives, métamorphisées ou anciennes, cisaillées par
des baies et des rias dans lesquelles se sont accumulés les sédiments issus de l’érosion du massif. Elle
conditionne également l’altitude des côtes, relatives à l’élévation du relief continental, responsable de la
distinction entre un littoral méridional bas et un littoral septentrional et occidental élevé. Le profil des
versants littoraux découlent par ailleurs de l’alternance du niveau marin et de l’alternance de séquences
littoraux et de séquences continentales, influant en partie sur leur érosion.
Ces différents paramètres expliquent la présence aujourd’hui de différents types de côtes, et
notam-ment de côtes rocheuses. L’objectif de ce chapitre étant de caractériser ces côtes rocheuses, afin de
déter-miner sur lesquelles nichent précisément les oiseaux pélagiques. Aussi, grâce aux paramètres présentés
précédemment, est établie une typologie de ces littoraux. Toutefois, il faut en premier lieu préciser le
vocabulaire caractérisant les littoraux.
1.3.1. De la côte au versant, précision de vocabulaire
Le littoral est la ligne de démarcation entre la mer et la terre. Toutefois, ses limites sont floues, selon les
auteurs mais surtout selon les usages. Dans le cadre de ce travail portant sur l’avifaune pélagique nicheuse,
la partie terrestre du littoral se limite à l’espace utilisé par l’oiseau, généralement restreint à la pente du
ver-sant côtier, voire à son sommet. A l’inverse, cette limite s’étale plus loin en mer, jusqu’à faire la transition
avec le domaine marin que l’oiseau exploite pour sa recherche de nourriture.
Le littoral est aussi appelé « côte ». Ce terme est ici utilisé pour déterminer le tracé de la côte. C’est
une caractéristique qui s’observe en plan et, dans une dimension moindre, également sur le terrain (fig.
2.4A). La caractérisation du tracé de la côte se fait à différentes échelles, du global (ensemble de la
Bre-tagne / sous-ensemble) au local (d’un secteur en particulier : archipel des Sept-Îles, cap Fréhel, etc.). Le
terme « côte » sert également à donner des spécificités générales au littoral : une côte rocheuse ou
d’accu-mulation, élevée ou basse, escarpée ou étendue, etc. Ces derniers éléments de détermination des côtes
amènent ensuite à une seconde dimension qui est celle du profil de la côte (fig. 2.4B). Il faut alors parler
de versant. Un versant relie un point haut ou une ligne de point haut (interfluve) à une ligne de points bas
(talweg) (Joly, 1997). Sur le littoral, le versant côtier constitue le pan incliné reliant la terre à la mer. Il joint
donc le sommet du plateau continental au niveau 0 de la mer.
Le terme de côte nécessite d’être observée via deux dimensions. En plan, il désigne une ligne dont le
tracé varie, et le terme de versant, une pente, dont le profil varie (fig. 2.4). Chacune de ces deux
dimen-sions, tracé de la côte et profil du versant, comprend des niveaux internes à leur dessin général,
nécessi-tant des changements d’échelles. Afin de caractériser les types de côte du Massif armoricain, ces niveaux
d’échelle sont analysés puisqu’ils caractérisent tous d’une manière différente, mais complémentaire, les
sites de nidification des oiseaux pélagiques.
1.3.2. Typologie des côtes rocheuses bretonnes
1.3.2.1. Les formes du tracé de la côte
Le tracé de la côte bretonne est particulièrement découpé. Il est alors caractérisé par une succession
de saillants et de rentrants, et ce, à toutes les échelles d’analyses (fig. 2.5). A une échelle globale
(pluri-kilométrique), sont distinguées les baies des caps, pouvant être prolongés par une île ou des ensembles
d’îles (archipel). A échelle plus fine (décamétrique), les rentrants sont communément nommés « anse » ou
« crique ». Des criques particulièrement étroites peuvent être la résultante de puit de déferlement effondré
(très présent sur le littoral septentrional du cap Sizun, 29) ou de couloir de faille évidé (cap Fréhel, 22).
Les saillants de la côte sont marqués par des pointes, précédées d’îles, d’îlots et de récifs. La distinction
retenue ici entre île et îlot est de l’ordre de leur superficie et se classe en quatre groupes : les îlots (moins
d’un hectare), les petites îles (d’un hectare à 1 km²), les îles moyennes (1 à 10 km²) et les grandes îles
(d’une superficie supérieure à 10 km²). Indépendamment de cette distinction de taille, les îles d’estrans
(pouvant être petites ou constituées des îlots) sont également nombreuses en Bretagne. Elles sont reliées
à la côte (continentale ou île principale) à marée basse et peuvent être atteintes à pied, comme les îlots du
Verdelet ou Saint-Michel sur la côte est de la baie de Saint-Brieuc (Côtes d’Armor).
En outre, en certains secteurs, le tracé de la côte peut toutefois être plus rectiligne, présentant des
tronçons de côte longiforme. Sur les côtes bretonnes, ils sont présents aussi bien à l’échelle
plurikilomé-trique (façade Est de la baie de Saint-Brieuc (22), façade septentrionale du cap Sizun (29)) qu’à l’échelle
décamétrique (côté Est de la pointe du cap Fréhel (22)).
1. cap
2. baie
1. reste de
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Côtes rocheuses de Bretagne et oiseaux pélagiques : vers une valorisation intégrée du patrimoine naturel
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